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27/06/2002 | SUISSE | N°P.84/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 juin 2002, P.84/01


«AZA 7»
P 84/01 Mh

IIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Ursprung et Frésard.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 27 juin 2002

dans la cause

M.________, recourante,

contre

Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS, rue du
Lac 37, 1815 Clarens, intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- M.________, alors divorcée, a été mise au bénéfice
de prestations complémentaires à l'assurance-invalidité à
partir du mois

d'avril 1996. A la suite de son remariage
avec B.________ le 26 novembre 1999, la Caisse cantonale
vaudoise de compensation (ci-après ...

«AZA 7»
P 84/01 Mh

IIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Ursprung et Frésard.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 27 juin 2002

dans la cause

M.________, recourante,

contre

Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS, rue du
Lac 37, 1815 Clarens, intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- M.________, alors divorcée, a été mise au bénéfice
de prestations complémentaires à l'assurance-invalidité à
partir du mois d'avril 1996. A la suite de son remariage
avec B.________ le 26 novembre 1999, la Caisse cantonale
vaudoise de compensation (ci-après : la caisse) a fixé le
montant de la prestation complémentaire mensuelle lui
revenant à 1317 fr. à partir du 1er décembre 1999 (déci-
sions du 28 janvier 2000).

La caisse a, par décision du 20 novembre 2000, suppri-
mé le droit de l'assurée à des prestations complémentaires
à partir du 1er décembre 2000, au motif que les revenus du
couple excédaient de 3894 fr. le montant de leurs dépenses
reconnues. Par courrier du 24 novembre 2000, elle lui a
indiqué avoir appris de l'Agence communale d'assurances
sociales de X.________ que B.________ avait perçu des
revenus (indemnités journalières et salaires), éléments qui
n'avaient pas été annoncés en temps voulu et qui ont été
pris en compte dans le calcul joint à sa décision du 20 no-
vembre 2000. Elle l'a en outre informée qu'elle allait pro-
céder à un réexamen de son droit aux prestations complémen-
taires depuis le 1er décembre 1999 et que le montant des
prestations versées à tort avoisinait les 15 800 fr.

B.- B.________ a recouru contre la décision du 20 no-
vembre 2000 devant le Tribunal des assurances du canton de
Vaud, en contestant les calculs effectués par la caisse.
Elle a admis n'avoir pas annoncé que son mari travaillait
depuis le mois d'avril 2000, en invoquant le fait qu'il
s'agissait toutefois d'un travail pour une agence de
placement temporaire et non pas d'un emploi fixe.
En cours de procédure, la caisse a indiqué, le 19 mars
2001, avoir repris le calcul des prestations complémen-
taires sur la base des justificatifs de salaire de
B.________ fournis par son épouse et produit cinq plans de
calcul, datés du 13 mars 2001, qui fixaient à 0 fr. les
prestations complémentaires dues à l'assurée pour la pé-
riode allant du 1er décembre 1999 à celle prenant naissance
le 1er janvier 2001. Elle a également précisé que les
montants versés indûment pour cette période allaient faire
l'objet d'un ordre de restitution. Le 9 mai 2001, elle a
annoncé au tribunal cantonal que la somme des prestations
complémentaires à restituer s'élevait à 15 804 fr.
Par courrier du 1er mai 2001, le tribunal cantonal a
informé l'assurée de son intention de réformer la décision

attaquée à son détriment et de la possibilité qui lui était
donnée de retirer son recours. Dans le délai imparti,
M.________ a déclaré maintenir son recours.
Par jugement du 18 juin 2001, le tribunal cantonal a
réformé la décision attaquée dans le sens des propositions
en procédure de la caisse du 13 mars 2001 et statué que
l'assurée était tenue de restituer à la caisse le montant
de 15 804 fr. correspondant aux prestations complémentaires
perçues à tort durant la période du 1er décembre 1999 au
30 novembre 2000, les conditions d'une remise de l'obliga-
tion de restituer n'étant par ailleurs pas remplies.

