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17/07/2002 | SUISSE | N°I.591/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 juillet 2002, I.591/01


{T 7}
I 591/01 /Tn

Arrêt du 17 juillet 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffier :
M.
Berthoud

Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion,
recourant,

contre

J.________, intimé, représenté par Me Jacques Philippoz, avocat,
place Maison
Commune 3, 1912 Leytron

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 20 août 2001)

Faits :

A.
A.a J.________ a exercé la profession de vigneron indép

endant, tout en
travaillant, durant la saison d'hiver, auprès des remontées mécaniques
X.________. De l'été 1983 à l'automne 1984...

{T 7}
I 591/01 /Tn

Arrêt du 17 juillet 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen. Greffier :
M.
Berthoud

Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15, 1951 Sion,
recourant,

contre

J.________, intimé, représenté par Me Jacques Philippoz, avocat,
place Maison
Commune 3, 1912 Leytron

Tribunal cantonal des assurances, Sion

(Jugement du 20 août 2001)

Faits :

A.
A.a J.________ a exercé la profession de vigneron indépendant, tout en
travaillant, durant la saison d'hiver, auprès des remontées mécaniques
X.________. De l'été 1983 à l'automne 1984, il a également occupé un
emploi à
temps partiel (environ 29 heures par semaine) au service de la commune
Y.________ (contrôle de la décharge municipale).

A la suite d'un accident de cyclomoteur survenu en 1967, le prénommé
souffre
de lombo-sciatalgies. Ces affections ont été exacerbées lors d'un
service
militaire en janvier 1983 (rapport du docteur A.________, du 15 avril
1983).
De ce chef, l'assurance-militaire lui a alloué une rente d'invalidité
fondée
sur un taux d'invalidité de 25 % dès le 1er janvier 1984 (cf.
décision du 25
janvier 1985), puis, à la suite d'une procédure de révision, une
rente fondée
sur un degré d'invalidité de 50 % à partir du 1er janvier 1999 (cf.
décision
du 7 juin 1999).

A.b Invoquant une diminution de sa capacité de travail due à ses
lombo-sciatalgies (cf. rapport du docteur B.________ du 14 septembre
1998),
J.________ s'est annoncé à l'assurance-invalidité le 15 juin 1998.
L'Office
cantonal AI du Valais (l'office AI) a invité le Centre d'observation
professionnelle de l'AI (COPAI), à Yverdon-les-Bains, à organiser un
stage
d'observation de l'assuré. Ce dernier s'est présenté au COPAI, mais
il n'a
toutefois pas pu entreprendre le stage, en raison d'une décompensation
dorsale aiguë. Par ailleurs, l'office AI a recueilli l'avis des
responsables
de la Clinique Z.________, où J.________ a fait l'objet d'examens.
Dans son
rapport du 6 novembre 2000, le docteur C.________ a confirmé, parmi
d'autres
affections, le diagnostic de lombo-sciatalgies et attesté que
l'assuré avait
une capacité de travail de 60 % dans une activité adaptée, soit un
rendement
de 80 % dans le cadre d'un horaire journalier de 75 %.

Au terme de ses investigations, l'office AI a estimé que l'assuré
présentait
un taux d'incapacité de travail de 60 % dans son activité de
vigneron. En
revanche, dans un emploi adapté, soit une activité légère, permettant
l'alternance des positions et évitant la position en porte-à-faux,
l'administration est parvenue à la conclusion qu'un horaire de travail
journalier effectif de 62,5 % serait exigible de la part de l'assuré
(plus
précisément, un pensum journalier de 75 % avec des pauses de 10
minutes par
heure).

Dans la comparaison des revenus, l'office AI a actualisé le salaire
dont
l'assuré bénéficierait en 2001, s'il avait été engagé définitivement
à plein
temps en qualité de manoeuvre au service de la commune Y.________ en
1984,
retenant ainsi un gain annuel (d'assuré valide) de 45 044 fr. Quant
au revenu
d'invalide, l'administration l'a établi à la lumière des données
ressortant
de l'enquête suisse sur la structure des salaires, publiée par
l'Office
fédéral de la statistique; partant d'un revenu statistique de 54 594
fr. pour
l'année 2001, l'office AI a évalué le gain d'invalide à 30 709 fr., en
fonction du taux d'occupation exigible de 62,5 % et d'un abattement
de 10 %.

Par décision du 6 avril 2001, l'office AI a arrêté le taux
d'invalidité de
l'assuré à 31,82 %, niant en conséquence son droit à une rente.

B.
J.________ a recouru contre cette décision devant le Tribunal des
assurances
du canton du Valais, en concluant à l'allocation d'une demi-rente
d'invalidité.

Par jugement du 20 août 2001, la juridiction cantonale a pris le
dispositif
suivant :
1. Le recours est admis et la décision de l'Office cantonal AI du
Valais
du 6 avril 2001 est annulée, J.________ étant mis au bénéfice d'une
demi-rente AI dès le 1er janvier 2000.

