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18/06/2002 | SUISSE | N°2P.56/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 juin 2002, 2P.56/2002


{T 0/2}
2P.56/2002/svc

Arrêt du 18 juin 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler et Berthoud, juge suppléant,
greffière Kurtoglu-Jolidon.

B. ________, recourant, représenté par Me Jacques Barillon, avocat,
rue du
Rhône 29, 1204 Genève,

contre

Département de justice, police et sécurité du canton de Genève, rue de
l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3962,
1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève,
rue des Chaudronnier

s 3, 1204 Genève.

art. 9 et 27 Cst. (carte professionnelle de chauffeur indépendant;
permis de
stationnement)

(...

{T 0/2}
2P.56/2002/svc

Arrêt du 18 juin 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler et Berthoud, juge suppléant,
greffière Kurtoglu-Jolidon.

B. ________, recourant, représenté par Me Jacques Barillon, avocat,
rue du
Rhône 29, 1204 Genève,

contre

Département de justice, police et sécurité du canton de Genève, rue de
l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3962,
1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève,
rue des Chaudronniers 3, 1204 Genève.

art. 9 et 27 Cst. (carte professionnelle de chauffeur indépendant;
permis de
stationnement)

(recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal administratif du
canton
de Genève du 8 janvier 2002)

Faits:

A.
L. ________ exploitait à N.________, depuis le 22 janvier 1985, une
entreprise de taxis pour laquelle il bénéficiait de six permis de
stationnement. Son fils B.________ a officiellement commencé à
travailler
pour le compte de son père le 3 janvier 1998, après avoir obtenu sa
carte
professionnelle de chauffeur de taxi le 20 octobre 1997. L.________
est
décédé le 2 novembre 2000. Le 7 novembre 2000, son fils a demandé au
Département de justice, police et sécurité du canton de Genève
(ci-après: le
Département) à pouvoir reprendre l'entreprise de taxis familiale.

Par décision du 22 décembre 2000, ledit Département lui a refusé le
transfert
des permis de stationnement et lui a fixé un délai au 31 mars 2001
pour le
dépôt des plaques correspondantes.

B.
Le 8 janvier 2002, le Tribunal administratif du canton de Genève
(ci-après:
le Tribunal administratif) a rejeté le recours de B.________. Il a
retenu en
substance que le refus du Département était conforme au droit actuel
sur les
services de taxis. En effet, le Tribunal administratif a estimé que
B.________ ne pouvait pas devenir titulaire des permis de
stationnement de
son père dès lors qu'il ne remplissait pas les conditions légales de
dévolution et cession desdits permis, à savoir qu'il n'était pas
détenteur
d'une carte professionnelle de chauffeur indépendant ou d'une
autorisation
d'exploiter lors de l'ouverture de la succession. Il ne remplissait
pas non
plus les conditions légales (en l'occurrence la pratique effective de
l'activité de chauffeur comme indépendant depuis plus de trois ans)
pour
l'obtention facilitée de la carte professionnelle de chauffeur
indépendant
prévue par les dispositions finales et transitoires du droit sur les
services
de taxis. D'autre part, il ne pouvait pas bénéficier de la dérogation
prévue
par celui-ci pour tenir compte de situations particulières ou de cas
de
rigueur.

C.
Agissant le 15 février 2002 par la voie du recours de droit public,
B.________ demande au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens,
d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif du 8 janvier 2002. Il
invoque le
grief d'appréciation arbitraire des preuves et d'application
arbitraire du
droit sur les services des taxis (art. 9 Cst.) ainsi que la violation
de la
liberté économique (art. 27 Cst.).

Le Tribunal administratif persiste dans les considérants et le
dispositif de
son arrêt et renonce à formuler des observations. Le Département
conclut au
rejet du recours.

D.
Par ordonnance du 13 mars 2002, le Président de la IIe Cour de droit
public a
accordé l'effet suspensif au recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi contre
une
décision finale prise en dernière instance cantonale, qui ne peut être
attaquée que par la voie du recours de droit public dans la mesure où
elle
repose uniquement sur le droit cantonal et qui touche le recourant
dans ses
intérêts juridiquement protégés, le présent recours est recevable au
regard
des art. 84 ss OJ.

