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22/10/2002 | SUISSE | N°4C.186/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 octobre 2002, 4C.186/2002


{T 0/2}
4C.186/2002 /ech

Arrêt du 22 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour,
Favre et Chaix, juge suppléant,
greffier Ramelet.

A. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Jean-Marc Reymond, avocat,
rue de
la Grotte 6, case postale 2480, 1003 Lausanne,

contre

X.________ SA,
défenderesse et intimée, représentée par Me Eric Ramel, avocat, rue du
Petit-Chêne 18, case postale 3420, 1002 Lausanne.

transaction extrajudiciaire


(recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal
cantonal
du canton de Vaud du 4 juillet 2001)

...

{T 0/2}
4C.186/2002 /ech

Arrêt du 22 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour,
Favre et Chaix, juge suppléant,
greffier Ramelet.

A. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Jean-Marc Reymond, avocat,
rue de
la Grotte 6, case postale 2480, 1003 Lausanne,

contre

X.________ SA,
défenderesse et intimée, représentée par Me Eric Ramel, avocat, rue du
Petit-Chêne 18, case postale 3420, 1002 Lausanne.

transaction extrajudiciaire

(recours en réforme contre le jugement de la Cour civile du Tribunal
cantonal
du canton de Vaud du 4 juillet 2001)

Faits:

A.
A.a Entre février 1997 et janvier 1998, A.________, médecin dentiste
de
formation né en 1949 et domicilié à Montreux, a ouvert trois comptes
auprès
de X.________ SA, à Genève (ci-après: X.________ ou la banque), soit
un
compte nominatif et deux comptes numériques ("Centia" et "Claudia").
Lors de
l'ouverture de chacun de ces comptes, il a signé un acte de
nantissement
général, prévoyant notamment que si la banque estime que la valeur du
gage
n'est plus suffisante pour couvrir sa créance, elle pourra exiger de
lui un
supplément de garantie ou un remboursement correspondant. Le principal
interlocuteur de A.________ au sein de X.________ était B.________,
gestionnaire de comptes.

Dès le début de la relation bancaire, A.________ s'est livré à des
opérations
de spéculation à la bourse. Il a ainsi effectué des opérations sur
produits
dérivés ainsi que des investissements sur les indices pétroliers. A
plusieurs
reprises, il a été informé par lettre de la banque sur les risques
relatifs à
certaines transactions mobilières et aux produits dérivés. Dès
février 1998
au moins, il a pu entrer en contact direct avec la salle des marchés;
il a
depuis lors passé constamment ses ordres lui-même, adoptant parfois
les
propositions d'opérations qui lui étaient faites par les employés
travaillant
à la corbeille. A aucun moment, il n'a donné à la banque un mandat
d'administration ou de gestion.

En août 1998, X.________ a constaté le passage du compte "Claudia" en
position négative. A plusieurs reprises, B.________ a invité
A.________ à
réduire sa position.

Le 13 août 1998, A.________ a envoyé à la banque une télécopie dictée
par
B.________ où il confirmait se porter garant d'éventuelles pertes sur
les
opérations boursières en cours. Le même jour, il a rencontré
B.________ et
signé une lettre rédigée par ce dernier à l'intention de la banque:
A.________ y autorisait X.________ à liquider toutes les positions du
compte
"Claudia" dès que le niveau total s'approcherait d'un solde négatif
d'environ
150'000 fr.; il ajoutait être conscient qu'en cas de crash le solde
négatif
pourrait devenir plus important du fait d'une panique du marché et de
la
chute des prix de ses positions. Le 17 août 1998, soit quatre jours
plus
tard, A.________ a remis à la banque un chèque de 100'000 fr. qui a
été
crédité sur le compte "Claudia".