2. L'Office cantonal AI versera au recourant une indemnité de 1000
fr.
pour ses frais et dépens.

C.
L'office AI interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
il demande l'annulation. A titre principal, il conclut à ce que la
cause lui
soit renvoyée afin de compléter l'instruction sur la prise en charge
de
mesures de réadaptation d'ordre professionnel; subsidiairement,
l'administration conclut au rétablissement de sa décision.

L'assuré intimé conclut au rejet du recours, avec suite de dépens.
Quant à
l'Office fédéral des assurances sociales, il a renoncé à se
déterminer.

Considérant en droit :

1.
Le litige porte sur le taux d'invalidité de l'intimé, et par voie de
conséquence, sur son droit aux prestations de l'assurance-invalidité,
singulièrement des mesures de réadaptation d'ordre professionnel ou
une rente
(cf. art. 4, 17 et 28 LAI).

2.
2.1Les premiers juges ont rappelé tout particulièrement que la notion
d'invalidité est, en principe, identique en matière
d'assurance-accidents,
d'assurance militaire et d'assurance-invalidité. Dans ces trois
domaines,
elle représente la diminution permanente ou de longue durée,
résultant d'une
atteinte à la santé assurée, des possibilités de gain sur le marché du
travail équilibré qui entre en ligne de compte pour l'assuré (ATF 119
V 470
consid. 2b, 116 V 249 consid. 1b et les arrêts cités).

Par ailleurs, les juges cantonaux ont exposé que ce principe connaît
des
exceptions, notamment lorsque l'évaluation de l'invalidité résulte
d'une
erreur de droit, si elle procède de l'exercice insoutenable du pouvoir
d'appréciation ou si le degré d'invalidité est le fruit d'une
transaction
passée avec l'assureur-accidents (ATF 126 V 288).

2.2 Dans le cas d'espèce, le Tribunal des assurances a considéré que
l'assurance-militaire ne s'était pas simplement basée sur le taux
d'incapacité de travail médico-théorique pour fixer le degré
d'invalidité de
l'intimé à 50 %. Selon les premiers juges, l'appréciation de
l'assurance-militaire se fondait également sur des renseignements
d'ordre
économique, soit sur deux rapports des 18 et 29 janvier 1999. Comme
le taux
d'incapacité de travail médico-théorique correspondait en l'espèce à
la
diminution des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du
travail, les
premiers juges en ont déduit que l'office AI ne pouvait pas
s'écarter, sans
motivation particulière, du taux d'invalidité retenu par
l'assurance-militaire.

Pour ce motif, les juges cantonaux ont accueilli les conclusions de
l'assuré.

3.
3.1Dans un premier moyen, l'office recourant soutient que
l'assurance-militaire a omis d'examiner la question de la
réadaptation de
l'intimé. Il souligne aussi que cette assurance n'a pas procédé à une
comparaison des revenus. Dans ces conditions, le recourant estime que
le
degré d'invalidité retenu par l'assurance-militaire ne lie pas l'AI.

3.2 Ce grief est bien fondé. Quoi qu'en disent les premiers juges, le
dossier
de l'assurance-militaire relatif à la révision de la rente de cette
assurance, et tout particulièrement les deux écritures qu'ils ont
retenues à
l'appui de leur jugement (rapport du service extérieur du 18 janvier
1999 et
prise de position du 29 janvier 1999), ne permet pas de savoir si le
degré
d'invalidité de l'intimé s'élève réellement à 50 %, ou s'il se situe
en deçà
voire en delà de ce taux. En effet, si le docteur D.________ a
constaté que
la capacité de travail dans la profession de vigneron était
problématique, il
a revanche attesté que la capacité de travail médico-théorique
demeurait
complète (rapport du 17 décembre 1998). Or l'assurance-militaire n'a
pas
cherché à en savoir davantage, en particulier à connaître le genre
d'activité
qui serait la plus adaptée au handicap de l'intimé et le salaire qu'il
pourrait en retirer.

Le degré d'invalidité de l'intimé, que les organes de
l'assurance-militaire
ont arrêté à 50 %, découle apparemment d'une confusion entre les
notions
d'incapacité de travail et d'invalidité, la doctoresse E.________
ayant parlé
d'un «taux médico-théorique de l'invalidité» de 50 % dans son rapport
du 11
janvier 1999. Ce taux de 50 % ne procède donc pas d'une saine
application des
art. 40 al. 4 et 44 LAM (cf. Maeschi, Kommentar zum Bundesgesetz über
die
Militärversicherung, pp. 318 ss), si bien que le recourant pouvait en
faire
abstraction dans son évaluation de l'invalidité, sans violer le droit
fédéral
(cf. ATF 126 V 288).

