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22/10/2002 | SUISSE | N°4P.71/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 octobre 2002, 4P.71/2002


{T 0/2}
4P.71/2002 /ech

Arrêt du 22 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et Favre,
greffière de Montmollin.

X. ________ Inc.,
recourante, représentée par Me Hrant Hovagemyan, avocat, place du
Bourg-de-Four 25, 1204 Genève,

contre

Y.________ Ltd,
intimée, représentée par Me Eugène Ibig, avocat, Grand-Rue 25, 1200
Genève
11,
Tribunal arbitral ad hoc siégeant à Genève, p.a. Monsieur le Prof.
Bernard
Hanotiau, arbitre unique,

avenue Louise 480 B.9 Louizalaan, 1050
Bruxelles
(Belgique).

arbitrage international; droit d'être entendu; ordre pub...

{T 0/2}
4P.71/2002 /ech

Arrêt du 22 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et Favre,
greffière de Montmollin.

X. ________ Inc.,
recourante, représentée par Me Hrant Hovagemyan, avocat, place du
Bourg-de-Four 25, 1204 Genève,

contre

Y.________ Ltd,
intimée, représentée par Me Eugène Ibig, avocat, Grand-Rue 25, 1200
Genève
11,
Tribunal arbitral ad hoc siégeant à Genève, p.a. Monsieur le Prof.
Bernard
Hanotiau, arbitre unique, avenue Louise 480 B.9 Louizalaan, 1050
Bruxelles
(Belgique).

arbitrage international; droit d'être entendu; ordre public

(recours de droit public contre la sentence du Tribunal arbitral du 5
février
2002)

Faits:

A.
La société irlandaise Y.________ Ltd (ci-après: Y.________) fabrique
et vend
des grues à pont roulant ainsi que des équipements accessoires pour le
déplacement des containers.
La société panaméenne X.________ Inc. Europe (ci-après: X.________)
fournit
des services de consultant ainsi que des services financiers pour les
entreprises qui mènent ou souhaitent mener des affaires dans les pays
du
Moyen-Orient.

Y. ________et X.________ ont conclu un contrat de coopération daté du
1er
juillet 1997, par lequel X.________ devenait le consultant exclusif de
Y.________en vue de l'obtention de commandes dans le contexte de
l'extension
et de la réhabilitation du port de Beyrouth. Ce contrat, conclu pour
la durée
d'une année, prévoit que X.________ aura droit, pour ses services, à
une
commission de 4% à condition que l'offre de Y.________soit acceptée
par le
port de Beyrouth et que le contrat de vente soit signé et exécuté. Les
parties sont convenues de soumettre leur convention au droit
irlandais et ont
précisé que tout litige éventuel relèverait de la compétence d'un
arbitre
unique siégeant à Genève.

Aucun contrat n'a été passé avec Y.________pendant le délai d'une
année.

Par une lettre du 9 juin 1998 adressée à X.________, Y.________a
exprimé la
volonté de ne pas prolonger le contrat de coopération après son
échéance.

X. ________ a protesté et continué de fournir des renseignements à
Y.________
Ltd, sans qu'il soit établi que ceux-ci aient été demandés ou
acceptés. Dans
une note du 17 décembre 1998, la société irlandaise a même précisé à
X.________ que son aide n'était pas requise.

Le 4 mars 1999, la société à laquelle le port de Beyrouth avait
confié la
réalisation de son projet a conclu avec Y.________deux contrats
portant sur
la fourniture de biens d'équipement; ces contrats ont été ensuite
transférés
à l'autorité portuaire de Dubai. Il doit être observé qu'ils ont été
conclus
plus de huit mois après la fin de l'accord de coopération et que
Y.________était assistée, durant les pourparlers, par son agent, la
société
libanaise Z.________.

Le 28 avril 1999, X.________ a envoyé à Y.________une facture,
réclamant à
cette dernière une commission sur ces deux contrats. Y.________a
refusé de
payer.

B.
Pour trancher le différend, les parties ont mis en oeuvre l'arbitrage
prévu
par leur convention et ont désigné, en qualité d'arbitre unique, le
professeur Bernard Hanotiau à Bruxelles.