A.b Le 2 septembre 1998, le compte "Claudia" accusait une perte
totale de
497'688 fr. 48. Au vu de la situation, une réunion s'est tenue le
matin même
dans les locaux de X.________à Genève. Au cours de cette réunion, à
laquelle
assistaient notamment B.________, A.________ et son conseiller
financier, ce
dernier a mis en cause la responsabilité de la banque dans la
survenance du
dommage subi. Le directeur général de X.________est alors intervenu,
irrité
par ce discours, pour contester toute responsabilité de son
établissement; il
a ordonné de liquider les positions du client et a quitté la salle de
réunion. Les employés de la banque restés sur place ont indiqué à
A.________
- qui s'était opposé à ce que la banque liquide ses positions et avait
déclaré vouloir amener des fonds - que la direction générale
prendrait quant
à ce dossier une décision stratégique, dont il serait informé. Dans
l'après-midi, B.________ a annoncé à A.________ que la direction
générale
avait finalement accepté de maintenir le compte sous certaines
conditions.

Le soir du même jour, A.________ et B.________ se sont rencontrés
dans un
grand hôtel de Lausanne. A la demande de B.________, A.________ a
contresigné, après y avoir porté la mention "lu et approuvé", chaque
page
d'une lettre rédigée par la banque. Ce courrier, daté du 2 septembre
1998,
rappelait que les positions négatives du compte "Claudia", en août
1998,
avaient été maintenues en raison de la situation financière aisée de
A.________; il mentionnait un solde négatif se montant alors à environ
450'000 fr., que le client avait affirmé pouvoir couvrir sans
difficulté dans
un délai de six mois. Cette écriture se terminait de la manière
suivante:
"(...)

Compte tenu de vos déclarations sur vos revenus ainsi que des apports
d'argent frais opérés sur votre compte ces derniers mois, nous vous
faisons
la proposition suivante:

Notre banque prend la responsabilité de gérer elle-même votre
portefeuille et
accepte de prendre à sa charge toutes pertes qui dépasseraient un
montant de
Frs. 450'000 .--.

De votre côté, vous vous engagez à nous verser un montant de Frs.
80'000 le
15 de chaque mois, dès le 15 septembre 1998 jusqu'à hauteur d'un
montant de
Frs. 450'000 maximum.

Nous conservons néanmoins la possibilité de liquider librement, en
tout temps
et à notre entière discrétion, tout ou partie de votre portefeuille
si nous
devions l'estimer nécessaire.

La liquidation de votre portefeuille déterminera uniquement le montant
définitif de la perte éventuelle mais ne mettra pas fin à votre
obligation de
versement mensuel de Frs. 80'000 .--.

Tout montant versé par vous-même qui dépasserait le montant de la
perte
définitive de votre portefeuille sera remis à votre disposition.

(...)"

B.
A. ________ n'a effectué aucun des versements prévus dans l'écriture
du 2
septembre 1998. Le 1er octobre 1998, il a déclaré invalider son
accord à ce
courrier, alléguant qu'il avait été obtenu "de façon très incongrue".
Il
rappelait que, lors de la réunion organisée le matin du 2 septembre
1998, il
avait clairement mis en cause la responsabilité de la banque pour le
dommage
subi.

Le 4 décembre 1998, le compte "Claudia" présentait un solde négatif de
480'687 fr. 89. X.________ a entamé des poursuites contre A.________
et obtenu la mainlevée provisoire des oppositions du poursuivi à
concurrence
de 450'000 fr., sous imputation de 18'740 fr. versés par un tiers sur
le
compte "Claudia".

Le 5 mars 1999, A.________ a ouvert action en libération de dette
devant la
Cour civile du Tribunal cantonal vaudois. Il a conclu à ce qu'il soit
dit
qu'il n'est pas le débiteur de X.________du montant de 450'000 fr.,
les
oppositions aux poursuites dirigées à son encontre étant
définitivement
maintenues; le demandeur a également pris des conclusions tendant à
faire
condamner la banque à lui verser la somme de 1'500'000 fr. en capital
à titre
de dommage.

X. ________ a conclu au déboutement du demandeur de toutes ses
conclusions
et, reconventionnellement, au prononcé de la mainlevée définitive de
l'opposition formée par le poursuivi.

