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14/11/2002 | SUISSE | N°5P.345/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 novembre 2002, 5P.345/2002


{T 0/2}
5P.345/2002 /frs

Arrêt du 14 novembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Hohl,
greffière Mairot.

W. ________,
recourant, représenté par Me Jean-Marie Favre, avocat,
boulevard de Pérolles 10, case postale 295, 1701 Fribourg,

contre

Tribunal civil de la Glâne, rue des Moines 58, 1680 Romont FR,

procédure de divorce, récusation; art. 30 al. 1 Cst., 6 § 1 CEDH,

recours de droit public contre l'ordonnance du Tribunal civil
de la Glân

e du 20 août 2002.

Faits:

A.
Dans la procédure matrimoniale qui le divise d'avec son épouse, dame
W.________,...

{T 0/2}
5P.345/2002 /frs

Arrêt du 14 novembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Nordmann, Hohl,
greffière Mairot.

W. ________,
recourant, représenté par Me Jean-Marie Favre, avocat,
boulevard de Pérolles 10, case postale 295, 1701 Fribourg,

contre

Tribunal civil de la Glâne, rue des Moines 58, 1680 Romont FR,

procédure de divorce, récusation; art. 30 al. 1 Cst., 6 § 1 CEDH,

recours de droit public contre l'ordonnance du Tribunal civil
de la Glâne du 20 août 2002.

Faits:

A.
Dans la procédure matrimoniale qui le divise d'avec son épouse, dame
W.________, W.________ a, par requête du 18 juillet 2002, demandé la
récusation de Michel Morel, président du Tribunal civil de la Glâne.

B.
Par ordonnance du 20 août 2002, le Tribunal civil de la Glâne a, après
remplacement du magistrat visé par son suppléant, rejeté la requête.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral,
le
requérant conclut à l'annulation de cette ordonnance et, s'il en est
besoin,
au renvoi de la cause à l'autorité cantonale dans le sens des
considérants.

Des observations n'ont pas été requises.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Formé en temps utile contre une décision relative à une demande
de
récusation, prise séparément et en dernière instance cantonale (art.
43 al.
2, 366 al. 1 CPC/FR; cf. Deschenaux/Castella, La nouvelle procédure
civile
fribour-geoise, p. 21), le présent recours est recevable au regard
des art.
86 al. 1, 87 al. 1 et 89 al. 1 OJ.

1.2 Dans un recours de droit public soumis à l'exigence de
l'épuisement
préalable des instances cantonales, les allégations, preuves ou faits
qui
n'ont pas été présentés à l'autorité cantonale sont irrecevables (ATF
108 II
69 consid. 1 p. 71; cf. Walter Kälin, Das Verfahren der
staatsrechtlichen
Beschwerde, 1994, p. 369 s.). Le Tribunal fédéral s'en tient donc en
principe
aux faits constatés dans la décision attaquée, à moins que le
recourant ne
démontre que ces constatations sont arbitrairement fausses ou
incomplètes
(ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26 et les arrêts cités). Les compléments,
modifications ou précisions que le recourant entend apporter au
déroulement
des faits sont par conséquent irrecevables, sous réserve des moyens
motivés
conformément à l'art. 90 al. 1 let. b OJ (cf. ATF 125 I 492 consid.
1b p.
495). Quant à l'avis paru dans la Feuille officielle du 20 septembre
2002
concernant la vente aux enchères, fixée au 11 décembre suivant, de
l'immeuble
propriété des époux, il s'agit d'un fait postérieur à l'ordonnance
attaquée,
donc nouveau, qui n'a dès lors pas à être pris en considération par le
Tribunal fédéral. La pièce produite doit ainsi être retranchée du
dossier.

2.
Invoquant les art. 29 et 30 Cst., ainsi que l'art. 6 § 1 CEDH, le
recourant
se plaint d'une violation de son droit à un juge impartial.
L'incident qui a
surgi lors de l'audience du 2 juillet 2002, certains propos tenus par
le
magistrat concerné le 18 avril 2002, et le fait que celui-ci ait
donné suite
à la requête urgente formée par l'intimée le 11 juillet 2002, mais
pas à sa
propre requête urgente de modification des mesures provisionnelles du
3 juin
2002, démontreraient une apparence de prévention.

