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01/10/2002 | SUISSE | N°2A.537/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 01 octobre 2002, 2A.537/2001


{T 0/2}
2A.537/2001/RrF

Arrêt du 1er octobre 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler, Yersin,
greffier Dubey.

H. ________, recourant,

contre

Administration fédérale des contributions, Division principale de la
taxe sur
la valeur ajoutée (TVA), Schwarztorstrasse 50, 3003 Berne,
Commission fédérale de recours en matière de contributions, avenue
Tissot 8,
1006 Lausanne.

taxe sur la valeur ajoutée (OTVA); exploitation de jeux et

d'automates;
contre-prestation; déduction de l'impôt préalable

recours de droit administratif contre la décision de ...

{T 0/2}
2A.537/2001/RrF

Arrêt du 1er octobre 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler, Yersin,
greffier Dubey.

H. ________, recourant,

contre

Administration fédérale des contributions, Division principale de la
taxe sur
la valeur ajoutée (TVA), Schwarztorstrasse 50, 3003 Berne,
Commission fédérale de recours en matière de contributions, avenue
Tissot 8,
1006 Lausanne.

taxe sur la valeur ajoutée (OTVA); exploitation de jeux et
d'automates;
contre-prestation; déduction de l'impôt préalable

recours de droit administratif contre la décision de la Commission
fédérale
de recours en matière de contributions du 31 octobre 2001.

Faits:

A.
H. ________ et W.________, associés solidairement responsables de la
société
en nom collectif T.________, active dans l'exploitation de jeux
automatiques
et la gérance de cafés, ont été immatriculés au registre de
l'Administration
fédérale des contributions du 1er janvier 1995 au 31 mars 1997 en
qualité
d'assujettis au sens de l'art. 17 de l'ordonnance du 22 juin 1994
régissant
la taxe sur la valeur ajoutée (OTVA; RO 1994, 1464). Les jeux
d'adresse ainsi
que les automates, tels que des distributeurs de cigarettes, étaient
installés dans des établissements publics. Les tenanciers de ces
établissements recevaient, à titre de commissions, une partie des
recettes
réalisées grâce aux jeux et automates en échange de la mise à
disposition
d'un emplacement pour les machines.

Constatant, lors d'un contrôle portant sur les années 1995 et 1996,
que les
intéressés n'avaient déclaré et comptabilisé que les recettes nettes
provenant des jeux d'adresse et des automates, c'est-à-dire après
déduction
des commissions versées aux tenanciers des établissements accueillant
ces
machines, l'Administration fédérale a établi un décompte
complémentaire
s'élevant à 130'289 fr. plus intérêts moratoires dès le 15 avril 1996,
résultant d'une reprise des commissions soustraites estimées à 35%,
d'une
reprise pour utilisation privée du véhicule de la société et de la
rectification de certains montants d'impôt préalable déduits. Elle
invitait
néanmoins les intéressés à fournir des attestations détaillées
certifiant que
les commissions versées avaient été imposées comme chiffre d'affaires
par les
tenanciers des établissements concernés. Par décision formelle du 5
mai 1999
adressée à H.________, à titre d'associé solidairement responsable,
l'Administration fédérale a confirmé le montant de la reprise fiscale.

B.
La réclamation de H.________ - limitée à la contestation du montant
des
commissions reprises et à la question de la déduction de l'impôt
préalable
sur ces mêmes commissions - ayant été rejetée par l'Administration
fédérale
parce que les pièces justificatives présentées ne remplissaient pas
les
exigences légales de l'art. 29 al. 1 et 2 OTVA, celui-ci a interjeté
recours
auprès de la Commission fédérale de recours en matière de
contributions
(ci-après: la Commission de recours) pour violation de son droit
d'être
entendu.

Par décision du 31 octobre 2001, la Commission de recours a rejeté le
recours
de H.________. L'exploitation de jeux d'adresse et d'automates
constituait
une opération imposable. L'ensemble des contre-prestations se
trouvant dans
un rapport de causalité avec cette activité devaient être soumises à
l'imposition. Il y avait donc lieu de reprendre les commissions non
déclarées. L'estimation des commissions non déclarées tenait compte
des
particularités de l'entreprise. La décision de l'Administration
fédérale
était, à cet égard, suffisamment motivée, dès lors que le rapport
annexé au
décompte complémentaire exposait comment avait été fixé le montant des
commissions non déclarées. Enfin, l'impôt préalable sur les
commissions
versées aux fournisseurs d'emplacement pour les machines pouvait en
principe
être déduit, pour autant que soient présentées des factures
comportant les
indications figurant à l'art. 28 al. 1 OTVA, ce qui n'était
clairement pas le
cas en l'espèce. L'Administration fédérale avait bien examiné les
pièces
justificatives, contrairement aux affirmations de l'intéressé, mais,
après
examen, les avait jugées insuffisantes pour justifier la mise en
compte de
l'impôt préalable relatif aux commissions versées pour la mise à
disposition
par les établissements publics concernés d'emplacements pour les
machines.