Par ordonnance du Juge instructeur de la Cour civile, la cause a été
disjointe afin de trancher à titre préjudiciel, d'une part, la
question de la
validité de la convention du 2 septembre 1998 et, d'autre part, la
question
de savoir si cette convention exclut les prétentions du demandeur
contre la
banque en réparation de son dommage.

Par jugement du 4 juillet 2001, dont les considérants ont été
notifiés le 17
avril 2002, la Cour civile du Tribunal cantonal a considéré que la
convention
du 2 septembre 1998 était valide (ch. I) et qu'elle excluait les
prétentions
du demandeur contre la défenderesse (ch. II). En conséquence,
A.________ a
été condamné à verser à X.________ la somme totale de 450'000 fr.
avec les
intérêts de droit sur les six tranches la composant , sous déduction
de
18'740 fr. en capital (ch. III); par ailleurs, les oppositions
formées par le
débiteur ont été levées définitivement (ch. IV et V). En substance,
la Cour
civile a jugé que le demandeur, qui n'était pas un novice en matière
d'investissement boursier, avait été correctement informé par la
défenderesse
des risques présentés par les opérations sur produits dérivés. La cour
cantonale a admis que le consentement du demandeur n'était pas vicié
lorsqu'il a signé la convention du 2 septembre 1998. Interprétant
objectivement l'accord précité, elle a enfin retenu qu'il excluait les
éventuelles prétentions que le demandeur pourrait élever à l'endroit
de la
banque.

C.
A.________ interjette un recours en réforme au Tribunal fédéral. Il
conclut à
ce que le chiffre II du dispositif du jugement cantonal constate
désormais
que la convention du 2 septembre 1998 n'exclut en aucune manière les
prétentions du demandeur contre la défenderesse dans le cadre de leurs
relations, la cause devant être renvoyée à la juridiction inférieure.

La défenderesse propose le rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie demanderesse qui a succombé dans ses
conclusions
libératoires et dirigé contre un jugement final rendu en dernière
instance
cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une
contestation
civile dont la valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art.
46 OJ),
le recours en réforme est en principe recevable, puisqu'il a été
déposé en
temps utile (art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ).

1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral,
mais
non pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art.
43 al. 1
2e phrase OJ) ou pour violation du droit cantonal (ATF 127 III 248
consid.
2c; 126 III 189 consid. 2a, 370 consid. 5).

Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve
n'aient
été violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations
reposant sur
une inadvertance manifeste (art.63 al. 2 OJ) ou qu'il faille
compléter les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte
de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis
(art. 64
OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c). Dans la mesure où un recourant
présente un
état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée
sans se
prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui viennent d'être
rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte. L'appréciation des
preuves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale ne peut être
remise en
cause (ATF 127 III 543 consid. 2c; 126 III 189 consid. 2a). II ne
peut être
présenté de griefs contre les constatations de fait, ni de faits ou
de moyens
de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).

Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des
parties, mais
il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1
OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al.
3 OJ;
ATF 128 III 22 consid. 2e/cc p. 29; 127 III 248 consid. 2c).

2.
Devant le Tribunal fédéral, le recourant ne remet plus en cause la
validité
de son consentement à l'acte du 2 septembre 1998, lequel est dès lors
acquis.
Il reproche en revanche à la cour cantonale une mauvaise
interprétation de
cette convention, dont il relève l'absence de qualification juridique
par les
premiers juges. II invoque ainsi une violation de l'art. 18 al. 1 CO.

2.1 Lorsque le recourant a signé le courrier litigieux, les parties se
trouvaient dans une incertitude (relative) à propos de la
continuation de
leurs relations juridiques et de la forme qu'elles pourraient prendre
le cas
échéant. Sans entrer plus avant sur la portée de ce document, on peut
affirmer que son but était de régler le litige existant entre les
parties
depuis l'échec de la réunion qui s'était tenue le matin du 2
septembre 1998.

