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27/05/2002 | SUISSE | N°2A.21/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 27 mai 2002, 2A.21/2002


{T 0/2}
2A.21/2002 /svc

Arrêt du 27 mai 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Müller et Yersin,
greffière Kurtoglu-Jolidon.

F. ________, recourant, représenté par Me Vincent Spira, avocat, rue
Saint-Ours 5,
1205 Genève,

contre

Office cantonal de la population du canton de Genève,
case postale 51, 1211 Genève 8,
Commission cantonale de recours de police des étrangers du canton de
Genève,
boulevard Helvétique 27, 1207 Genève.

Art. 9

al. 2 LSEE: révocation d'autorisation de séjour

recours de droit administratif contre la décision de la Commission
canto...

{T 0/2}
2A.21/2002 /svc

Arrêt du 27 mai 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Müller et Yersin,
greffière Kurtoglu-Jolidon.

F. ________, recourant, représenté par Me Vincent Spira, avocat, rue
Saint-Ours 5,
1205 Genève,

contre

Office cantonal de la population du canton de Genève,
case postale 51, 1211 Genève 8,
Commission cantonale de recours de police des étrangers du canton de
Genève,
boulevard Helvétique 27, 1207 Genève.

Art. 9 al. 2 LSEE: révocation d'autorisation de séjour

recours de droit administratif contre la décision de la Commission
cantonale
de recours de police des étrangers du canton de Genève du 4 décembre
2001

Faits:

A.
Ressortissant nigérian né en 1960, F.________ a déposé le 22 février
1991 une
première demande d'asile, qui a été rejetée par l'Office fédéral des
réfugiés
le 30 juillet 1992. A la suite de la confirmation de cette décision
par la
Commission suisse de recours en matière d'asile, le prénommé a été
refoulé au
Nigéria le 21 février 1993. Le 10 juillet 1995, il a présenté une
nouvelle
demande d'asile. L'Office fédéral des réfugiés a rendu le 30 novembre
1995
une décision de non entrée en matière, confirmée le 12 mai 1998 par la
Commission suisse de recours en matière d'asile. Un délai au 15 août
1998 lui
a alors été imparti pour quitter le territoire suisse.

B.
Le 19 août 1998, F.________ et H.________, ressortissante suisse, née
en
1978, ont signé une promesse de mariage à Genève. Vu la situation de
son
fiancé, cette dernière a été entendue le 4 septembre 1998 par l'Office
cantonal de la population du canton de Genève dans le cadre de cette
promesse. Le mariage a finalement pu être célébré le 29 octobre 1998.

F. ________ a alors demandé une autorisation de séjour, qui lui a été
octroyée
par l'Office cantonal de la population le 19 mai 1999.

Le 13 novembre 2000, H.________ a déposé plainte pénale contre son
époux et
un certain "J.________" pour faux dans les titres et menaces. Selon
l'intéressée, "J.________" aurait été à l'origine de son mariage avec
F.________. En effet, celui-ci recherchait des Suissesses pour
conclure des
mariages blancs avec des Nigérians en échange d'une somme d'argent.
Selon un
rapport du 23 janvier 2001 de la Police judiciaire, l'enquête sur
ledit
"J.________" paraît n'avoir pas abouti.

Le 13 décembre 2000, H.________ a déposé une demande de divorce au
motif que
son mariage était un mariage de complaisance et qu'elle n'avait
jamais eu de
vie commune avec son époux. F.________ s'est opposé au divorce niant
qu'il
s'agissait d'un tel mariage. Il a déclaré que son épouse ne dormait
plus que
de temps en temps au domicile conjugal mais qu'il pensait qu'elle
allait
revenir vivre avec lui, comme cela c'était déjà produit auparavant.

C.
A la suite d'une nouvelle audition de H.________, l'Office cantonal
de la
population a révoqué l'autorisation de séjour de son époux le 11 juin
2001 au
motif que le mariage des époux avait été célébré dans le seul but
d'éluder
les prescriptions en matière de police des étrangers. Ledit office a
invoqué
la différence d'âge entre les époux, les déclarations de H.________
selon
lesquelles le mariage avait été arrangé et monnayé, le fait que le
mariage
a eu
lieu alors que F.________ était sous le coup d'une expulsion
judiciaire du
territoire suisse et que les époux n'avaient jamais vécu ensemble. Un
délai a
été fixé à l'intéressé au 11 septembre 2001 pour quitter la Suisse.

