La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2002 | SUISSE | N°2P.182/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 juin 2002, 2P.182/2001


{T 0/2}
2P.182/2001 /dxc

Arrêt du 18 juin 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Müller, Yersin, Merkli et Zappelli, juge suppléant,
greffière Kurtoglu-Jolidon.

Union Technique Suisse, 8006 Zürich,
X.________,
recourants,
tous les deux représentés par Me Patrice Girardet, avocat,
rue de Bourg 8, case postale 3712, 1002 Lausanne,

contre

Conseil d'Etat du canton de Vaud, 1014 Lausanne,
représenté par Me Denis Sulliger, avocat, rue du Simplon 13,
ca

se postale 1085, 1800 Vevey 1,

art. 27, 49 Cst.: liberté économique; primauté du droit fédéral

(recours de dr...

{T 0/2}
2P.182/2001 /dxc

Arrêt du 18 juin 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Müller, Yersin, Merkli et Zappelli, juge suppléant,
greffière Kurtoglu-Jolidon.

Union Technique Suisse, 8006 Zürich,
X.________,
recourants,
tous les deux représentés par Me Patrice Girardet, avocat,
rue de Bourg 8, case postale 3712, 1002 Lausanne,

contre

Conseil d'Etat du canton de Vaud, 1014 Lausanne,
représenté par Me Denis Sulliger, avocat, rue du Simplon 13,
case postale 1085, 1800 Vevey 1,

art. 27, 49 Cst.: liberté économique; primauté du droit fédéral

(recours de droit public contre le règlement du Conseil d'Etat du
canton de
Vaud du 14 mai 2001 modifiant celui du 19 septembre 1986
d'application de la
loi du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les
constructions
[RATC])

Faits:

A.
Le 14 mai 2001, le Conseil d'Etat du canton de Vaud (ci-après: le
Conseil
d'Etat) a adopté un règlement modifiant celui du 19 septembre 1986
d'application de la loi du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du
territoire et
les constructions (ci-après: RATC ou le règlement).

Au chapitre III "Formalités relatives à la construction", section I
"Permis
de construire", ce règlement contient notamment les nouvelles
dispositions
suivantes:
Art. 69 - Pièces et indications à fournir avec la demande de permis de
construire

"1 ...
ch. 1 ...
L'ingénieur géomètre breveté authentifie la conformité du plan de
situation
au plan cadastral mis à jour et les indications mentionnées; ..."
Art. 71 - Dérogations

"Lorsqu'un projet de construction prévoit une dérogation aux
règlements ou
aux plans d'affectation, celle-ci doit être mentionnée sur le plan de
situation authentifié par l'ingénieur géomètre breveté."
A la section II "Exécution des travaux, permis d'habiter ou
d'utiliser", il
est précisé (seul l'al. 3 de l'art. 77 a été modifié):
Art. 77 - Exécution des travaux

"1 Outre les avis à donner au commencement et à l'achèvement des
travaux, le
maître de l'ouvrage est, dans les cas de constructions nouvelles,
d'agrandissement, de surélévation ou de transformation de bâtiments,
tenu
d'aviser par écrit la municipalité de l'état d'avancement des travaux
en vue
des vérifications d'implantation.

2 Cet avis est donné après l'établissement des gabarits délimitant
l'implantation, puis lorsque l'ouvrage atteint le niveau de la
première
dalle.

3 Les communes qui n'ont pas de service technique font exécuter ces
vérifications par un ingénieur géomètre breveté lorsque les distances
jusqu'aux fonds voisins sont proches du minimum autorisé ou que
l'implantation du bâtiment dépend d'une limite des constructions.
L'ingénieur
géomètre breveté assume la responsabilité des contrôles effectués.
(...)"

B.
Agissant par la voie du recours de droit public, l'Union Technique
Suisse et
X.________ demandent au Tribunal fédéral, sous suite de frais et
dépens,
d'annuler l'article 69 al. 1 ch. 1 al. 2 RATC et de le remplacer par
le texte
suivant:
"Ce plan est établi par un ingénieur au sens des articles 107a alinéa
1 LATC
et premier de l'arrêté du Conseil d'Etat du canton de Vaud du 23
avril 2001
fixant la liste des spécialistes en mensuration autorisés à réaliser
les
travaux de la mensuration officielle portant sur les couches
d'information «
couverture du sol », « objets divers et éléments linéaires », «
altimétrie »
et « conduites »."
Les recourants concluent aussi à l'annulation de la dernière partie de
l'article 71 RATC, à savoir les mots: «(...) authentifié par
l'ingénieur
géomètre breveté». Enfin, ils demandent l'annulation des mots
«géomètre
breveté» figurant aux deux phrases de l'art. 77 al. 3 RATC.
Invoquant les art. 8, 27, 36 et 94 Cst., les recourants prétendent que
l'exigence, posée par les art. 69 al. 1 ch. 1 al. 2 et 71 RATC,
d'authentification de plan de situation par un ingénieur géomètre
breveté ne
répond à aucune nécessité objective et à aucun but de police mais vise
uniquement au maintien de la mainmise desdits ingénieurs sur le marché
lucratif de la mise à l'enquête des projets de construction important
et
violerait leur liberté économique et le principe de l'égalité devant
la loi.
Il en irait de même de la compétence exclusive accordée aux ingénieurs
géomètres brevetés pour les travaux de vérification de l'implantation
visés
par l'art. 77 al. 3 RATC. Ils voient en outre, dans l'exigence
d'authentification, par un ingénieur géomètre breveté, des plans
établis par
un ingénieur géomètre non breveté une violation du droit fédéral,
dont la
primauté est garantie à l'art. 49 Cst., et du principe de la légalité
consacré à l'art. 5 Cst.

