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03/09/2002 | SUISSE | N°I.70/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 septembre 2002, I.70/02


{T 7}
I 70/02

Arrêt du 3 septembre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Kernen et Boinay, suppléant.
Greffier : M.
Wagner

B.________, recourant, représenté par Me Mauro Poggia, avocat, rue de
Beaumont 11, 1206 Genève,

contre

Office cantonal AI Genève, boulevard du Pont-d'Arve 28, 1205 Genève,
intimé

Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI, Genève

(Jugement du 29 octobre 2001)

Faits :

A.
B. ________, a déposé une demande de

prestations pour adultes à
l'assurance-invalidité, le 14 juillet 1997, en invoquant une
incapacité
totale de travail dès le 4 oc...

{T 7}
I 70/02

Arrêt du 3 septembre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Kernen et Boinay, suppléant.
Greffier : M.
Wagner

B.________, recourant, représenté par Me Mauro Poggia, avocat, rue de
Beaumont 11, 1206 Genève,

contre

Office cantonal AI Genève, boulevard du Pont-d'Arve 28, 1205 Genève,
intimé

Commission cantonale de recours en matière d'AVS/AI, Genève

(Jugement du 29 octobre 2001)

Faits :

A.
B. ________, a déposé une demande de prestations pour adultes à
l'assurance-invalidité, le 14 juillet 1997, en invoquant une
incapacité
totale de travail dès le 4 octobre 1988, suite à divers problèmes de
santé.

Par décision du 3 août 1998, l'Office cantonal de
l'assurance-invalidité
(ci-après: OCAI) de Genève a alloué à B.________ une rente ordinaire
simple à
100 %, ainsi que des rentes complémentaires pour son conjoint et ses
trois
enfants, dès le 1er juillet 1996.

B.
Par lettre du 28 août 1998, B.________ a déféré cette décision devant
la
Commission cantonale genevoise de recours en matière d'AVS/AI, en
concluant
implicitement à ce que la rente lui soit allouée avec effet
rétroactif. Il a
également demandé des éclaircissements sur le montant de la rente
elle-même.
B.________ a allégué que la demande tardive à l'assurance-invalidité
relevait
du contexte médical.

Par jugement du 29 octobre 2001, la Commission cantonale de recours en
matière d'AVS/AI a rejeté le recours.

C.
B.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement et
conclut à ce que son droit à une rente entière d'invalidité lui soit
reconnu
dès le mois d'octobre 1989, subsidiairement dès le mois de juillet
1992, le
tout sous suite des frais et dépens.

L'OCAI conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des
assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.
1.1 L'art. 48 al. 2 LAI dispose que, si l'assuré présente sa demande
plus de
douze mois après la naissance du droit, les prestations ne sont
allouées que
pour les douze mois précédant le dépôt de la demande. Elles sont
allouées
pour une période antérieure si l'assuré ne pouvait pas connaître les
faits
ouvrant droit à prestations et qu'il présente sa demande dans les
douze mois
dès le moment où il en a eu connaissance.

1.2 Selon la jurisprudence, l'art. 48 al. 2 seconde phrase LAI
s'applique
lorsque l'assuré ne savait pas et ne pouvait pas savoir qu'il était
atteint,
en raison d'une atteinte à la santé physique ou mentale, d'une
diminution de
la capacité de gain dans une mesure propre à lui ouvrir le droit à des
prestations. Cette disposition ne concerne en revanche pas les cas où
l'assuré connaissait ces faits mais ignorait qu'ils donnent droit à
une rente
de l'assurance-invalidité (ATF 102 V 113 consid. 1a). Autrement dit,
«les
faits ouvrant droit à des prestations (que) l'assuré ne pouvait pas
connaître», au sens de l'art. 48 al. 2 seconde phrase LAI, sont ceux
qui
n'étaient objectivement pas reconnaissables, mais non ceux dont
l'assuré ne
pouvait subjectivement pas saisir la portée (ATF 100 V 119 ss.
consid. 2c;
RCC 1984 p. 420 ss. consid. 1; Valterio, Droit et pratique de
l'assurance-invalidité [ les prestations], p. 305 ss.).

Toutefois, une restitution de délai doit également être accordée si
l'assuré
a été incapable d'agir pour une cause de force majeure - par exemple
en
raison d'une maladie psychique entraînant une incapacité de
discernement (ATF
108 V 228 ss. consid. 4; arrêt non publié V. du 16 mars 2000, I
149/99) - et
qu'il présente une demande de prestations dans un délai raisonnable
après la
cessation de l'empêchement. Mais encore faut-il, ici aussi, qu'il
s'agisse
d'une impossibilité objective, s'étendant sur la période au cours de
laquelle
l'assuré se serait vraisemblablement annoncé à l'assurance-invalidité
s'il
l'avait pu, et non d'une difficulté ou d'un motif subjectif, comme
celui
d'ignorer son droit ou de mal concevoir ses intérêts (ATF 102 V 115
consid.
2a ; RCC 1984 p. 420 ss. consid. 1 ; Valterio, eod. loc. ).

