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04/06/2002 | SUISSE | N°I.309/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 juin 2002, I.309/01


«AZA 7»
I 309/01 Mh

IVe Chambre

Mme et MM. les juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et
Ferrari. Greffier : M. Métral

Arrêt du 4 juin 2002

dans la cause

F.________, recourant, représenté par Me Filippo Ryter,
avocat, avenue du Léman 30, 1005 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- F.________ est au bénéfice d'une forma

tion de
mécanicien sur automobile, sans certificat fédéral de
capacité (CFC). Engagé en qualité d'agent commercial par
X._______...

«AZA 7»
I 309/01 Mh

IVe Chambre

Mme et MM. les juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et
Ferrari. Greffier : M. Métral

Arrêt du 4 juin 2002

dans la cause

F.________, recourant, représenté par Me Filippo Ryter,
avocat, avenue du Léman 30, 1005 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- F.________ est au bénéfice d'une formation de
mécanicien sur automobile, sans certificat fédéral de
capacité (CFC). Engagé en qualité d'agent commercial par
X.________ SA, en mars 1992, il s'est trouvé en incapacité
de travail totale entre les mois de novembre 1992 et
février 1993, puis dès le mois de juillet 1993, périodes au
cours desquelles il subit plusieurs opérations de hernie

discale. Selon son médecin traitant, le prénommé ne pouvait
plus effectuer les longs trajets en voiture qu'imposait son
travail pour X.________ SA, mais pouvait exercer une acti-
vité permettant d'alterner les positions assise et debout
(rapport du 20 mai 1996 de la doctoresse A.________).
F.________ déposa une demande de prestations à
l'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud
(ci-après : office AI), qui lui alloua une rente d'invali-
dité, du 1er juillet 1994 au 31 mars 1997, puis des mesures
de reclassement professionnel, sous la forme d'une forma-
tion d'employé de commerce. Celle-ci se déroula du 1er fé-
vrier 1997 au 30 juin 1998, d'abord sous forme de stages en
entreprises, de cours d'allemand et d'italien ainsi que de
cours spécifiques de préparation au CFC d'employé de com-
merce. Après un premier échec, l'assuré s'est inscrit
derechef à des cours d'allemand et de préparation au CFC,
qui se sont déroulés entre le 24 août 1998 et le 29 mai
1999, aux frais de l'assurance-invalidité. Il a échoué une
seconde fois aux examens fédéraux d'employé de commerce, en
juin 1999. L'office AI l'a alors mis au bénéfice d'une
indemnité journalière d'attente (décision du 15 juillet
1999). Il lui proposa par ailleurs d'effectuer un stage au
Centre d'intégration professionnelle de l'assurance-invali-
dité (CIP), à W.________, et de se rendre au Centre d'ob-
servation professionnelle (ORIPH) de Y.________, en vue de
mettre sur pied un projet professionnel adapté à ses capa-
cités. F.________ a refusé, faisant valoir qu'il préférait
suivre une formation de technicien en marketing au Centre
suisse d'enseignement Z.________. Il n'est pas davantage
entré en matière sur une proposition de l'office AI de
prendre en charge une formation de vendeur de voitures.

Le 14 octobre 1999, l'office AI l'a informé du fait
qu'il entendait rejeter sa demande tendant au financement
d'une formation auprès de Z.________ et nier son droit à
une rente d'invalidité. Le lendemain, il annonçait à
l'assuré son intention de mettre fin, le 31 octobre 1999,
au versement de l'indemnité journalière allouée jusqu'alors
(projets de décisions des 14 et 15 octobre 1999). Le verse-
ment des prestations fut effectivement suspendu dès le
1er novembre 1999. Il s'en est suivi un échange de corres-
pondance au cours duquel l'office AI a imparti à F.________
un délai échéant le 10 février 2000 pour démontrer sa
volonté de collaborer à des mesures de réadaptation simples
et adéquates; en était notamment exclue la formation de
technicien en marketing auprès de Z.________ (lettre du
7 janvier 2000 au mandataire de l'assuré). Celui-ci a
maintenu ses exigences initiales.
Par décision du 16 février 2000, l'office AI a refusé
d'accorder à F.________ de nouvelles mesures de reclas-
sement professionnel. Par décision du 17 février 2000, il a
nié son droit à une indemnité journalière de l'assurance-
invalidité, avec effet au 1er novembre 1999.

B.- Ces décisions ont été déférées par l'assuré au
Tribunal des assurances du canton de Vaud, qui a rejeté le
recours, par jugement du 22 mars 2001.