4.
4.1Dans un second moyen, le recourant observe qu'il avait abandonné
l'idée de
réadapter l'intimé, alléguant que ce dernier ne semblait guère motivé
à
suivre cette voie. Le recourant admet toutefois que sa position
n'était pas
conciliable avec le principe de la priorité de la réadaptation sur la
rente,
d'autant moins que le taux d'invalidité dépassait, à son avis, le
seuil de 20
% à partir duquel une perte de gain durable dans toute activité
exigible et
qui ne nécessite pas une formation professionnelle complémentaire
ouvre
droit, en principe, au reclassement dans une nouvelle profession (ATF
124 V
110-111 consid. 2b et les références). Le recourant invite dès lors le
Tribunal fédéral des assurances à lui renvoyer le dossier pour qu'il
puisse
procéder à cet examen.

4.2 Comme le recourant le relève à juste titre, selon l'art. 28 al. 2
LAI, la
réadaptation a la priorité sur la rente dont l'octroi n'entre en
ligne de
compte que si une réadaptation suffisante est impossible. Saisie d'une
demande de rente ou appelée à se prononcer à l'occasion d'une
révision de
celle-ci, l'administration doit donc élucider d'office, avant toute
chose, la
question de la réintégration de l'assuré dans le circuit économique
(ATF 108
V 212 s., 99 V 48).

A cet égard, l'intimé soutient qu'il ne dispose pas des capacités
physiques
et intellectuelles requises pour entreprendre et mener à chef les
mesures de
réadaptation que le recourant entend mettre en oeuvre. Il incombera
toutefois
à l'administration de l'AI d'en décider, au terme de l'examen auquel
elle
doit procéder d'office et préliminairement. A cette fin, elle peut
recourir à
des institutions spécialisées, à l'instar d'un COPAI, ce qu'elle
avait du
reste jadis envisagé dans un rapport du 15 décembre 1999. Dans le cas
d'espèce, un tel stage apparaît approprié, car à l'issue de celui-ci
le
recourant pourra en principe dire, en connaissance de cause, si
l'intimé est
ou non susceptible d'être réintégré dans le circuit économique.

4.3 La conclusion principale du recours est donc bien fondée, ce qui
entraîne
l'admission du recours et le renvoi de la cause à l'office recourant
afin
qu'il puisse examiner en premier lieu, comme il l'appelle maintenant
de ses
voeux, la question de la prise en charge de mesures d'ordre
professionnel.

Ce n'est que lorsque ce point aura été élucidé qu'il sera possible,
dans une
phase ultérieure, d'aborder la question du taux d'invalidité de
l'intimé et,
le cas échéant, de son droit éventuel à la rente. A ce stade, pareil
examen
est en effet prématuré.

5.
5.1L'intimé succombe dans la mesure où il a conclu au rejet du
recours de
droit administratif. Il ne saurait dès lors se voir allouer des
dépens pour
la procédure fédérale (art. 159 al. 1 OJ).

5.2 Conformément à l'art. 159 al. 6 OJ, le tribunal confirme, annule
ou
modifie, selon le résultat du procès, la décision de la juridiction
cantonale
qui a condamné l'une des parties aux dépens. Il peut les fixer
lui-même
d'après le tarif du canton, ou en déléguer la taxation à l'autorité
compétente.

Pour obtenir gain de cause - au sens des dispositions du droit
fédéral qui
prescrivent l'octroi de dépens - dans un litige au sujet d'une
prestation de
l'assurance sociale, il suffit d'obtenir satisfaction sur le plan
formel, en
ce sens que l'annulation de la décision attaquée et le renvoi de la
cause à
l'administration pour instruction complémentaire et nouvelle décision
laissent subsister tous les droits éventuels relatifs à la prestation
demandée (ATF 110 V 57 et les arrêts cités; RCC 1987 pp. 285-286
consid. 5a
ainsi que les références jurisprudentielles et doctrinales; arrêt non
publié
G. du 5 février 1999, U 52/98).

En l'occurrence, si les premiers juges avaient statué conformément aux
considérations développées dans le présent arrêt, ils auraient annulé
la
décision du recourant du 6 avril 2001 et renvoyé le dossier à ce
dernier.
Dans ces conditions, l'intimé aurait obtenu gain de cause. Il
convient donc
de confirmer le jugement attaqué dans la mesure où il prescrit
l'allocation
de dépens à l'intimé (cf. art. 85 al. 2 let. f LAVS).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis. Le ch. 1 du dispositif du jugement du Tribunal
des
assurances du canton du Valais du 20 août 2001 et la décision de
l'Office
cantonal AI du Valais du 6 avril 2001 sont annulés, la cause étant
renvoyée
audit office pour instruction complémentaire au sens des considérants
et
nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal des
assurances, à la Caisse
cantonale valaisanne de compensation, à
l'Office
fédéral de l'assurance militaire, Division de Genève, et à l'Office
fédéral
des assurances sociales.

Lucerne, le 17 juillet 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.591/01
Date de la décision : 17/07/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-07-17;i.591.01 ?
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