2.
2.1Est seule litigieuse la question de savoir à partir de quelle date
le
recourant peut prétendre toucher une rente de l'assurance-invalidité.
En
effet, il est incontesté que le recourant est en incapacité de
travail dès le
4 octobre 1988 et qu'il n'a jamais repris d'activité professionnelle
depuis
lors. L'intimée a donc admis, à juste titre, que le droit à la rente
a pris
naissance le 4 octobre 1989, en application de l'art. 29 al. 1 let. b
LAI.

Le recourant n'ayant présenté une demande de prestations que le 14
juillet
1997, il y a lieu d'examiner l'éventuelle rétroactivité de la demande.
L'intimée a fait application de l'art. 48 al. 2 première phrase LAI
et a
alloué une rente dès le 1er juillet 1996. Le recourant conteste cette
manière
de faire et réclame un rétroactif complet à partir du 1er octobre
1989, sur
la base de l'art. 48 al. 2 seconde phrase LAI.

2.2 En l'espèce, le recourant souffre de diverses atteintes à sa
santé, tant
structurelles que fonctionnelles, datant d'avant octobre 1988, si
l'on en
croit l'exposé qu'il a fait de son cas les 23 mai et 12 juillet 1997.
Il a
été opéré d'un prolapsus anal en 1991. A la suite de cette
intervention
chirurgicale, il a souffert d'incontinence des selles ce qui l'a
handicapé
dans la vie de tous les jours et serait catastrophique s'il reprenait
son
travail (rapport du docteur A.________ à la Vaudoise Assurance du 20
décembre
1992 ). La question d'une demande de rente à l'assurance-invalidité
avait
déjà été envisagée en 1993 puisque, dans une lettre du 22 août 1993,
le
docteur A.________ écrit que « la demande d'AI n'a pas eu lieu,
celle-ci ne
pouvant être faite que par le malade, une assurance ou une instance
sociale
». Ces éléments démontrent clairement que le recourant, qui est en
arrêt de
travail à 100% dès le 4 octobre 1988, savait qu'il souffrait d'une
atteinte à
sa santé - physique, éventuellement mentale - qui lui causait une
incapacité
de gain dans une mesure propre à lui ouvrir le droit aux prestations
et ce, à
tout le moins, dès la période postopératoire du prolapsus anal en
1991. Ces
faits étaient objectivement reconnaissables pour le recourant.
Celui-ci n'a
pas manqué de toucher, après s'être annoncé, diverses prestations
liées à
l'incapacité de travail (Vaudoise Assurances, etc.) Objectivement, il
connaissait les faits. Dès lors, il ne saurait se prévaloir de l'art.
48 al.
2 seconde phrase LAI.

2.3 Le recourant justifiant sa demande rétroactive par le caractère
exceptionnellement complexe de sa pathologie, il reste à examiner si
l'assuré
a été incapable d'agir pour cause de force majeure.

Le docteur C.________, spécialiste FMH en psychiatrie-psychothérapie,
a
établi deux certificats médicaux les 20 septembre 2000 et 26
septembre 2001,
attestant que l'apparition progressive et insidieuse des troubles
somatiques,
accompagnée d'un espoir de restitutio ad integrum, a gravement
diminué chez
le recourant la capacité à s'adapter psychologiquement à ses
handicaps. Aucun
des trois certificats du docteur C.________ (15 juillet 1997, 20
septembre
2000 et 26 septembre 2001) ne fait état de troubles psychiques qui
auraient
privé le recourant de la faculté d'agir raisonnablement. Rien au
dossier ne
permet de mettre en doute sa capacité de discernement, qui ne
subissait ainsi
aucune impossibilité objective d'agir. Son attitude d'attente résulte
plus,
comme il l'admet lui-même, du fait qu'il ne considérait pas son cas
comme
relevant de l'assurance-invalidité selon l'idée qu'il s'en faisait. Le
docteur C.________ a également relevé que la nature même des
symptômes, qui
se traduisent régulièrement par des situations socialement très
embarrassantes et revêtent par conséquent un caractère humiliant, a pu
inhiber la capacité à envisager une demande de rente. Ces motifs
présentent à
l'évidence un caractère subjectif prédominant qui exclut une
restitution de
délai.

3.
Il résulte de ce qui précède qu'une rente d'invalidité ne peut être
allouée
au recourant pour la période antérieure aux douze mois qui précèdent
le dépôt
de la demande de prestations. Le recours est ainsi mal fondé.

4.
La procédure porte sur l'octroi ou le refus de prestations
d'assurance, si
bien qu'elle est gratuite ( art. 134 OJ ). Par ailleurs, le
recourant, qui
succombe, ne peut prétendre une indemnité de dépens pour l'instance
fédérale
(art. 159 al. 1 en corrélation avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Commission
cantonale de
recours en matière d'assurance-vieillesse, survivants et invalidité
et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 3 septembre 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.70/02
Date de la décision : 03/09/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-09-03;i.70.02 ?
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