X. ________ a conclu à ce que Y.________soit condamnée à lui verser
la somme
de 1 600 000 US$ avec différents accessoires. Y.________a conclu au
déboutement.

Par sentence du 5 février 2002, l'arbitre a rejeté la demande avec
suite de
frais et dépens. Procédant à une interprétation du contrat, l'arbitre
a
estimé que X.________ avait droit à la commission si l'offre de
Y.________était acceptée et si le contrat était signé et exécuté
pendant la
durée de la convention de coopération; dans l'hypothèse où ces faits
ne se
produisaient qu'après l'échéance, X.________ n'avait droit à sa
commission
qu'en prouvant que son activité durant la convention était la cause
effective
de la conclusion. L'arbitre a constaté qu'aucun contrat de vente
n'avait été
conclu avec Y.________pendant la durée de la convention de
coopération. Il a
estimé que X.________ n'était pas parvenue à prouver que les contrats
conclus
après l'échéance avaient pour cause effective son activité (même
postérieure
à la date d'échéance); il a considéré en particulier que la
préqualification
obtenue par X.________ ne présentait pas de difficultés pour
Y.________et ne
pouvait être considérée comme le pas décisif entraînant la conclusion
des
contrats.

C.
X.________ interjette un recours de droit public au Tribunal fédéral.
Invoquant une violation du droit d'être entendu et de l'ordre public,
elle
conclut à l'annulation de la sentence attaquée. L'effet suspensif lui
a été
refusé par ordonnance du 13 mars 2002.

Y. ________propose le rejet du recours dans la mesure où il est
recevable.
Elle a sollicité des sûretés, qui lui ont été accordées, à
concurrence de 25
000 fr., par ordonnance du 11 juin 2002. La requête tendant à un
second
échange d'écritures a été écartée par cette même ordonnance.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Selon l'art. 85 let. c OJ, le recours de droit public au Tribunal
fédéral
est ouvert contre une sentence arbitrale aux conditions des art. 190
ss LDIP.

Comme le siège du Tribunal arbitral a été fixé en Suisse (à Genève)
et que
l'une des parties au moins (en l'occurrence les deux) n'avait, au
moment de
la conclusion de la convention d'arbitrage, ni son domicile, ni sa
résidence
habituelle en Suisse, les art. 190 ss LDIP sont applicables (art. 176
al. 1
LDIP), étant observé que les parties n'en ont pas exclu l'application
par
écrit en choisissant d'appliquer exclusivement les règles de la
procédure
cantonale en matière d'arbitrage (art. 176 al. 2 LDIP). Le recours au
Tribunal fédéral prévu par l'art. 191 al. 1 LDIP est ici ouvert,
puisque les
parties n'ont pas choisi, en lieu et place, le recours à l'autorité
cantonale
(art. 191 al. 2 LDIP). En prévoyant que l'arbitre unique statuerait
définitivement, les parties n'ont pas déclaré, avec la précision
requise,
exclure conventionnellement le recours au Tribunal fédéral pour les
motifs
prévus par la loi (cf. art. 192 LDIP; ATF 116 II 639 consid. 2c).

Le recours ne peut être formé que pour l'un des motifs énumérés de
manière
exhaustive à l'art. 190 al. 2 LDIP (ATF 128 III 53 consid. 1a; 127
III 279
consid. 1a; 119 II 380 consid. 3c). Il doit respecter les règles de
procédure
de l'OJ, notamment en ce qui concerne la motivation qui doit répondre
aux
exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ (ATF 128 III 50 consid. 1c;
127 III
279 consid. 1c; 126 III 524 consid. 1c).

Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que
les
griefs admissibles qui ont été invoqués et suffisamment motivés dans
l'acte
de recours (ATF 128 III 50 consid. 1c; 127 III 279 consid. 1c; 126
III 524
consid. 1c). La partie recourante doit donc indiquer quelle hypothèse
de
l'art. 190 al. 2 LDIP est à ses yeux réalisée et, en partant de la
décision
attaquée, montrer de façon circonstanciée en quoi consisterait la
violation
du principe invoqué (ATF 128 III 50 consid. 1c; 127 III 279 consid.
1c); ce
n'est qu'à ces conditions qu'il est possible d'entrer en matière sur
ses
griefs.

