La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/06/2002 | SUISSE | N°4C.110/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 juin 2002, 4C.110/2002


{T 0/2}
4C.110/2002 /ech

Arrêt du 25 juin 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et
Favre,
greffier Carruzzo.

M.________,
demandeur et recourant, représenté par Me Urs Andenmatten, avocat,
Kreuzgasse
2, Case postale 31, 3953 Leuk Stadt,

contre

X.________ S.A.,
défenderesse et intimée, représentée par Me Jörn-Albert Bostelmann,
avocat,
avenue Ritz 31, case postale 2040, 1950 Sion 2.

responsabilité du propriétaire d'ouvrage; fixati

on du dommage,

(recours en réforme contre le jugement de la IIe Cour civile du
Tribunal
cantonal du canton du Valais ...

{T 0/2}
4C.110/2002 /ech

Arrêt du 25 juin 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et
Favre,
greffier Carruzzo.

M.________,
demandeur et recourant, représenté par Me Urs Andenmatten, avocat,
Kreuzgasse
2, Case postale 31, 3953 Leuk Stadt,

contre

X.________ S.A.,
défenderesse et intimée, représentée par Me Jörn-Albert Bostelmann,
avocat,
avenue Ritz 31, case postale 2040, 1950 Sion 2.

responsabilité du propriétaire d'ouvrage; fixation du dommage,

(recours en réforme contre le jugement de la IIe Cour civile du
Tribunal
cantonal du canton du Valais du 8 février 2002).

Faits:

A.
M.________ est propriétaire d'un centre de tennis, édifié sur la
parcelle n°
380 plan n° 8 de la commune de Y.________, qu'il exploite depuis le 12
décembre 1984. A l'ouest de son bien-fonds se trouve la parcelle n°
798, sur
laquelle ont été construits deux bâtiments en propriété par étages
(V.________ et W.________), dont X.________S.A. est propriétaire de
toutes
les unités d'étages. Sur la limite de propriété, commune entre les
deux
parcelles, une route d'accès au terrain n° 798, large d'environ 5 à 6
m., a
été tracée, suivant la pente descendante du nord au sud; elle est
constituée
de terre battue, couverte de granulés.

A l'extrémité est de la parcelle n° 798, un bisse court le long de la
route
d'accès en direction du sud. En août/septembre 1994, il a été placé
dans une
conduite dont l'ouverture supérieure se situe à l'angle nord-est du
bien-fonds, légèrement au-dessus du bâtiment W.________. Son entrée
est munie
de deux barres de métal verticales. A la suite d'un débordement
survenu le 20
novembre 1994, il a été décidé de construire sur la parcelle n° 798,
le long
d'un mur de pierres et parallèlement au bisse placé sous conduite, un
petit
canal de 25 cm. de diamètre ("cunette") se trouvant à l'extrémité
ouest de la
route d'accès. Cette dernière est traversée, en diagonale, par deux
caniveaux
avec grille carrossable, le premier se déversant dans la "cunette" et
le
second directement dans le puits de dessablement (regard avec grille)

aboutit également la "cunette". Ce puits, ne disposant à tort d'aucun
sac de
boue est raccordé en aval au bisse par un tuyau de matière plastique
de
plusieurs mètres de long. En dessous du regard avec grille, dans la
façade
sud-ouest de la halle de tennis, se trouve la porte du garage de ce
centre
qui offre un accès direct aux places de jeux couvertes. Le seuil
extérieur de
cette porte est équipé d'un dispositif d'écoulement des eaux de
surface, la
halle de tennis disposant en plus d'une ceinture de drainage, d'un
diamètre
de 20 à 25 cm.

B.
Selon une "convention et constitution de servitudes" relative au
bisse,
passée entre la municipalité de Y.________ et X.________S.A. le 31
mai 1994,
cette dernière "assume l'entière responsabilité à tous égards et tous
risques
dommages, indemnités (...) qui pourraient résulter de" la
modification de
l'état des lieux concernant le lit du bisse.

C.
C.aLe 20 novembre 1994, le bisse a débordé, l'eau n'arrivant plus à
s'engouffrer dans l'orifice de la canalisation, à l'extrémité
nord-est de la
parcelle n° 798. Elle s'est alors déversée sur la route d'accès avant
de
pénétrer dans la halle de tennis de M.________. Celui-ci a estimé à
16 431
fr. le dommage provenant de ces dégâts d'eau.