Le 4 août 2001, H.________ a eu un enfant qui, selon les déclarations
concordantes des époux, n'est pas celui de F.________.

Le 25 octobre 2001, le Tribunal de première instance a débouté la
demanderesse de sa demande de divorce. Il n'a pas tranché la question
du
mariage de complaisance mais a retenu qu'en toute hypothèse l'art.
115 CC
permettant le divorce avant l'échéance du délai de séparation de
quatre ans
ne s'appliquait pas.

D.
La Commission cantonale de recours de police des étrangers du canton
de
Genève (ci-après: la Commission de recours) a, par décision du 4
décembre
2001, confirmé la révocation de l'autorisation de séjour de
F.________ et
constaté qu'il n'avait pas droit à la délivrance d'une telle
autorisation.

E.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, F.________
demande au
Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annuler la
décision de la
Commission de recours du 4 décembre 2001.

La Commission de recours renonce à présenter des observations.
L'Office
cantonal de la population se reporte à la décision attaquée tandis que
l'Office fédéral des étrangers propose de rejeter le recours.

Par ordonnance présidentielle du 8 février 2002, l'effet suspensif a
été
octroyé au recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
D'après l'art. 7 al. 1 de la loi fédérale sur le séjour et
l'établissement
des étrangers du 26 mars 1931 (LSEE; RS 142.20), le conjoint étranger
d'un
ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la prolongation de
l'autorisation de séjour. Selon la jurisprudence, pour juger de la
recevabilité du recours de droit administratif, seule est
déterminante la
question de savoir si un mariage au sens formel existe (ATF 124 II 289
consid. 2b p. 291). Tel est bien le cas en l'espèce.

L'autorisation de séjour révoquée est, dans l'intervalle, apparemment
venue à
échéance. Dans cette mesure, le recours n'a plus d'objet. Il subsiste
toutefois la question du renouvellement de cette autorisation. Le
recours est
donc recevable au regard de la disposition précitée.

2.
2.1 La décision attaquée retient que le recourant a conclu un mariage
fictif
dans le but d'obtenir une autorisation de séjour et, ainsi, d'éviter
son
renvoi du territoire suisse.

2.2 Comme mentionné ci-dessus, conformément à l'art. 7 al. 1 LSEE, le
conjoint étranger d'un ressortissant suisse a droit à l'octroi et à la
prolongation de l'autorisation de séjour. Toutefois, ce droit
n'existe pas en
cas de mariage fictif, soit lorsque le mariage a été contracté dans
le but
d'éluder les dispositions sur le séjour et l'établissement des
étrangers et
notamment celles sur la limitation du nombre des étrangers (art. 7
al. 2
LSEE). Par ailleurs, l'art. 9 al. 2 lettre a LSEE dispose que
l'autorisation
de séjour peut être révoquée lorsque l'étranger l'a obtenue par
surprise, en
faisant de fausses déclarations ou en dissimulant des faits
essentiels.

2.3 La preuve directe que les époux se sont mariés non pas pour
fonder une
véritable communauté conjugale, mais seulement dans le but d'éluder
les
dispositions de la législation sur le séjour et l'établissement des
étrangers
ne peut être aisément apportée; les autorités doivent donc se fonder
sur des
indices (ATF 127 II 49 consid. 5a, 122 II 289 consid. 2b). De tels
indices
peuvent notamment résulter du fait que l'étranger est menacé d'un
renvoi de
Suisse, que son autorisation de séjour n'est pas prolongée ou que sa
demande
d'asile a été rejetée. La grande différence d'âge entre les époux, les
circonstances de leur relation, de même que l'absence de vie commune
ou le
fait que la vie commune a été de courte durée, constituent également
des
indices que les époux n'ont pas la volonté de créer une véritable
union
conjugale (Alain Wurzburger, La jurisprudence récente du Tribunal
fédéral en
matière de police des étrangers in: RDAF 1997 I 267).

