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10/10/2002 | SUISSE | N°4C.197/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 octobre 2002, 4C.197/2002


{T 0/2}
4C.197/2002 /mks

Arrêt du 10 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour,
Corboz, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Favre,
greffier Ramelet.

A. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Olivier Wehrli, avocat, case
postale 5715, 1211 Genève 11,

contre

B.________ SA,
défenderesse et intimée, représentée par Me Philippe Girod, avocat,
rue
Plantamour 42, 1201 Genève.

remise de commerce; défauts; dommage

(recours en r

éforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice
du canton de Genève du 19 avril 2002)

Faits:

A.
...

{T 0/2}
4C.197/2002 /mks

Arrêt du 10 octobre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour,
Corboz, Klett, Rottenberg Liatowitsch, Favre,
greffier Ramelet.

A. ________,
demandeur et recourant, représenté par Me Olivier Wehrli, avocat, case
postale 5715, 1211 Genève 11,

contre

B.________ SA,
défenderesse et intimée, représentée par Me Philippe Girod, avocat,
rue
Plantamour 42, 1201 Genève.

remise de commerce; défauts; dommage

(recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre civile de la Cour de
justice
du canton de Genève du 19 avril 2002)

Faits:

A.
A.a Par une convention de remise de commerce signée le 1er septembre
1995, la
société B.________ S.A. (ci-après: B.________) a cédé à la société
C.________
S.A., représentée par son directeur A.________, une boîte de nuit à
l'enseigne "Club D.________", sise à Genève dans un immeuble
appartenant à la
société SI E.________. Aux termes de ce contrat, B.________ a aliéné à
C.________ S.A. l'intégralité de l'agencement, du mobilier, du
matériel et
des installations garnissant et existant dans les locaux, le fonds de
commerce, la clientèle, le droit à l'enseigne et le droit au bail. Le
prix a
été fixé à 1'050'000 fr. et payé au moyen d'un chèque de 600'000 fr.
et d'un
prêt de 450'000 fr. consenti par B.________ à A.________. Un contrat
de prêt
a été signé entre ces deux personnes le même jour, indiquant que sa
durée
maximale était de trois ans.

Le 15 septembre 1998, B.________ a mis en demeure A.________ de lui
rembourser, au 30 septembre 1998, le prêt de 450'000 fr. qui lui
avait été
accordé trois ans plus tôt.

Excipant de compensation, A.________ ne s'est pas exécuté. B.________
lui a
fait notifier un commandement de payer, qui a été frappé
d'opposition. La
mainlevée provisoire a été prononcée le 2 février 1999.

Le 5 mars 1999, A.________ a déposé devant les tribunaux genevois une
action
en libération de dette à l'encontre de B.________.

A.b La créance compensatrice litigieuse repose sur les faits suivants.

En 1966, les locaux du Club D.________, à la suite d'un incendie, ont
été
floqués à l'amiante, ce qui apparaissait à l'époque comme une
protection
adéquate contre le feu. B.________ avait connaissance de la présence
de cette
matière considérée désormais comme dangereuse, mais il n'est pas
prouvé
qu'elle en ait informé, avant la conclusion du contrat, la société
C.________
S.A. En mars 1998, A.________, en tant qu'exploitant du Club
D.________, a
reçu un rapport de l'Institut Universitaire Romand de Santé au
Travail qui
estimait nécessaire l'assainissement des locaux; il était relevé que
le
flocage d'amiante se trouvait sans protection dans le couloir menant à
l'office ainsi que dans la cuisine, alors que, dans les lieux
fréquentés par
le public, il se trouvait derrière un faux plafond servant d'écran.

Selon un devis daté du 3 septembre 1998 établi à la demande de
A.________ par
l'entreprise F.________, les travaux d'assainissement demandés
devraient
coûter 198'355 fr. et durer 32 jours ouvrables. D'après l'organe de
révision
de C.________ S.A., l'exécution de ces travaux devrait entraîner une
perte de
gain de 197'941 fr. 55. A.________ estime qu'il en découlera
également une
perte de clientèle qu'il évalue à environ 60'000 fr.
Par convention du 18 février 1999, C.________ S.A. a cédé à
A.________ sa
créance en réduction du prix de vente découlant du contrat du 1er
septembre
1995, ainsi que sa créance en réparation du dommage consécutif au
défaut
constaté. A.________ excipe donc de compensation, pour les montants
invoqués,
en tant que cessionnaire des droits de C.________ S.A.

