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14/10/2002 | SUISSE | N°4C.247/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 14 octobre 2002, 4C.247/2002


{T 0/2}
4C.247/2002 /ech

Arrêt du 14 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz, Klett,
Rottenberg
Liatowitch et Favre,
greffière de Montmollin

X.________ SA,
demanderesse et recourante, représentée par Me Jean-Daniel Borgeaud,
avocat,
boulevard des Tranchées 16, case postale 328, 1211 Genève 12,

contre

A.________,
défendeur et intimé, représenté par Me Denis Mathey, avocat,
boulevard des
Philosophes 17, 1205 Genève.

co

ntrat de travail; provision; avance; interprétation

(recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel des prud'hommes
d...

{T 0/2}
4C.247/2002 /ech

Arrêt du 14 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz, Klett,
Rottenberg
Liatowitch et Favre,
greffière de Montmollin

X.________ SA,
demanderesse et recourante, représentée par Me Jean-Daniel Borgeaud,
avocat,
boulevard des Tranchées 16, case postale 328, 1211 Genève 12,

contre

A.________,
défendeur et intimé, représenté par Me Denis Mathey, avocat,
boulevard des
Philosophes 17, 1205 Genève.

contrat de travail; provision; avance; interprétation

(recours en réforme contre l'arrêt de la Cour d'appel des prud'hommes
du
canton de Genève du 16 mai 2002)

Faits:

A.
Par contrat du 18 mars 1998, X.________ SA a engagé A.________ en
tant que
responsable commercial chargé de promouvoir la distribution
d'articles pour
fumeurs, d'instruments d'écriture ainsi que d'alcools de luxe.

Le contrat prévoit, pendant le temps d'essai, un salaire mensuel fixe
brut de
8'000 fr. Dès la fin du temps d'essai, la rémunération devait
comporter un
salaire mensuel fixe brut de 5'000 fr. et une commission de 3% sur
toutes les
affaires conclues. L'art. 5.3 du contrat a la teneur suivante:
"Pour assurer un revenu régulier à l'employé, l'employeur lui versera
une
avance sur commission de 3'500 fr. par mois. En cas de solde positif
à la fin
de l'année civile, l'employeur versera le solde des commissions dues à
l'employé. Sur demande de l'employé, le solde positif pourra être
payé plus
fréquemment."
Pour fixer le taux des commissions (3%) et pour arrêter le montant de
l'avance mensuelle (3'500 fr.), les parties ont estimé que le chiffre
d'affaires annuel serait de l'ordre de 2'000'000 fr., ce qui aurait
représenté, au taux de 3%, une somme de 5'000 fr. par mois à titre de
commission. L'employeur avait proposé de fixer l'avance à 3'000 fr.
par mois,
mais l'employé avait expliqué que cela ne suffisait pas à couvrir les
besoins
financiers de son ménage, raison pour laquelle il avait été convenu
de porter
l'avance à 3'500 fr. par mois.

Par la suite, l'employeur a délivré régulièrement à son employé des
décomptes
mensuels qui font apparaître, sous la dénomination de "salaire de
base", la
somme totale de 8'500 fr., correspondant au salaire fixe et à l'avance
convenue; les charges sociales étaient prélevées sur l'ensemble de
cette
somme.

Dans une note du 18 janvier 2000 adressée à son employé, l'employeur a
reconnu que le chiffre d'affaires de 2'000'000 fr. espéré à l'origine
s'était
révélé irréaliste; il était proposé de porter la commission à 10% en
2000 et
de renoncer à réclamer le trop-perçu sur les avances pour l'année
1998.
L'employé n'a pas répondu à cette note.

Le 13 novembre 2000, X.________ SA, constatant que les résultats de
l'activité de son employé demeuraient largement en deçà de ses
attentes, a
résilié le contrat de travail pour le 31 janvier 2001. La société a
manifesté
la volonté de recouvrer la différence entre les avances versées et les
commissions dues à l'employé. Celui-ci s'est élevé contre cette
prétention.