Ce courrier, rédigé par l'intimée et accepté par le recourant,
constitue
indubitablement une transaction extrajudiciaire (Vergleich), à savoir
un
contrat synallagmatique et onéreux par lequel les parties terminent
un litige
ou mettent fin, par des concessions réciproques, à une incertitude,
subjective ou objective, touchant les faits, leur qualification
juridique,
l'existence, le contenu ou l'étendue d'un rapport de droit (ATF 121
III 495
consid. 5b p. 498; 111 II 349 consid. 1). La transaction permet ainsi
aux
parties de régler à nouveau leurs rapports (ATF 114 lb 74 consid. 1
p. 78).
Ces nouveaux rapports sont fondés sur des concessions réciproques, qui
peuvent prendre la forme d'une reconnaissance de dette, d'une remise
de
dette, d'une remise d'intérêts moratoires, d'un aménagement de délais
de
paiement, etc. (cf. Peter Gauch, Der aussergerichtliche Vergleich, in:
Innominatverträge, Festgabe zum 60. Geburtstag von Walter R. Schluep,
Zürich
1988, p. 6).

2.2 La détermination du contenu de la transaction, qui permet de
définir les
prétentions et points litigieux qui ont été définitivement réglés,
s'effectue
selon les principes habituels en matière d'interprétation des contrats
(Gauch, op. cit., p. 13), qu'il sied maintenant de rappeler.

2.2.1 En présence d'un litige
sur l'interprétation d'une clause
contractuelle, le juge doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la
commune
et réelle intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou
dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur,
soit
pour déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1 CO;
ATF 127
III 444 consid. 1b).

Déterminer ce qu'un cocontractant savait et voulait au moment de
conclure
relève des constatations de fait qui lient le Tribunal fédéral (ATF
118 II 58
consid. 3a). Si la cour cantonale parvient à se convaincre d'une
commune et
réelle intention des parties, il s'agit d'une constatation de fait
qui ne
peut être remise en cause dans un recours en réforme (ATF 126 III 25
consid.
3c, 375 consid. 2e/aa; 125 III 305 consid. 2b, 435 consid. 2a/aa).

Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si elle
est
divergente, le juge doit interpréter les déclarations et les
comportements
selon la théorie de la confiance. Il doit donc rechercher comment une
déclaration ou une attitude pouvait être comprise de bonne foi en
fonction de
l'ensemble des circonstances (cf. ATF 127 III 444 consid. 1b; 126 III
59
consid. 5b, 375 consid. 2e/aa p. 380). Il convient de préciser que le
principe de la confiance permet d'imputer à une partie le sens
objectif de sa
déclaration ou de son comportement, même si celui-ci ne correspond
pas à sa
volonté intime (ATF 127 III 279 consid. 2c/ee p. 287 et les références
doctrinales).

L'application du principe de la confiance est une question de droit
que le
Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, peut examiner
librement (ATF
127 III 248 consid. 3a; 126 III 25 consid. 3c, 59 consid. 5a, 375
consid.
2e/aa p. 379). Pour trancher cette question de droit, il faut
cependant se
fonder sur le contenu de la manifestation de volonté et sur les
circonstances, lesquelles relèvent du fait (ATF 126 III 375 consid.
2e/aa;
124 III 363 consid. 5a; 123 III 165 consid. 3a).

2.2.2 En matière de transaction, lorsque les règles habituelles
d'interprétation ne conduisent pas à un résultat sûr ou que, à tout
le moins,
deux solutions différentes apparaissent soutenables, il convient de
procéder
à une interprétation stricte, semblable à celle régissant les
quittances pour
solde de tout compte (cf. ATF 127 III 444 consid. 1a). Ce principe
vaut
notamment lorsqu'un lésé et une assurance procèdent à un règlement
global des
prétentions du premier envers la seconde et que demeure incertain le
point de
savoir si ce règlement vise les seules prétentions existant au moment
où la
transaction est signée ou également celles qui pourraient naître par
la suite
(Gauch, op. cit., p. 13 et les références). Enfin, il faut garder à
l'esprit
que si des clauses sont peu claires, elles doivent être interprétées
contre
la partie qui les a rédigées ("in dubio contra stipulatorem") (cf. à
ce
propos: ATF 126 V 499 consid. 3b; 122 III 118 consid. 2d).