2.1 La garantie d'un tribunal indépendant et impartial instituée par
les art.
30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH permet d'exiger la récusation d'un juge
dont la
situation ou le comportement est de nature à faire naître un doute
sur son
objectivité (ATF 126 I 68 consid. 3a p. 73 et les arrêts cités). Elle
tend
notamment à éviter que des circonstances extérieures à la cause ne
puissent
influencer le jugement en faveur ou au détriment d'une partie (ATF
125 I 209
consid. 8a p. 217; 119 Ia 81 consid. 3 p. 84 et les références). Il
n'est pas
nécessaire qu'une prévention effective soit établie, car une
disposition
interne du juge ne peut guère être prouvée; il suffit que les
circonstances
donnent l'apparence de la prévention et fassent redouter une activité
partiale de celui-ci. Seules des circonstances constatées
objectivement
doivent être prises en considération; les impressions purement
individuelles
d'une partie au procès ne sont pas décisives (ATF 127 I 196 consid.
2b p. 198
et les citations). Le plaideur est fondé à mettre en doute
l'impartialité
d'un juge lorsque celui-ci révèle, par des déclarations avant ou
pendant la
procédure, une opinion qu'il a déjà acquise sur l'issue à donner au
litige
(ATF 125 I 119 consid. 3a p. 122 et l'arrêt mentionné). En principe,
d'éventuelles erreurs de procédure ou d'appréciation commises par un
juge ne
suffisent pas à fonder objectivement un soupçon de prévention. Seules
des
erreurs particulièrement lourdes ou répétées, constituant des
violations
graves de ses devoirs, peuvent justifier le soupçon de parti pris
(ATF 125 I
119 consid. 3e p. 124; 116 Ia 135 consid. 3a p. 138).

Comme les art. 30 al. 1 Cst. et 6 § 1 CEDH ne s'appliquent qu'aux
autorités
qui exercent des fonctions de juge au sens étroit, l'art. 29 al. 1
Cst.
assure, en dehors du champ d'application de ces dispositions, une
garantie de
portée équivalente s'agissant des exigences d'impartialité et
d'indépendance,
à ceci près que l'art. 29 al. 1 Cst., à la différence des art. 30 al.
1 Cst.
et 6 § 1 CEDH, n'impose pas l'indépendance et l'impartialité comme
maxime
d'organisation des autorités auxquelles il s'applique (ATF 127 I 196
précité;
125 I 119 consid. 3f p. 124). En l'occurrence, le cas de récusation
soulevé
par le recourant doit être examiné - librement (ATF 126 I 68 consid.
3b p.
73) - sous l'angle de l'art. 30 al. 1 Cst., à l'égard duquel l'art. 6
§ 1
CEDH n'a pas de portée propre (ATF 127 I 196 précité).

2.2
2.2.1Le recourant fait d'abord grief à l'autorité cantonale d'avoir
écarté le
reproche adressé au Président du Tribunal civil de la Glâne, selon
lequel
celui-ci aurait refusé de poser deux questions à l'intimée lors de
l'audience
du 2 juillet 2002, et aurait déclaré à cette occasion qu'il se
demandait
"s'il était possible de mener convenablement une audience avec lui",
respectivement avec son mandataire. Ces propos ne résultent toutefois
pas de
l'ordonnance attaquée. Comme le recourant ne se plaint pas
d'arbitraire à ce
sujet (cf. ATF 118 Ia 20 consid. 5a p. 26), sa critique, à cet égard
fondée
sur des faits nouveaux, ne peut qu'être écartée. L'autorité cantonale
s'est
du reste estimée convaincue par les déterminations du magistrat visé
concernant ce motif de récusation: le procès-verbal de l'audience du 2
juillet 2002 démontrait effectivement qu'il s'agissait d'une demande
superfétatoire, et "l'explication du Président ne constituait en rien
une
interprétation prématurée des propos de l'intimée, mais rappelait que
ceux-ci, au besoin complétés par les écritures, répondaient à la
question que
pouvait encore se poser la partie adverse". Le recourant affirme que
ses
questions étaient au contraire pertinentes et qu'en refusant de les
poser, le
président du tribunal a manifesté d'une manière directe son animosité
à son
mandataire, l'atteignant ainsi directement. Ce faisant, il se contente
d'opposer son opinion à celle de l'autorité cantonale, en se fondant
essentiellement sur des faits qui n'ont pas été constatés dans
l'ordonnance
attaquée: une telle argumentation n'est pas suffisante au regard des
exigences de motivation déduites de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF
127 I 38
consid. 3c p. 43 et les arrêts cités).