Le Conseil d'état conclut au rejet du recours.

Les recourants ont déposé un mémoire complétif sur lequel le Conseil
d'Etat
s'est déterminé. Ils n'ont pas expressément modifié leurs conclusions.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 128 II 13 consid. 1a p. 16, 46 consid. 2a p.
47).

1.1 Le recours de droit public est recevable lorsqu'il est formé,
comme en
l'espèce, contre un arrêté de portée générale pour violation des
droits
constitutionnels des citoyens (art. 84 al. 1 lettre a OJ).

1.2 L'exigence de l'épuisement des voies de droit cantonales prévue
par
l'art. 86 al. 1 OJ s'applique également aux recours de droit public
formés
contre les arrêtés cantonaux de portée générale (ATF 124 I 11 consid.
1a p.
13, 159 consid. 1b p. 161; 119 Ia 321 consid. 2a p. 324). Le droit
vaudois ne
prévoyant aucune procédure de contrôle direct de la
constitutionnalité des
normes cantonales de portée générale édicté par le Conseil d'Etat
(cf. art. 4
de la loi vaudoise du 18 décembre 1989 sur la juridiction et la
procédure
administrative), le présent recours, interjeté directement devant le
Tribunal
fédéral, est recevable au regard de l'art. 86 al. 1 OJ.

1.3 D'après l'art. 89 al. 1 OJ, l'acte de recours doit être déposé
devant le
Tribunal fédéral dans les 30 jours dès la communication, selon le
droit
cantonal, de l'arrêté ou de la décision attaquée. Dans le cas
particulier, le
règlement cantonal a été promulgué dans la Feuille des avis officiels
du
canton de Vaud parue le 1er juin 2001, de sorte que le recours du 2
juillet
2001 a été interjeté en temps utile (ATF 103 Ia 191 consid. 1 p. 193;
125 II
440 consid. 1b p. 442).

1.4 Lorsque le recours est dirigé contre un arrêté de portée
générale, la
qualité pour recourir, au sens de l'art. 88 OJ, est reconnue à toute
personne
dont les intérêts juridiquement protégés sont effectivement touchés
par
l'acte attaqué ou pourront l'être un jour (ATF 125 I 173 consid. 1b
p. 174,
474 consid. 1 p. 477; 125 II 440 consid. 1c p. 442). En sa qualité
d'ingénieur ETS en mensuration et génie rural, au bénéfice de
l'autorisation
de travailler dans la mensuration cadastrale et qui exerce son métier
à
Z.________, X.________ est touché par les dispositions réglementaires
attaquées qui l'empêchent notamment de dresser des plans de situation
sous sa
seule responsabilité et l'obligent à les faire authentifier. Il a donc
qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ.

Une association peut également agir par la voie du recours de droit
public en
vue de sauvegarder les intérêts de ses membres, même si elle n'est pas
directement touchée par l'acte entrepris. Il faut notamment qu'elle
ait la
personnalité juridique, que la défense des intérêts de ses membres
figure
parmi ses buts statutaires et que la majorité, ou tout au moins un
grand
nombre, de ses membres aient la qualité pour agir (ATF 125 I 71
consid. 1b p.
75, 369 consid. 1a p. 371; Walter Kälin, Das Verfahren der
staatsrechtlichen
Beschwerde, 1994, p. 268). En l'occurrence, l'Union Technique Suisse
est une
association dont les statuts stipulent qu'elle défend les intérêts
professionnels de ses membres (art. 1.2 ch. 2) et qu'elle favorise la
considération, ainsi que la reconnaissance nationale et
internationale des
ingénieurs et des architectes diplômés (art. 1.2 ch. 4). L'Union
Technique
Suisse comprend des sections, dont plusieurs sont vaudoises et
comptent un
très grand nombre de membres qui sont susceptibles d'être touchés par
les
dispositions réglementaires critiquées. L'Union Technique Suisse a
donc
qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ.

1.5 Sous réserve d'exceptions non réalisées en l'espèce, le recours
de droit
public est de nature purement cassatoire (ATF 128 III 50 consid. 1b
p. 53;
127 II 1 consid. 2c p. 5 et les arrêts cités). Dans la mesure où les
recourants demandent autre chose que l'annulation de l'arrêt attaqué
dans
leur conclusions relatives à l'art. 69 al. 1 ch. 1 al. 2 RATC, soit
l'injonction à l'autorité intimée de remplacer ledit alinéa par un
texte
arrêté par le Tribunal fédéral, celles-ci sont irrecevables.

2.
Les recourants invoquent plusieurs principes constitutionnels dont
certains
se recoupent. Ils estiment tout d'abord que la liberté économique
consacrée à
l'art. 27 Cst. est violée. En substance, ils reprochent aux art. 69
al. 1 ch.
1 al. 2, 71 et 77 al. 3 RATC d'être dépourvus de base légale, de
manquer
d'intérêt public, d'enfreindre le principe de la proportionnalité et
de ne
pas respecter le principe d'égalité de traitement entre concurrents.