B.
Par jugement du 10 mai 2001, le Tribunal de première instance du
canton de
Genève a considéré que la présence de l'amiante constituait un défaut
de la
chose vendue, que la venderesse en avait dolosivement dissimulé
l'existence
et que l'acheteuse (dont A.________ est cessionnaire) avait droit à
une
diminution du prix correspondant au coût des travaux
d'assainissement, soit
198'355 fr. En conséquence, le tribunal a prononcé que la poursuite
irait sa
voie pour le montant du prêt, soit 450'000 fr. avec intérêts à 6,5%
dès le 30
septembre 1998, sous imputation de la créance compensatoire de
198'355 fr.
avec intérêts à 5% dès le 30 septembre 1998.

Saisie d'un appel interjeté par A.________ et d'un appel incident
formé par
B.________, la Chambre civile de la Cour de justice du canton de
Genève, dans
un arrêt du 19 avril 2002, a considéré que la présence de l'amiante ne
constituait pas un défaut de la chose vendue, parce que l'amiante se
trouvait
dans les plafonds remis à bail par la SI E.________, et non pas dans
un bien
aliéné par B.________ à C.________ S.A.; par ailleurs, comme il n'a
été ni
allégué ni prouvé que les travaux d'assainissement aient été
exécutés, la
cour cantonale en a déduit qu'il n'y avait ni dommage effectif ni gain
manqué. En conséquence, elle a annulé le jugement attaqué et rejeté
l'action
en libération de dette, précisant que la poursuite irait sa voie pour
le
montant du prêt, soit 450'000 fr. avec intérêts à 6,5% l'an dès le 30
septembre 1998.

C.
Parallèlement à un recours de droit public qui a été rejeté par arrêt
de ce
jour, A.________ exerce un recours en réforme au Tribunal fédéral.
Invoquant
une violation des art. 8 CC, 19, 51, 197, 41 et 97 CO, il conclut à
l'annulation de l'arrêt attaqué ainsi qu'à ce qu'il soit dit qu'il ne
doit
pas la somme de 450'000 fr. plus intérêts à 5,5% dès le 1er septembre
1995 et
que la poursuite n'ira pas sa voie; subsidiairement, il demande que
la cause
soit renvoyée à la cour cantonale.

L'intimée propose le rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Interjeté par la partie qui a succombé dans ses conclusions
libératoires
et dirigé contre un jugement final rendu en dernière instance
cantonale par
un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une contestation civile
dont la
valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ), le
recours en
réforme est en principe recevable, puisqu'il a été formé en temps
utile (art.
54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ).

1.2 Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral,
mais
non pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art.
43 al. 1
2e phrase OJ) ou pour violation du droit cantonal (ATF 127 III 248
consid.
2c; 126 III 189 consid. 2a, 370 consid. 5).

Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement juridique sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à moins que des dispositions fédérales en matière de preuve
n'aient
été violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations
reposant sur
une inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille
compléter les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte
de faits pertinents, régulièrement allégués et clairement établis
(art. 64
OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). Dans la
mesure où une
partie recourante présente un état de fait qui s'écarte de celui
contenu dans
la décision attaquée sans se prévaloir avec précision de l'une des
exceptions
qui viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir
compte (ATF
127 III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté de griefs contre les
constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux
(art. 55
al. 1 let. c OJ). Le recours en réforme n'est pas ouvert pour se
plaindre de
l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en
découlent (ATF
127 III 543 consid. 2c; 126 III 189 consid. 2a; 125 III 78 consid.
3a).

Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties
(qui ne
peuvent en prendre de nouvelles: art. 55 al. 1 let. b OJ), mais il
n'est pas
lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al.
3 OJ;
ATF 128 III 22 consid. 2e/cc p. 29; 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59
consid. 2a). Le Tribunal fédéral peut donc admettre un recours pour
d'autres
motifs que ceux invoqués par la partie recourante et il peut
également le
rejeter en adoptant une autre motivation que celle retenue par la cour
cantonale (ATF 127 III 248 consid. 2c in fine).

2.
2.1Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir perdu de vue la
liberté
des conventions (art. 19 al. 1 CO) et soutient que l'accord passé
entre la
cédante et la reprenante constitue, en raison de la diversité des
prestations, un contrat sui generis.