2.2.2 Sont également irrecevables les critiques du recourant
concernant les
propos qu'aurait tenus le président du tribunal lors de l'audience du
18
avril 2002. L'ordonnance attaquée retient en effet que l'intéressé
les a
contestés. Le recourant prétend certes qu'il s'agit pourtant de la
vérité,
autrement dit que le président ment - il menace d'ailleurs de requérir
l'ouverture d'une enquête administrative à son encontre -, mais ni
cette
affirmation, ni l'absence de prise de position de la partie adverse ne
suffisent à démontrer que ces propos seraient établis (art. 90 al. 1
let. b
OJ). Le Tribunal civil a de plus estimé que, même si ledit président
s'était
réellement exprimé de la manière qui lui était reprochée par le
recourant,
celui-ci n'aurait pas manqué, s'il y avait attaché l'importance qu'il
prétendait y accorder désormais, de faire protocoler ses dires et de
déposer,
à ce moment-là déjà, une requête de récusation. Selon l'autorité
cantonale,
puisqu'il ne l'avait invoqué que le 18 juillet 2002, ce grief était
par
conséquent tardif; en outre, ces prétendus propos pouvaient
d'ailleurs être
compris comme une tentative d'amener les parties à se concilier. Dès
lors que
le recourant ne critique pas ces motifs, son moyen est irrecevable.

2.2.3 Le recourant soutient encore que le président du tribunal a
manifestement agi de façon partiale en n'examinant pas sa requête
urgente en
modification des mesures provisionnelles du 3 juin 2002, alors qu'il
s'est
empressé de statuer sur celle de l'intimée, déposée le 11 juillet
2002, sans
d'ailleurs prévoir d'audience contradictoire pour en traiter. Comme
il a été
rappelé ci-dessus (cf. consid. 2.1), d'éventuelles erreurs de
procédure ou
d'appréciation commises par un juge ne suffisent pas à fonder
objectivement
un soupçon de prévention, ce que le recourant semble du reste
reconnaître.
Même si elles paraissent contestables, des mesures inhérentes à
l'exercice
normal de sa charge ne permettent pas d'exiger la récusation du juge.
Dans le
cas particulier, l'hypothèse d'erreurs lourdes et répétées,
constituant des
violations graves des devoirs du juge et dénotant de sa part une
intention de
nuire au recourant n'est à l'évidence pas réalisée. Au demeurant,
l'autorité
cantonale a considéré en substance qu'il était justifié de statuer
rapidement
et en premier lieu sur la requête de l'épouse, qui concernait un avis
au
débiteur, soit, en quelque sorte, l'exécution d'une décision
précédemment
rendue. Le recourant, qui se limite sur ce point à de simples
affirmations,
ne critique pas valablement cette motivation; le seul fait que, comme
il le
prétend, sa propre requête n'ait pas encore été tranchée, pourrait,
le cas
échéant, constituer un déni de justice formel, mais ne saurait
justifier une
demande de récusation.

3.
En conclusion, le recours apparaît mal fondé, dans la faible mesure
de sa
recevabilité. Le recourant, qui succombe, supportera les frais
judiciaires
(art. 156 al. 1 OJ). Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer des
dépens, des
observations n'ayant pas été requises.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 1'500 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant
et au
Tribunal civil de la Glâne.

Lausanne, le 14 novembre 2002

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.345/2002
Date de la décision : 14/11/2002
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-11-14;5p.345.2002 ?
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