2.1 Selon l'art. 27 Cst., la liberté économique est garantie (al. 1);
elle
comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à
une
activité économique lucrative privée et son libre exercice (al. 2).
Cette
liberté protège toute activité économique privée, exercée à titre
professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un revenu
(ATF 128 I
19 consid. 4c/aa p. 29). Elle peut être invoquée tant par les
personnes
physiques que par les personnes morales (FF 1997 I 179; Andreas
Auer/Giorgio
Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse, vol. II,
2000, no
605, p. 315). L'art. 94 al. 1 Cst. impose à la Confédération et aux
cantons
de respecter le principe de la liberté économique.

Conformément à l'art. 36 Cst., toute restriction d'un droit
fondamental doit
reposer sur une base légale. Les restrictions graves doivent être
prévues par
une loi (al. 1); elles doivent en outre être justifiées par un
intérêt public
ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui et, selon le
principe de
la proportionnalité, se limiter à ce qui est nécessaire à la
réalisation des
buts d'intérêt public poursuivis (al. 2 et 3). Ces conditions à la
limitation
d'un droit fondamental s'appliquent aussi à l'égalité de traitement
entre
concurrents directs, c'est-à-dire entre personnes appartenant à une
même
branche économique, qui s'adressent au même public avec des offres
identiques
pour satisfaire le même besoin (ATF 123 I 259 consid. 2b p. 260,
concernant
la profession d'avocat; ATF 112 Ia 30 consid. 3a p. 33). Sont
prohibées les
mesures de politique économique ou de protection d'une profession qui
entravent la libre concurrence en vue de favoriser certaines branches
professionnelles ou certaines formes d'exploitation (ATF 128 I 3
consid. 3a
et 3b p. 9; 125 I 209 consid. 10a p. 221 et les arrêts cités).

La jurisprudence développée sous l'angle de l'art. 31 al. 2 aCst.
demeure
applicable à l'art. 27 Cst. (ATF non publié du 27 juillet 2000 dans
la cause
2P.48/2000 consid. 2b). Il a été jugé que la profession d'architecte
tombe
sous le coup de l'art. 31 aCst. (ATF 112 Ia 30 consid. 3a p. 33). Or,
à
l'instar des architectes, les ingénieurs acquièrent leurs
connaissances
scientifiques soit dans un établissement universitaire, soit dans un
établissement technique supérieur. L'absence de ces connaissances,
dans un
cas comme dans l'autre, risquerait d'être préjudiciable à la
collectivité.
Ainsi, ce qui a été émis à propos des architectes est valable pour les
ingénieurs. Les cantons peuvent donc édicter des restrictions au droit
d'exercer librement la profession d'ingénieur si celles-ci sont
justifiées
par des motifs de police suffisants, comme ils peuvent le faire
relativement
à la profession d'architecte. Il est dès lors loisible aux cantons
d'exiger
des ingénieurs des connaissances et des capacités de leur part et
d'opérer
des distinctions entre ceux qui possèdent ces connaissance et ceux
qui ne les
possèdent pas, ou dans une moindre mesure, lorsque l'intérêt public le
requiert (ATF 112 Ia 30 consid. 3 p. 33).

2.2 Le Tribunal fédéral examine librement - sous la seule réserve de
la
retenue qu'il s'impose s'agissant des questions d'appréciation et la
prise en
compte des circonstances locales - si la mesure contestée repose sur
une base
légale suffisante, répond à un intérêt public prépondérant et
respecte le
principe de la proportionnalité (ATF 123 I 212 consid. 3a p. 217; 120
Ia 67
consid. 3b p. 72, 74 consid. 5 p. 79). Toutefois, s'agissant de la
question
de la base légale, il examine le droit cantonal sous l'angle
restreint de
l'arbitraire, lorsque l'atteinte à la liberté économique n'est pas
particulièrement grave (ATF 128 I 19 consid. 4c/bb p. 30).

Une restriction à la liberté économique est grave lorsque, par
exemple,
l'exercice d'une profession est interdit faute de posséder un
certificat de
capacité (ATF 104 Ia 196; Ulrich Häfelin / Walter Haller,
Schweizerisches
Bundesrecht, 5è
éd., n. 667/668, p. 192). En l'occurrence, les
restrictions
dont se plaignent les recourants ne revêtent pas un tel caractère de
gravité.
Le libre exercice de leur profession est reconnu. Seuls certains actes
relatifs à l'authentification des plans de situation et, dans
certaines
conditions, à la vérification de l'implantation d'une construction
sont
soustraits à leurs compétences et réservés aux ingénieurs géomètres
porteurs
d'un brevet fédéral (ATF 123 I 259 consid. 2b p. 260 concernant les
restrictions apportées à l'exercice de la profession d'avocat). On ne
peut
donc parler de restriction grave à la liberté économique. En
conséquence, le
Tribunal fédéral examinera le droit cantonal sous l'angle restreint de
l'arbitraire.