Face à une convention analogue, qui prévoyait la cession du mobilier,
de
l'agencement, du matériel, des installations, ainsi que du droit au
bail, de
la clientèle et de l'enseigne, la jurisprudence a déjà admis que le
contrat
de remise de commerce devait être qualifié de contrat sui generis
(arrêt
C.294/1986 du 10 décembre 1986, consid. 2a, publié in SJ 1987 p. 179
s.).

Le recourant ne peut cependant rien déduire en sa faveur de cette
qualification juridique. La remise de commerce est un contrat sui
generis,
parce que, en raison de la diversité des prestations, elle ne peut
pas être
qualifiée de vente mobilière. Comme le relève l'arrêt cité, une
cession de
commerce n'est pas, sans autre examen, soumise aux règles de la vente
mobilière; il faut au contraire rechercher la règle qui s'adapte le
mieux en
fonction de la prestation qui donne matière au litige (cf. arrêt
précité,
ibidem).

2.2 Le recourant soutient qu'il fallait appliquer l'art. 197 CO, qui
régit la
garantie due par le vendeur pour les défauts de la chose livrée.

Comme le montre le texte de cette disposition et son emplacement dans
la loi,
cette garantie suppose l'existence d'un contrat de vente.

Selon l'art. 184 al. 1 CO, la vente est un contrat par lequel le
vendeur
s'oblige à livrer la chose vendue à l'acheteur et à lui en transférer
la
propriété, moyennant un prix que l'acheteur s'engage à lui payer.

Il est vrai que la vente ne porte pas nécessairement sur une chose,
mais peut
aussi avoir pour objet une créance, un droit immatériel, ou un
avantage comme
la clientèle (Koller, Commentaire bâlois, 2e éd., n. 11 s. ad art.
184 CO;
Schönle, Commentaire zurichois, n. 42 ad art. 184 CO). La vente peut
donc
concerner, par exemple, un hôtel ou une pension (Engel, Contrats de
droit
suisse, 2e éd., p. 15). Il convient cependant d'observer que lorsque
la vente
ne porte pas sur une chose, mais sur une créance, la doctrine
majoritaire
considère qu'il ne faut pas appliquer l'art. 197 CO (invoqué par le
recourant), mais les art. 171 à 173 CO (Koller, op. cit., n. 13 ad
art. 184
CO; Schönle, op. cit., n. 60 s. ad art. 184 CO; opinion divergente:
Giger,
Commentaire bernois, n. 9 ad remarques préalables ad art. 197-210 CO).

Quoi qu'il en soit, la vente doit tendre au transfert définitif et
complet
d'un bien, et non pas simplement à la cession temporaire de son usage
(Koller, op. cit., n. 6 ad art. 184 CO; Engel, op. cit., p. 137;
Giger, op.
cit., n. 6 ad art. 184 CO). C'est ainsi que l'on distingue
fondamentalement
les contrats d'aliénation (la vente, l'échange et la donation) des
contrats
qui ne font que céder temporairement l'usage d'un bien (le bail à
loyer, le
bail à ferme et le prêt à usage).

En l'espèce, il ne ressort pas des constatations cantonales - qui
lient le
Tribunal fédéral saisi d'un recours en réforme (art. 63 al. 2 OJ) -
que
l'amiante (substance en soi dangereuse) se trouvait dans une
installation
mise en place par l'exploitant et cédée par lui à son successeur,
comme dans
le cas du précédent déjà cité (arrêt C.294/1986 du 10 décembre 1986,
SJ 1987
p. 178 ss, qui a trait au manque d'étanchéité d'un sauna). Au
contraire, il a
été retenu que l'amiante se trouvait dans les plafonds, c'est-à-dire
logiquement dans la structure du bâtiment qui comprend le sol, le
plafond et
les murs. S'agissant précisément des locaux dans lesquels la
reprenante
devait exercer son activité, le contrat prévoit exclusivement la
cession du
droit au bail. Cette clause signifiait clairement que la cédante
s'engageait
à opérer un transfert de son bail au sens de l'art. 263 al. 1 CO. Le
recourant ne conteste pas que cette obligation a été remplie et que la
reprenante est devenue locataire de la société propriétaire. Il en
découle
que la reprenante, selon l'accord des parties, devait obtenir l'usage
des
locaux, c'est-à-dire des sols, plafonds et murs, par le moyen d'un
bail. La
reprenante ne devait obtenir ainsi que l'usage temporaire des locaux,
ce qui
exclut, pour tout ce qui concerne les locaux eux-mêmes, la
qualification de
vente.

