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06/06/2002 | SUISSE | N°2P.94/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 06 juin 2002, 2P.94/2001


{T 0/2}
2P.94/2001 /dxc

Arrêt du 6 juin 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler et Yersin.
greffier Dubey.

A. ________ et B.________,
recourants, représentés par la fiduciaire G. Jordan &
L. Berguerand, av. de la Gare 24, case postale 617,
1920 Martigny,

contre

Service cantonal des contributions du canton du Valais, bâtiment
Planta 577,
avenue de la Gare 35, 1951 Sion,
Administration fiscale cantonale du canton de Genève,
rue du Sta

nd 26, case postale 3937, 1211 Genève 3.

art. 127 Cst. (double imposition)

(recours de droit public contre le...

{T 0/2}
2P.94/2001 /dxc

Arrêt du 6 juin 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler et Yersin.
greffier Dubey.

A. ________ et B.________,
recourants, représentés par la fiduciaire G. Jordan &
L. Berguerand, av. de la Gare 24, case postale 617,
1920 Martigny,

contre

Service cantonal des contributions du canton du Valais, bâtiment
Planta 577,
avenue de la Gare 35, 1951 Sion,
Administration fiscale cantonale du canton de Genève,
rue du Stand 26, case postale 3937, 1211 Genève 3.

art. 127 Cst. (double imposition)

(recours de droit public contre les décisions du Service cantonal du
canton
du Valais du 7 mars 2001 et de l'Administration fiscale cantonale du
canton
de Genève des 10 décembre 1996, 22 avril 1998 et 28 novembre 2000)
Faits:

A.
A. ________ et B.________ sont domiciliés à Genève depuis 1985.
A.________
est enseignant à Genève. B.________ est ophtalmologue. Elle exerce son
activité de manière dépendante en qualité de médecin auprès de
l'hôpital de
Martigny et sous forme indépendante dans le cabinet médical dont elle
est
propriétaire, également à Martigny.

Par décisions des 10 décembre 1996, 22 avril 1998 et 28 novembre 2000,
l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève a taxé
A.________ et
B.________ pour les périodes fiscales 1996, 1997, 1998 et 1999. Par
décisions
du 7 mars 2001, le Service cantonal des contributions du canton du
Valais a
taxé A.________ et B.________ pour les périodes fiscales 1997/ 1998 et
1999/2000.

B.
Agissant le 5 avril 2001 par la voie du recours de droit public pour
violation de l'art. 127 al. 3 Cst., A.________ et B.________
demandent au
Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, "que les répartitions
intercantonales soient établies selon les règles de la jurisprudence
et que
les taxations des autorités fiscales valaisannes et genevoises soient
corrigées afin d'éviter la double imposition". Ils prétendent que les
frais
professionnels de l'épouse et leurs intérêts passifs n'ont pas été
entièrement déduits; les répartitions n'auraient pas été établies
année par
année; le Tribunal fédéral devrait également examiner l'évaluation
des actifs
commerciaux.

Par acte déposé hors du délai imparti par le Tribunal fédéral, le
Service
cantonal des contributions du canton du Valais a produit les dossiers
fiscaux
en cause et conclu implicitement au rejet du recours. L'Administration
fiscale cantonale du canton de Genève admet la déduction à Genève de
certains
montants correspondant aux frais de déplacement et aux frais de repas
pris
hors du domicile dans les limites de la pratique genevoise, soit
5'600 fr.
plus 3'700 fr. par année fiscale, la répartition intercantonale
genevoise
étant par ailleurs conforme aux principes jurisprudentiels et
doctrinaux en
la matière, et conclut au rejet du recours pour le surplus.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 128 II 13 consid. 1a p. 16, 46 consid. 2a p.
47; IV
148 consid. 1a p. 151; 127 I 92 consid. 1 p. 93; 127 II 198 consid. 2
p. 201;
127 III 41 consid. 2a p. 42; 126 II 506 consid. 1 p. 507 et la
jurisprudence
citée).

1.1 Le citoyen qui se plaint d'être imposé à double peut former un
recours de
droit public pour violation de l'art. 127 al. 3 Cst. (art. 46 al. 2
aCst.).
Le délai de trente jours court dès la notification de la dernière
prétention
fiscale qui, selon le recourant, constitue une double imposition.
L'épuisement des instances cantonales de recours n'est pas nécessaire
(art.
86 al. 2 OJ). Si le recours est déposé à temps contre la décision du
dernier
canton qui a statué, il est recevable contre la taxation antérieure
émanant
de l'autre canton (ATF 104 Ia 257 consid. 1; Archives 53, p. 449).