2.3 ll convient d'examiner tout d'abord si l'arrêté du 14 mai 2001
repose sur
une base légale permettant au Conseil d'Etat de réserver aux
ingénieurs
géomètres brevetés les compétences prévues aux dispositions attaquées.
L'autorité intimée fonde sa compétence sur l'art. 25 de la loi
fédérale du 22
juin 1979 sur l'aménagement du territoire (LAT; RS 700) et sur la loi
vaudoise du 4 décembre 1985 sur l'aménagement du territoire et les
constructions (LATC). Aux termes de l'art. 25 LAT, en matière
d'implantation,
de transformation ou de changement d'affectation de constructions et
d'installations, «les cantons règlent la compétence et la procédure».
Les
autorités cantonales sont également compétentes pour décider si les
projets
de construction situés hors de la zone à bâtir sont conformes à
l'affectation
de la zone ou si une dérogation peut être accordée (al. 2). L'art.
106 LATC
dispose :
"Les plans de toute construction mise à l'enquête, à l'exception des
constructions de minime importance, doivent être établis et signés
soit par
un architecte, soit par un ingénieur pour les plans particuliers
relevant de
sa spécialité."
Quant à l'art. 107a LATC, il prévoit :
"1 La qualité d'ingénieur est reconnue:
- aux porteurs du diplôme des Ecoles polytechniques fédérales de
Lausanne et
de Zurich, ainsi qu'aux diplômés bénéficiant d'une équivalence
constatée par
le Département des infrastructures;
- aux porteurs du diplôme des Ecoles techniques supérieures ETS;
- aux personnes inscrites au Registre des ingénieurs A ou B du REG
(Fondation
suisse des registres des ingénieurs, des architectes et des
techniciens).
2 La qualité d'ingénieur géomètre est reconnue aux personnes ayant
obtenu le
brevet fédéral d'ingénieur géomètre."
Selon l'art. 108 al. 1 LATC :
"La demande de permis de construire est adressée à la municipalité.
(...)
Elle indique les dérogations requises et les dispositions
réglementaires sur
lesquelles elles sont fondées."
Le Conseil d'Etat est chargé de l'application de la loi vaudoise sur
l'aménagement du territoire et les constructions (art. 9 LATC). Le
règlement
en question (RATC) a pour objet l'application de ladite loi.

L'art. 69 RATC autorise tous les ingénieurs, au sens des art. 106 et
107a
LATC précités, à dresser les plans de situation dans les cas de
construction
nouvelle, d'agrandissement, de surélévation, de transformation
d'immeubles ou
de changement de leur destination. Par contre, seul un ingénieur
géomètre
breveté est autorisé à authentifier ces plans. Il en va de même en
cas de
dérogation aux règlements et aux plans d'affectation (art. 71 RATC).
Dans les
cas où les distances jusqu'aux fonds voisins sont proches du minimum
autorisé
ou que l'implantation du bâtiment dépend d'une limite de
construction, la
vérification de la conformité de l'implantation après l'établissement
des
gabarits, puis lorsque l'ouvrage atteint le niveau de la première
dalle, est
du ressort exclusif de l'ingénieur géomètre breveté (art. 77 RATC).

Les normes réglementaires attaquées restent ainsi dans le cadre de la
LATC
(art. 106 et 107a) qui permet certes à tout ingénieur de dresser des
plans de
situation mais n'interdit pas de procéder à une distinction entre les
ingénieurs cités par l'al. 1 de l'art. 107a LATC et les ingénieurs
géomètres
brevetés (al. 2) en ce qui concerne l'authentification desdits plans.
A tout
le moins, l'autorité intimée pouvait, sans arbitraire, déduire cette
compétence des normes du droit fédéral et du droit cantonal.

2.4 La question se pose ensuite de savoir si le fait de réserver
l'authentification des plans de situation servant à la mise à
l'enquête,
ainsi que la vérification de l'implantation, à des ingénieurs
géomètres
brevetés, est pertinente, répond à un intérêt public prépondérant.

