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17/09/2002 | SUISSE | N°4P.133/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 septembre 2002, 4P.133/2002


{T 0/2}
4P.133/2002 /ech

Arrêt du 17 septembre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et Favre,
Greffière Michellod

A.________,
recourant, représenté par Me Jean-Marc Froidevaux, avocat,
rue de Rive 8, case postale 3195, 1211 Genève 3,

contre

X.________ Sàrl,
intimée, représentée par Me François Roullet, avocat,
rue Ferdinand-Hodler 11, 1207 Genève,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève

3.

art. 9 et 29 al. 2 Cst. (procédure civile; appréciation des preuves;
droit
d'être entendu)

(recours de dro...

{T 0/2}
4P.133/2002 /ech

Arrêt du 17 septembre 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et Favre,
Greffière Michellod

A.________,
recourant, représenté par Me Jean-Marc Froidevaux, avocat,
rue de Rive 8, case postale 3195, 1211 Genève 3,

contre

X.________ Sàrl,
intimée, représentée par Me François Roullet, avocat,
rue Ferdinand-Hodler 11, 1207 Genève,
Chambre civile de la Cour de justice du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

art. 9 et 29 al. 2 Cst. (procédure civile; appréciation des preuves;
droit
d'être entendu)

(recours de droit public contre l'arrêt de la Chambre civile de la
Cour de
justice du canton de Genève du 19 avril 2002)

Faits:

A.
Par jugement du 11 octobre 2001, le Tribunal de première instance du
canton
de Genève a condamné le recourant à verser à l'intimée la somme de
113'074,60
FF avec intérêts à 5% l'an dès le 3 août 1999. Il a notamment retenu
les
faits suivants:

L'intimée est une société française active dans le domaine de la
fabrication
d'articles de confection. Le recourant est styliste et exploite en
raison
individuelle une entreprise à Genève. Fin 1997, début 1998, l'intimée
a, sur
commande du recourant et d'après ses instructions, élaboré le
prototype, puis
réalisé l'exécution d'une collection de vêtements de sport pour la
saison
1998/1999.

Pour la livraison de ces articles, l'intimée a adressé au recourant
deux
factures de 162'158,90 FF et de 20'915,70 FF, les 16 et 19 mars 1998.
Le 16
mars 1998, elle a également adressé une facture de 10'000 FF à une
société
espagnole sur instructions de Mme B.________, qui agissait pour le
compte du
recourant. Le 4 juin 1998, ce dernier a versé à l'intimée un acompte
de
80'000 FF sur ces factures. Il n'a par la suite plus rien payé, malgré
plusieurs rappels. Le 19 octobre 1999, il a répondu à l'intimée que
ces
factures ne le concernaient pas.

Le 26 novembre 1999, l'intimée a assigné le recourant en paiement de
113'074,60 FF avec intérêts à 5% l'an dès le 20 avril 1998. Ce montant
représentait le solde des factures après déduction de l'acompte de
80'000 FF.
Le recourant s'est opposé à ces prétentions en faisant valoir que les
parties
avaient constitué une société simple dans le but de commercialiser une
collection de vêtements de sport, lui-même s'occupant du stylisme et
apportant sa connaissance des marchés, l'intimée s'engageant à
produire
l'ensemble des collections et à les remettre à des importateurs
étrangers
contre factures payables par eux.

Le Tribunal a estimé que les parties avaient conclu un contrat
d'entreprise,
que la marchandise correspondant aux factures litigieuses avait été
livrée
conformément aux instructions du recourant et qu'elle n'était pas
affectée de
défauts; les montants réclamés par l'intimée étaient donc dus. Quant à
l'existence d'une société simple, le Tribunal a rejeté cette
argumentation,
considérant qu'aucun élément n'étayait les dires du recourant.

Par arrêt du 19 avril 2002, la Cour de justice du canton de Genève a
confirmé
ce jugement.

B.
Le recourant interjette un recours de droit public au Tribunal
fédéral.
Invoquant la violation des art. 9 et 29 al. 2 Cst., il conclut à
l'annulation
de l'arrêt attaqué.

Invitée à déposer une réponse, l'intimée conclut au rejet du recours
et à la
confirmation de la décision cantonale.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fédéral n'examine que
les
griefs d'ordre constitutionnel invoqués et suffisamment motivés par
l'acte de
recours (art. 90 al. 1 let. b OJ; ATF 127 I 38 consid. 3c; 127 III 279
consid. 1c; 126 III 524 consid. 1c, 534 consid. 1b).

2.
Avant d'exposer ses griefs, le recourant présente des "observations
sur les
faits établis par la Cour". Sans invoquer la violation d'un droit
constitutionnel particulier, il allègue que la cour cantonale a
commis une
"erreur manifeste de plume" en retenant qu'il avait lui-même versé la
somme
de 80'000 FF à l'intimée le 4 juin 1998, car les pièces démontraient
que
cette somme avait été versée par Mme B.________ le 2 juin 1998.

Tant le Tribunal de première instance que la cour cantonale (déjà
saisie de
la même critique) ont retenu, en fait, que le recourant avait versé
une somme
de 80'000 FF à l'intimée le 4 juin 1998. La thèse de l'erreur de
plume n'est
pas convaincante, dans la mesure où la cour cantonale a constaté que
Mme
B.________ agissait pour le compte du recourant dans ses rapports avec
l'intimée. On ne peut dès lors exclure que la constatation critiquée
repose
sur une appréciation des preuves. Or le recourant ne soutient pas
que cette
appréciation serait arbitraire.