L'année de taxation 1996 se rapporte dans le canton de Genève à
l'année de
calcul 1995 (système de taxation praenumerando annuelle). Cette
dernière est
également une année de calcul pour la taxation de la période fiscale
1997/1998 dans le canton du Valais, (système de taxation praenumerando
bisannuelle), qui a fait l'objet des décisions de taxation du 7 mars
2001.
Par conséquent, le présent recours, adressé au Tribunal fédéral dans
les
trente jours dès la date de notification des décisions de taxation du
canton
du Valais pour 1997/1998 et 1998/1999, a été introduit en temps utile
également contre les décisions de taxation du canton de Genève pour
les
années de taxation 1996 - contrairement à l'avis du canton de Genève
- ainsi
que 1997, 1998 et 1999, qui portent sur des périodes de calcul
identiques
mais prises en compte par les cantons en cause dans des périodes
fiscales
différentes (cf. Locher, Doppelbesteuerung, Die Praxis der
Bundessteuern,
IIIe partie, § 2 IV B, 2 b, n° 8).

1.2 Selon l'art. 90 al. 1 OJ, l'acte de recours doit - à peine
d'irrecevabilité - contenir "les conclusions du recourant" (lettre a)
et "un
exposé des faits essentiels et un exposé succinct des droits
constitutionnels
ou des principes juridiques violés, précisant en quoi consiste la
violation"
(lettre b). S'agissant d'un recours de droit public, le Tribunal
fédéral
n'examine que les griefs soulevés de manière claire et, dans la
mesure du
possible, justifiés par des documents. Il appartient au recourant
d'indiquer
quel droit constitutionnel a été violé et quelle est la portée de la
violation. Il ne saurait se contenter de soulever de vagues griefs ou
de
renvoyer aux actes cantonaux (ATF 110 Ia 3 ss.; Locher, op. cit., §
12, III
B, 3, n° 4, 7, 9, 14, 16). Lorsque le recourant invoque des droits
constitutionnels dont le Tribunal fédéral examine l'application avec
un libre
pouvoir d'examen, tels que l'interdiction de la double imposition
intercantonale, il doit établir en quoi la norme juridique a été mal
interprétée et mal appliquée. Un bref exposé suffit, si le droit
constitutionnel invoqué est clairement défini, et si l'espèce
litigieuse
représente un cas typique d'application de ce droit. En revanche,
dans les
autres hypothèses, de vagues griefs ou un renvoi aux actes cantonaux
ne
suffit pas (RDAT 2000 I 650 consid. 2b p. 651; ATF 107 Ia 126 consid.
1c p.
129).

C'est à la lumière de ces principes que doivent être appréciés les
moyens
soulevés par les recourants.

2.
Le principe de l'interdiction de la double imposition intercantonale
(art. 46
al. 2 aCst. et 127 al. 3 1ère phrase Cst.) s'oppose à ce qu'un
contribuable
soit concrètement soumis, par deux ou plusieurs cantons, sur le même
objet,
pendant la même période, à des impôts analogues (double imposition
effective)
ou qu'un canton excède les limites de sa souveraineté fiscale et,
violant des
règles de conflit jurisprudentielles, prétende prélever un impôt dont
la
perception est de la seule compétence d'un autre canton (double
imposition
virtuelle); en outre, le Tribunal fédéral a déduit des art. 46 al. 2
aCst. et
127 al. 3 1ère phrase Cst. le principe selon lequel un canton ne peut
imposer
plus lourdement un contribuable du fait qu'il est assujetti aux
impôts dans
un autre canton (ATF 125 I 458 consid. 2a p. 466/467, 54 consid. 1b
p. 55/56;
121 I 259 consid. 2a p. 261 et les références).

3.
Les recourants soutiennent d'abord que les décisions des autorités
fiscales
des cantons du Valais et de Genève violent l'interdiction de la double
imposition intercantonale, en ce sens que le canton de Genève devrait
admettre en déduction du revenu de l'activité salariale qu'il impose
les
frais que le canton du Valais a considéré, dans la détermination du
revenu du
cabinet médical, comme liés à l'activité auprès de l'hôpital de
Martigny.

3.1 Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à
l'interdiction de
la double imposition intercantonale (cf. art. 46 al. 2 aCst. et 127
al. 3
1ère phrase Cst.), l'imposition du revenu d'une personne exerçant une
activité lucrative dépendante revient au canton où cette personne a
son
domicile fiscal (cf. ATF 125 I 458 consid. 2b p. 467 et les arrêts
cités).
Les frais d'acquisition de ce revenu sont déductibles dans le même
canton
(Locher, op. cit., § 9, III, n° 4).

3.2 En l'espèce, il est établi que les recourants ont leur domicile
dans le
canton de Genève et que les revenus provenant de l'activité
dépendante de
B.________ doivent y être imposés. Les frais d'acquisition de ce
revenu sont
déductibles dans ce même canton, ce que le canton de Genève ne
conteste pas
sur le principe. Les décisions de taxation du canton de Genève
doivent être
annulées, à charge pour ce dernier de déterminer, au regard de son
propre
droit fiscal, les frais d'acquisition qui peuvent être admis en
déduction des
revenus provenant de l'activité lucrative dépendante de B.________.