2.4.1 Aux termes de l'art. 950 CC :
"L'immatriculation et la description de chaque immeuble au registre
foncier
s'opèrent d'après un plan dressé, dans la règle, sur la base d'une
mensuration officielle.
Le Conseil fédéral décide d'après quels principes le levé de ces
plans aura
lieu."
L'art. 42 du Titre final CC précise que «le Conseil fédéral, après
entente
avec les cantons, arrête le mode de mensuration pour les diverses
espèces de
terrain.»
La mensuration ne consiste plus seulement à délimiter horizontalement
la
surface des biens-fonds et des objets mais elle englobe également
toutes les
données nécessaires à un système d'information du territoire. La
mensuration
comprend principalement l'abornement, la polygonation, les levés de
détail ou
la mensuration au sens étroit ainsi que la représentation sous forme
de plans
des levés (Meinrad Huser / Sébastien Chaulmontet, Droit suisse de la
mensuration, 2000, p. 11 et 59). L'art. 6 de l'Ordonnance du Conseil
fédéral
du 18 novembre 1992 sur la mensuration officielle (OMO; RS 211.432.2)
précise
que les données saisies dans le cadre de la mensuration forment le
catalogue
des données et comprennent plusieurs couches d'information. Selon
l'art. 43
OMO, l'exécution de la mensuration officielle incombe aux cantons.
L'art. 44
OMO, sous le titre marginal "Droit d'exécuter les travaux", a la
teneur
suivante :
"1 Les cantons règlent l'exécution des travaux par des ingénieurs
géomètres
brevetés et d'autres spécialistes en mensuration. ...
2 Le canton ne peut confier l'exécution des travaux concernant les
couches
d'information «points fixes», «biens-fonds», «nomenclatures»,
«divisions
administratives et techniques», ainsi que l'entretien de la
mensuration
officielle qu'à :
a. des communes ou d'autres collectivités de droit public ou personnes
morales de droit public, si celles-ci disposent d'un propre service de
mensuration dirigé par un ingénieur géomètre breveté ;
b. des ingénieurs géomètres brevetés. ..."
Au vu de l'art. 44 OMO, le canton de Vaud a modifié, le 5 septembre
2000,
l'art. 12 de sa loi du 23 mai 1972 sur le registre foncier, le
cadastre et le
système d'information sur le territoire, lequel prévoyait que «les
ingénieurs
géomètres porteurs du brevet fédéral sont les officiers publics seuls
autorisés à exécuter la mensuration (y compris l'abornement), et à
établir
des plans de mutation ou d'immatriculation pour le registre foncier».
Sous le
titre marginal "Spécialistes en mensuration", le nouvel article 12 de
ladite
loi cantonale a la teneur suivante :
"Les travaux concernant les couches d'information «points fixes»,
«biens-fonds», «nomenclature», «divisions administratives et
techniques»,
ainsi que l'entretien de la mensuration officielle, ne peuvent être
exécutés
que par les ingénieurs géomètres brevetés conformément à l'art. 44
al. 2 de
l'Ordonnance fédérale sur la mensuration officielle (OMO).
Les travaux concernant les autres couches d'information du catalogue
des
données peuvent aussi être exécutés par d'autres spécialistes en
mensuration.
(...)"
Dans son arrêté du 23 avril 2001, le Conseil d'Etat a reconnu comme
spécialistes en mensuration au sens de l'art. 12 précité, outre les
ingénieurs géomètres brevetés, notamment les porteurs de titres
décernés par
l'un des établissements d'enseignement spécialisés de la branche, soit
l'EPFZ, l'EPFL, et l'école d'ingénieurs du canton de Vaud (EIVD).

Il en résulte que pour les couches d'information «couverture du sol»,
«objets
divers, éléments linéaires», «altimétrie», «conduites», mentionnées
dans le
catalogue des données de la mensuration officielle, les ingénieurs
diplômés
ETS sont désormais également compétents, alors que les ingénieurs
géomètres
brevetés demeurent seuls compétents, en vertu du droit fédéral, pour
les
relevés concernant les autres couches d'information.

Selon les recourants, les prestations exigées pour établir un plan de
situation en vue de l'obtention d'un permis de construire sont les
mêmes que
celles pour les relevés concernant la couche d'information
«couverture du
sol», ou «objets divers, éléments linéaires», pour lesquelles la
compétence
des ingénieurs non détenteurs du brevet fédéral de géomètre est
admise, et
elles se fondent sur les mêmes bases cadastrales. L'exigence
d'authentification du plan de situation et de vérifications
d'implantation
par un ingénieur géomètre porteur du brevet fédéral n'aurait ainsi
aucune
justification compatible avec la Constitution.

2.4.2 En matière de mensuration officielle, les prestations du
géomètre
consistent, pour la couche d'information «couverture du sol», dans le
levé
des données décrivant la situation géographique réelle des objets,
leur
surface et leur nature - bâtiments, surfaces à revêtement dur,
surfaces
vertes, eaux, surfaces boisées, surfaces sans végétation (art. 7 al.
1 let. b
de l'Ordonnance technique du 10 juin 1994 sur la mensuration
officielle
[OTEMO; RS 211.432.21]). Quant aux travaux concernant la couche
d'information
«objets divers, éléments linéaires» (art. 7 al. 1 let. c OTEMO), ils
concernent des objets qui présentent des caractéristiques importantes
pour la
description de la couverture du sol mais qui, vu leurs dimensions ou
leurs
propriétés, sont négligeables au niveau de la partition du
territoire. Cela
comprend les détails de la couverture du sol tels que les murs, les
tunnels,
les passages inférieurs, les ouvrages de protection des rives ou des
éléments
linéaires comme les lignes aériennes à haute tension, les conduites
forcées
en surface, les voies ferrées, les téléphériques et les entrées de
caverne
(Meinrad Huser / Sébastien Chaulmontet, op. cit., p. 68/69).

Ces prestations, que l'ingénieur issu de la filière des Hautes écoles
spécialisées (HES) ou EPF mais non porteur du brevet fédéral de
géomètre est
en droit d'accomplir en matière de mensuration selon le droit
fédéral, sont
donc des relevés de la situation existante du sol.