2.
2.1La recourante soutient tout d'abord qu'elle serait victime d'un
déni de
justice formel.

Elle n'invoque cependant pas l'art. 190 al. 2 let. c LDIP, ce qui
exclut
d'emblée que la question soit examinée sous cet angle. Au demeurant,
comme
l'arbitre a rejeté entièrement la demande avec suite de frais et
dépens, on
ne voit pas comment on pourrait lui reprocher d'avoir omis de se
prononcer
sur l'une des conclusions valablement prises devant lui (cf. art. 190
al. 2
let. c LDIP; ATF 128 III 234 consid. 4a; 115 II 288 consid. 5;
Corboz, Le
recours au Tribunal fédéral en matière d'arbitrage international, SJ
2002 II
p. 20). En tout cas, un tel grief n'est pas formulé d'une manière
répondant
aux exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ.

2.2 Invoquant l'art. 190 al. 2 let. d LDIP, la recourante se plaint,
dans le
même contexte, d'une violation du droit d'être entendu.

Ce motif d'annulation a pour but d'assurer le respect de la règle de
procédure impérative contenue à l'art. 182 al. 3 LDIP (ATF 119 II 386
consid.
1b; 117 II 346 consid. 1a).

Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 182 al. 3
et 190
al. 2 let. d LDIP, n'a en principe pas un contenu différent de celui
consacré
en droit constitutionnel (ATF 127 III 576 consid. 2c; 119 II 386
consid. 1b;
117 II 346 consid. 1a).

La recourante reproche plus précisément à l'arbitre de ne pas avoir
satisfait
à son devoir d'examiner et de traiter les arguments juridiques
qu'elle a
soulevés et qu'elle considère comme pertinents.

Il est vrai que la jurisprudence a déduit du droit d'être entendu un
devoir
minimum pour l'autorité d'examiner et traiter les problèmes
pertinents (ATF
126 I 97 consid. 2b; 124 II 146 consid. 2a; 122 IV 8 consid. 2c). En
matière
d'arbitrage, la jurisprudence a admis une violation du droit d'être
entendu
si le contenu de la sentence équivaut à un déni de justice formel qui
vide de
sa substance le droit d'être entendu; cette hypothèse est réalisée
si, par
inadvertance ou malentendu, le Tribunal ne prend pas en compte des
allégués,
arguments, preuves et offres de preuves présentés par l'une des
parties et
importants pour la décision à rendre (ATF 127 III 576 consid. 2e; 121
III 331
consid. 3b); toute inadvertance manifeste ne constitue cependant pas
nécessairement une violation du droit d'être entendu (cf. ATF 127 III
576
consid. 2).

2.3 En l'espèce, la recourante reproche à l'arbitre de n'être pas
entré en
matière sur les moyens tirés de l'équité, de l'enrichissement
illégitime ou
du quantum meruit.

Il faut tout d'abord observer que l'arbitre n'a pas ignoré les
arguments
soulevés par la recourante, puisqu'il les a expressément cités sous
considérant 57 de la sentence attaquée.

L'arbitre a estimé que la demande devait être rejetée, même si cela
pouvait
apparaître comme dur à l'égard de la recourante, ce qui revient à
écarter
l'argument tiré de l'équité (sentence attaquée, considérant 82). Il a
d'autre
part écarté expressément le moyen tiré de l'enrichissement illégitime
ou du
quantum meruit au considérant 78 de la sentence attaquée. Il a donc
bien
statué sur les moyens invoqués par la recourante.

Sa motivation ressort clairement de la sentence. L'arbitre a constaté
que les
parties avaient fixé les conditions permettant l'octroi d'une
commission et
il en a déduit, a contrario, qu'elles avaient exclu la commission
lorsque,
comme il a constaté que tel était le cas en l'espèce, ces conditions
n'étaient pas remplies. Il a estimé que la recourante ne pouvait pas
obtenir
de rémunération sur une autre base juridique, parce que cela
reviendrait à
détourner l'accord des parties - contrairement au principe pacta sunt
servanda. L'arbitre a de la sorte écarté les moyens de la recourante
en
procédant à un raisonnement formulé de manière parfaitement
intelligible. Il
a ainsi satisfait à son devoir de traiter les questions soulevées.
Savoir
s'il a bien ou mal jugé est un problème indépendant du droit d'être
entendu.