2.3 En l'occurrence, il n'a pas pu être établi que les plaideurs
avaient la
volonté réelle que le recourant, en signant l'accord du 2 septembre
1998,
acceptât de renoncer à toute prétention en dommages-intérêts contre
l'intimée. Le texte litigieux ne fait pas allusion à cette question,
que ce
soit pour exclure formellement de telles prétentions ou pour les
réserver,
même de manière vague et générale. Il y a dès lors lieu de déterminer
la
volonté objective des parties, sur la base de toutes les
circonstances de
l'espèce et de la logique de la transaction passée.

Le matin du 2 septembre 1998, le demandeur et la défenderesse se sont
quittés
après avoir exprimé des opinions inconciliables: maintenir ses
positions et
rechercher la responsabilité de la banque, pour le premier; liquider
les
positions du client et terminer la relation bancaire avec celui-ci,
pour la
seconde. Dès l'après-midi, le recourant était averti que la banque
était
disposée à maintenir la relation, "sous certaines conditions". Il
ressort de
l'accord conclu le soir-même que l'intimée effectuait deux concessions
importantes: d'abord, elle consentait à ne pas liquider immédiatement
toutes
les positions, pourtant gravement négatives, du recourant; ensuite,
elle
acceptait que le dommage supporté par le demandeur, théoriquement
illimité,
soit arrêté à 450'000 fr. au maximum. De son côté, le demandeur
s'engageait à
verser, en mensualités de 80'000 fr., l'équivalent des pertes
enregistrées
sur le compte, à concurrence toujours de 450'000 fr. La concession
accordée
par le recourant consistait donc à se reconnaître débiteur envers la
banque
de la somme maximale de 450'000 fr.

En admettant de faire une telle concession, sans émettre la moindre
réserve,
le recourant peut se voir imputer la volonté - objectivée - de
renoncer à
toute prétention contre l'intimée en réparation d'un éventuel
dommage. En
effet, un homme loyal et raisonnable, passant un compromis
transactionnel
quelques heures après avoir menacé son cocontractant d'agir contre
lui en
responsabilité, est supposé avoir renoncé à ce projet. Par ailleurs,
le but
de la transaction était de maintenir une relation bancaire entre les
parties,
ce qu'aurait évidemment exclu une action en justice du recourant
contre
l'intimée. Enfin, il résultait de la logique et de l'économie de la
transaction que les concessions substantielles accordées par la
banque au
recourant devaient être contrebalancées par d'autres concessions de
la part
de ce dernier que la seule reconnaissance de sa qualité de débiteur,
laquelle
découlait déjà de l'acte de nantissement général signé lors de
l'ouverture du
compte. A considérer ces éléments, l'intimée pouvait de bonne foi
admettre
que le demandeur avait accepté de renoncer à la rechercher en
responsabilité.

L'application au cas d'espèce des règles sur l'interprétation
objective du
contrat conduit à un résultat suffisamment sûr, de sorte que le
recours à une
interprétation stricte, laquelle est préconisée, ainsi qu'on l'a vu,
en ce
qui concerne les transactions extrajudiciaires, n'a pas lieu d'être.
Tout
doute sur la portée de l'accord litigieux étant ainsi écarté, le fait
qu'il
ait été rédigé par l'intimée est sans importance.

Par conséquent, c'est sans violer le droit fédéral que l'autorité
cantonale a
jugé que l'acceptation par le recourant du compromis en cause
excluait qu'il
fasse valoir des prétentions pécuniaires contre la banque en raison du
résultat désastreux de ses placements boursiers.

3.
Au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, le jugement
attaqué
étant confirmé. Les frais et dépens seront donc mis à la charge du
recourant,
qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté et le jugement attaqué est confirmé.

2.
Un émolument judiciaire de 12'000 fr. est mis à la charge du
recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 14'000 fr. à titre
de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Cour civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 22 octobre 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.186/2002
Date de la décision : 22/10/2002
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-10-22;4c.186.2002 ?
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