2.
Le recourant soutient que le Tribunal administratif a mal apprécié
les faits
de la cause et a procédé à une application arbitraire des art. 12 et
36 de la
loi genevoise du 26 mars 1999 sur les services de taxis (ci-après :
LST/GE),
entrée en vigueur le 1er juin 1999. Il estime en effet que celui-ci a
omis de
tenir compte, d'une part, de la durée pendant laquelle il a conduit
son taxi
de manière effective, d'autre part, de l'impossibilité de subir les
examens
prévus par cette loi lorsqu'il a déposé sa demande de transfert des
permis de
stationnement et que le Tribunal administratif a fait fi de la
dérogation à
laquelle il pouvait prétendre en application de l'art. 36 al. 5
LST/GE.

2.1 La jurisprudence rendue en application de l'art. 4 aCst., mais
qui garde
toute sa valeur sous l'empire de l'art. 9 Cst., reconnaît au juge un
important pouvoir d'appréciation dans la constatation des faits et
leur
appréciation (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40). Le Tribunal fédéral
n'intervient en conséquence que si le juge du fait a abusé de ce
pouvoir, en
particulier lorsqu'il méconnaît des preuves pertinentes ou
qu'arbitrairement
il n'en tient pas compte (ATF 118 Ia 28 consid. 1b p. 30; 112 Ia 369
consid.
3 p. 371), lorsque des constatations de fait sont manifestement
fausses (ATF
101 Ia 298 consid. 5 p. 306; 98 Ia 140 consid. 3a p. 142 et les arrêts
cités), enfin lorsque l'appréciation des preuves est tout à fait
insoutenable
(ATF 118 Ia 28 consid. 1b p. 30; 117 Ia 97 consid. 5b p. 106).

En outre, une décision est arbitraire lorsqu'elle viole gravement une
règle
ou un principe juridique clair et indiscuté ou lorsqu'elle contredit
d'une
manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Le
Tribunal
fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité cantonale de
dernière instance que si elle est insoutenable ou en contradiction
évidente
avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motifs
objectifs ou en
violation d'un droit certain; par ailleurs, il ne suffit pas que les
motifs
de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que
celle-ci
soit arbitraire dans son résultat. Il n'y a pas arbitraire du seul
fait
qu'une autre interprétation de la loi est possible ou même préférable
(ATF
127 I 60 consid. 5a p. 70; 125 I 166 consid. 2a p. 168 et les arrêts
cités).

2.2 L'art. 8 LST/GE dispose que le stationnement d'un véhicule sur
les places
réservées aux taxis sur le domaine public est subordonné à l'obtention
préalable d'un permis de stationnement délivré par le département
(al. 1). Le
permis est délivré au titulaire d'une carte professionnelle de
chauffeur
indépendant ou d'une autorisation d'exploiter un service de taxis
(al. 2). Le
permis est strictement personnel et intransmissible, sous réserve de
l'art.
12 LST/GE (al. 3).

Sous le titre "Dévolution et cession des permis de stationnement",
l'art. 12
LST/GE prévoit qu'un permis de stationnement n'est transmissible à un
héritier en ligne directe qu'à la condition alternative que cet
héritier
dispose d'une carte professionnelle de chauffeur indépendant (art. 5
LST/GE)
ou qu'il soit détenteur d'une autorisation d'exploiter un service de
taxis
(art. 6 LST/GE). Le moment déterminant pour l'examen de cette
condition est
celui de la date d'ouverture de la succession.
Au chapitre des dispositions finales et transitoires, l'art. 36 LST/GE
réglemente comme suit la situation des chauffeurs et exploitants déjà
au
bénéfice d'une autorisation:
"1. Les chauffeurs, suisses ou au bénéfice du droit de séjourner en
Suisse
tout en étant exempté des mesures de limitation d'accès à l'emploi,
qui, lors
de l'entrée en vigueur de la loi, sont au bénéfice d'une carte
professionnelle délivrée conformément à l'article 8 de la loi du 14
septembre
1979 depuis plus de trois ans et qui exercent de manière effective
leur
activité de taxi comme indépendant, reçoivent la carte
professionnelle de
chauffeur indépendant prévue à l'article 5.

