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16/05/2002 | SUISSE | N°4C.70/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 mai 2002, 4C.70/2002


{T 0/2}
4C.70/2002 /ech

Arrêt du 16 mai 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et Favre,
greffière Aubry Girardin

X.________ SA,
défenderesse et recourante, représentée par Me Mike Hornung, avocat,
place du
Bourg-de-Four 9, 1204 Genève,

contre

A.________,
demandeur et intimé, représenté par Me Pierre Siegrist, avocat,
Grand-Rue 17,
1204 Genève.

contrat de bail, décision incidente

(recours en réforme contre l'arrêt de la

Chambre d'appel en matière
de baux
et loyers du canton de Genève du 10 décembre 2001).

Faits:

A.
Par contrat conclu ...

{T 0/2}
4C.70/2002 /ech

Arrêt du 16 mai 2002
Ire Cour civile

Les juges fédéraux Walter, président de la Cour, Corboz et Favre,
greffière Aubry Girardin

X.________ SA,
défenderesse et recourante, représentée par Me Mike Hornung, avocat,
place du
Bourg-de-Four 9, 1204 Genève,

contre

A.________,
demandeur et intimé, représenté par Me Pierre Siegrist, avocat,
Grand-Rue 17,
1204 Genève.

contrat de bail, décision incidente

(recours en réforme contre l'arrêt de la Chambre d'appel en matière
de baux
et loyers du canton de Genève du 10 décembre 2001).

Faits:

A.
Par contrat conclu le 5 octobre 1993, A.________ a pris à bail de
Z.________
(devenue X.________ SA) un local commercial de 78 m2, à usage de
cabinet
médical, dans un immeuble situé à Genève. Le bail a été conclu pour
une durée
de cinq ans, arrivant à échéance le 31 décembre 1998; le loyer
convenu était
assorti d'une clause d'indexation. Il était prévu que le bail était
ensuite
renouvelable tacitement d'année en année.

Pendant la période initiale de cinq ans, le loyer a été augmenté par
trois
fois en vertu de la clause d'indexation.

Par lettres des 12 janvier 1998, 27 novembre 1998 et 29 mars 1999, le
locataire s'est plaint qu'il n'ait pas été tenu compte de la baisse
du taux
hypothécaire, mais sans rencontrer d'écho favorable de la part de la
bailleresse, qui a refusé expressément d'entrer en matière par
courriers des
17 décembre 1998 et 14 avril 1999.

B.
Par requête déposée le 10 mai 1999 auprès de la Commission de
conciliation en
matière de baux et loyers du canton de Genève, A.________ a demandé
une
diminution de loyer à partir du 1er janvier 2000, fondée sur la
baisse du
taux hypothécaire.

Statuant par jugement du 5 avril 2001, le Tribunal des baux et loyers
du
canton de Genève a considéré que le locataire avait laissé le bail se
renouveler tacitement après la période initiale de cinq ans et qu'il
fallait
en conséquence effectuer les calculs à compter de la fin de la période
d'indexation. Tenant compte de la baisse du taux hypothécaire, de la
hausse
des charges et du renchérissement, il a réduit le montant du loyer
annuel de
35'532 fr. à 34'944 fr. avec effet au 1er janvier 2000.

Saisie d'un appel du locataire, la Chambre d'appel en matière de baux
et
loyers, statuant par arrêt du 10 décembre 2001, a estimé que celui-ci
avait
suffisamment manifesté, pendant la période d'indexation, son
désaccord avec
le niveau du loyer, de sorte qu'il se justifiait de faire les calculs
à
compter de la date de conclusion du bail. Elle a considéré également
qu'il
fallait procéder à un calcul de rendement, requis formellement par le
locataire et sollicité implicitement par la bailleresse. En
conséquence, la
cour cantonale a annulé le jugement attaqué et renvoyé la cause au
Tribunal
des baux et loyers pour nouvelle décision dans le sens des
considérants.

C.
Contre cet arrêt, la bailleresse exerce un recours en réforme au
Tribunal
fédéral. Soutenant qu'il faut suivre le raisonnement adopté par les
juges de
première instance, elle conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué et
à ce que
le loyer annuel soit fixé à 34'944 fr., charges non comprises, dès le
1er
janvier 2000.