En outre, pour que l'art. 7 al. 2 LSEE soit applicable, il ne suffit
pas que
le mariage ait été contracté dans le but de permettre au conjoint
étranger de
séjourner régulièrement en Suisse; encore faut-il que la communauté
conjugale
n'ait pas été réellement voulue. En d'autres termes, les motifs du
mariage ne
sont pas décisifs dès l'instant où le mariage et la communauté de vie
sont
réellement voulus par les époux (ATF 121 II 97 consid. 3b p. 102; 113
II 5
consid. 3b p. 9).

3.
3.1 En l'espèce, la Commission de recours a retenu que, lorsque le
recourant
s'est marié, sa demande d'asile avait été rejetée et qu'il devait
quitter la
Suisse à bref délai. Il n'avait donc pas d'autre solution qu'un
mariage avec
une ressortissante suisse pour pouvoir rester dans notre pays. A cela
s'ajoute la différence d'âge de dix-huit ans entre les époux.
Toujours selon
l'autorité intimée, le fait que l'épouse ignorait une partie du passé
de son
conjoint ou qu'elle ait reçu des informations trompeuses à son sujet
est
révélateur des intentions réelles des époux. De plus, cette dernière a
déclaré que son mari avait monnayé le mariage. Cette thèse,
corroborée par
des témoins, jette une ombre sur les motifs prétendument
désintéressés de
cette union. La Commission de recours concluait ainsi que tout porte
à croire
qu'il n'y a pas eu de communauté ni de toit ni de lit et que, de
toute façon,
la vie commune, si tant est qu'il y en ait eu une, a été de brève
durée.

3.2 Ces faits ne sont pas manifestement inexacts ni établis en
violation des
règles de procédure; ils lient donc le Tribunal fédéral selon l'art.
105 al.
2 OJ. La Commission de recours a pris en compte le fait que les époux
donnaient des événements des versions opposées. Au vu de l'ensemble du
dossier à sa disposition, elle a admis que les dénégations du
recourant
n'étaient pas convaincantes. Cette appréciation de la Commission de
recours
n'est en tout cas pas manifestement fausse. La lecture du dossier
permet
certes de voir que, sur certains points, il existe des éléments de
preuve,
allant à l'appui des deux versions discordantes. En tranchant
largement pour
la version de l'épouse, la Commission de recours pouvait toutefois
s'appuyer,
outre sur les déclarations de celle-ci, sur un certain nombre d'autres
éléments et cela d'une manière qui n'est en tout cas pas
déraisonnable. Or,
vu l'art. 105 al. 2 OJ, il n'appartient pas au Tribunal fédéral de
revoir les
faits constatés comme dans un appel, ce à quoi tend en fait le
recours.
D'autre part, le fait de n'avoir pas entendu l'ami de l'épouse avec
lequel
celle-ci aurait habité à un moment donné ne constitue pas une
violation des
règles de procédure. Ce témoignage n'est en effet pas déterminant
compte tenu
des autres éléments du dossier et, de plus, n'a pas été demandé à la
Commission de recours.

3.3 Au vu des faits ainsi établis, il n'y a pas de doute qu'il existe
un
faisceau d'indices suffisant pour admettre que le recourant
n'entendait pas,
en se mariant, fonder une véritable union conjugale mais éluder les
règles
sur le séjour des étrangers.

4.
Il résulte de ce qui précède que le recours est mal fondé et qu'il
doit être
rejeté. Avec ce prononcé, la requête d'effet suspensif devient sans
objet.
Succombant, le recourant doit supporter les frais judiciaires (art.
156 al. 1
OJ). L'autorité intimée n'a pas droit à des dépens (art. 159 al. 2
OJ).

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant, à
l'Office cantonal de la population et à la Commission cantonale de
recours de
police des étrangers du canton de Genève, ainsi qu'à l'Office fédéral
des
étrangers.

Lausanne, le 27 mai 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.21/2002
Date de la décision : 27/05/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-05-27;2a.21.2002 ?
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