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10/10/2002 | SUISSE | N°C.236/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 octobre 2002, C.236/01


{T 7}
C 236/01

Arrêt du 10 octobre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffier :
M.
Métral

Service de l'emploi du canton de Vaud, première instance cantonale de
recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lausanne Adm
cant VD,
recourant,

contre

N.________, intimé,

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 23 juillet 2001)

Faits :

A.
N. ________ a travaillé au servic

e de S.________ AG du 1er mars 1966
au 30
avril 1999, en qualité de délégué médical, activité pour laquelle son
dernier
salaire ...

{T 7}
C 236/01

Arrêt du 10 octobre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffier :
M.
Métral

Service de l'emploi du canton de Vaud, première instance cantonale de
recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lausanne Adm
cant VD,
recourant,

contre

N.________, intimé,

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 23 juillet 2001)

Faits :

A.
N. ________ a travaillé au service de S.________ AG du 1er mars 1966
au 30
avril 1999, en qualité de délégué médical, activité pour laquelle son
dernier
salaire mensuel brut était de 10 667 fr. Le 3 mai 1999, il a déposé
une
demande de prestations à la Caisse de chômage de la Chambre vaudoise
du
commerce et de l'industrie (ci-après : la caisse), qui lui a alloué
une
indemnité journalière pendant les mois de mai à juillet 1999.

Le 2 août 1999, le prénommé a été réengagé par son ancien employeur
pour un
salaire fixe de 1500 fr. par mois, auquel s'ajoutait une commission
de 10 %
sur «la plus-value réalisée annuellement». Il a annoncé à la caisse
percevoir
un gain intermédiaire correspondant à son salaire mensuel, en
précisant qu'il
toucherait peut-être des commissions, dont le montant ne pouvait pas
encore
être défini précisément. L'employée de la caisse en charge de son
dossier lui
a alors indiqué que les commissions seraient assimilées à un treizième
salaire et que le calcul des indemnités compensatoires versées par
l'assurance-chômage serait adapté en conséquence. De telles indemnités
compensatoires, calculées sur la base d'un gain intermédiaire mensuel
de 1624
fr. 95 pour les mois d'août à décembre 1999, et de 1500 fr. pour les
mois de
janvier à mai 2000, ont été versées à N.________. Le 18 janvier 2000,
la
caisse a toutefois rectifié les décomptes établis en 1999, ce qui l'a
amenée
à verser à l'assuré un montant complémentaire total de 480 fr. (96
fr. par
mois).

Jusqu'en mai 2000, S.________ AG a régulièrement attesté payer à
N.________
un salaire mensuel de 1500 fr., sans faire état d'un treizième
salaire, de
gratifications ni de commissions. Lors d'un entretien avec les
représentants
de la caisse, au mois de juin 2000, l'assuré a toutefois admis avoir
bénéficié d'une commission au début de l'année, en précisant qu'il
s'attendait à une nouvelle prime à la fin du mois. Par télécopie
adressée le
30 juin 2000 à la caisse, S.________ AG a confirmé ces propos et
indiqué
avoir versé à son employé des commissions de 9500 fr. en février 2000
et de
9513 fr. 20 en juin 2000.

Le 14 juillet 2000, la caisse a reconsidéré les indemnités
compensatoires
allouées à l'assuré depuis le mois d'août 1999, afin de prendre en
considération les commissions dont il avait bénéficié en février et
juin
2000, et exigé le remboursement d'un montant de 10 780 fr. 50. Par
décision
séparée du même jour, elle a suspendu N.________ dans l'exercice de
son droit
aux indemnités de chômage, pour une durée de 31 jours, au motif qu'il
avait
obtenu ou tenté d'obtenir des prestations indues en passant sous
silence la
commission perçue en février 2000. Le recours interjeté par le
prénommé
contre la mesure de suspension prononcée à son encontre a été rejeté
par le
Service de l'emploi du canton de Vaud, par décision du 6 février 2001.

B.
Le 23 juillet 2001, le Tribunal administratif du canton de Vaud a
admis le
recours interjeté par l'assuré contre cette décision, qu'il a
réformée en
réduisant de 31 à 8 jours la durée de la suspension prononcée par la
caisse.

C.
Le Service de l'emploi du canton de Vaud interjette un recours de
droit
administratif contre ce jugement, dont il demande l'annulation.
L'intimé n'a
pas déposé de mémoire-réponse. Pour sa part, la caisse propose, en
substance,
l'admission du recours, alors que le Secrétariat d'Etat à l'économie a
renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
1.1 Aux termes de l'art. 30 al. 1 LACI, le droit de l'assuré à
l'indemnité de
chômage est suspendu lorsqu'il est établi, notamment, que celui-ci a
donné
des indications fausses ou incomplètes ou a enfreint, de quelque autre
manière, l'obligation de fournir des renseignements spontanément ou
sur
demande et d'aviser (let. e) ou qu'il a obtenu ou tenté d'obtenir
indûment
l'indemnité de chômage (let. f).

1.2 L'état de fait visé par l'art. 30 al. 1 let. e LACI est réalisé
lorsque
l'assuré remplit de manière fausse ou incomplète des formules
destinées à la
caisse, à l'office du travail ou à l'autorité cantonale. Une
violation de
l'obligation d'annoncer ou de renseigner est en outre réalisée si
l'assuré
contrevient à ses devoirs découlant de l'art. 96 LACI.