4.
Les recourants soutiennent ensuite que la répartition des intérêts
passifs
n'est pas calculée de manière identique par les cantons de Genève et
Valais.
A leur avis, les intérêts passifs devraient être déduits, dans une
première
répartition, des revenus provenant de la fortune, puis, dans une
deuxième
répartition éventuelle, des autres revenus. A cet égard, ils exposent
que la
règle jurisprudentielle, qui veut que la répartition intercantonale
doit se
faire année par année lorsque les cantons ont une imposition dans le
temps
différente, a été violée. Ils estiment encore, vu la prétendue
divergence à
ce sujet des cantons du Valais et de Genève, que le Tribunal fédéral
fédéral
doit examiner et déterminer l'évaluation et le mode de répartition
des actifs
commerciaux lorsque des immeubles commerciaux figurent au bilan.

En l'espèce, les recourants n'exposent pas en quoi les règles
relatives à la
déduction des intérêts passifs et à l'évaluation des actifs
commerciaux ont
été mal interprétées voire mal appliquées, ni en quoi consisterait la
double
imposition. Il ne ressort pas en effet de leur acte de recours quelles
décisions du canton du Valais ou du canton de Genève seraient
contraires à
cette règle. Ils se limitent à décrire les taxations fiscales qui
leur ont
été notifiées par les autorités de taxation de ces cantons et à
constater que
leurs résultats s'écartent des projets de répartition qu'ils ont
établi
eux-mêmes, que "les revenus imposés par les deux cantons sont
supérieurs aux
revenus effectivement acquis, respectivement de 13'137 fr. pour
l'année de
calcul 1995, de 38'172 fr. en 1996, de 17'745 fr. en 1997 et de 5'495
fr. en
1998" (chiffre 2.3), que "la décision des autorités fiscales
valaisannes
s'écartent des répartitions intercantonales établies par les autorités
fiscales genevoises (chiffres 2.5, 2.7) et que "les répartitions
intercantonales notifiées par le canton de Genève ne respectent pas"
la règle
relative à la répartition des intérêts passifs (chiffre 2.8). Ces
constatations ne suffisent pas à établir l'existence d'une double
imposition
et ne constituent pas une motivation suffisante au regard de l'art.
90 al. 1
lettre b OJ. D'une manière générale, en effet, le fait que les revenus
imposés par les cantons soient supérieurs aux revenus déclarés ne
signifie
pas encore l'existence d'une double imposition prohibée et cela ne
permet pas
de soumettre le problème au Tribunal fédéral comme à un bureau de
conseils en
matière fiscale.

Enfin, les recourants n'indiquent pas non plus en quoi la règle
jurisprudentielle qui veut que la répartition intercantonale doit se
faire
année par année lorsque les cantons ont une imposition dans le temps
différente aurait été violée, d'autant que, dans les dossiers
produits par
les autorités fiscales des deux cantons en cause, figurent des
procès-verbaux
de taxations, pour le canton du Valais, et, pour le canton de Genève,
des
tableaux de répartition intercantonale, pour chaque année de calcul
mise en
cause.

5.
Au vu de ce qui précède, en tant qu'il s'en prend au canton du
Valais, le
présent recours doit être déclaré irrecevable. Dirigé contre le
canton de
Genève, le présent recours est très partiellement admis en tant qu'il
est
recevable. Les décisions de taxation des 10 décembre 1996, 22 avril
1998 et
28 novembre 2000 de l'Administration fiscale cantonale du canton de
Genève
sont annulées et le dossier renvoyé à cette administration pour
nouvelles
décisions au sens des considérants.

Leurs griefs ayant été pour l'essentiel déclarés irrecevables et pour
le
solde très partiellement admis, le désistement du canton de Genève
(dont les
taxations ont été admises sans objection et qui n'a pas été sollicité
d'accorder la déduction en cause conforme à son droit interne)
suppléant en
grande partie la motivation lacunaire du mémoire, les recourants
doivent
supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ). Il
ne leur
est pas alloué d'indemnité de partie pour le même motif (art. 159 al.
1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours de droit public est irrecevable en tant qu'il est dirigé
contre le
canton du Valais.

2.
Le recours de droit public est très partiellement admis dans la
mesure où il
est recevable en tant qu'il est dirigé contre le canton de Genève. Les
décisions de taxation des 10 décembre 1996, 22 avril 1998 et 28
novembre 2000
de l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève sont
annulées et
le
dossier renvoyé à cette administration pour nouvelles décisions au
sens des
considérants.

3.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge des
recourants,
solidairement entre eux.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux recourants, au Service
cantonal
des contributions du canton du Valais et à l'Administration fiscale
cantonale
du canton de Genève.

Lausanne, le 6 juin 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.94/2001
Date de la décision : 06/06/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-06-06;2p.94.2001 ?
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