Le 23 novembre 1994, les propriétaires voisins ont décidé, en
présence d'un
responsable du service technique de la commune de Y.________,
d'envisager la
constitution d'une servitude de distance et divers travaux de
réaménagement
du bisse et de la voie d'accès ("cunette", caniveaux et regard avec
grille
complète). Les architectes, constructeurs du bâtiment W.________, se
sont
engagés à dénoncer le sinistre à leur assureur pour la prise en
charge des
frais de remise en état des dégâts occasionnés par le débordement. Le
27 mars
1995, M.________ et X.________S.A. ont passé devant notaire la
convention de
constitution de servitude de distance. Sous "IV. Besondere
Vereinbarungen",
les mesures d'amélioration de la canalisation, spécialement de son
entrée et
de la route, ont été confirmées, ainsi que l'engagement du maître de
l'ouvrage des travaux réalisés sur la parcelle n° 798 (Die
Bauherrschaft) de
soumettre le sinistre à sa compagnie d'assurances.

C.b Le 22 avril 1995, le bisse a débordé à nouveau, au même endroit,
l'eau
s'introduisant dans la halle de tennis par la porte du garage. Son
propriétaire a estimé les dégâts à 12 896 fr.50.

Selon un rapport du service technique de la commune, le débordement
aurait pu
être évité si les travaux exigés antérieurement avaient été
accomplis, en
particulier la construction de l'entrée de l'aqueduc avec une grille
avancée.
Les architectes du maître de l'ouvrage, un représentant de leur
assurance RC,
un entrepreneur en maçonnerie et le responsable du service technique
de la
commune ont décidé, le 23 juin 1995, de mandater l'architecte
B.________
"pour déterminer les responsabilités et vérifier la valeur des
dommages". Ce
dernier a rendu son rapport le 28 août 1995. Entre-temps, les travaux
de
modification de la pente de la voie d'accès étaient exécutés et les
caniveaux
en travers posés, mais non raccordés à la "cunette".

C.c Les 13 et 14 juillet 1995, à la suite d'importants orages, en
raison de
l'insuffisance du système de canalisations et de l'aménagement du
terrain,
l'eau s'est écoulée en direction de la parcelle n° 380, pénétrant
jusqu'au
fond du premier court de tennis à l'ouest de la halle sur une largeur
de 2 à
3 m., ainsi qu'à l'entrée sur une profondeur de 4 à 5 cm.
L'exploitant a
estimé les dommages à 11 424 fr.90.

Le 20 février 1996, C.________, époux de la concierge des immeubles
V.________ et W.________, a aidé cette dernière à déblayer la neige
de la
route d'accès. A cette occasion, de petites pierres ont été projetées
contre
la paroi translucide ouest de la halle de tennis, causant un dommage
que son
propriétaire évalue à 15 000 fr. au minimum.

D.
Par demande du 5 février 1997, M.________ a agi devant le Tribunal
cantonal
valaisan siégeant comme première et unique instance aux termes de
l'art. 5
aCPC/VS en concluant au paiement des montants susmentionnés, soit au
total 55
751 fr., par X.________S.A.; après diverses audiences d'instruction
tenues
devant le Tribunal de district et l'exécution d'autres mesures
probatoires,
en particulier le dépôt d'un rapport du 15 octobre 1998 et d'un
rapport
complémentaire du 19 août 1999 de l'ingénieur A.________, expert
judiciaire,
le dossier a été transmis au Tribunal cantonal pour jugement. Dans ses
dernières conclusions du 31 janvier 2002, le demandeur a conclu au
paiement
des sommes citées plus haut, en y ajoutant le montant de 15 500 fr.
en raison
du défaut d'aménagement de la route d'accès et de 15 240 fr. pour le
nettoyage accru du système de drainage situé devant l'entrée
sud-ouest de la
halle, pendant une période de six ans. Subsidiairement le demandeur
sollicitait l'aménagement de la route d'accès dans les termes
préconisés par
l'expert judiciaire.

La défenderesse a conclu au rejet de la demande.