Selon l'alinéa 1er de cette disposition, les bénéficiaires de
prestations,
leurs représentants légaux et les employeurs sont tenus de fournir aux
caisses et aux autorités compétentes de la Confédération et des
cantons tous
les renseignements et documents nécessaires. Quant à l'alinéa 2, il
impose à
l'assuré, aussi longtemps qu'il touche des prestations, d'annoncer
spontanément à la caisse tous les faits importants pour l'exercice de
ses
droits ou pour le calcul des prestations, notamment ceux qui
pourraient
influer sur le droit aux allocations pour enfant et de formation
professionnelle, ainsi que les modifications de son revenu ou de son
gain
intermédiaire.

Le devoir d'informer l'administration s'étend à tous les faits qui
ont une
importance pour le droit aux prestations. Sont importantes, en
particulier,
toutes les informations qui ont trait à l'aptitude au placement, qui
sont
nécessaires pour juger du caractère convenable d'un emploi ou qui
concernent
les recherches personnelles de travail. Peu importe au demeurant que
les
renseignements faux ou incomplets aient joué un rôle pour
l'allocation des
prestations (ATF 123 V 151 consid. 1b; DTA 1993 no 3 p. 21 consid.
3b).
Quant à l'art. 30 al. 1 let. f LACI, il vise tout spécialement une
violation
intentionnelle de l'obligation de renseigner ou d'annoncer, cela dans
le but
d'obtenir des prestations indues (DTA 1993 no 3 p. 21 consid. 3b).

2.
N.________ ne conteste pas avoir reçu, jusqu'au mois de mai 2000, des
indemnités compensatoires supérieures à celles qu'il pouvait
prétendre, en
raison notamment de la commission versée par son employeur en février
2000.
Devant les premiers juges, il a cependant exposé avoir renoncé à
annoncer
spontanément cette commission, dès lors que d'après les renseignements
obtenus en septembre 1999, celle-ci devait être assimilée à un
treizième
salaire, inclus pro rata temporis dans les décomptes mensuels
effectués par
la caisse. Aussi l'assuré a-t-il reconnu avoir commis une négligence
légère,
mais nié tout comportement dolosif. Pour l'essentiel, la juridiction
cantonale a admis la pertinence de cette argumentation.

3.
3.1On peut tenir pour établi, au regard des décomptes établis par la
caisse
jusqu'au 31 décembre 1999, que l'une de ses collaboratrices a
expliqué à
l'assuré, comme il le soutient, qu'un «treizième salaire» fictif
serait pris
en considération pour le calcul des indemnités compensatoires
auxquelles il
avait droit, en raison des commissions qu'il pouvait s'attendre à
recevoir de
son employeur. Toutefois, rien n'indique, d'une part, que cette
collaboratrice l'aurait dispensé d'annoncer le montant exact de ces
commissions, et d'autre part, qu'elle lui aurait laissé croire que
leur
importance serait sans influence sur son droit aux indemnités de
chômage.
C'est donc à juste titre qu'une faute de l'intimé a été retenue par
les
premiers juges. Il reste à en déterminer la gravité, ce qui dépend en
particulier du point de savoir si l'assuré a délibérément violé son
devoir de
renseigner la caisse, dans l'espoir de percevoir des prestations
supérieures
à celles qu'il pouvait prétendre, ou s'il n'a commis qu'une simple
négligence.

3.2 Les deux primes perçues par l'intimé en février et juin 2000
représentent
un total de 18 500 fr., soit un montant supérieur à l'ensemble des
salaires
mensuels que lui a versés son employeur entre les mois d'août 1999 et
juin
2000. Elles constituent donc une part très importante de sa
rémunération, ce
qu'il ne pouvait ignorer au moment de percevoir la première
commission, voire
même, compte tenu de sa longue expérience au service de S.________
AG, dès
son réengagement par cette entreprise, en août 1999. Il n'est donc pas
vraisemblable que l'intimé ait cru, de bonne foi, que l'importance de
ces
commissions serait sans influence sur son droit à des indemnités
compensatoires de l'assurance-chômage et qu'il n'était pas tenu de les
déclarer. En particulier, on voit mal comment les commissions payées
par
S.________ AG auraient pu, dans l'esprit de l'intimé, être purement et
simplement compensées par le «treizième salaire» pris en
considération par la
caisse, alors que le montant de 9500 fr. perçu en février 2000
représentait,
à lui seul, plus de 6 mois de salaire. S'il éprouvait un doute sur ce
point,
rien ne l'empêchait de déclarer le montant exact de cette commission
à la
caisse afin de clarifier la situation. En renonçant à le faire
spontanément,
avant que la caisse lui demande des explications plus détaillées sur
son
activité, il a donc admis, de manière délibérée, que des prestations
nettement supérieures à celles qu'il pouvait prétendre lui soient
allouées.
Ce comportement tombe sous le coup de l'art. 30 al. 1 let. f LACI et
constitue une faute grave.

4. Vu ce qui précède, c'est à tort que les premiers juges ont réduit
de 31 à
8 jours la durée de la mesure de suspension prononcée à l'encontre de
l'intimé par la caisse. Cette dernière n'a par ailleurs pas fait un
usage
critiquable de son pouvoir d'appréciation en s'en tenant au minimum
prévu par
l'art. 45 al. 2 OACI en cas de faute grave de l'assuré.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis et le jugement du 23 juillet 2001 du Tribunal
administratif du canton de Vaud est annulé.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à Caisse de chômage de
la
Chambre vaudoise du commerce et de l'industrie, Lausanne, au Tribunal
administratif du canton de Vaud et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 10 octobre 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.236/01
Date de la décision : 10/10/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-10-10;c.236.01 ?
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