C.- F.________ interjette un recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement. Il en demande la réforme en ce
sens que soit reconnu son droit à la prise en charge, par
l'assurance-invalidité, d'une formation de technicien en
marketing auprès de Z.________, ainsi qu'au versement
d'indemnités journalières dans l'attente de cette mesure,
le tout sous suite de frais et dépens. L'intimé conclut au
rejet du recours, alors que l'Office fédéral des assurances
sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Est litigieux le droit du recourant à des mesures
de reclassement professionnel et au versement d'indemnités
journalières. Le pouvoir d'examen du Tribunal fédéral des
assurances n'est donc pas limité à la violation du droit
fédéral - y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appré-
ciation - mais s'étend également à l'opportunité de la
décision attaquée. Le tribunal n'est pas lié par l'état de
fait constaté par la juridiction inférieure, et il peut
s'écarter des conclusions des parties à l'avantage ou au
détriment de celles-ci (art. 132 OJ).

2.- Le jugement expose correctement les dispositions
légales et la jurisprudence relatives aux mesures d'ordre
professionnel de l'assurance-invalidité, en particulier aux
mesures de reclassement professionnel, de sorte qu'on peut
y renvoyer.
On ajoutera cependant que l'assuré mis au bénéfice de
mesures de reclassement peut prétendre le versement d'une
indemnité journalière pendant la période de réadaptation,
lorsque celle-ci l'empêche d'exercer une activité lucrative
durant trois jours consécutifs au moins ou s'il présente,
dans son activité habituelle, une incapacité de travail de
50 pour cent au moins (art. 22 al. 1 LAI). Une indemnité
journalière sera par ailleurs versée à l'assuré présentant
une incapacité de travail de 50 % au moins et qui doit
attendre le début de prochaines mesures de réadaptation
(indemnité d'attente : art. 22 al. 3 LAI et art. 18 al. 1
RAI). Le droit à l'indemnité s'ouvre au moment où l'office
AI constate, sur la base de l'instruction, que des mesures
de réadaptation sont indiquées, mais au plus tard quatre
mois après le dépôt de la demande (art. 18 al. 2 RAI).

3.- Après le second échec de F.________ aux examens
fédéraux d'employé de commerce, l'office AI lui a reconnu

le droit à de nouvelles mesures de reclassement et, avant
que les mesures appropriées soient déterminées et mises en
oeuvre, à une indemnité journalière d'attente au sens de
l'art. 18 al. 1 RAI. Il a toutefois mis fin à ses presta-
tions, avec effet au 1er novembre 1999, au motif que
l'assuré refusait d'entrer en matière sur des mesures de
reclassement professionnel mieux appropriées qu'une forma-
tion de technicien en marketing; l'office AI considérait
que celle-ci présentait trop de difficultés pour l'assuré,
de sorte qu'elle était vouée à l'échec. Cette argumentation
a convaincu les premiers juges.

4.- En l'occurrence, l'office AI et la juridiction
cantonale pouvaient légitimement mettre en doute l'aptitude
de F.________ à mener à terme avec succès une formation de
technicien en marketing. Contrairement à ce que s'emploie à
démontrer le recourant, ses échecs successifs aux examens
fédéraux d'employé de commerce doivent effectivement être
attribués à ses difficultés à assimiler les connaissances
requises, plus qu'à des problèmes de santé l'empêchant de
suivre les cours correctement. A cet égard, il n'est pas
nécessaire de compléter le dossier par une expertise
médicale : pendant les deux ans de préparation aux examens
d'employé de commerce, l'assuré n'a pas fait état de gêne
occasionnée par ses lombalgies (cf. notamment les rapports
intermédiaires des 20 février 1998, 7 juillet 1998,
27 juillet 1998 et 2 juillet 1999), mais a notamment exposé
ses difficultés à gérer le grand nombre d'informations
reçues lors des cours (rapport intermédiaire du 20 février
1998). La psychologue chargée par l'office AI d'évaluer les
aptitudes du recourant a du reste relevé des lacunes dans
sa formation scolaire et a recommandé de renoncer à une
formation trop exigeante de ce point de vue (rapport
d'évaluation du 31 août 1999).