Statuant le jour même, la IIème Cour civile du Tribunal cantonal a
condamné
la défenderesse à payer au demandeur 12 900 fr. avec intérêts à 5%
dès le 26
avril 1996 et lui a ordonné d'aménager la route située entre les deux
parcelles n°s 380 et 798 selon les modalités arrêtées par l'expert
judiciaire
dans son rapport du 15 octobre 1998. Elle a rejeté les autres
conclusions de
la demande et mis les frais à la charge des parties par moitié,
chacune
d'elles supportant ses propres frais d'intervention. La cour
cantonale a
retenu, en substance, que la responsabilité de propriétaire d'ouvrage
de la
défenderesse était engagée pour les trois débordements du bisse. Elle
a
estimé que le demandeur avait prouvé son dommage à concurrence de
7200 fr.
pour le premier sinistre et de 5700 fr. pour le deuxième. Pour le
troisième,
il s'était borné à déposer un décompte sans autre pièce justificative
ni
moyen de preuve, de sorte qu'il ne pouvait être mis au bénéfice de
l'art. 42
al. 2 CO, ce qui entraînait le rejet de ses prétentions. Le dommage
subi le
20 février 1996, lors de travaux de déneigement, n'était pas
imputable à la
défenderesse. La conclusion en paiement de 15 500 fr. pour le défaut
d'aménagement de la route d'accès était irrecevable, de même que
celle en
paiement de 15 240 fr. pour les frais d'entretien du système de
drainage. Par
contre, le demandeur était fondé à exiger l'exécution de l'art. 6 du
contrat
constitutif de servitude de distance, prévoyant l'aménagement de la
route
d'accès, qui devait être accomplie selon les directives incontestées
de
l'expert judiciaire. En définitive, la défenderesse devait payer au
demandeur
12 900 fr. et aménager la route d'accès.

E.
Le demandeur interjette au Tribunal fédéral, parallèlement, un
recours de
droit public et un recours en réforme. Dans chacun d'eux, il précise
que le
jugement cantonal n'est pas attaqué quant au ch. 2 du dispositif
ordonnant à
X.________S.A. d'aménager la route située à la limite des parcelles
n°s 380
et 798, selon les modalités arrêtées par l'expert judiciaire. Dans le
recours
de droit public, le demandeur conclut à l'annulation du jugement de
la IIème
Cour civile cantonale et au renvoi de la cause à cette autorité pour
nouvelle
décision. Dans le recours en réforme, il requiert la condamnation de
la
défenderesse au paiement de respectivement 16 430 fr., 12 896 fr.50,
11 424
fr.90, 15 000 fr. et 15 240 fr., avec intérêts à 5% dès la survenance
des
différents sinistres, sous déduction du montant de 12 700 fr. (recte:
12 900
fr.), avec intérêts à 5% dès le 26 avril 1996, alloué par le Tribunal
fédéral. La motivation des deux recours (III. Beschwerdebegründung et
III.
Berufungsbegründung) est mot pour mot identique. La seule différence
réside
dans une partie de la remarque finale exprimée en page 21 du recours
de droit
public: "Die Beschwerde ist aus diesen Gründen gutzuheissen und der
Entscheid
des Kantonsgerichtes vom 31.1/8.2.2002 aufzuheben", et en page 18 du
recours
en réforme: "Die Berufung ist aus diesen Gründen gutzuheissen und der
Entscheid des Kantonsgerichtes vom 31.1/8.2.2002 zu reformieren."

En substance, le recourant expose, pour le premier dégât d'eau, de
novembre
1994, que le Tribunal cantonal a arbitrairement apprécié les preuves
en
méconnaissant le rapport de l'expert judiciaire, non contesté, au
profit des
conclusions de l'expert privé B.________. Or, ce dernier n'avait pas
eu
connaissance de tous les éléments du dommage, concernant certaines
interventions et le nombre d'heures de travail, alors qu'il aurait pu
être
établi à partir de la liste des travailleurs employés que contient
l'annexe
12 de son rapport. Appréciant ainsi les preuves contrairement à
l'art. 8 CC,
et ne procédant pas à l'audition complémentaire de l'expert
judiciaire selon
l'art. 248 aCPC/VS, le Tribunal cantonal avait finalement violé
l'art. 42 CO.

Pour le deuxième dégât d'eau, du 22 avril 1995, les mêmes griefs sont
adressés à la cour cantonale. Cette dernière s'est fondée sur
l'opinion de
l'expert privé, qui a supprimé sans explication plusieurs jours
entiers de
travail; de son côté l'expert judiciaire a reconnu entièrement le
dommage,
sous réserve des heures de travail qui n'étaient, pour lui, pas
objectivement
contrôlables.

Quant au troisième dégât d'eau, de juillet 1995, le recourant relève
que
l'expert judiciaire a reconnu tous les postes du dommage, sous
réserve des
heures de travail qui ne pouvaient être évaluées. L'expert privé ne
s'est pas
exprimé sur ce sinistre.

