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17/05/2002 | SUISSE | N°7B.54/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 mai 2002, 7B.54/2002


«/2»
7B.54/2002

CHAMBRE DES POURSUITES ET DES FAILLITES
***************************************

17 mai 2002

Composition de la Chambre: Mme Nordmann, présidente,
Mme Escher et M. Meyer, juges. Greffier: M. Fellay.

Statuant sur le recours formé

par

C.________ SA, représentée par Me Christophe Wilhelm, avocat
à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 27 février 2001 par la Cour des poursuites
et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud;

(exécution du séquestre)<

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Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Les 20/21 juillet 2000, S.________ SA a obt...

«/2»
7B.54/2002

CHAMBRE DES POURSUITES ET DES FAILLITES
***************************************

17 mai 2002

Composition de la Chambre: Mme Nordmann, présidente,
Mme Escher et M. Meyer, juges. Greffier: M. Fellay.

Statuant sur le recours formé

par

C.________ SA, représentée par Me Christophe Wilhelm, avocat
à Lausanne,

contre

l'arrêt rendu le 27 février 2001 par la Cour des poursuites
et faillites du Tribunal cantonal du canton de Vaud;

(exécution du séquestre)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Les 20/21 juillet 2000, S.________ SA a obtenu
cinq séquestres à l'encontre de SA C.________ pour un
montant
de créance de 17'726'659 fr. 15. Chargé d'exécuter l'un de
ces séquestres, lequel visait des avoirs de la débitrice se
trouvant en mains de C.________ SA, l'Office des poursuites
de Lausanne-Est a aussitôt adressé à cette société l'avis
concernant le séquestre d'une créance (art. 99 et 275 LP).
En
juin et juillet 2001, l'opposition au séquestre ayant été
écartée, l'office a requis des renseignements sur la portée
du séquestre auprès de ladite société, qui lui a répondu
qu'à
la date du séquestre la débitrice possédait contre elle une
créance de USD 735'968.88. Le 12 juillet 2001, l'office l'a
invitée à lui verser immédiatement le montant précité, en se
référant à l'art. 98 al. 1 LP.

B.- La tierce débitrice a déposé plainte contre
cette décision, dont elle a demandé l'annulation. Selon
elle,
l'art. 98 al. 1 LP n'était pas applicable; seul l'était
l'art. 99 LP, qui prévoyait comme unique mesure de sûreté
l'avis au tiers débiteur, avis qui avait déjà été donné; par
ailleurs, l'office ne pouvait se prévaloir de l'art. 100 LP
pour procéder à l'encaissement de la créance séquestrée, dès
lors que celle-ci n'était pas échue.

a) L'office s'étant déclaré prêt à revoir sa posi-
tion si l'inexigibilité de la créance était clairement éta-
blie, la plaignante lui a fait savoir ce qui suit: elle
était
chargée du suivi des ventes de la débitrice et de l'encaisse-
ment de celles-ci; aux termes de ce mandat, elle devait ren-
seigner périodiquement la débitrice sur les montants ainsi
encaissés, lesquels étaient utilisés, d'une part, pour effec-
tuer certains versements pour le compte de la débitrice, sur

demande de celle-ci, et, d'autre part, pour ses propres
frais
de fonctionnement; aussi longtemps que la débitrice ne requé-
rait pas le versement des montants encaissés, elle n'était
débitrice d'aucune créance échue en sa faveur; ainsi le mon-
tant séquestré de USD 735'968.88 ne constituait pas une cré-
ance échue.

Invitée à nouveau par l'office à établir clairement
que la créance séquestrée n'était pas encore échue et à pro-
duire tout document permettant d'établir ce fait, ainsi que
de connaître l'échéance exacte de ladite créance, la plai-
gnante a répondu qu'en l'absence de toute réquisition de sa
mandante, elle n'était débitrice d'aucune créance échue et
que cela ne résultait d'aucun contrat écrit, mais de la pra-
tique suivie depuis de nombreuses années par les deux socié-
tés. Sur quoi, l'office a maintenu son avis et proposé le re-
jet de la plainte.

b) Par prononcé du 19 décembre 2001, l'autorité can-
tonale inférieure de surveillance a rejeté la plainte, en
bref pour les motifs suivants: la débitrice et la plaignante
étaient liées par un contrat de mandat d'encaissement accor-
dant le pouvoir à la seconde d'encaisser des créances en son
propre nom, mais pour le compte de la première; un tel pou-
voir ne transférant pas la titularité des créances,
celles-ci
restaient acquises à la représentée, qui pouvait les faire
valoir en tout temps; payables à la représentée à première
réquisition, elles étaient immédiatement exigibles, donc
échues selon la jurisprudence (ATF 90 II 428 consid. 2 p.
432).

c) Sur recours de la tierce débitrice, la Cour des
poursuites et faillites du Tribunal cantonal vaudois a con-
firmé le prononcé de l'autorité inférieure de surveillance
par arrêt du 27 février 2002.