2. Les chauffeurs qui, lors de l'entrée en vigueur de la loi, ne
remplissent
pas les conditions fixées à l'alinéa 1, mais sont au bénéfice d'une
carte
professionnelle délivrée conformément à l'article 8 de la loi du 14
septembre
1979 et exercent de manière effective leur activité de taxi,
reçoivent la
carte professionnelle de chauffeur employé prévue à l'article 4.

3. Les personnes physiques qui, lors de l'entrée en vigueur de la
loi, sont
au bénéfice d'une autorisation d'exploiter délivrée conformément à
l'article
2 de la loi du 14 septembre 1979 sur les taxis reçoivent
l'autorisation
d'exploiter prévue à l'article 6.

4. Les personnes physiques qui remplissent les conditions prévues aux
alinéas 1 ou 3 sont dispensées de l'obligation d'obtenir un brevet
d'exploitant.

5. Le département peut accorder des dérogations aux personnes visées
à
l'alinéa 2 pour tenir compte de situations particulières ou de cas de
rigueur. (...)"
2.3Il n'est pas contesté que le 2 novembre 2000, date du décès de son
père,
le recourant n'était pas détenteur d'une autorisation d'exploiter et
ne
disposait pas non plus d'une carte professionnelle de chauffeur
indépendant,
qu'il n'a sollicitée que le 19 janvier 2001. Après l'entrée en
vigueur de la
loi en cause, il n'avait requis que la délivrance d'une carte
professionnelle
de chauffeur employé, au sens de l'art. 4 LST/GE. La carte pour la
conduite
d'un taxi qui lui a été délivrée le 20 octobre 1997 ne peut pas être
assimilée à la carte professionnelle de chauffeur indépendant au sens
de
l'art. 5 LST/GE. La loi du 14 septembre 1979, en vigueur jusqu'au 31
mai
1999, ne prévoyait, à son art. 8, qu'une seule catégorie de carte
professionnelle. La loi actuelle distingue la carte de chauffeur
employé
(art. 4 LST/GE) de celle de chauffeur indépendant (art. 5 LST/GE).
Son art.
36 al. 1 prévoit que les titulaires de la carte professionnelle
délivrée
avant l'entrée en vigueur de la loi, soit avant le 1er juin 1999,
peuvent
recevoir une carte professionnelle de chauffeur indépendant à la
condition
d'avoir exercé de manière effective une activité de taxi en qualité
d'indépendant pendant plus de trois ans. Donc, même si le recourant
avait
exercé depuis le 20 octobre 1997 une activité effective de chauffeur
de taxi
indépendant, la condition de durée de l'art. 36 al. 1 LST/GE ne
serait pas
remplie, l'activité en cause s'étant déroulée sur une période de
dix-neuf
mois et douze jours. L'échéance de la période de trois ans de l'art.
36 al. 1
LST/GE est en effet celle du 1er juin 1999, date d'entrée en vigueur
de la
loi du 26 mars 1999, et non pas, comme le soutient le recourant,
celle du 7
novembre 2000, correspondant à la demande de transfert des permis de
stationnement.

En retenant que le recourant n'avait pas exercé une activité de
chauffeur de
taxi pendant trois ans, le Tribunal administratif a procédé non
seulement à
une saine appréciation des preuves mais à une application correcte de
l'art.
36 al. 1 LST/GE. La condition de durée de plus de trois ans faisant
défaut,
l'autorité intimée n'avait pas à se prononcer, dans le cadre de cette
disposition légale, sur le caractère effectif de l'activité du
recourant ni à
examiner si l'intensité de sa collaboration dans l'entreprise de son
père
permettait de l'assimiler à une activité indépendante.