Dans ces conditions, le jugement cantonal en tant
qu'il confirme le refus du reclassement requis par l'assuré
apparaît bien fondé. L'office AI était ainsi en droit
d'exiger de l'assuré qu'il se soumette à des mesures
d'ordre professionnel en vue d'examiner d'autres projets de
réadaptation, mieux appropriés que des cours de technicien
en marketing, ou qu'il suive une formation de vendeur de
voitures, à titre de mesure de reclassement professionnel.
Quoi qu'en dise le recourant, cette dernière profession
permet l'alternance des positions assises et debout et
n'implique pas le port de charges. Elle était donc adaptée
à son état de santé au moment des décisions litigieuses,
déterminant pour statuer sur les mérites du recours (cf.
ATF 121 V 366 consid. 1b et les arrêts cités). Partant, en
refusant d'entrer en matière tant sur cette mesure de
reclassement professionnel que sur la proposition de stage
au CIP et d'évaluation professionnelle à l'ORIPH,
F.________ a violé son obligation de faciliter toutes les
mesures prises en vue de sa réadaptation à la vie profes-
sionnelle (art. 10 al. 2 1ère phrase LAI).

5.- a) Selon l'art. 31 al. 1 LAI, si l'assuré se sous-
trait ou s'oppose à une mesure de réadaptation ordonnée à
laquelle on peut raisonnablement exiger qu'il se soumette
et dont on peut attendre une amélioration notable de sa
capacité de gain, l'assurance lui enjoindra de participer à
sa réadaptation en lui impartissant un délai convenable et
en l'avertissant des conséquences qu'aurait sa passivité.
Si l'assuré n'obtempère pas à cette mise en demeure, la
rente lui sera refusée ou retirée temporairement ou défi-
nitivement. Dans le même sens, l'art. 10 al. 2 2ème phrase
LAI prévoit que l'assurance peut suspendre ses prestations
si l'ayant droit entrave ou empêche la réadaptation.
D'après la jurisprudence, la procédure de sommation prévue
à l'art. 31 al. 1 LAI (refus de la rente) est également

applicable dans le cadre de l'art. 10 al. 2 LAI, notamment
lorsque l'assurance envisage de refuser des mesures d'ordre
professionnel ou de supprimer l'indemnité journalière,
faute de coopération de l'assuré (ATF 122 V 219 consid. 4b;
RCC 1983 p. 28 consid. 3).

b) L'office AI n'avait pas adressé de sommation ni
imparti de délai de réflexion au sens de la jurisprudence
citée ci-dessus, lorsqu'il a mis fin au versement d'une
indemnité journalière à l'assuré, le 1er novembre 1999. A
cet égard, les projets de décisions des 14 et 15 octobre
1999 étaient insuffisants. En effet, la sommation et
l'octroi d'un délai de réflexion ne peuvent être remplacés
par la simple mention, dans une décision de refus de pres-
tation, de la possibilité de s'adresser à nouveau à l'assu-
rance-invalidité (ATF 122 V 220).
En revanche, le courrier du 7 janvier 2000 au manda-
taire de l'assuré contenait un avertissement suffisamment
explicite pour valoir sommation. L'office intimé précisait
qu'il maintiendrait ses projets de décisions si F.________
ne manifestait pas clairement sa volonté, avant le 10 fé-
vrier 2000, de collaborer à d'autres mesures de réadap-
tation qu'une formation de technicien en marketing. Faute
pour l'assuré d'avoir manifesté cette volonté, l'office AI
était dès lors en droit de supprimer ses prestations, en
particulier de mettre fin au versement de l'indemnité
journalière d'attente, à l'échéance du délai imparti, soit
à partir du 10 février 2000.

6.- Vu ce qui précède, il convient d'admettre partiel-
lement le recours et de reconnaître le droit du recourant
au versement d'une indemnité journalière au sens de
l'art. 18 al. 1 RAI, pour la période du 1er novembre 1999
au 9 février 2000 (inclus).

La procédure porte sur l'octroi ou le refus de presta-
tions d'assurance, de sorte qu'elle est gratuite (art. 134
OJ). Par ailleurs, le recourant, qui n'obtient que très
partiellement gain de cause, peut prétendre une indemnité
de dépens réduite (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est partiellement admis. Le jugement du
14 mars 2001 du Tribunal des assurances du canton de
Vaud et la décision du 17 février 2000 de l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud sont
annulés, dans la mesure où ils nient le droit du
recourant à une indemnité journalière d'attente, pour
la période du 1er novembre 1999 au 9 février 2000.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'intimé versera au recourant la somme de 800 fr. (y
compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens
pour l'instance fédérale.

IV. Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera
à nouveau sur les dépens pour la procédure de première
instance, au regard de l'issue du procès de dernière
instance.

V. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal des assurances du canton de Vaud et à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 4 juin 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
La Présidente de la IVe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.309/01
Date de la décision : 04/06/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-06-04;i.309.01 ?
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