B.
Le 28 juin 2001, X.________ SA a déposé devant le Tribunal des
prud'hommes du
canton de Genève une demande en paiement dirigée contre A.________,
lui
réclamant la somme de 54'605 fr. 25, à savoir le solde débiteur du
compte
d'avances sur commissions depuis 1998. Le défendeur s'est opposé à la
demande
et a réclamé reconventionnellement 10'500 fr., soit les 3 dernières
mensualités de 3'500 fr. pour la période allant de novembre 2000 à
janvier
2001, que son employeur avait refusé de verser.

Par jugement du 31 octobre 2001, le Tribunal a rejeté la demande
principale
et admis les conclusions reconventionnelles, estimant que les avances
sur
commissions équivalaient à du salaire.

Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la Cour d'appel rendu le
16 mai
2002.

C.
X.________ SA recourt en réforme au Tribunal fédéral. Invoquant la
violation
du droit fédéral, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et à
la
condamnation de sa partie adverse à lui verser la somme de 54'605 fr.
25 avec
intérêts à 5% l'an dès le 1er février 2001.

L'intimé propose le rejet du recours dans la mesure où il est
recevable et la
confirmation des décisions cantonales.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire
son
raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve
n'aient
été violées, qu'il n'y ait lieu à rectification de constatations
reposant sur
une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il ne faille
compléter
les constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas
tenu
compte de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF
127 III
248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). Il n'est possible de tenir
compte
d'un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la décision
attaquée
qu'à la condition que la partie recourante se prévale avec précision
de l'une
des exceptions qui viennent d'être rappelées (ATF 127 III 248 consid.
2c). Il
ne peut être présenté de griefs contre les constatations de fait, ni
de faits
ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55 al. 1 let. c OJ).
L'appréciation des
preuves et les constatations de fait qui en découlent ne peuvent
donner lieu
à un recours en réforme (ATF 127 III 543 consid. 2c; 126 III 189
consid. 2a;
125 III 78 consid. 3a).

Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des
parties, mais
il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1
OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al.
3 OJ;
ATF 128 III 22 consid. 2e/cc; 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59
consid. 2a).

1.2 Sur deux points, la recourante demande la rectification d'une
inadvertance manifeste au sens de l'art. 63 al. 2 2e phrase OJ.

Il faut préalablement rappeler que la rectification n'a lieu que si
le point
de fait est pertinent pour l'issue du litige (ATF 95 II 503 consid.
2a;
Corboz, Le recours en réforme au Tribunal fédéral, SJ 2000 II p. 1
ss, p.
66).

La recourante reproche à la cour cantonale d'avoir omis d'indiquer que
l'intimé avait reconnu, lors d'une comparution personnelle, que son
employeur
tenait à prévoir une provision, afin de garder la motivation de
l'employé. On
ne voit cependant pas en quoi ce point de fait pourrait modifier
l'issue du
litige. Il n'est pas contesté qu'une provision a été convenue et le
but
économique d'un tel mode de rémunération est notoire (cf. ATF 128 III
174
consid. 2b). La question litigieuse est totalement différente: il faut
déterminer, par voie d'interprétation, si les parties ont exclu une
restitution dans l'hypothèse où les avances dépasseraient le montant
des
commissions dues.

La recourante se plaint également de ce que l'arrêt cantonal ne
reproduirait
pas correctement les dispositions légales qu'elle avait invoquées. Ce
point
de fait est également sans pertinence, puisque le Tribunal fédéral,
saisi
d'un recours en réforme, examine librement quelles sont les
dispositions de
droit fédéral applicables.

Il n'y a donc pas lieu de rectifier l'état de fait contenu dans
l'arrêt
attaqué.

2.
2.1Constatant que l'employé passait les deux tiers du temps de
travail dans
les locaux de l'entreprise, la cour cantonale a exclu d'emblée la
qualification de voyageur de commerce (cf. art. 347 al. 2 CO). Cette
question
n'est plus discutée et il n'y a pas lieu d'y revenir.

Sur la base des constatations cantonales - qui lient le Tribunal
fédéral
saisi d'un recours en réforme (art. 63 al. 2 OJ) - on doit retenir
que les
parties ont conclu un contrat individuel de travail au sens de l'art.
319 al.
1 CO.