Le Tribunal cantonal a encore arbitrairement conclu à
l'irrecevabilité de la
demande de paiement de 15 240 fr. pour les frais d'entretien plus
intensifs
du système de drainage, en considérant qu'elle avait été formulée
pour la
première fois lors du débat final. En réalité, le recourant avait
invoqué
l'obligation pour l'intimée d'entretenir le système d'écoulement de
l'eau et
de goudronner la route d'accès dans sa réplique du 2 septembre 1997,
et dans
la remise d'un dossier photographique des 16/18 février 2000 à
l'occasion de
la procédure probatoire. Toutefois, ces documents sont parvenus au
Tribunal
cantonal dans un dossier partiel séparé. Le montant de 15 240 fr. a
été
articulé à l'occasion des débats finaux. Ainsi, la juridiction
cantonale
n'avait pas pris connaissance de l'état de fait et n'avait pas porté
son
attention sur les preuves, qu'elle avait appréciées arbitrairement en
s'appuyant sur l'art. 88 aCPC/VS, inapplicable en l'espèce.

Concernant enfin le dommage subi en raison de trous constatés dans la
paroi
translucide de la façade ouest de la halle, le recourant souligne
qu'il
découle d'un rapport de la police cantonale que le mari de la
concierge des
copropriétés V.________ et W.________ avait reconnu que des pierres
pouvaient
être projetées par la fraiseuse qu'il utilisait, ce qui ressortait
également
de l'état du revêtement de la route d'accès, non goudronnée. L'expert
judiciaire avait considéré le montant du dommage, à concurrence de 15
000
fr., comme raisonnable et le Tribunal cantonal n'avait tenu aucun
compte de
ces éléments,
en violation des art. 4 aCst. et 42 CO.

L'intimée conclut au rejet des recours avec suite de frais et dépens.

Le Tribunal cantonal se réfère à son jugement.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Interjeté par la partie demanderesse qui a succombé dans ses
conclusions
condamnatoires et dirigé contre un jugement final rendu en dernière
instance
cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une
contestation
civile dont la valeur litigieuse dépasse le seuil de 8000 fr. (art.
46 OJ),
le recours en réforme est en principe recevable, puisqu'il a été
formé en
temps utile (art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ).

Le recours en réforme est ouvert pour violation du droit fédéral,
mais non
pour violation directe d'un droit de rang constitutionnel (art. 43
al. 1 OJ)
ou pour violation du droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2a; 126
III 189
consid. 2a, 370 consid. 5).

Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral doit conduire son
raisonnement sur la base des faits contenus dans la décision
attaquée, à
moins que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient été
violées, qu'il y ait lieu à rectification de constatations reposant
sur une
inadvertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille compléter
les
constatations de l'autorité cantonale parce que celle-ci n'a pas tenu
compte
de faits pertinents et régulièrement allégués (art. 64 OJ; ATF 127
III 248
consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a). Dans la mesure où une partie
demanderesse
présente un état de fait qui s'écarte de celui contenu dans la
décision
attaquée sans se prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui
viennent d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte
(ATF 127
III 248 consid. 2c). Il ne peut être présenté de griefs contre les
constatations de fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux
(art. 55
al. 1 let. c OJ). Le recours n'est pas ouvert pour se plaindre de
l'appréciation des preuves et des constatations de fait qui en
découlent (ATF
126 III 189 consid. 2a; 125 III 78 consid. 3a; 122 III 26 consid.
4a/aa, 61
consid. 2c/bb, 73 consid. 6b/bb p. 80).

Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des
parties, mais
il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1
OJ), ni par
l'argumentation juridique retenue par la cour cantonale (art. 63 al.
3 OJ;
ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59 consid. 2a; 123 III 246
consid. 2).

2.
Le demandeur fait tout d'abord valoir une violation de l'art. 8 CC au
sujet
de la preuve des faits se rapportant au premier et au deuxième dégâts
d'eau.

2.1 Selon cette disposition, chaque partie doit, si la loi ne
prescrit le
contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son
droit. Sous
réserve d'une règle spéciale (instituant par exemple une présomption
légale),
l'art. 8 CC répartit le fardeau de la preuve (ATF 122 III 219 consid.
3c p.
223) pour toutes les prétentions fondées sur le droit privé fédéral
(ATF 124
III 134 consid. 2b/bb p. 143) et détermine, sur cette base, laquelle
des
parties doit assumer les conséquences d'un échec de la preuve (ATF
125 III 78
consid. 3b p. 79).