Ainsi, l'amiante dans les plafonds ne peut pas être qualifiée de
défaut de la
chose livrée (cf. Koller, op. cit., n. 2 art. 197 CO; Giger, op.
cit., n. 4
ad remarques préalables ad art. 197-210 CO), parce que les plafonds
n'ont pas
été cédés complètement et définitivement à la reprenante.

La cour cantonale n'a donc pas violé le droit fédéral en estimant que
les
plafonds floqués à l'amiante ne pouvaient pas être considérés comme
une chose
vendue, de sorte que l'art. 197 CO n'était pas applicable.

2.3 On pourrait certes se demander si la présence de l'amiante n'a
pas pour
effet de rendre défectueux les biens que
la cédante a transférés
définitivement à la reprenante. Il n'y a pas de raison de le penser
puisque
le défaut allégué ne réside pas dans ces biens et qu'il n'a pas été
constaté
que l'exploitation du commerce aurait été entravée ou que le chiffre
d'affaires aurait été diminué; d'après les constatations cantonales,
les
travaux d'assainissement n'ont même pas été exécutés.

Dans le transfert de bail, le transférant ne devient pas garant, aux
côtés du
bailleur, des défauts qui pourraient affecter la chose louée (sur les
effets
du transfert: cf. Lachat, Le bail à loyer, chapitre 23, n. 3.4, p.
389 s.).

Il ne ressort pas non plus de l'état de fait définitif que la
cédante, par
une clause contractuelle particulière, aurait fourni une quelconque
garantie
quant à l'état des locaux.

Le recourant fait certes valoir que la reprenante a été victime d'un
dol,
mais la volonté d'invalider le contrat sui generis n'a pas été
exprimée dans
le délai prescrit par l'art. 31 al. 1 CO, de sorte que le dol ne peut
plus
être invoqué. En demandant de revoir le prix, le cessionnaire de la
reprenante a au contraire manifesté la volonté de maintenir le
contrat (cf.
ATF 127 III 83 consid. 1b; arrêt 4C.242/1990 du 13 août 1991, consid.
1,
publié in SJ 1992 p. 13 s.).
2.4 Le recourant se prévaut également d'une violation des art. 97 et
41 CO.

Son argumentation sur ce point est peu claire, puisqu'on ignore s'il
envisage
une mauvaise exécution du contrat sui generis, une culpa in
contrahendo ou un
acte illicite résultant d'une tromperie. Quoi qu'il en soit, une
action
fondée sur l'art. 41 ou l'art. 97 CO suppose la survenance d'un
dommage.

Dire s'il y a eu dommage et quelle en est la quotité est une question
de fait
qui ne peut être revue dans un recours en réforme (ATF 128 III 22
consid. 2e,
180 consid. 2d p. 184; 127 III 73 consid. 3c, 543 consid. 2b); en
revanche,
le Tribunal fédéral peut examiner si la notion juridique de dommage a
été
méconnue, parce qu'il s'agit d'une question de droit fédéral (ATF 128
III 22
consid. 2e, 180 consid. 2d p. 184; 127 III 73 consid. 3c, 543 consid.
2b).

Le dommage juridiquement reconnu réside dans la diminution
involontaire de la
fortune nette; il correspond à la différence entre le montant actuel
du
patrimoine du lésé et le montant qu'aurait ce même patrimoine si
l'événement
dommageable ne s'était pas produit; le dommage peut se présenter sous
la
forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une
non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif (ATF
128 III 22
consid. 2e/aa, 180 consid. 2d p. 184; 127 III 543 consid. 2b).

A l'appui de sa demande en réparation, le recourant n'a invoqué, en
tant que
préjudice, que trois faits et l'examen doit être limité à ses
allégués.

Il a fait valoir qu'il avait obtenu un devis évaluant le coût
prévisible des
travaux d'assainissement demandés. Un devis ne fait cependant
qu'établir un
pronostic sur un coût futur éventuel. Il n'établit pas que la somme a
été
effectivement dépensée (diminution de l'actif) ou qu'une somme est
due à
l'entrepreneur (augmentation du passif). L'existence de ce devis est
donc
impropre à établir un dommage au sens juridique.

Le recourant a ensuite invoqué la perte de chiffre d'affaires en cas
d'interruption de l'exploitation pour exécuter les travaux, ainsi que
la
perte de clientèle qui en résulterait. Ces deux allégués concernent
un gain
manqué futur et éventuel; dès lors qu'il n'est pas établi que les
travaux ont
été exécutés, ces allégués sont impropres à démontrer l'existence d'un
dommage actuel (sous la forme d'une non-augmentation de l'actif).