En matière de construction, la demande de permis de construire, selon
l'art.
69 RATC, doit comprendre un plan de situation extrait du plan
cadastral. Ce
document est essentiel puisqu'il doit permettre à l'autorité de
vérifier si
les conditions légales permettant l'octroi du permis sont réalisées.
Outre
les noms et prénoms du propriétaire du fonds et des fonds voisins, les
données cartographiques relatives au bâtiment projeté, les indications
relatives aux accès, etc. (art. 69 al. 1 ch. 1 al. 1 let. a, b, c, h
et i,
RATC), le plan doit mentionner l'indication des limites de
construction, des
limites de zones, l'affectation réglementaire et les servitudes (let.
d), les
distances de la construction aux limites du terrain et, au besoin, aux
bâtiments existants, ainsi que la distance au lac et cours d'eau si
celle-ci
est inférieure à 20 mètres (let. f). Comme le relève et le démontre
l'autorité intimée, l'indication des limites de construction et
l'affectation
réglementaire suppose, c'est d'ailleurs une évidence, la connaissance
de
diverses lois fédérales, de lois et règlements cantonaux, ainsi qu'une
appréciation de ces lois et règlements dans le cas d'espèce. Quant à
la
détermination de la distance de la construction par rapport aux
limites du
terrain et aux bâtiments existants, etc., elle dépend de la
connaissance et
de l'analyse des divers règlements communaux applicables, comme le
démontre
également le Conseil d'Etat. L'art. 69 al. 1 ch. 1 al. 1 let. g RATC
oblige
l'auteur du plan à indiquer notamment la limite de l'aire forestière
et de
toute surface soumise au régime forestier, ainsi que les limites ou
l'indication des secteurs de protection des eaux (let j). Ces
indications
supposent des connaissances et une appréciation juridiques qui vont
au-delà
du simple relevé décrivant la seule situation géographique.

L'art. 71 RATC, également objet du présent recours, oblige l'auteur
du plan
de situation à mentionner les dérogations aux règlements ou aux plans
d'affectation. Ces indications ne peuvent être fournies que moyennant
une
très bonne connaissance des lois et règlements applicables, ainsi que
de la
jurisprudence y relative. Or, ces connaissances vont, sur ces
questions, bien
au-delà de celles que nécessite la mensuration officielle. La
vérification de
l'implantation, au sens de l'art. 77 al. 3 RATC également attaqué par
les
recourants, suppose le même type de connaissances des lois et
règlements que
celle requises pour déterminer les distances au sens de l'art. 69 al.
1 ch. 1
al. 1 let. f RATC mentionné ci-dessus.

Il résulte de l'analyse des dispositions légales qui précède que les
prestations exigées de l'auteur du plan de situation en vue de
l'obtention
d'un permis de construire ou de la vérification de l'implantation ne
se
confondent pas avec celles requises du géomètre appelé à lever des
données
pour la mensuration officielle.


2.4.3 ll n'est pas contesté que le fait d'exiger des renseignements
précis et
fiables sur le plan de situation répond à un intérêt public
important. Cela
constitue en effet une garantie, d'une part, pour les communes, dont
certaines ne disposent pas d'un service technique, d'autre part, pour
les
tiers ayant à consulter le dossier lors de la mise à l'enquête
publique.

Cette constatation n'emporte pas en soi que l'on réserve aux seuls
ingénieurs
géomètres brevetés, à l'exclusion des autres ingénieurs issus de la
filière
HES ou EPF, le droit d'établir de tels plans ou de procéder aux
vérifications
sous leur seule responsabilité. Il convient d'examiner si des critères
objectifs justifient cette discrimination et si celle-ci est le moyen
adéquat
d'atteindre le but recherché par la réglementation attaquée.

Les recourants ne contestent pas que l'établissement d'un plan de
situation
exige la connaissance des lois et règlements et une appréciation
juridique,
mais ils affirment être pourvus d'une formation pratique et juridique
suffisante à cet effet.

Selon l'art. 3 al. 1 de la loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les
hautes
écoles spécialisées (LHES; RS 414.71):
"Les hautes écoles spécialisées dispensent un enseignement axé sur la
pratique, sanctionné par un diplôme et préparant à l'exercice
d'activités
professionnelles qui requièrent l'application de connaissances et de
méthodes
scientifiques."

La formation juridique des ingénieurs en géomatique comprend, à tout
le moins
pour l'enseignement dispensé dans l'école d'ingénieurs du canton de
Vaud, un
cours général permettant d'acquérir des connaissances de base dans les
domaines du droit constitutionnel, du droit des personnes, de la
famille, des
successions et des obligations, ainsi que des droits réels. Ces cours
ont
lieu durant les premier et deuxième semestres des études qui en
comprennent
six, à raison de deux heures par semaine, soit en tout soixante
heures. Ils
font l'objet de contrôles continus mais ils ne sont pas sanctionnés
par un
examen. Durant les troisième et quatrième semestres sont dispensés
des cours
ayant pour objectif de faire connaître à l'étudiant les problèmes
juridiques
en relation avec sa future profession, notamment en matière de droits
réels
et de droit foncier rural. Ces cours, à raison de quatre heures
hebdomadaires, font l'objet de contrôles continus et sont sanctionnés
par un
examen oral. Dispensés par un ingénieur civil diplômé, ils portent
sur le
territoire, l'aménagement, l'environnement et la construction. Dans
cette
dernière partie, un chapitre est consacré aux permis de construire.
Un second
cours concerne les améliorations foncières mais pas directement la
question
du permis de construire.