Il ne prescrit cependant pas quelles sont les mesures probatoires qui
doivent
être ordonnées; il ne détermine pas non plus sur quelles bases le
juge peut
forger sa conviction (ATF 122 III 219 consid. 3c; 118 II 142 consid.
3a, 365
consid. 1 p. 366). L'art. 8 CC est éludé (et en conséquence violé) si
le juge
admet ou écarte un fait pertinent et contesté sans aucun raisonnement
ni
aucun commencement de preuve (Bernard Corboz, Le recours en réforme au
Tribunal fédéral, SJ 2000 II p. 1 ss, 41). En revanche, dès le moment
où le
juge tire des déductions en examinant les éléments réunis, il procède
à une
appréciation des preuves; or l'appréciation des preuves et les
constatations
de fait qui en découlent ne sont pas régies par le droit fédéral et ne
peuvent donner lieu à un recours en réforme, mais seulement à un
recours de
droit public pour arbitraire (ATF 126 III 10 consid. 2b p. 13; 125
III 78
consid. 3a; 122 III 61 consid. 2c/cc p. 66).

2.2 Lorsqu'il reproche au Tribunal cantonal de s'être fondé
principalement
sur l'expertise B.________, sans l'avoir confrontée aux déclarations
des
parties et des témoins et à certaines pièces du dossier, notamment
sans égard
aux conclusions de l'expert judiciaire, le demandeur reproche à la
juridiction cantonale d'avoir préféré un moyen de preuve à d'autres
pour
asseoir son opinion. Une telle critique relève de l'appréciation des
preuves
et s'avère par conséquent irrecevable dans le cadre du présent
recours en
réforme, dès lors que, lorsque le juge a procédé à une telle
appréciation, la
question de la répartition du fardeau de la preuve ne se pose plus,
ce qui
vide de son objet le grief de violation de l'art. 8 CC. En
l'occurrence, le
demandeur a invoqué le moyen pris de l'appréciation arbitraire des
preuves
dans le recours de droit public déposé parallèlement au recours en
réforme,
et sur lequel le Tribunal de céans s'est prononcé en le rejetant.

De même, lorsque le demandeur fait grief au Tribunal cantonal de ne
pas avoir
apprécié les pièces et les preuves selon l'art. 8 CC et de n'avoir
tenu aucun
compte de l'expérience de la vie, alors que la cour cantonale expose
très
succinctement pourquoi elle a suivi l'expertise B.________, en raison
de la
grande difficulté de l'expert judiciaire de contrôler dans le détail
les
factures présentées, notamment en ce qui concerne les heures de
travail, il
s'en prend aux bases sur lesquelles le juge a établi son
raisonnement, et non
pas au droit à la preuve, et à la répartition du fardeau de celle-ci.
Ce
moyen, irrecevable dans la présente procédure, a été développé par le
demandeur dans le recours de droit public connexe, sur lequel le
Tribunal de
céans a statué.

3.
3.1Le demandeur se plaint d'une mauvaise application de l'art. 42 CO
de la
part du Tribunal cantonal, en ce que ce dernier n'a pas retenu le
montant
réclamé pour le premier sinistre, de novembre 1994, en ignorant
certains
postes du dommage, notamment les frais de granulés et les dépenses
relatives
aux heures de travail. Le même grief était adressé à la juridiction
cantonale
pour les dégâts d'eau du 22 avril 1995.

Pour le troisième dommage, soit l'inondation des 13 et 14 juillet
1995, le
demandeur estime que le Tribunal cantonal aurait dû considérer le
préjudice
allégué comme fondé, notamment par référence à l'expertise judiciaire.

Sous let. E, le demandeur critique enfin la décision du Tribunal
cantonal de
n'avoir pas fixé à 15 000 fr., en application de l'art. 42 CO, le
montant du
préjudice, qualifié de "raisonnable" par l'expert judiciaire, pour ce
qui est
du jet de pierres contre la paroi translucide du centre de tennis.

