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29/07/2002 | SUISSE | N°6S.255/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 juillet 2002, 6S.255/2002


{T 0/2}
6S.255/2002 /rod

Arrêt du 29 juillet 2002
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schubarth, président,
Schneider et Kolly,
greffière Kistler.

X. ________

contre

Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte, route de St-Cergue
38,
1260 Nyon.

contravention à l'art. 23 al. 4 LSEE, état de nécessité (art. 34 CP)

pourvoi en nullité contre le jugement du 30 mai 2002 du Tribunal
d'arrondissement de la Côte

Faits:

A.
X. ________ est d

irecteur d'une importante entreprise maraîchère, qui
emploie, en période estivale, jusqu'à 60 personnes. Du 20 juin au 21
septembre 20...

{T 0/2}
6S.255/2002 /rod

Arrêt du 29 juillet 2002
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schubarth, président,
Schneider et Kolly,
greffière Kistler.

X. ________

contre

Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte, route de St-Cergue
38,
1260 Nyon.

contravention à l'art. 23 al. 4 LSEE, état de nécessité (art. 34 CP)

pourvoi en nullité contre le jugement du 30 mai 2002 du Tribunal
d'arrondissement de la Côte

Faits:

A.
X. ________ est directeur d'une importante entreprise maraîchère, qui
emploie, en période estivale, jusqu'à 60 personnes. Du 20 juin au 21
septembre 2001, il a employé deux ressortissants macédoniens sans
autorisation de travail valable. Il leur a versé un salaire usuel et
a pris
en charge les cotisations sociales, ce qu'on appelle communément un
engagement "au gris".

B.
Par prononcé préfectoral du 14 mars 2002, le Préfet du district de
Morges a
infligé à X.________ une amende de 300 francs pour contravention à
l'art. 23
al. 4 LSEE. Le 30 mai 2002, le Tribunal de police de l'arrondissement
de La
Côte a rejeté l'appel formé par X.________ et a confirmé le prononcé
préfectoral.

C.
X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral. Invoquant une
violation de l'art. 34 CP, il demande l'annulation du jugement du
Tribunal de
police de l'arrondissement de La Côte. Il sollicite en outre l'effet
suspensif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 Le jugement attaqué est une décision d'un Tribunal
d'arrondissement
vaudois, soit d'un tribunal inférieur, rendue sur appel. Selon l'art.
268 ch.
1 PPF, le pourvoi en nullité est recevable contre les jugements qui ne
peuvent pas donner lieu à un recours de droit cantonal pour violation
du
droit fédéral; font cependant exception les jugements des tribunaux
inférieurs statuant en instance cantonale unique.

En l'espèce, le jugement attaqué ne peut faire l'objet d'un recours
cantonal,
dès lors que la loi vaudoise sur les contraventions déclare
définitifs les
jugements rendus sur appel en matière de contravention de droit
fédéral ou de
délit (art. 80a LC/VD). Le Tribunal fédéral a par ailleurs précisé
que, saisi
d'un appel contre un prononcé préfectoral, le Tribunal
d'arrondissement
vaudois ne statuait pas en instance cantonale unique, mais bien en
seconde
instance cantonale (ATF 127 IV 220 consid.1b p. 223 s., voir aussi
ATF 126 IV
95 consid. 1a p. 97). Le pourvoi en nullité est donc recevable sous
l'angle
de l'art. 268 ch. 1 PPF.

1.2 Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle
l'application
du droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base de l'état de fait
définitivement
arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 277bis et 273 al. 1 let. b
PPF). Le
raisonnement juridique doit être mené sur la base des faits retenus
dans la
décision attaquée, dont le recourant est irrecevable à s'écarter.

Le Tribunal fédéral n'est pas lié par les motifs invoqués, mais il ne
peut
aller au-delà des conclusions du recourant (art. 277bis PPF). Les
conclusions
devant être interprétées à la lumière de leur motivation, le
recourant a
circonscrit les points litigieux (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66).

2.
Le recourant se prévaut de l'état de nécessité (art. 34 CP).

2.1 Selon l'art. 34 ch. 1 al. 1 CP, "lorsqu'un acte aura été commis
pour
préserver d'un danger imminent et impossible à détourner autrement un
bien
appartenant à l'auteur de l'acte, notamment la vie, l'intégrité
corporelle,
la liberté, l'honneur, le patrimoine, cet acte ne sera pas punissable
si le
danger n'était pas imputable à une faute de son auteur et si, dans les
circonstances où l'acte a été commis, le sacrifice du bien menacé ne
pouvait
être raisonnablement exigé de l'auteur de l'acte".

L'état de nécessité suppose donc l'existence d'un danger imminent qui
ne peut
être détourné autrement (principe de la subisidarité; sur l'état de
nécessité, voir Philippe Graven, L'infraction pénale punissable, 2e
éd.,
Berne 1995, p. 136 ss).

2.2
Le recourant affirme que son entreprise se trouvait face à un danger
imminent
et concret dans la mesure où les cultures risquaient de ne pouvoir
être
récoltées en temps utile faute de main d'oeuvre.

Par cette argumentation, il s'éloigne de l'état de fait retenu par le
Tribunal d'arrondissement. En effet, la situation "dangereuse" dans
laquelle
l'entreprise, respectivement le recourant, se seraient trouvés ne
ressort pas
du jugement attaqué. Le Tribunal d'arrondissement relève certes que le
recourant a agi dans un état proche de l'état de nécessité, dans la
mesure où
la difficulté d'embaucher des ressortissants des zones de recrutement
autorisées est avérée, mais il ne constate pas que le défaut de
personnel
risquait de compromettre la survie de l'entreprise. Le principe de la
subsidiarité n'est en outre pas non plus respecté. Il n'est en effet
nullement établi que le recourant ne pouvait pas trouver de la main
d'oeuvre
légale. Le Tribunal d'arrondissement précise au contraire qu'il est
délicat
de délimiter de cas en cas la frontière entre la difficulté de
recruter
légalement du personnel et l'impossibilité. Le grief du recourant
doit donc
être rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.3 Il convient cependant de souligner que, même s'il avait été
établi que le
manque de personnel avait compromis la situation économique de
l'entreprise,
l'art. 34 CP n'aurait pu justifier l'engagement d'ouvriers au mépris
des
dispositions légales et réglementaires de la police des étrangers. La
politique en matière d'immigration et de main d'oeuvre étrangère
relève en
effet de la compétence de l'Assemblée fédérale et du Conseil fédéral,
et le
juge ne peut intervenir en ce domaine pour imposer sa propre
appréciation et
qualifier de dangereuse une situation qui est la conséquence d'une
correcte
application de la loi (ATF 104 IV 229 consid. 4 p. 232; Graven, op.
cit., p.
138). La seule marge de manoeuvre du juge se situe au niveau de
l'appréciation de la faute et de la fixation de la peine. Or, en
l'espèce, le
Tribunal d'arrondissement a largement tenu compte de la difficulté de
recrutement du personnel dans le domaine de l'agriculture puisqu'il
n'a
prononcé qu'une amende de 300 francs.

3.
Le pourvoi doit en conséquence être rejeté dans la mesure où il est
recevable. Le recourant, qui succombe, est condamné aux frais (art.
278 al. 1
PPF et 156 OJ).

Vu le sort de la cause, la requête d'effet suspensif est devenue sans
objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et au Tribunal
de
police de l'arrondissement de La Côte.

Lausanne, le 29 juillet 2002

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.255/2002
Date de la décision : 29/07/2002
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-07-29;6s.255.2002 ?
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