C.- M.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement, en concluant implicitement au
maintien de son droit à des prestations complémentaires
au-delà du 1er décembre 1999 ainsi qu'à l'annulation de
l'obligation de restituer les prestations perçues à partir
de cette date.
La caisse conclut au rejet du recours, tandis que
l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se
déterminer.

Considérant en droit :

1.- a) Selon l'art. 128 OJ, le Tribunal fédéral des
assurances connaît en dernière instance des recours de
droit administratif contre des décisions au sens des
art. 97, 98 let. b à h et 98a OJ, en matière d'assurances
sociales. Dans la procédure juridictionnelle administra-
tive, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que
les rapports juridiques à propos desquels l'autorité
administrative compétente s'est prononcée préalablement
d'une manière qui la lie, sous la forme d'une décision.
Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la
contestation qui peut être déféré en justice par voie de

recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n'a
été rendue, la contestation n'a pas d'objet, et un jugement
sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 125 V 414 con-
sid. 1a, 119 Ib 36 consid. 1b et les références citées).

b) Par décision du 20 novembre 2000, la caisse intimée
a nié à la recourante tout droit à des prestations complé-
mentaires dès le 1er décembre 2000. En revanche, ni la
suppression du droit à des prestations complémentaires pour
la période allant du 1er décembre 1999 au 30 novembre 2000,
ni l'obligation de restitution de ces prestations qui
auraient été versées à tort, ni encore la remise éventuelle
de cette obligation n'ont fait l'objet d'une décision
administrative. A cet égard, tout en précisant en cours de
procédure cantonale que les montants versés allaient faire
«l'objet d'un ordre de restitution ultérieur», la caisse a
produit cinq plans de calcul intitulés «propositions de
procédure» qui sont datés du 13 mars 2001 et portent sur la
suppression du droit aux prestations complémentaires de la
recourante pour la période du 1er décembre 1999 au 1er jan-
vier 2001. Ces plans de calcul ne constituent qu'une simple
proposition de l'administration au juge (ATF 109 V 236 con-
sid. 2, VSI 1994 p. 281 consid. 4a).
Les trois propositions relatives aux périodes du
1er décembre 1999 au 31 décembre 1999, du 1er janvier 2000
au 31 mars 2000, et du 1er avril 2000 au 30 novembre 2000,
concernent une période antérieure à celle visée par la
décision litigieuse. Dans la mesure où elles tendent à
supprimer avec effet rétroactif au 1er décembre 1999 le
droit aux prestations complémentaires de la recourante et
impliquent l'examen de l'obligation de restituer les mon-
tants déjà versés, voire de la remise de cette obligation,
elles ne se rapportent pas à un état de fait commun à celui
de la décision du 20 novembre 2000, laquelle supprime le
droit à ces prestation avec effet ex nunc et pro futuro à
partir du 1er décembre 2000. Or, en l'absence du lien de

connexité étroit requis pour étendre l'objet de la contes-
tation, pour des motifs d'économie de procédure, (cf. ATF
122 V 36 consid. 2a et les références), l'autorité canto-
nale de recours n'avait pas à statuer sur ces points, ce
d'autant moins que ces questions n'ont pas fait l'objet
d'une décision de l'administration : à plusieurs reprises
en cours de procédure cantonale, l'intimée a certes exprimé
son intention de rendre une décision de restitution des
prestations versées à tort, sans toutefois apparemment la
concrétiser.
Par ailleurs, contrairement à ce qu'a retenu le
premier juge, ces propositions ne pouvaient pas aboutir à
une reformatio in peius de la décision attaquée au dé-
triment de la recourante, dès lors qu'elles ont pour effet
d'étendre l'objet de la contestation. Or, une reformatio in
peius ne se conçoit que dans le cadre de l'objet même de la
contestation (dans ce sens, Attilio R. Gadola, Die reforma-
tio in peius vel melius in der Bundeverwaltungsrechtspflege
- eine Übersicht der neuesten Rechtsprechung, in : PJA
1/1998 p. 59). La compétence d'une autorité de recours de
statuer en défaveur de la partie recourante (reformatio in
peius) ne saurait en effet conduire à une modification,
dans le sens d'une extension, de l'objet de la contestation
(Fritz Gygi, Bundesverwaltungsrechtspflege, 1983, p. 43 s.,
205 et 250, Pierre Moor, Droit administratif, vol. II,
p. 447, ch. 5.7.4.2).
Il convient donc d'annuler d'office le jugement
attaqué, en tant qu'il se prononce sur la suppression du
droit aux prestations complémentaires pour la période du
1er décembre 1999 au 30 novembre 2000, l'obligation de
restitution des prestations et la remise de celle-ci.