3.2 La fixation du dommage ressortit en principe au juge du fait.
Saisi d'un
recours en réforme, le Tribunal fédéral n'intervient que si l'autorité
cantonale a méconnu la notion juridique du dommage ou si elle a violé
des
principes juridiques relatifs au calcul du préjudice. L'estimation du
dommage
d'après l'art. 42 al. 2 CO repose sur le pouvoir d'apprécier les
faits; elle
relève donc de la constatation des faits, laquelle ne peut être revue
en
instance de réforme. Certes, ressortit au droit le point de savoir
quel degré
de vraisemblance la survenance du dommage doit atteindre pour
justifier
l'application de l'art. 42 al. 2 CO et si les faits allégués, en la
forme
prescrite et en temps utile, permettent de statuer sur la prétention
en
dommages-intérêts litigieuse. Il n'en demeure pas moins que, dans la
mesure
où l'autorité cantonale, sur la base d'une appréciation des preuves
et des
circonstances concrètes, a admis ou nié que la vraisemblance de la
survenance
du préjudice confinait à la certitude, elle a posé une constatation
de fait
qui est, sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce,
soustraite au
contrôle de la juridiction fédérale de réforme (ATF 126 III 388
consid. 8a et
les références).

3.3 Le demandeur invoque l'art. 42 CO, sans préciser qu'il fonde en
réalité
son argumentation sur une violation éventuelle de l'art. 42 al. 2 CO,
concernant la fixation du montant du dommage par le Tribunal cantonal.

Dans les deux premiers cas (A et B), la cour cantonale a fixé le
montant du
préjudice à des valeurs différentes de celles proposées par le
demandeur,
procédant à une appréciation des faits qui n'est pas susceptible
d'être
corrigée en instance de réforme. Sur ce point, le recours est
irrecevable.

Concernant le troisième dégât d'eau, le Tribunal cantonal a
expressément
admis que le demandeur l'avait subi, mais il a reproché à ce dernier
de
s'être contenté de déposer un décompte, sans aucune pièce
justificative
attestant de la commande de matériaux ou le paiement de factures en
rapport
avec la remise en état des lieux. De même, le Tribunal cantonal
relève que le
demandeur n'avait pas prouvé le nombre d'heures passées à ces travaux
par
l'audition des personnes employées à leur réalisation, ce pourquoi les
prétentions devaient être rejetées, faute de preuves suffisantes.

D'après la jurisprudence, pour que l'art. 42 al. 2 CO soit
applicable, il
faut que les preuves du dommage fassent défaut ou que leur
administration ne
puisse être raisonnablement exigée du lésé (ATF 105 II 87 consid. 3
p. 89 et
les arrêts cités). L'art. 42 al. 2 CO ne constitue en effet pas une
solution
de facilité pour le plaideur qui omet d'apporter des preuves ou qui
ferait
obstacle à leur administration. L'application de cette disposition
suppose en
outre que la partie à laquelle le fardeau de la preuve incombe
fournisse au
juge, dans la mesure du possible, tous les éléments permettant
l'évaluation
ex aequo et bono du montant du dommage (ATF 113 II 323 consid. 9c p.
343; 98
II 34 consid. 2; 97 II 216 consid. 1).

En l'espèce, malgré une certaine difficulté quant à l'estimation du
nombre
d'heures de travail nécessaires à la restitution des lieux dans leur
état
d'usage, le demandeur aurait pu fournir les preuves et les témoignages
nécessaires à fixer directement le dommage, ou, à tout le moins, à
permettre
au juge de l'évaluer en fonction de ces données partielles, en
application de
l'art. 42 al. 2 CO. En l'absence de tels éléments, le Tribunal
cantonal
pouvait retenir qu'il n'était pas tenu d'appliquer l'art. 42 al. 2
CO, sans
violer cette disposition. Le recours doit être rejeté sur ce point.

3.4 Enfin, concernant les atteintes causées à la paroi ouest du
centre de
tennis par C.________, le dommage et le montant du préjudice
ressortent du
dossier, notamment des déclarations de l'expert judiciaire. Toutefois,
l'auteur de ce dommage n'est pas la société intimée, mais
l'auxiliaire d'une
employée de deux communautés de copropriétaires, de sorte que, faute
de
légitimation passive de l'intimée, la juridiction cantonale a eu
raison de
rejeter les prétentions du demandeur à son égard.

Le recours en réforme doit donc être intégralement rejeté, dans la
mesure où
il est recevable.

4.
Vu l'issue du recours, les frais seront mis à la charge du demandeur
qui
succombe, soit un émolument de 3000 fr. Celui-ci devra aussi
s'acquitter
d'une indemnité de 3000 fr. à titre de dépens en faveur de l'intimée.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable, et le
jugement
attaqué est confirmé.

2.
Un émolument judiciaire de 3000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le recourant versera à l'intimée une indemnité de 3000 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
IIe Cour civile du Tribunal cantonal du canton du Valais.

Lausanne, le 25 juin 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.110/2002
Date de la décision : 25/06/2002
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-06-25;4c.110.2002 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award