2.4 L'absence d'épreuve d'examens avant le mois de mai 2001 est sans
conséquence dans le cas d'espèce. En effet, c'est au jour de
l'ouverture de
la succession que le recourant devait être au bénéfice d'une carte
professionnelle de chauffeur indépendant, conformément à l'art. 12
LST/GE.
Or, il est établi que le recourant n'a sollicité l'octroi d'une telle
carte
que le 19 janvier 2001 et qu'il a subi un échec lors d'examens de
décembre
2001. Contrairement à ce que soutient le recourant, l'art. 12 LST/GE
n'exige
pas seulement que les conditions légales et réglementaires
nécessaires à
l'obtention de la carte professionnelle de chauffeur indépendant
soient
réunies lors de l'ouverture de la succession mais que l'héritier soit
déjà
titulaire de cette carte. Comme il ne remplissait pas les conditions
de
l'art. 36 al. 1 LST/GE, si le recourant projetait de reprendre les
places de
stationnement de son père au décès de celui-ci, il lui incombait de
solliciter une carte professionnelle de chauffeur indépendant dès le
1er
janvier 2000, date d'entrée en vigueur du règlement d'exécution de la
LST/GE.
Dans cette hypothèse, et sous réserve de l'exercice effectif de la
profession, l'absence d'épreuve d'examens avant la date du décès du
père du
recourant aurait vraisemblablement pu constituer un motif de
dérogation au
sens de l'art. 36 al. 5 LST/GE.

L'autorité intimée n'a donc pas abusé de son pouvoir d'appréciation en
retenant que la requête du recourant tendant à l'obtention d'une carte
professionnelle de chauffeur indépendant, déposée après le décès de
son père,
avait été présentée trop tardivement pour que le recourant puisse
bénéficier
de la transmissibilité des permis de stationnement prévue par l'art.
12
LST/GE.

2.5 Le recourant fait grief à l'autorité intimée de ne pas l'avoir
mis au
bénéfice des dérogations prévues à l'art. 36 al. 5 LST/GE. Cette
disposition
permet d'accorder une carte professionnelle de chauffeur indépendant
aux
titulaires d'une carte professionnelle délivrée sous l'empire de
l'ancienne
loi du 14 septembre 1979 qui ne remplissaient pas, au 1er juin 1999,
la
condition de l'exercice de manière effective, depuis plus de trois
ans, d'une
activité
indépendante de chauffeur de taxi au sens de l'art. 36 al. 1
LST/GE.
Comme on l'a vu, le recourant ne remplissait pas, à la date
déterminante du
1er juin 1999, la condition de la durée supérieure à trois ans (cf.
consid.
2.3 ci-dessus). En outre, il paraît difficile d'admettre que le
recourant ait
exercé de manière effective l'activité de chauffeur de taxi entre le
20
octobre 1997, date de l'obtention de sa carte professionnelle de
chauffeur de
taxi, et le 31 mai 1999. Il n'a en effet travaillé que soixante-neuf
jours en
1998 et cinquante-cinq jours en 1999, pour une moyenne quotidienne de
sept
heures. Ces durées correspondent à un taux d'activité de l'ordre de
30%,
respectivement de 25%, donc à un emploi accessoire. Ce caractère
accessoire
s'explique d'ailleurs par le fait que le recourant a étudié les
langues
étrangères appliquées à C.________ de 1998 à 2000. De plus, le
recourant a
exercé l'activité accessoire de chauffeur de taxi pour le compte de
son père
et non pas en qualité d'indépendant. Ce n'est qu'après avoir renoncé
à ses
études qu'il s'est réellement investi dans la profession, soit durant
le
deuxième semestre 2000. Pendant le premier semestre 2000, il n'a
travaillé
qu'à raison de vingt-trois jours, soit moins de quatre jours par mois
en
moyenne. Cet éloignement de la profession de chauffeur de taxi
explique que
le recourant n'ait pas sollicité, au début de l'année 2000, l'octroi
d'une
carte professionnelle de chauffeur indépendant. L'art. 36 al. 5 LST/GE
constitue une disposition dérogatoire à la réglementation légale et,
à ce
titre, doit être interprété de façon restrictive. Il n'est dès lors
pas
arbitraire de considérer qu'il ne s'applique pas au recourant qui, au
1er
juin 1999, disposait d'une carte professionnelle de chauffeur de taxi
que
depuis moins de vingt mois et n'exerçait la profession qu'à titre
accessoire,
pour le compte de son père.