Selon l'accord des parties, la rémunération du travailleur se
composait d'une
part d'un salaire fixe (art. 322 al. 1 CO) et, d'autre part, d'une
provision
(art. 322b CO; ATF 128 III 174 consid. 2b).

Il a été convenu que le travailleur recevrait chaque mois une avance
de 3'500
fr. sur la provision.

2.2 La demanderesse voit un prêt de consommation (art. 312 CO) dans
cet
accord sur le versement d'une avance.

Le prêt de consommation est un contrat par lequel le prêteur s'oblige
à
mettre à disposition de l'emprunteur des biens fongibles (auxquels
celui-ci
ne pourrait prétendre sans cet accord), à charge pour lui d'en
restituer
l'équivalent ultérieurement, fût-ce par compensation (art. 312 CO;
Engel,
Contrats de droit suisse, 2e éd., p. 266 s.; Tercier, Les contrats
spéciaux,
2e éd., n° 2352).

L'avance - évoquée par l'art. 323 al. 4 CO - se caractérise comme un
paiement
anticipé sur une dette qui sera échue plus tard (cf. Rehbinder,
Commentaire
bernois, n. 30 ad art. 323 CO; Schönenberger/Staehelin, Commentaire
zurichois, n. 18 ad art. 323 CO). Une telle avance, même sur une
provision,
peut être librement convenue dans un contrat de travail
(Schönenberger/Staehelin, op. cit., n. 14 et 19 ad art. 323 CO).

En l'espèce, le travailleur fournissait constamment une activité
génératrice
de provision et il a été convenu, pour lui permettre de subvenir à son
entretien sans attendre le décompte périodique, qu'il recevrait
chaque mois
une certaine somme à déduire de la provision déterminée
périodiquement. Ces
versements se caractérisent donc bien comme des avances, conformément
à la
terminologie utilisée par les parties, et la cour cantonale, en
employant ce
terme, n'a pas violé le droit fédéral.

2.3 La demanderesse considère que les parties, en raison de ces
avances, ont
conclu un contrat de compte courant (sur cette figure juridique: cf.
ATF 100
III 79 ss; Engel, Traité des obligations en droit suisse, 2e éd., p.
773 s.).

Le contrat de compte courant comporte un accord de compensation selon
lequel
toutes les prétentions nées de part et d'autre, comprises dans le
rapport de
compte courant, seront compensées automatiquement, sans déclaration de
compensation, soit pendant que le compte courant est ouvert, soit à
la fin
d'une période comptable (ATF 100 III 79). Dans un compte courant, les
prétentions et contre-prétentions portées en compte s'éteignent par
compensation et une nouvelle créance prend naissance à concurrence du
solde
(cf. ATF 127 III 147 consid. 2a; 104 II 190 consid. 2a). Il y a
novation
lorsque le solde du compte a été arrêté et reconnu (art. 117 al. 2
CO).

En l'espèce, les parties sont convenues que la rémunération du
travailleur
serait assurée en partie par une provision sur les affaires conclues.
Cette
solution implique nécessairement qu'un décompte soit établi
périodiquement
afin de déterminer le montant de la créance du travailleur. Cette
opération
arithmétique tend seulement à déterminer la dette de l'employeur et ne
comporte aucun élément de compensation. Il est vrai que si des
avances ont
été effectuées, celles-ci doivent être déduites. Cette soustraction a
pour
unique but de déterminer la créance du travailleur. On ne discerne
donc pas
l'existence de créances réciproques qui seraient échues
successivement et
qui, en vertu d'un accord, se compenseraient sans déclaration. Chaque
somme
due (le salaire fixe, l'avance convenue et le solde de provision)
doit être
payée à la date prévue. Il n'y a là aucun mécanisme de compensation
réciproque qui s'inscrirait dans la durée, de sorte que la cour
cantonale n'a
pas violé le droit fédéral en ne faisant pas appel à la notion de
contrat de
compte courant.