3.
Le recourant estime que la cour cantonale a violé l'art. 29 al. 2
Cst. en
refusant d'ouvrir des probatoires. Il soutient qu'en présence d'une
divergence sur l'existence d'une société simple, cette autorité devait
ordonner les probatoires utiles pour établir la réelle intention des
parties.
Selon lui, la cour cantonale a refusé d'accéder à sa requête au motif
qu'il
n'a pas plaidé avec suffisamment d'insistance la violation de son
droit à la
preuve et qu'il n'a pas donné le nom des témoins qu'il souhaitait
faire
entendre. Il soutient que la nécessité d'entendre Mme B.________ était
pourtant évidente.

3.1
La portée du droit d'être entendu et les modalités de sa mise en
oeuvre sont
d'abord déterminées par le droit cantonal, dont le Tribunal fédéral
ne revoit
l'application que sous l'angle de l'arbitraire. Lorsque la protection
accordée par le droit cantonal est inférieure ou équivalente aux
garanties
minimales déduites de l'art. 29 al. 2 Cst., dont le Tribunal fédéral
vérifie
librement le respect, le justiciable peut invoquer celles-ci
directement (ATF
126 I 15 consid. 2a). En l'espèce, le recourant ne prétend pas que les
dispositions cantonales lui accorderaient plus de droits que l'art.
29 al. 2
Cst., et se plaint principalement de la violation de cette
disposition.

Selon la jurisprudence, le droit d'être entendu comprend notamment le
droit
pour l'intéressé d'obtenir l'administration des preuves pertinentes et
valablement offertes ainsi que de participer à l'administration des
preuves
essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat
lorsque cela
est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 124 I 241
consid. 2;
122 II 464 consid. 4a p. 469 et la jurisprudence citée). Il est
possible,
sans violer le droit d'être entendu, de refuser une mesure probatoire
sollicitée lorsqu'elle est inapte à apporter la preuve, lorsque le
fait à
prouver est sans pertinence ou déjà établi ou encore lorsque le juge,
à la
suite d'une appréciation anticipée des preuves non arbitraire,
parvient à la
conclusion que l'administration de la preuve sollicitée ne pourrait
l'amener
à modifier son opinion (ATF 124 I 208 consid. 4a p. 211, 274 consid.
5b p.
285; 122 II 464 consid. 4a p. 469).

3.2
En l'espèce, il ne ressort ni de l'arrêt ni du dossier cantonal que le
recourant aurait sollicité l'audition de témoins en première
instance. La
cour cantonale relève d'ailleurs qu'il ne se plaint pas d'une
violation du
droit à la preuve. Par ailleurs, le recourant n'explique pas, dans son
mémoire d'appel, ce qui justifierait l'ouverture de probatoires et
l'audition
de Mme B.________; il se contente de redonner sa version des faits et
de
demander subsidiairement à la cour de l'acheminer à prouver ses
allégués.
Contrairement à ce qu'affirme le recourant, la cour cantonale ne lui
a pas
refusé des probatoires au motif qu'il n'aurait pas plaidé la
violation de
l'art. 29 al. 2 Cst. ou qu'il n'aurait pas énuméré les témoins à
entendre. Le
refus de la cour cantonale repose en réalité sur une appréciation
anticipée
des preuves. Même si elle ne le dit pas expressément, il ressort de
son
raisonnement qu'elle ne voit pas quelles personnes pourraient être
susceptibles de l'éclairer sur la réelle intention des parties. Cette
appréciation échappe au grief d'arbitraire. En effet, le recourant
admettait
lui-même, dans ses écritures, que la volonté des parties devait
essentiellement être déduite des échanges de fax et/ou de
correspondance
produits. Il n'avait en outre pas sollicité l'audition de Mme
B.________ en
première instance, ce qui était difficilement compréhensible si le
témoignage
de cette personne était susceptible de prouver "l'animus societatis"
des
parties. Enfin, Mme B.________ agissait pour le compte du recourant
dans ses
rapports avec l'intimée, de sorte qu'il n'était pas arbitraire de
considérer
que sa déposition n'aurait pas été plus crédible que les allégués du
recourant. La cour cantonale n'a par conséquent pas violé le droit
d'être
entendu du recourant en refusant d'ouvrir des probatoires.

4.
Le recourant affirme que l'arrêt attaqué viole l'art. 9 Cst. car sa
motivation est contradictoire. Il estime choquant que la cour
cantonale lui
reproche de ne pas avoir apporté la preuve de l'existence d'une
société
simple alors qu'elle ne lui a pas donné la possibilité de prouver
cette
allégation en ouvrant des probatoires.

Comme cela a été expliqué ci-dessus, la cour cantonale était
parfaitement en
droit de renoncer à l'ouverture de probatoires et de statuer sur la
base des
déclarations des parties et des pièces versées au dossier. Appréciant
les
preuves (d'une manière non arbitraire au demeurant), elle est
parvenue à la
conviction que les parties n'avaient pas l'intention d'unir leurs
efforts ou
leurs ressources en vue d'atteindre un but commun. Il n'y a dès lors
rien de
choquant à ce qu'elle en conclue que le recourant n'a pas apporté la
preuve,
qui lui incombait, des faits permettant de constater l'existence d'une
société simple entre les parties.

5.
Le recours sera rejeté et il appartiendra au recourant, qui succombe,
d'assumer les frais judiciaires et les dépens de la procédure
fédérale (art.
156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 2'000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux parties et à la Chambre
civile
de la Cour de justice du canton de Genève.

Lausanne, le 17 septembre 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.133/2002
Date de la décision : 17/09/2002
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-09-17;4p.133.2002 ?
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