2.- Le litige porte sur le point de savoir si l'inti-
mée était fondée à modifier avec effet ex nunc et pro
futuro, par sa décision du 20 novembre 2000, la décision
d'octroi de prestations complémentaires, en ce sens qu'elle

a mis fin à toute prestation complémentaire à compter du
1er décembre 2000. La modification d'une décision avec
effet ex nunc et pro futuro est visée à l'art. 25 al. 2
let. c et d OPC-AVS/AI (cf. ATF 122 V 137 s. consid. 2b).

a) Selon l'art. 25 al. 1 OPC-AVS/AI, la prestation
complémentaire annuelle doit être augmentée, réduite ou
supprimée lorsque les dépenses reconnues, les revenus
déterminants et la fortune subissent une diminution ou une
augmentation pour une durée qui sera vraisemblablement
longue (let. c) ou, lors d'un contrôle périodique, si l'on
constate un changement des dépenses reconnues, des revenus
déterminants et de la fortune (let. d). Dans les cas prévus
au 1er alinéa let. c, lors d'une diminution de l'excédent
des dépenses, la nouvelle décision doit porter effet au
plus tard dès le début du mois qui suit celui au cours
duquel la nouvelle décision a été rendue (art. 25 al. 2
let. c OPC-AVS/AI). Dans les cas prévus au 1er alinéa
let. d, la nouvelle décision doit porter effet dès le début
du mois au cours duquel le changement a été annoncé, mais
au plus tôt à partir du mois dans lequel celui-ci est
survenu et au plus tard dès le début du mois qui suit celui
au cours duquel la nouvelle décision a été rendue (art. 25
al. 2 let. d OPC-AVS/AI).

b) Après avoir appris que l'époux de la recourante
exerçait une activité lucrative, l'intimée a, dans la dé-
cision litigieuse, pris en compte, au chapitre des revenus
déterminants, un montant de 53 328 fr. au titre de revenus
d'une activité lucrative, sans que le plan de calcul ne
spécifie à quelle activité professionnelle ce montant se
rapporte. En cours de procédure cantonale, se fondant sur
divers certificats de salaire de B.________, produits par
la recourante, elle a procédé à un nouveau calcul du revenu
provenant de l'activité lucrative de celui-ci et l'a fixé à
39 752 fr. (proposition en procédure du 13 mars 2001