Comme les faits régulièrement allégués ne sont pas propres à démontrer
l'existence d'un dommage au sens juridique, l'action fondée sur les
art. 41
et 97 CO a été rejetée sans enfreindre le droit fédéral.

La notion de dommage ne doit pas être confondue avec celle de
réduction du
prix en cas de garantie des défauts (cf. art. 205 al. 1 CO).

2.5 Savoir si la société propriétaire, en tant que bailleresse,
pouvait être
garante du défaut invoqué est une question qu'il n'y a pas lieu
d'examiner
ici, puisque cette société n'est pas partie à la procédure.

Invoquer l'art. 51 CO n'est d'aucun secours pour le recourant,
puisqu'il a
été retenu, sans violer le droit fédéral, que l'intimée n'était pas
débitrice
de la reprenante, ce qui exclut d'emblée l'idée d'une
coresponsabilité.

2.6 Le recourant invoque enfin une violation de l'art. 8 CC.

Pour toutes les prétentions fondées sur le droit fédéral, cette
disposition,
en l'absence de règles contraires, répartit le fardeau de la preuve et
détermine, sur cette base, laquelle des parties doit assumer les
conséquences
de l'échec de la preuve (ATF 127 III 519 consid. 2a). En l'espèce, le
recourant ne prétend pas que la cour cantonale aurait éprouvé un
doute qui
aurait été interprété en faveur de la partie qui avait le fardeau de
la
preuve; il n'y a donc pas trace d'un renversement de ce fardeau en
violation
de l'art. 8 CC.

Il a été également déduit de l'art. 8 CC un droit à la preuve et à la
contre-preuve (ATF 126 III 315 consid. 4a), à la condition qu'il
s'agisse
d'établir un fait pertinent (ATF 126 III 315 consid. 4a; 123 III 35
consid.
2b; 122 III 219 consid. 3c), qui n'est pas déjà prouvé (ATF 127 III
520
consid. 2a; 126 III 315 consid. 4a), par une mesure probatoire
adéquate (ATF
90 II 219 consid. 4b), laquelle a été régulièrement offerte selon les
règles
de la loi de procédure applicable (ATF 126 III 315 consid. 4a; 122
III 219
consid. 3c). Il n'y a pas violation de l'art. 8 CC si une mesure
probatoire
est refusée à la suite d'une appréciation anticipée des preuves (ATF
127 III
520 consid. 2a; 126 III 315 consid. 4a; 122 III 219 consid. 3c).

Comme on vient de le voir, le recourant a allégué, pour démontrer son
dommage, des faits non contestés qui étaient impropres à l'établir.
La cour
cantonale n'a pas violé l'art. 8 CC en n'administrant aucune preuve
sur des
faits sans pertinence. Il faut d'ailleurs observer que le recourant
n'a pas
régulièrement offert en preuve que les actifs qui lui ont été
transférés
auraient subi une moins-value.

Le moyen est dénué de tout fondement.

3.
Il suit de là que le recours doit être rejeté, l'arrêt attaqué étant
confirmé. Vu l'issue du litige, les frais et dépens seront mis à la
charge du
recourant qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté et l'arrêt attaqué est confirmé.

2.
Un émolument judiciaire de 6'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 7'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 10 octobre 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.197/2002
Date de la décision : 10/10/2002
1re cour civile

Analyses

Contrat de remise de commerce. Lorsque la remise de commerce porte sur diverses prestations (mobilier, agencement, matériel, installations, droit au bail, clientèle, enseigne), il s'agit d'un contrat sui generis, qui ne saurait être soumis, sans autre examen, aux dispositions de la vente mobilière (consid. 2.1). Comme la vente tend au transfert définitif et complet d'un bien, la présence d'amiante dans les plafonds de l'établissement public remis ne constitue pas pour le reprenant un défaut de la chose vendue au sens de l'art. 197 CO, si l'usage des locaux devait faire l'objet d'un transfert de bail et si l'exploitation du commerce n'en a pas souffert (consid. 2.2 et 2.3). La production d'un devis estimant le coût prévisible des travaux d'assainissement est impropre à démontrer l'existence d'un dommage actuel (consid. 2.4).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-10-10;4c.197.2002 ?
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