C.- La tierce débitrice a recouru le (lundi) 11
mars 2002 à la Chambre des poursuites et des faillites du
Tribunal fédéral en concluant, principalement, à la réforme
de l'arrêt de la cour cantonale en ce sens que la sommation
de paiement du 12 juillet 2001 est annulée, subsidiairement
à
l'annulation de l'arrêt attaqué et au renvoi de la cause à
l'autorité cantonale pour nouvelle instruction et nouveau ju-
gement. Elle invoque une application arbitraire des art. 99
et 100 LP.

Sur requête de la recourante, l'effet suspensif a
été accordé.

Des réponses n'ont pas été requises.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- L'arbitraire dans l'application du droit fédé-
ral déterminant est assimilé à une violation de la loi et ou-
vre donc la voie du recours de poursuite prévu par les art.
19 al. 1 LP et 78 ss OJ (Sandoz-Monod, Commentaire de la loi
fédérale d'organisation judiciaire, vol. II, Berne 1990, p.
722 n. 2.3; Amonn/Gasser, Grundriss des Schuldbetreibungs-
und Konkursrechts, 6e éd., Berne 1997, § 6 n. 100). Le re-
cours de droit public est donc exclu en vertu de l'art. 84
al. 2 OJ.

2.- a) Le séquestre est une mesure conservatoire
qui a pour but d'empêcher le débiteur de disposer de son pa-
trimoine, de le dissimuler ou de compromettre de toute autre
manière le résultat d'une poursuite pendante ou future. Il
ne
peut frapper que les "biens du débiteur" (art. 271 al. 1
LP).
L'office des poursuites est en principe tenu d'obtempérer à
une ordonnance de séquestre régulière en la forme et n'a pas
la compétence d'en examiner le bien-fondé, notamment de véri-

fier les conditions justifiant l'octroi de la mesure. Cepen-
dant, il peut et doit même refuser son concours à
l'exécution
de celle-ci lorsque la mise sous main de justice des biens
visés est impossible, se heurte à une cause de nullité ou
consacrerait l'abus manifeste d'un droit. Ainsi en va-t-il
lorsque l'ordonnance vise des biens qui, au dire même du
créancier ou de toute évidence, n'appartiennent pas au débi-
teur ou pas à lui seul: la mise sous main de justice serait
alors incompatible avec la nature du séquestre, qui est de
garantir l'exécution forcée sur le patrimoine du débiteur
(ATF 107 III 33 consid. 2 et 4 et les arrêts cités).

b) En l'espèce, comme le constate l'arrêt attaqué
(p. 8, 2e par.), le séquestre a été autorisé à la requête de
la créancière sur tous les biens appartenant à la débitrice,
sous son nom, numéro ou nom pseudonymique, et se trouvant en
mains de la recourante. Chargé d'exécuter ce séquestre, l'of-
fice ne se trouvait donc pas dans le cas où le créancier re-
connaît et désigne lui-même les biens à séquestrer comme ap-
partenant à un tiers. En outre, lorsqu'il l'a interpellée
sur
la portée du séquestre, la recourante lui a répondu sans am-
biguïté à ce sujet. La cour cantonale en a déduit à juste ti-
tre que lorsqu'il a invité la recourante, en application de
l'art. 100 LP, à verser le montant de la créance indiqué,
l'office n'avait aucune raison de douter que les biens sé-
questrés appartenaient en réalité à un tiers, partant de re-
fuser d'exécuter la mesure.

3.- L'autorité cantonale inférieure de
surveillance
a admis l'existence d'un contrat de mandat d'encaissement ac-
cordant le pouvoir à la recourante d'encaisser des créances
en son propre nom pour le compte de la débitrice, mais sans
transfert de la titularité des créances. Devant l'autorité
cantonale supérieure de surveillance, la recourante a confir-
mé le mandat d'encaissement, tout en ajoutant que la débitri-
ce lui avait cédé l'ensemble de ses créances et qu'elle-même

était libre d'en retenir les frais liés à son activité, soit
une commission, et toute somme nécessaire à assurer ses pro-
pres liquidités, de sorte qu'il fallait plutôt voir dans cet-
te relation un mandat fiduciaire lui conférant la titularité
des biens fiduciaires; ces derniers n'étaient donc pas sé-
questrables en l'état, l'exécution forcée ne pouvant porter
que sur la créance en restitution des biens à l'extinction
des rapports fiduciaires, conformément à la jurisprudence
(ATF 106 III 86). La recourante a déduit de cette jurispru-
dence, et du fait que la relation fiduciaire se poursuivait,
que la créance litigieuse n'était pas échue. A l'appui de
ses
allégations, elle a produit six factures.