pour la prestation complémentaire du 1er au 31 décembre
2000). De la réplique du 19 mars 2001 de l'intimée au
recours cantonal, il ressort que ce calcul prend en compte
les salaires versés à B.________ au cours de l'année 2000,
des prestations de chômage ainsi que des indemnités pour
perte de gain qu'il a reçues en l'an 2000, soit des
nouveaux éléments qui sont effectivement déterminants pour
le calcul des revenus au sens de l'art. 3c al. 1 LPC et
doivent être convertis sur une année (art. 25 al. 1 let. c
OPC-AVS/AI). Contrairement à ce que soutient la recourante,
le fait qu'il s'agit selon elle de «salaires irréguliers»
en ce sens que son époux ne disposait que d'un contrat de
travail temporaire, ne suffit pas pour considérer ces
revenus comme «non durables» (cf. art. 25 al. 1 let. c
OPC-AVS/AI); en dehors d'une courte période de chômage et
de périodes d'incapacité de travail liées à des problèmes
de santé, B.________ a exercé une activité lucrative
pendant toute l'année 2000, de sorte qu'on ne saurait
qualifier celle-ci de purement temporaire. On peut donc
retenir à titre de revenu de l'activité lucrative le
montant de 39 752 fr., qui, conformément au calcul effectué
par l'intimée, doit être pris en compte à raison de deux
tiers seulement après déduction d'un montant de 1500 fr.
pour les couples, ce qui revient à 25 501 fr. (art. 3c
al. 1 let. a LPC). Ce revenu s'ajoute au montant de
12 060 fr. correspondant à la rente perçue par la recou-
rante, ce qui fait un total de revenus de 37 561 fr.

c) En ce qui concerne les dépenses reconnues, l'inti-
mée a tenu compte d'un montant de 24 690 fr. au titre des
besoins vitaux pour un couple, d'un montant de 9300 fr. au
titre du loyer annuel déductible et d'un montant de
2100 fr. au titre d'autres déductions (frais de régime).
Ces montants ont été fixés conformément à la loi (art. 3b
al. 1 let. a ch. 2 LPC [en relation avec l'art. 1er de

l'Ordonnance 99 du 16 septembre 1998 concernant les adapta-
tions dans le régime des prestations complémentaires à
l'AVS/AI], art. 3b al. 1 let. b en relation avec l'art. 5
al. 1 let. b ch. 2 et art. 3d al. 1 let. c LPC). Au demeu-
rant, ils ne sont pas contestés par la recourante.

d) Enfin, le calcul de la prestation complémentaire
(total des déductions moins le total des revenus déterminés
ci-dessus; art. 3a al. 1 LPC) conduit à un excédent des
revenus de 1471 fr. (37 561 - 36 090), tel que l'a calculé
l'intimée dans sa proposition en procédure du 13 mars 2001,
de sorte que la recourante n'a plus droit à une prestation
complémentaire.
Ainsi, même s'il y a lieu de s'écarter du revenu d'une
activité lucrative retenu par l'intimée dans la décision
attaquée et de prendre en compte celui qu'elle a fixé dans
la proposition en procédure du 13 mars 2001, il se justifie
de supprimer le droit à la prestation complémentaire de la
recourante à partir du 1er décembre 2000, ce qu'a fait
l'intimée par décision du 20 novembre 2000, de sorte qu'il
n'y a pas lieu d'annuler celle-ci.

3.- En résumé, le jugement attaqué doit être annulé
dans la mesure où il étend l'objet de la contestation en
statuant sur la période des prestations complémentaires du
1er décembre 1999 au 30 novembre 2000. Le présent arrêt ne
fait pas obstacle au prononcé d'une décision de l'intimée
- si elle ne l'a pas déjà fait entre temps - sur la sup-
pression du droit de la recourante
à des prestations com-
plémentaires pour cette période et sur une éventuelle
obligation de restitution des montants versés. En l'état,
le Tribunal fédéral des assurances n'a toutefois pas à
examiner ces questions, ni à entrer en matière sur le
bien-fondé d'une telle décision au regard, notamment, du
délai de péremption d'un an prévu par l'art. 47 al. 2 LAVS
(en relation avec l'art. 27 al. 1 OPC-AVS/AI).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis en ce sens que le jugement du
Tribunal des assurances du canton de Vaud du 18 juin
2001 est annulé dans la mesure où il se prononce sur
la période de prestations complémentaires du 1er dé-
cembre 1999 au 30 novembre 2000.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 27 juin 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : P.84/01
Date de la décision : 27/06/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-06-27;p.84.01 ?
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