C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, H.________
demande au
Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler la
décision du 31
octobre 2001. A l'appui de son recours il fait valoir que la décision
du 31
octobre 2001 est inopportune. La Commission de recours serait en
outre tombée
dans l'arbitraire et aurait fait preuve de formalisme excessif.
Enfin, elle
aurait violé son droit d'être entendu.

La Commission de recours renonce à déposer des observations.
L'Administration
fédérale conclut au rejet du recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Dirigé contre une décision au sens de l'art. 5 PA, prise par une
commission fédérale de recours (art. 98 lettre e OJ) et fondée sur le
droit
public fédéral, le présent recours, qui ne tombe sous aucune des
exceptions
mentionnées aux art. 99 à 102 OJ, est en principe recevable en vertu
des art.
97 ss OJ ainsi que de la règle particulière des art. 54 al. 1 OTVA et
66 al.
1 de la loi fédérale du 2 septembre 1999 régissant la taxe sur la
valeur
ajoutée entrée en vigueur le 1er janvier 2001 (loi sur la TVA, LTVA;
RS
641.20).

1.2 Conformément à l'art. 104 lettre a OJ, le recours de droit
administratif
peut être formé pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et
l'abus
du pouvoir d'appréciation. Le Tribunal fédéral vérifie d'office
l'application
du droit fédéral qui englobe notamment les droits constitutionnels du
citoyen
(cf. ATF 125 II 326 consid. 3 p. 330). Il n'est pas lié par les motifs
invoqués par les parties (cf. art. 114 al. 1 in fine OJ; ATF 121 II
473
consid. 1b p. 477 et la jurisprudence citée). En revanche, lorsque le
recours
est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autorité
judiciaire,
il est lié par les faits qui y sont constatés, sauf s'ils sont
manifestement
inexacts ou incomplets, ou s'ils ont été établis au mépris de règles
essentielles de procédure (cf. art. 104 lettre b et 105 al. 2 OJ). De
surcroît, il ne peut pas revoir l'opportunité de la décision attaquée
(cf.
art. 104 lettre c OJ; ATF 125 II 326 consid. 3 p. 330). Par ailleurs,
il
examine librement l'interprétation des dispositions de l'ordonnance
régissant
la TVA par les autorités inférieures et la conformité de cette
interprétation
aux normes constitutionnelles (cf. ATF 125 II 326 consid. 3b p.
331/332).

2.
2.1En vertu de l'art. 4 lettres a et b OTVA, sont notamment soumises à
l'impôt, pour autant qu'elles ne soient pas exclues du champ de
l'impôt (art.
14) les livraisons de biens faites à titre onéreux sur territoire
suisse.
L'impôt se calcule sur la contre-prestation (art. 26 al. 1 OTVA). Il
n'est
pas contesté que l'art. 14 ch. 19 OTVA, qui exclut du champ de
l'impôt les
opérations dans le domaine des jeux de hasard avec mise d'argent,
n'est pas
applicable en l'espèce.

En vertu de l'art. 48 OTVA, si les documents comptables font défaut
ou sont
incomplets, ou si les résultats présentés par l'assujetti ne
correspondent
manifestement pas à la réalité, l'Administration fédérale des
contributions
procède à une estimation dans les limites de son pouvoir
d'appréciation.

2.2 Le recourant admet à juste titre que l'exploitation de jeux
d'adresse et
d'automates constitue une opération imposable et que l'impôt se
calcule sur
les recettes brutes provenant de cette exploitation, y compris les
commissions prélevées sur ces recettes brutes et reversées aux
tenanciers des
établissement en contre-partie de la mise à disposition d'un
emplacement pour
les machines. Il ne conteste pas non plus que le montant moyen des
commissions reprises soit estimé à 35% des recettes brutes, ce que la
Commission des recours a confirmé à bon droit au regard de l'art. 48
OTVA,
dès lors que le pourcentage des commissions reversées oscillait entre
25 et
50%. Il reproche en revanche à la Commission de recours d'être tombée
dans
l'arbitraire et de faire preuve de formalisme excessif en considérant
que les
pièces produites ne remplissaient pas les critères des art. 28 et 29
OTVA
autorisant la déduction de l'impôt préalable sur le montant des
commissions
reprises. Ces griefs se confondent avec celui de la violation des
art. 28 et
29 OTVA. Le grief d'inopportunité exposé par le recourant à
l'encontre de la
décision litigieuse est irrecevable (cf. art. 104 lettre c OJ).

3.
3.1Si l'assujetti utilise des biens ou des prestations de services
pour des
livraisons ou des prestations de services imposables, il peut
déduire, dans
son décompte, les montants d'impôt préalable que d'autres assujettis
lui ont
facturés, conformément à l'art. 28 OTVA, pour des livraisons ou des
prestations de services (art. 29 al. 1 lettre a OTVA).