2.4 L'art. 5.3 du contrat, reproduit intégralement ci-dessus, prévoit
que
l'employeur versera une avance sur commission de 3'500 fr. par mois.
Il
ajoute qu'en cas de solde positif à la fin de l'année civile,
l'employeur
versera le solde des commissions dues à l'employé; à la demande de
celui-ci,
le solde positif pourra être payé plus fréquemment.

Il résulte immédiatement de la lecture de cette disposition que
l'hypothèse
d'un solde négatif n'a pas été expressément abordée. La formule "en
cas de
solde positif" impliquait logiquement que l'on envisage aussi
l'hypothèse
d'un solde négatif. Pour respecter le concept d'une avance, on aurait
pu
s'attendre à ce que les parties prévoient un remboursement à
l'employeur du
trop-perçu, dans le cas d'un solde négatif. Une telle mention fait
cependant
totalement défaut à l'art. 5.3, qui traite pourtant, avec soin, de
l'obligation de verser le solde positif.

Il faut donc se demander si l'on se trouve en présence d'une simple
inadvertance qui devrait être comblée par les instruments de la
logique ou
s'il s'agit d'un silence qualifié en ce sens que les parties ont
exclu toute
restitution en cas de solde négatif.

En d'autres termes, il s'agit ainsi d'interpréter la volonté des
parties.
Contrairement à ce que soutient la demanderesse, le problème n'est
pas de
savoir s'il y a eu une modification ultérieure du contrat sans
respecter la
forme écrite convenue.

2.5 Face à un litige sur l'interprétation d'une clause contractuelle,
le juge
doit tout d'abord s'efforcer de déterminer la commune et réelle
intention des
parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes
dont elles
ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature
véritable de
la convention (art. 18 al. 1 CO).


S'il y parvient, il s'agit d'une constatation de fait qui ne peut
être remise
en cause dans un recours en réforme (ATF 126 III 25 consid. c, 375
consid.
2e/aa; 125 III 305 consid. 2b, 435 consid. 2a/aa).

Si la volonté réelle des parties ne peut pas être établie ou si elle
est
divergente, le juge doit interpréter les déclarations faites et les
comportements selon la théorie de la confiance (ATF 128 III 265
consid. 3a;
127 III 444 consid. 1b). Il doit donc rechercher comment une
déclaration ou
une attitude pouvait être comprise de bonne foi en fonction de
l'ensemble des
circonstances (cf. ATF 126 III 59 consid. 5b, 375 consid. 2e/aa).
Même si la
teneur d'une clause contractuelle paraît claire à première vue, il
peut
résulter d'autres conditions du contrat, du but poursuivi par les
parties ou
d'autres circonstances que son texte ne restitue pas exactement le
sens de
l'accord conclu (ATF 127 III 444 consid. 1b); il n'y a cependant pas
lieu de
s'écarter du sens littéral du texte adopté par les intéressées
lorsqu'il n'y
a pas de raisons sérieuses de penser qu'il ne correspond pas à leur
volonté
(ATF 128 III 265 consid. 3a).

Il doit être rappelé que le principe de la confiance permet d'imputer
à une
partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement,
même s'il
ne correspond pas à sa volonté intime (arrêt 4C.43/2000 du 21 mai
2001,
publié in SJ 2001 I p. 541, consid. 2c et les références citées).

L'application du principe de la confiance est une question de droit
que le
Tribunal fédéral, saisi d'un recours en réforme, peut examiner
librement (ATF
127 III 248 consid. 3a; 126 III 25 consid. 3c, 59 consid. 5a, 375
consid.
2e/aa).

Pour trancher cette question de droit, il faut cependant se fonder
sur le
contenu de la manifestation de volonté et sur les circonstances,
lesquelles
relèvent du fait (ATF 126 III 375 consid. 2e/aa; 124 III 363 consid.
5a; 123
III 165 consid. 3a).

2.6 La cour cantonale a procédé à une appréciation des preuves
recueillies et
a tenu compte du comportement ultérieur des parties pour parvenir à la
conclusion qu'elles avaient exclu une obligation de remboursement à
la charge
du travailleur en cas de solde négatif. Il semble qu'elle ait ainsi
déterminé
la volonté réelle des parties. S'agissant d'une question de fait (ATF
127 III
248 consid. 3a; 126 III 10 consid. 2b; 125 III 305 consid. 2b), le
Tribunal
fédéral, saisi d'un recours en réforme, est lié par cette
constatation (art.
63 al. 2 OJ), ce qui clôt le débat.

