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11/11/2002 | SUISSE | N°I.605/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 11 novembre 2002, I.605/02


{T 7}
I 605/02

Arrêt du 11 novembre 2002
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M. Métral

N.________, recourante, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat,
FSIH,
place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 24 mai 2002)

Faits :

A.
A.a

Souffrant de douleurs à l'épaule gauche depuis le mois d'octobre
1992,
N.________ a cessé d'exercer son activité professionnelle...

{T 7}
I 605/02

Arrêt du 11 novembre 2002
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M. Métral

N.________, recourante, représentée par Me Jean-Marie Agier, avocat,
FSIH,
place du Grand-Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 24 mai 2002)

Faits :

A.
A.a Souffrant de douleurs à l'épaule gauche depuis le mois d'octobre
1992,
N.________ a cessé d'exercer son activité professionnelle
d'aide-infirmière
le 22 mai 1995. Le 21 mars 1996, elle a présenté une demande de
prestations à
l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après :
l'office AI). D'après les renseignements donnés par les médecins de
l'Hôpital
X.________, l'assurée présentait une tendinopathie de la coiffe des
rotateurs
de l'épaule gauche et ne pouvait plus exercer son métier depuis le 22
mai
1995 (rapport du 28 avril 1997 du docteur A.________ et rapport du 23
juin
1998 de la doctoresse B.________).

N. ________ fut placée en stage au Centre d'observation
professionnelle de
l'assurance-invalidité de Z.________ (ci-après : le COPAI), où elle
fit part
de douleurs s'étendant de manière diffuse de l'épaule à la main
gauche,
touchant également la nuque et une partie du tronc à gauche; elle
présenta
par ailleurs un rendement extrêmement faible, y compris dans les
activités
les mieux adaptées à son état de santé (travaux ne nécessitant pas le
port de
charges lourdes ou le port répété de charges légères, permettant
d'éviter
tout mouvement répétitif de rotation et d'élévation du membre
supérieur
gauche). Le rapport du COPAI fit néanmoins état d'une capacité de
travail de
70 % eu égard aux constatations objectives réalisées pendant le
stage, ainsi
qu'au résultat des examens pratiqués par le médecin-conseil du
centre, la
doctoresse C.________ (rapport du 13 janvier 1999).

Par décision du 22 novembre 1999, l'office AI alloua à l'assurée une
rente
entière d'invalidité, pour la période du 1er mai 1996 au 31 janvier
1999,
puis une demi-rente d'invalidité, à partir du 1er février 1999,
assorties de
rentes pour enfants. Il considéra que l'assurée était en mesure de
réaliser,
dès cette dernière date, un salaire correspondant au 51,76 % de celui
qu'elle
aurait pu obtenir sans atteinte à la santé. L'assurée déféra cette
décision
au Tribunal des assurances du canton de Vaud, mais retira finalement
son
recours, de sorte que la cause fut radiée du rôle le 14 juillet 2000,
sans
jugement sur le fond.

A.b Le 17 août 2000, reprenant l'examen du cas, l'office AI confia à
la
doctoresse D.________, chirurgien orthopédiste à l'Hôpital
Y.________, le
soin de réaliser une expertise. Celle-ci posa le diagnostic de
polyinsertionite du membre supérieur gauche et de début de
polyinsertionite
du membre inférieur gauche. Elle attesta d'une capacité de travail de
50 % au
moins dans la profession d'aide-infirmière, et de 100 % dans une
activité de
femme de ménage ou de petite manutention, pouvant être effectuée
essentiellement avec le bras droit (rapport du 5 février 2001).

Se fondant pour l'essentiel sur cette expertise, l'office AI
considéra que
l'état de santé de l'assurée s'était amélioré et mit fin, avec effet
au 1er
juillet 2001, à la demi-rente allouée jusqu'alors à l'assurée
(décision du 8
mai 2001).

B.
Par jugement du 24 mai 2002, le Tribunal des assurances du canton de
Vaud
rejeta le recours déposé par N.________ contre cette décision.
D'après le
tribunal, l'état de santé de l'assurée ne s'était pas modifié depuis
la
décision du 22 novembre 1999 de l'office AI, qui était toutefois
manifestement erronée et pouvait faire l'objet d'une reconsidération.

C.
La prénommée interjette un recours de droit administratif en
concluant à
l'annulation du jugement entrepris et de la décision du 8 mai 2001 de
l'office intimé, sous suite de dépens. A titre préalable, elle
demande que
l'effet suspensif soit octroyé au recours. L'intimé conclut au rejet
du
recours, alors que l'Office fédéral des assurances sociales ne s'est
pas
déterminé.

Considérant en droit :

1.
Selon un principe général du droit des assurances sociales,
l'administration
peut reconsidérer une décision formellement passée en force de chose
jugée et
sur laquelle une autorité judiciaire ne s'est pas prononcée quant au
fond, à
condition qu'elle soit sans nul doute erronée et que sa rectification
revête
une importance notable (ATF 127 V 469 consid. 2c et les arrêts cités).