En vertu de l'art. 28 al. 1 OTVA, pour sa livraison ou sa prestation
de
services, l'assujetti doit, sur demande du destinataire assujetti à
l'impôt,
dresser une facture portant son nom, son adresse, ainsi que son numéro
d'immatriculation au registre des contribuables (lettre a), le nom et
l'adresse du destinataire de la livraison ou de la prestation de
services
(lettre b), la date ou la période de la livraison ou de la prestation
de
services (lettre c), le genre, l'objet et l'importance de la
livraison ou de
la prestation de services (lettre d), la contre-prestation pour la
livraison
ou la prestation de services (lettre e), le montant de l'impôt dû sur
la
contre-prestation (lettre f).

3.2 En l'espèce, l'Administration fédérale a procédé à une révision
des
comptes de la société en nom collectif pour les années 1995 et 1996
qui a
permis de constater que les commissions versées aux tenanciers des
établissements pour la mise à disposition d'emplacement pour les
machines ne
faisaient pas l'objet de factures. Les listes remises à
l'Administration
fédérale par le recourant comportaient uniquement le nom de
l'établissement
public, son numéro TVA, la date du relevé des recettes, le montant des
recettes brutes, celui de la commission et de l'encaissement net. En
revanche, le genre, l'objet et l'importance de la prestation ainsi
que le
montant de l'impôt faisaient défaut. Ces indications étant
indispensables
pour l'examen du droit à la déduction de l'impôt préalable, c'est à
bon droit
que la Commission de recours a considéré que ces listes ne
constituaient pas
des factures remplissant les conditions formelles de l'art. 28 OTVA.
Quant
aux attestations produites ultérieurement par le recourant sur les
formules
ad hoc de l'Administration fédérale, elles n'étaient pas entièrement
complétées ni signées par les fournisseurs, de sorte qu'en l'espèce
elles ne
pouvaient suppléer l'absence de factures au sens de l'art. 28 OTVA.
Contrairement à ce que soutient le recourant, le dossier ne contient
aucune
pièce établissant clairement que les tenanciers des établissements
concernés
ont facturé à la société en nom collectif, dont le recourant était
solidairement responsable, la TVA sur les commissions reçues et l'ont
versée
à l'Administration fédérale des contributions. Le recourant ne saurait
prétendre à la déduction d'un impôt dont la perception n'est pas
prouvée sous
une forme ou sous une autre.

3.3 Le recourant voit dans cette constatation une violation de son
droit
d'être entendu. Ce grief doit être rejeté. En effet, le recourant
perd de
vue que le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par l'art. 29
al. 2
Cst., comprend le droit pour l'intéressé de produire des preuves
pertinentes,
d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes,
de
participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le
moins de
s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur
la
décision à rendre (ATF 127 III 576 consid. 2c p. 578 s.; 124 II 132
consid.
2b p. 137 et la jurisprudence citée). Le droit d'être entendu implique
également pour l'autorité l'obligation de motiver sa décision (ATF
126 I 97
consid. 2b p. 102; 122 IV 8 consid. 2c p. 14/ 15). En revanche, le
droit
d'être entendu ne saurait contraindre les autorités administratives
et de
juridiction administrative à adhérer aux conclusions et motifs d'une
partie
au mépris du droit applicable. En l'espèce, tant l'Administration
fédérale
que la Commission de recours sont entrées en matière sur les pièces
produites
et les ont examinées au regard des exigences des art. 28 et 29 OTVA.
Le fait
que ces pièces ont été jugées insuffisantes pour autoriser la
déduction de
l'impôt préalable relève de l'application - au demeurant correcte -
du droit
et ne viole pas le droit d'être entendu du recourant.

Enfin, c'est en vain que le recourant allègue que l'impôt serait payé
deux
fois si la décision litigieuse n'était pas annulée, puisqu'il a
précisément
échoué dans la preuve que l'impôt avait préalablement été payé.

3.4 Par conséquent, en considérant que la déduction de l'impôt
préalable sur
les commissions versées aux tenanciers ne pouvait être accordée en
l'absence

de pièces justificatives suffisantes, la Commission de recours a
correctement
interprété et appliqué les art. 28 et 29 OTVA et sa décision échappe
aussi
aux griefs d'arbitraire, de formalisme excessif et de violation du
droit
d'être entendu.

4.
Les considérant qui précèdent conduisent au rejet du recours.

Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art.
156 al.
1, 153 et 153a OJ) et n'a pas droit à des dépens.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant, à
l'Administration
fédérale des contributions, Division principale de la taxe sur la
valeur
ajoutée (TVA) et à la Commission fédérale de recours en matière de
contributions.

Lausanne, le 1er octobre 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.537/2001
Date de la décision : 01/10/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-10-01;2a.537.2001 ?
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