Comme l'expose le Département, l'art. 36 al. 5 LST/GE a
principalement pour
but de tenir compte de circonstances particulières liées à l'exercice
de la
profession de chauffeur de taxi pendant de nombreuses années (le
mémorial des
séances du Grand Conseil genevois du 25 juin 1998, p. 3750, évoque la
dispense du brevet d'exploitant pour un chauffeur de taxi ayant
exercé son
métier pendant vingt ans comme employé et qui souhaite devenir
indépendant).
En se fondant sur la brièveté de l'exercice de l'activité de
chauffeur de
taxi du recourant pour refuser l'application de l'art. 36 al. 5
LST/GE, le
Tribunal administratif a donc respecté la volonté du législateur. Il
faut
certes admettre que l'application de cette disposition ne dépend pas
exclusivement du critère de la durée de l'activité professionnelle.
C'est
ainsi qu'un cas de rigueur pourrait être retenu dans l'hypothèse d'un
chauffeur actif depuis plusieurs années qui aurait sollicité, dès
l'entrée en
vigueur de la loi du 26 mars 1999, une carte professionnelle de
chauffeur
indépendant mais qui n'aurait pas pu l'obtenir faute de session
d'examens. Il
est en revanche douteux que les conséquences économiques liées au
dépôt des
plaques de stationnement dont le père du recourant était titulaire
puissent
être retenues au regard de l'art. 36 al. 5 LST/GE. En effet,
l'intention du
législateur était de limiter la transmissibilité des permis de
stationnement
et d'éviter de leur conférer une valeur marchande. Le législateur a
donc pris
en compte le risque de fermeture de certaines entreprises permettant
la
libération de places de stationnement en faveur des candidats
figurant sur la
liste d'attente de tels emplacements. Pour le surplus, c'est à tort
que le
recourant prétend s'être trouvé dans une situation nouvelle et
imprévisible;
il pouvait, dès l'entrée en vigueur de la loi du 26 mars 1999,
prendre les
dispositions pour répondre aux conditions de l'art. 12 LST/GE. Or, à
cette
époque, il se consacrait principalement à ses études et n'envisageait
pas de
reprendre l'exploitation de l'entreprise de son père. L'existence
d'un cas de
rigueur ne saurait être retenue du seul fait que le recourant s'est
réellement investi dans la profession de chauffeur de taxi depuis le
deuxième
semestre 2000.

Le grief d'arbitraire dans l'appréciation des preuves et dans
l'application
des articles 12 et 36 LST/GE doit dès lors être écarté.

3.
Le recourant fait valoir que l'art. 12 LST/GE instaure une distinction
injustifiée entre concurrents et une restriction disproportionnée à sa
liberté économique dans la mesure où il exige de l'héritier d'un
titulaire de
permis de stationnement qu'il possède une carte de chauffeur
indépendant pour
obtenir le transfert de ces permis.

Bien que le délai pour attaquer la constitutionnalité de l'art. 12
LST/GE,
entré en vigueur le 1er juin 1999, soit échu depuis longtemps (art.
89 OJ),
le recourant peut invoquer ce grief à l'occasion d'un cas
d'application
concrète de cette disposition.

3.1 La liberté économique, garantie par l'art. 27 Cst., protège toute
activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant
à la
production d'un gain ou d'un revenu, telle que l'activité de
chauffeur de
taxi indépendant, même si cette activité implique un usage accru du
domaine
public (ATF 121 I 129 consid. 3b p. 131; 108 Ia 135 consid. 3 p.
136). Cet
usage accru du domaine public peut cependant être réglementé par
l'Etat; le
législateur cantonal peut ainsi limiter le nombre de places de
stationnement
réservées aux taxis et déterminer le cercle des bénéficiaires de ces
emplacements. Indépendamment de l'usage accru du domaine public,
l'Etat peut
soumettre l'exercice de la profession de chauffeur de taxi à
l'obtention
d'une autorisation pour lui permettre d'exercer un contrôle efficace
de cette
branche d'activité économique qui, par sa fonction et son importance,
se
rapproche d'un service public. Une telle exigence ne viole pas l'art.
27 Cst.
mais constitue une mesure justifiée par l'intérêt public (ATF 99 Ia
394
consid. 2 et 3 p. 397ss) qui doit respecter le principe de la
proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst.), c'est-à-dire se limiter à ce
qui est
nécessaire à la réalisation des buts poursuivis (ATF 125 I 335
consid. 2a p.
337 et les arrêts cités).