Ce premier grief est donc infondé.

3.
3.1Se référant à l'art. 190 al. 2 let. e LDIP, la recourante soutient
que la
sentence attaquée est contraire à l'ordre public, évoquant à ce sujet
la
fidélité contractuelle (pacta sunt servanda), le principe de la bonne
foi et
l'interdiction de l'abus de droit.

3.2 De façon générale, la réserve de l'ordre public doit permettre de
ne pas
apporter de protection à des situations qui heurtent de manière
choquante les
principes les plus essentiels de l'ordre juridique, tel qu'il est
conçu en
Suisse (ATF 126 III 534 consid. 2c; 125 III 443 consid. 3d).

Pour qu'il y ait contrariété avec l'ordre public, il ne suffit pas
que les
preuves aient été mal appréciées (arrêt 4P.277/98 du 22 février 1999,
consid.
2b), qu'une constatation de fait soit manifestement fausse (ATF 121
III 331
consid. 3a; 117 II 604 consid. 3; 116 II 634 consid. 4), qu'une clause
contractuelle n'ait pas été correctement interprétée ou appliquée
(ATF 116 II
634 consid. 4b; arrêt reproduit in SJ 1991 p. 12 consid. 2b) ou
encore qu'une
règle de droit applicable ait été clairement violée (ATF 117 II 604
consid.
3; 116 II 634 consid. 4a; 115 II 102 consid. 3a); seule la violation
d'un
principe juridique fondamental peut entraîner l'annulation de la
décision
attaquée pour cause de violation de l'ordre public (arrêt 4P.143/01
du 19
septembre 2001, consid. 3a/aa).

On distingue l'ordre public matériel et l'ordre public procédural
(ATF 128
III 191 consid. 4a; 126 III 249 consid. 3a); compte tenu des
précisions
qu'elle apporte, la recourante se réfère manifestement à l'ordre
public
matériel.

Une sentence est contraire à l'ordre public matériel lorsqu'elle
viole des
principes juridiques fondamentaux de droit de fond au point de ne
plus être
conciliable avec l'ordre juridique et le système de valeurs
déterminants; au
nombre de ces principes figurent notamment la fidélité contractuelle,
le
respect des règles de la bonne foi, l'interdiction de l'abus de
droit, la
prohibition des mesures discriminatoires ou spoliatrices,
ainsi que la
protection des personnes civilement incapables (ATF 128 III 191
consid. 6b;
120 II 155 consid. 6a; 117 II 604 consid. 3).

Pour qu'il y ait violation du principe de la fidélité contractuelle,
il faut
que l'arbitre refuse d'appliquer une clause contractuelle tout en
admettant
qu'elle lie les parties ou, à l'inverse, leur impose le respect d'une
clause
dont il considère qu'elle ne les lie pas (arrêt 4P.143/01 du 19
septembre
2001, consid. 3a/bb; arrêt 4P.12/00 du 14 juin 2001, consid. 4b). Les
règles
de la bonne foi et l'interdiction de l'abus de droit doivent être
comprises à
la lumière de la jurisprudence rendue au sujet de l'art. 2 CC
(Corboz, op.
cit., p. 28).

3.3 En l'espèce, la recourante considère surtout comme choquant
qu'elle n'ait
pas droit à une rémunération alors qu'elle a fourni des services qui,
à ses
yeux, étaient utiles.