Devant le Tribunal fédéral, la recourante ne fait
pas grief à la cour cantonale d'avoir ignoré la distinction,
faite par la doctrine (cf. Daniel Guggenheim, Les contrats
de
la pratique bancaire suisse, 4e éd., p. 525 ss; Engel, Con-
trats de droit suisse, 2e éd., p. 505 s.), entre acte fidu-
ciaire pur, conclu uniquement dans l'intérêt du fiduciant
(fiducie d'administration) et acte fiduciaire mixte, où le
fiduciaire - agissant également dans son propre intérêt -
est
aussi le créancier du fiduciant (fiducie de garantie). Il ne
lui reproche pas davantage d'avoir méconnu les conséquences
juridiques à tirer d'une telle distinction. La cour
cantonale
a du reste admis que si les droits découlant de la fiducie
mixte invoquée par la recourante étaient reconnus évidents
et
incontestables, ils s'opposeraient effectivement au séques-
tre; toutefois, l'existence d'un mandat d'encaissement, qui
n'était pas contestée, n'impliquait pas ipso facto ou ipso
jure un contrat de fiducie. Or, la recourante avait simple-
ment allégué l'existence d'un tel contrat, sans toutefois
l'établir et sans que ses déclarations fussent confirmées
par
d'autres éléments du dossier.

La critique essentielle de la recourante consiste
en
ce que la cour cantonale n'aurait pas examiné les preuves

produites, savoir des "factures adressées ... directement à
ses clients mais pour le compte du débiteur séquestré", piè-
ces qui auraient démontré "de manière claire et irréfutable
la qualité d'agent fiduciaire" exercée par elle en l'espèce
(recours, ch. II/3). Le grief est manifestement mal fondé.
La
cour cantonale a en effet déclaré les pièces en question re-
cevables, constaté qu'il s'agissait de factures sur du
papier
à en-tête de la recourante relatives à des livraisons de man-
ganèse (arrêt attaqué, p. 6 consid. I et II) et considéré
qu'elles n'étaient pas de nature à établir l'existence d'un
contrat de fiducie (id., p. 9/10 consid. II/b). Une simple
lecture desdites factures permet de s'en convaincre aisément
et n'autorise visiblement pas d'autre constat. La cour canto-
nale n'a en tout cas pas commis un abus de son pouvoir d'ap-
préciation sur ce point. La recourante ne lui reproche pas,
par ailleurs, d'avoir violé ses obligations découlant de
l'art. 20a al. 2 LP, notamment en ce qui concerne la consta-
tation des faits (ch. 2) et l'appréciation des preuves
(ch. 3).

4.- A titre subsidiaire, la recourante fait valoir
que si l'office estimait ne pas pouvoir suivre son point de
vue, il lui incombait d'ouvrir une procédure de
revendication
au sens de l'art. 106 LP.

Selon la cour cantonale, l'office n'avait aucun dou-
te à avoir lorsqu'il a ordonné les mesures critiquées: le sé-
questre visait en effet des biens mentionnés comme apparte-
nant à la débitrice et se trouvant en mains de la recourante
(cf. supra consid. 2b); de plus, à aucun moment avant le dé-
pôt du recours à l'autorité cantonale supérieure de surveil-
lance, la recourante n'avait invoqué sa qualité de proprié-
taire fiduciaire; l'office n'avait donc pas à ouvrir une pro-
cédure de revendication, et il s'est conformé à la loi en
donnant suite à l'ordonnance qui lui avait été remise et en
suivant la procédure prévue aux art. 99 et 100 LP.

La Chambre de céans partage l'avis de l'autorité
cantonale. Dans sa plainte à l'autorité cantonale inférieure
de surveillance, la recourante estimait alors que l'art. 99
LP était seul applicable: elle admettait donc clairement par
là sa qualité de tierce débitrice, et non de titulaire, des
avoirs litigieux.

Par ces motifs,

la Chambre des poursuites et des faillites:

1. Rejette le recours.

2. Communique le présent arrêt en copie au mandatai-
re de la recourante, à l'Office des poursuites de Lausanne-
Est et à la Cour des poursuites et faillites du Tribunal can-
tonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 17 mai 2002
FYC/frs

Au nom de la
Chambre des poursuites et des faillites
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
La Présidente,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 7B.54/2002
Date de la décision : 17/05/2002
Chambre des poursuites et des faillites

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-05-17;7b.54.2002 ?
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