Selon l'art. 2 de l'ordonnance du Conseil fédéral du 16 novembre 1994
concernant le brevet fédéral d'ingénieur géomètre (ci-après:
l'Ordonnance; RS
211.432.261), pour obtenir ce brevet, il faut:
"...
a. être titulaire d'un diplôme reconnu:

1. d'une EPF ;
2. d'une autre école universitaire, orientation mensuration, ou
3. d'une haute école spécialisée, orientation mensuration;

b. prouver que l'on a la formation théorique nécessaire; et

c. subir avec succès l'examen de brevet."
L'obtention du brevet fédéral comprend donc plusieurs étapes. Elle
nécessite
une formation théorique, dont le candidat fournit la preuve par des
examens
(art. 3 de l'Ordonnance) dont peuvent en principe être dispensés les
titulaires d'un diplôme EPF (art. 5 de l'Ordonnance). Quant aux
titulaires
d'autres diplômes d'une HES, ils peuvent être admis à ne passer
qu'une partie
de ces examens à certaines conditions (art. 6 de l'Ordonnance). Avant
de se
présenter aux examens de brevet, le candidat doit exercer une activité
professionnelle durant au moins un an et demi après l'achèvement de la
formation théorique (art. 16 de l'Ordonnance). Durant cette période,
le
candidat doit pouvoir se familiariser avec tous les aspects de la
mensuration
officielle. L'examen de brevet se compose de travaux de bureau et de
travaux
sur le terrain. Il comprend les thèmes suivants: mensuration, régime
foncier,
améliorations foncières, aménagement du territoire, applications de
l'informatique, gestion d'entreprise et administration (art. 15 de
l'Ordonnance). Le deuxième thème porte notamment sur l'aménagement et
les
règlements des constructions, les plans d'affectation, règlement des
constructions, plans de quartier, les supports juridiques de
l'aménagement du
territoire et les bases légales, tous thèmes ayant trait au droit des
constructions. Pour être admis à la formation d'ingénieur géomètre
breveté,
il faut donc, au préalable, avoir obtenu un diplôme d'ingénieur EPF
ou HES.
Cette formation postgrade spécialisée justifie, les recourants n'en
disconviennent pas, qu'en matière de mensuration officielle, les
porteurs du
brevet fédéral soient seuls autorisés à exécuter certains travaux
(art. 44
OMO). On l'a vu, cette formation spécialisée comprend également un
enseignement assez approfondi en matière du droit de la construction,
lequel
est sanctionné par un examen. Le niveau d'enseignement, la
spécialisation et
les difficultés des études dans les matières touchant au régime
juridique du
sol et son utilisation sont donc, objectivement, supérieurs à ceux de
la
filière HES ou EPF.

L'intérêt public de l'Etat à ce que les plans soumis à l'enquête en
vue d'une
construction présentent une forte garantie de fiabilité explique
qu'il s'en
remette, pour l'authentification des plans de situation (art. 69 et
71 RATC)
et pour la vérification de l'implantation (art. 77 RATC), aux
spécialistes
particulièrement qualifiés que sont les ingénieurs géomètres brevetés,
garants de la conformité des plans aux prescriptions légales.
L'exigence du
brevet est ainsi fondée sur un motif valable. La distinction opérée
entre les
ingénieurs suivant qu'ils possèdent ou non le brevet fédéral est donc
justifiée par des faits objectifs compte tenu de l'intérêt public en
cause.

2.5 Il convient encore de s'assurer que les mesures prises par
l'autorité
intimée pour atteindre l'objectif fixé sont conformes au principe de
la
proportionnalité. Ce principe est inscrit dans la Constitution
fédérale aux
art. 5 al. 2 et 36 al. 3. L'activité de l'Etat doit être
proportionnée au but
visé. Selon la jurisprudence, le principe de proportionnalité se
compose des
règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à
atteindre le
but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens
adaptés, on
choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts
privés - et
de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de
la
mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat
escompté du
point de vue de l'intérêt public - (ATF 125 I 474 consid. 3 p. 482).
Le
Tribunal fédéral examine en principe librement la question du respect
du
principe de la proportionnalité. Il s'impose toutefois une certaine
retenue
lorsqu'il s'agit avant tout d'un problème d'organisation,
d'appréciation ou
de circonstances locales que les autorités cantonales connaissent
mieux ou
sont mieux à même d'évaluer que le Tribunal fédéral (ATF 124 I 297
consid. 3b
p. 299; 120 la 67 consid. 3b p. 72; 119 Ia 378 consid. 6a p. 383).

En l'occurrence, le Conseil d'Etat a choisi, pour atteindre son
objectif, le
moyen qui porte le moins d'atteinte au libre exercice de la profession
d'ingénieur géomètre non breveté. Celui-ci reste libre d'établir les
plans de
situation, seule l'authentification de ces plans est réservée à
l'ingénieur
géomètre breveté. Quant aux vérifications de l'implantation, selon
l'art. 77
RATC, elles n'ont lieu que dans certaines conditions limitatives et
elles
sont le prolongement de l'obligation faite à l'ingénieur géomètre
breveté de
vérifier la conformité des plans de situation. Le principe de la
proportionnalité est donc respecté et, au vu des considérants 2.3 et
2.4; la
liberté économique n'est pas violée par les dispositions du règlement
en
cause et l'égalité de traitement entre concurrents respectée.

3.
Invoquant l'art. 49 Cst., les recourants font encore grief à
l'autorité
intimée d'avoir violé la force dérogatoire du droit fédéral.