En outre, par analogie avec la révision des décisions rendues par les
autorités judiciaires, l'administration est tenue de procéder à la
révision
d'une décision entrée en force formelle lorsque sont découverts des
faits
nouveaux ou de nouveaux moyens de preuve, susceptibles de conduire à
une
appréciation juridique différente (révision procédurale : ATF 127 V
469
consid. 2c et les références). La notion de faits ou moyens de preuve
nouveaux s'apprécie de la même manière en cas de révision d'une
décision
administrative, de révision d'un jugement cantonal dans le cadre de
l'art. 85
al. 2 let. h LAVS ou d'une révision fondée sur l'art. 137 let. b OJ
(à propos
de la révision procédurale de décisions administratives : ATF 108 V
168; à
propos de l'art. 137 let. b OJ : ATF 108 V 170 et 110 V 141 consid.
2; à
propos de l'art. 85 al. 2 let. h LAVS : ATF 111 V 53 consid. 4b).
Dans ces
trois cas, il ne suffit pas, pour justifier la révision d'une
décision ou
d'un jugement, qu'une nouvelle expertise donne une appréciation
différente de
faits déjà connus au moment de la procédure précédente (cf. ATF 127 V
358
consid. 5b, 110 V 141 consid. 2, 293 consid. 2a, 108 V 171 consid. 1).

Enfin, en vertu de l'art. 41 LAI, si l'invalidité d'un bénéficiaire
de rente
se modifie de manière à influencer le droit à la rente, celle-ci est,
pour
l'avenir, augmentée, réduite ou supprimée.

2.
La doctoresse D.________ n'a pas constaté de modification de l'état
de santé
de la recourante depuis la décision du 22 novembre 1999 de l'office
AI,
entrée en force ensuite du retrait de son recours par l'assurée. Elle
n'a pas
davantage mis en évidence un élément de fait existant au moment de
cette
décision, mais dont l'office AI n'aurait pas eu connaissance.
Celui-ci ne le
soutient du reste pas, et n'a pas davantage fait valoir cet argument
devant
la juridiction cantonale. Il n'y a donc motif ni à révision au sens
de l'art.
41 LAI, ni à révision procédurale de la décision par laquelle la
recourante a
été mise au bénéfice d'une demi-rente d'invalidité. Cela dit, il
reste à
déterminer si les conditions d'une reconsidération sont réunies,
comme l'ont
admis les premiers juges.

3.
3.1La juridiction cantonale a tenu la décision du 22 novembre 1999 de
l'office AI pour manifestement erronée, au motif que la doctoresse
D.________
attestait une pleine capacité de travail dans une activité adaptée,
que la
doctoresse C.________ faisait état, quant à elle, d'une capacité de
travail
de 70 % au minimum, et que selon le rapport du 28 avril 1997 du
docteur
A.________, l'assurée était en mesure d'exercer une activité plus
sédentaire,
sans port de charges, les bras en-dessous de l'horizontale. Ils ont
également
motivé leur jugement par le fait que la recourante aurait présenté,
selon son
ancien employeur, des difficultés d'adaptation à sa nouvelle fonction
et se
serait vue signifier son licenciement peu avant son incapacité de
travail.
Dans ces circonstances, il leur apparaissait pour le moins douteux
que cette
incapacité découle uniquement de motifs médicaux.

3.2 Le taux d'invalidité ayant fondé l'octroi d'une demi-rente à
l'assurée a
été fixé après comparaison des revenus et sur la base d'une capacité
de
travail de 70 % dans une activité adaptée et exigible. Celle-ci était
fondée
aussi bien sur les observations réalisées au COPAI, que sur les
conclusions
concordantes données par la doctoresse C.________ au terme de son
examen
médical.

Dans ces conditions, et même si l'on peut éprouver des doutes sur le
bien-fondé de la décision du 22 novembre 1999 de l'office AI, on ne
saurait
tenir pour manifestement erronée cette décision fondée sur des
renseignements
médicaux et professionnels, au motif que la doctoresse D.________ a
apprécié
différemment la capacité de travail, de surcroît dans une situation
où il lui
avait été extrêmement difficile de se prononcer en raison de
l'attitude de
l'assurée. A tout le moins, son opinion ne permet pas de tenir pour
infondées
les conclusions de la doctoresse C.________. Il n'en va pas
différemment du
rapport établi en 1997 par le docteur A.________, dès lors que ce
praticien
s'est borné à indiquer que l'assurée pouvait encore exercer une
activité dans
les conditions décrites, sans préciser, cependant, avec quel
rendement. C'est
dire que, contrairement à l'opinion des premiers juges, les
conditions d'une
reconsidération de la décision du 22 novembre 1999 de l'office AI ne
sont pas
réunies.

4.
Vu ce qui précède, il convient d'admettre le recours, ce qui entraîne
l'annulation du jugement cantonal et de la décision du 8 mai 2001 de
l'office
AI, et rend sans objet la conclusion relative à l'effet suspensif du
recours.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis et le jugement du 24 mai 2002 du Tribunal des
assurances
du canton de Vaud ainsi que la décision du 8 mai 2001 de l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud sont annulés.

2.
L'intimé versera à la recourante la somme de 2000 fr. (y compris la
taxe à la
valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance fédérale.

3.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera à nouveau sur
les
dépens de l'instance cantonale, au regard de l'issue du procès.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 11 novembre 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.605/02
Date de la décision : 11/11/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-11-11;i.605.02 ?
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