L'arrêt cantonal n'étant toutefois pas absolument clair sur ce point,
on ne
peut pas exclure que la conclusion procède d'une application de la
théorie de
la confiance, ce qui constitue une question de droit que le Tribunal
fédéral
peut librement revoir.

Il a été établi (d'une manière qui lie le Tribunal fédéral) que les
parties
avaient envisagé, au moment de la conclusion du contrat, un chiffre
d'affaires tellement important qu'il impliquait pour le travailleur
une
rémunération mensuelle d'environ 10'000 fr. (5'000 fr. de salaire
fixe et
5'000 fr. de provision). En décidant un versement fixe de 8'500 fr.
par mois
(5'000 fr. de salaire fixe et 3'500 fr. de provision), les parties
excluaient, selon leurs prévisions, que le travailleur doive
restituer une
partie des sommes reçues. C'est manifestement pour ce motif que la
clause
contractuelle prévoit une obligation pour l'employeur de verser le
complément
en cas de solde positif, mais n'impose aucune obligation au
travailleur de
restituer le trop-perçu en cas de solde négatif.
Pendant le temps d'essai, le travailleur recevait un salaire fixe de
8'000
fr. On imagine bien qu'il n'aurait pas accepté, après cette période,
de
recevoir une somme inférieure. Il ressort au contraire des
constatations
cantonales qu'il a expliqué à l'employeur qu'un montant de 8'500 fr.
lui
était nécessaire pour entretenir convenablement sa famille et que
c'est pour
ce motif que l'employeur a accepté de porter l'avance de 3'000 fr. à
3'500
fr. Le travailleur a ainsi clairement manifesté la volonté de ne pas
recevoir
moins de 8'500 fr. par mois et l'employeur l'a acceptée. L'hypothèse
d'une
restitution irait manifestement à l'encontre de cet accord.

L'employeur a d'ailleurs bien compris que l'avance jouait le même
rôle qu'un
salaire, puisqu'il l'a mentionnée dans les décomptes mensuels sous la
rubrique "salaire de base" et qu'il a prélevé les charges sociales
sur la
somme totale de 8'500 fr. Lorsqu'il s'est rendu compte que le chiffre
d'affaires prévu n'était pas atteint, il a annoncé spontanément qu'il
renonçait à réclamer le trop-perçu pour 1998, ce qui ne fait que
confirmer
qu'il se rendait compte qu'une telle prétention ne correspondait pas
à ce que
les parties avaient prévu.

Sur la base de l'ensemble de ces éléments, la cour cantonale, en
retenant que
les parties avaient exclu une obligation du travailleur de restituer
le
trop-perçu, l'avance constituant une provision minimale garantie, ne
pourrait
se voir reprocher une violation des règles fédérales sur
l'interprétation des
manifestations de volonté, selon le principe de la confiance. Le
recours doit
donc être rejeté.

3.
Compte tenu de la valeur litigieuse, la procédure n'est pas gratuite
(cf.
art. 343 al. 2 et 3 CO).

Les frais et dépens seront mis à la charge de la recourante qui
succombe
(art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté et l'arrêt attaqué confirmé.

2.
Un émolument judiciaire de 2'500 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 3'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Cour d'appel des prud'hommes du canton de Genève (cause n°
C/13924/2001-1).

Lausanne, le 14 octobre 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.247/2002
Date de la décision : 14/10/2002
1re cour civile

Analyses

Contrat de travail; nature juridique et interprétation d'une clause prévoyant le versement mensuel d'une avance sur commission au salarié (art. 322 al. 1 et 322b CO). En l'occurrence, pas d'obligation du travailleur de rembourser les sommes reçues en trop à titre d'avances, celles-ci étant considérées comme des provisions minimales garanties (consid. 2).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-10-14;4c.247.2002 ?
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