3.1 En vertu du principe de la force dérogatoire du droit fédéral,
celui-ci
prime le droit cantonal qui lui est contraire. Les cantons ne sont pas
autorisés à légiférer dans les domaines exhaustivement réglementés
par le
droit fédéral (Ulrich Häfelin / Walter Haller, op. cit., no 1185 à
1187, p.
335/336). Dans les autres domaines, les cantons peuvent édicter des
règles de
droit qui ne violent ni le sens ni l'esprit du droit fédéral et qui
n'en
compromettent pas la réalisation. Les règles fédérales et cantonales
ne
peuvent toutefois coexister qu'en l'absence de conflit (Andreas Auer /
Giorgio Malinverni / Michel Hottelier, Droit constitutionnel suisse,
vol I,
no 1037 et 1040, p. 367/368). Dans le cadre d'un contrôle abstrait
des normes
fondé sur l'art. 49 al. 1 Cst., le Tribunal fédéral vérifie librement
la
conformité d'une règle de droit cantonal avec le droit fédéral (ATF
128 I 46
consid. 5a p. 54; 127 I 60 consid. 4 p. 68 et les arrêts cités).

3.2 Pour les recourants, les articles 69 al. 1 ch. 1 al. 2, 71 et 77
al. 3
RATC se heurteraient au droit fédéral (art. 44 OMO), lequel autorise
expressément les ingénieurs géomètres non brevetés à lever des plans
en vue
de la mensuration officielle pour des couches d'information qui ne
sont pas
réservées aux ingénieurs géomètres brevetés. Or, les bases cadastrales
servant à dresser un plan de situation déposé en vue de l'obtention
d'un
permis de construire ou étant nécessaires aux travaux de vérification
de
l'implantation sont les mêmes que celles que les ingénieurs géomètres
non
brevetés ont la compétence d'établir selon le droit fédéral. Le
Conseil
d'Etat du canton de Vaud ne saurait dès lors limiter cette compétence
par le
règlement en question.

Il faut relever ici que les dispositions du règlement attaqué et
l'ordonnance
sur la mensuration officielle, invoquée par les recourants, n'ont pas
le même
objet puisque les premières concernent le droit de la construction
alors que
la deuxième est relative au droit de la mensuration officielle. Les
prescriptions en matière de construction font en effet partie
intégrante du
concept de "droit de l'aménagement du territoire et des constructions"
(Piermarco Zen-Ruffinen / Christine Guy-Ecabert, Aménagement du
territoire,
construction, expropriation, 2001, p. 371). Ainsi, le règlement ne
peut pas
être contraire à une ordonnance qui ne traite pas du même sujet.

3.3 L'art. 75 al. 1 Cst. prévoit que la Confédération fixe les
principes
applicables à l'aménagement du territoire, lequel incombe aux cantons.
L'aménagement du territoire est ainsi d'abord du ressort des cantons
qui
reçoivent le mandat de le réaliser. Quant aux prescriptions en
matière de
constructions, elles relèvent pour la plupart du droit public cantonal
(Piermarco Zen-Ruffinen / Christine Guy-Ecabert, op. cit., p. 25 et
372). Au
chapitre 3 relatif aux plans d'affectation - lesquels règlent le mode
d'utilisation du sol -, l'art. 22 LAT prévoit qu'aucune construction
ou
installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de
l'autorité compétente (al. 1). L'autorisation est délivrée si la
construction
ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone et le
terrain
équipé (al. 2). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser
d'autres
conditions (al. 3). L'art. 25 LAT dispose que :
"1 Les cantons règlent la compétence et la procédure.
1bis Ils impartissent des délais dont ils règlent les effets dans
toutes les
procédures requises pour implanter, transformer ou changer
d'affectation les
constructions et installations.
2 Pour tous les projets de construction situés hors de la zone à
bâtir,
l'autorité cantonale compétente décide si ceux-ci sont conformes à
l'affectation de la zone ou si une dérogation peut être accordée."
Aux termes des dispositions constitutionnelles et fédérales, les
cantons sont
donc chargés d'édicter des dispositions relatives à l'aménagement du
territoire ainsi qu'à la compétence et la procédure du droit de la
construction.

C'est ce qu'a fait le canton de Vaud en adoptant la loi du 4 décembre
sur
l'aménagement du territoire et les constructions (LATC) ainsi que son
règlement d'application (RATC). Les art. 69 al. 1 ch. 1 al. 2, 71 et
77 al. 3
RATC ne sont pas en contradiction avec la loi fédérale sur
l'aménagement du
territoire puisque celle-ci ne règle pas la question des formalités
relatives
aux permis de construire et à l'exécution des travaux. Le Conseil
d'Etat
pouvait dès lors réserver l'authentification du plan de situation et
les
vérifications d'implantation aux ingénieurs géomètres brevetés sans
violer le
droit fédéral. Les dispositions en question respectent l'art. 49 Cst.

4.
ll résulte de ce qui précède que, entièrement mal fondé, le recours
doit être
rejeté dans la mesure où il est recevable. Succombant, les recourants
doivent
supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ). Il
n'est
pas alloué de dépens (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge des
recourants.


3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties.

Lausanne, le 18 juin 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.182/2001
Date de la décision : 18/06/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-06-18;2p.182.2001 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award