Cette opinion ne peut pas être suivie. Rien n'empêche, sous l'angle
de la
liberté contractuelle, de prévoir que la rémunération d'un
prestataire de
services ne sera due que si son activité produit un certain résultat
dans un
délai donné. La recourante devait aider l'intimée à obtenir des
commandes. La
convention de coopération s'apparente donc à un contrat de courtage ou
d'agence. Or, le droit interne suisse (inapplicable en l'espèce)
prévoit
lui-même, dans le cas du contrat de courtage, que le courtier n'a en
principe
droit à son salaire que si l'indication qu'il a donnée ou la
négociation
qu'il a conduite aboutit à la conclusion d'un contrat (art. 413 al. 1
CO). Il
a été jugé que la conclusion du contrat devait être le résultat de
l'activité
du courtier (ATF 76 II 378 consid. 2), en d'autres termes qu'il devait
exister un rapport de causalité entre l'activité du courtier et la
conclusion
de l'affaire (ATF 84 II 521 consid. 1). De la même manière, il faut en
principe, en cas de contrat d'agence, qu'il y ait un lien
psychologique entre
l'activité de l'agent et la conclusion du contrat (ATF 84 II 542
consid. 5).
Le courtier ne peut d'ailleurs pas invoquer l'activité qu'il a
déployée après
la fin du contrat, sauf si son aide lui a été demandée par le mandant
(ATF 97
II 355 consid. 4). Si le contrat est conclu après la fin du rapport de
courtage, le courtier n'a droit à sa provision que si la conclusion
est due à
son activité pendant le contrat (Tercier, Les contrats spéciaux, 2ème
éd., n°
4341). Le Tribunal fédéral a été saisi récemment d'une affaire qui
présente
une grande similitude avec le cas d'espèce; il s'agissait d'un
travailleur
payé à la commission; il a été jugé qu'il n'avait pas droit à
rémunération
pour son activité au début des négociations, dès lors que le contrat
avait
été conclu après la fin de son emploi et qu'il n'avait pas été
démontré que
sa participation eût été indispensable pour parvenir à la conclusion
du
contrat (ATF 128 III 174 consid. 2).

On ne voit pas ce qui interdisait aux parties d'adopter un tel
mécanisme dans
leurs relations contractuelles. On ne saurait dire que le résultat
auquel
l'arbitre est parvenu heurte de manière choquante un principe des plus
essentiels de l'ordre juridique, tel qu'il est conçu en Suisse,
puisque
l'application du droit interne suisse pourrait conduire à un résultat
semblable.

Savoir si l'arbitre a correctement interprété la clause contractuelle
fixant
les conditions d'une rémunération est une pure question
d'interprétation qui,
comme on l'a vu, ne peut pas être examinée dans un recours en matière
d'arbitrage international.

Savoir si, pour statuer sur la causalité, l'arbitre a bien compris
l'enchaînement des événements est une pure question d'appréciation des
preuves et d'établissement des faits, qui, on l'a également déjà
rappelé, ne
peut pas davantage faire l'objet d'un tel recours.

Savoir si l'arbitre a correctement déterminé la notion de causalité
applicable relève de l'interprétation de la clause contractuelle et,
subsidiairement, du droit irlandais (l'arbitre s'est référé au droit
irlandais). Une fois encore, ces questions ne peuvent pas être
examinées ici.
Dès lors que le mécanisme retenu et son application s'apparentent à
ce qui
existe aussi au droit interne suisse, on ne saurait dire que la
sentence
attaquée viole l'ordre public matériel.

En mettant le fardeau de la preuve à la charge de la recourante,
l'arbitre
n'a pas davantage violé l'ordre public. Le droit interne suisse admet
lui-même qu'il appartient à la partie demanderesse de prouver les
faits
permettant de constater l'existence de la créance qu'elle invoque
(cf. art. 8
CC).

En interprétant la clause contractuelle, l'arbitre est parvenu à la
conclusion que la rémunération n'était due que si l'activité de la
recourante
était la cause effective de la conclusion du contrat; en appréciant
les
preuves, il a admis que cette condition n'était pas remplie et il a
donc
rejeté la demande. Dès lors qu'il avait jugé que les parties étaient
convenues d'exclure une rémunération en pareilles circonstances, la
décision
de l'arbitre respecte entièrement le principe de la fidélité
contractuelle et
on ne discerne ni violation de la bonne foi, ni abus de droit. La
recourante
ne peut prétendre à une rémunération conventionnellement exclue.

Le recours est ainsi entièrement infondé.

4.
Les frais et dépens seront mis à la charge de la recourante qui
succombe
(art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 25 000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 25 000 fr. à titre
de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et au
Tribunal arbitral.

Lausanne, le 22 octobre 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.71/2002
Date de la décision : 22/10/2002
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-10-22;4p.71.2002 ?
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