3.2 L'art. 12 LST/GE constitue une dérogation au principe de
l'intransmissibilité des permis de stationnement prévu par l'art. 8
al. 3
LST/GE. Le législateur cantonal a donc assuré la pérennité des
entreprises de
taxis. L'exigence de la détention d'une carte professionnelle de
chauffeur
indépendant ou d'une autorisation d'exploiter n'est pas propre à la
dévolution des permis de stationnement aux héritiers mais s'applique
à toute
délivrance de tels permis. La réglementation de la transmissibilité
des
permis de stationnement répond au souci du législateur cantonal de
lutter
contre le commerce de ces permis. L'art. 11 LST/GE prohibe d'ailleurs
la
location des places minéralogiques liées à un permis de
stationnement. Le
risque d'un tel commerce n'est en effet pas négligeable, compte tenu
de la
limitation des permis de stationnement prévue à l'art. 9 LST/GE. Il
est donc
justifié d'exiger de l'héritier qu'il remplisse les conditions liées
à la
délivrance de tels permis; à défaut, il serait avantagé par rapport
aux
autres chauffeurs de taxi inscrits sur la liste d'attente établie par
le
Département conformément à l'art. 9 al. 5 LST/GE.

La réglementation prévue par la LST/GE quant à la transmissibilité
des permis
de stationnement répond donc à un intérêt public digne de protection.

3.3 L'argument du recourant selon lequel l'art. 12 LST/GE serait
constitutif
d'une inégalité de traitement entre concurrents n'est pas fondé. En
soumettant l'obtention de la carte professionnelle de chauffeur
indépendant à
l'obtention du brevet d'exploitant, le législateur s'est donné les
moyens de
vérifier que les candidats possèdent les aptitudes et les
connaissances
requises, indépendamment de la durée de leur expérience de chauffeur
de taxi.
A cet égard, une longue pratique professionnelle facilitera
assurément la
réussite des épreuves d'examens. Il paraît donc très théorique
d'imaginer,
comme le fait le recourant, qu'un chauffeur de taxi obtienne une carte
professionnelle d'indépendant sans être au bénéfice d'une certaine
expérience
professionnelle. Le critère de la durée de l'expérience
professionnelle ne
saurait donc être déterminant à lui seul et l'exigence d'un examen
pour
l'obtention de la carte professionnelle de chauffeur indépendant
permet de
respecter le principe de l'égalité entre les candidats. En outre, la
LST/GE
permet, à son art. 36 al. 5, de tenir compte de la durée de
l'expérience
professionnelle acquise lors de son entrée en vigueur.

3.4 Enfin, c'est en vain que le recourant invoque le régime
transitoire
aménagé en faveur des héritiers d'un exploitant d'un café-restaurant
ou d'un
hôtel. La réglementation des professions de cafetier-restaurateur et
hôtelier
ne répond pas aux mêmes préoccupations que celles des services de
taxis.
Contrairement aux patentes d'exploitation d'établissements publics,
les
autorisations d'exploiter un service de taxis, comprenant le droit de
stationner sur la voie publique, impliquent un usage accru du domaine
public
et ne confèrent aucun droit acquis. Le législateur a volontairement
limité
leur transmissibilité et leur valeur marchande. Cet objectif justifie
qu'à
l'inverse de celle des patentes d'exploitation d'établissements
publics, la
réglementation des permis de stationnement ne prévoie pas, en cas de
décès,
la possibilité pour l'héritier de continuer à bénéficier, à titre
précaire,
des places de stationnement de l'exploitant décédé.

La réglementation prévue par la LST/GE quant à la transmissibilité
des permis
de stationnement ne viole pas la liberté économique garantie par
l'art. 27
Cst. Fondée sur un intérêt public digne de protection, elle n'est pas
source
d'inégalité de traitement entre concurrents.

4.
Vu ce qui précède, le recours doit être rejeté dans la procédure de
l'art.
36a OJ.

Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art.
156 al.
1. 153 et 153a OJ). Il n'est pas alloué de dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Département de justice, police et sécurité et au Tribunal
administratif du
canton de Genève.

Lausanne, le 18 juin 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.56/2002
Date de la décision : 18/06/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-06-18;2p.56.2002 ?
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