Le locataire, appuyant pour sa part l'opinion émise par la cour
cantonale,
conclut au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt du 10
décembre
2001.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 L'arrêt attaqué ne met pas fin à la procédure entre les parties,
puisque
les juges de première instance doivent rendre une nouvelle décision.
Il est
dès lors exclu que cet arrêt puisse constituer une décision finale au
sens de
l'art. 48 OJ. En effet, pour qu'une décision soit qualifiée de finale
au sens
de cette disposition, il faut d'une part qu'elle mette un terme à la
procédure entre les parties (ATF 123 III 140 consid. 2a; cf. Corboz,
Le
recours en réforme au Tribunal fédéral, SJ 2000 II p. 1 ss, 6) et,
d'autre
part, que l'autorité cantonale ait statué sur le fond de la
prétention ou s'y
soit refusée pour un motif qui empêche définitivement que la même
prétention
soit exercée à nouveau entre les mêmes parties (ATF 127 III 433
consid. 1b/aa
p. 435, 474 consid. 1a et les arrêts cités).

La cour cantonale n'a pas non plus, dans son dispositif, statué sur
une
partie de ce qui était demandé, de sorte que la qualification de
décision
partielle est également exclue (sur cette notion: cf. ATF 124 III 406
consid.
1a; 123 III 140 consid. 2a; 117 II 349 consid. 2a).

L'arrêt par lequel une autorité supérieure renvoie l'ensemble de la
cause à
l'instance inférieure pour nouveau jugement constitue une décision
incidente,
même si elle tranche définitivement (dans son dispositif ou par
renvoi à ses
considérants) une question préalable à la décision finale (cf. ATF
127 III
433 consid. 1b/aa et bb p. 435 s.).

1.2 Dès lors que le présent recours n'est pas formé pour violation des
prescriptions du droit fédéral sur la compétence (art. 49 al. 1 OJ),
il n'est
recevable qu'aux conditions posées par l'art. 50 al. 1 OJ.

Il ressort de cette disposition que le recours en réforme interjeté
directement contre une décision incidente sans attendre la décision
finale
n'est recevable qu'exceptionnellement. Il faut, d'une part, qu'une
décision
finale puisse ainsi être provoquée immédiatement et, d'autre part,
que la
durée et les frais de la procédure probatoire apparaissent si
considérables
qu'il convient de les éviter en autorisant le recours immédiat au
tribunal.
Ces deux exigences sont cumulatives (cf. ATF 123 III 414 consid. 3b
p. 420).

Le tribunal décide librement et sans délibération publique si ces
conditions
sont remplies (art. 50 al. 2 OJ).

1.3 Comme la défenderesse soutient que seul le raisonnement adopté en
première instance est conforme au droit fédéral et qu'il suffit d'en
reprendre les conclusions, il y a lieu de s'interroger sur la
réalisation de
la seconde condition posée par l'art. 50 al. 1 OJ.

Celle-ci suppose d'examiner si la durée et les frais de la procédure
probatoire restant à accomplir seraient si considérables qu'il
convient de
les éviter en autorisant le recours immédiat au tribunal.

Comme le texte légal se réfère expressément à la procédure
probatoire, le
temps naturellement nécessaire pour que les parties puissent
s'exprimer et
que le tribunal puisse rendre son jugement n'entre pas en
considération
(Corboz, op. cit., p. 13). Il faut seulement apprécier l'ampleur
prévisible
de la procédure probatoire et déterminer si celle-ci justifie
d'écarter la
règle générale selon laquelle une cause ne peut être soumise au
Tribunal
fédéral qu'une seule fois.

Le recours immédiat étant exceptionnel, il convient d'interpréter la
condition issue de l'art. 50 al. 1 OJ de manière restrictive, puisque
la
décision incidente, en cas d'irrecevabilité du recours, pourra encore
être
attaquée avec le fond (ATF 122 III 254 consid. 2a; 118 II 91 consid.
1b p.
92).

S'il ne découle pas manifestement de la décision attaquée ou de la
nature de
la cause que la poursuite de la procédure prendra un temps
considérable et
exigera des frais très importants, il incombe à la partie recourante
d'indiquer quelles sont les mesures probatoires prévisibles et
pourquoi
l'administration des preuves devrait être particulièrement longue et
coûteuse
(ATF 118 II 91 consid. 1a p. 92; 116 II 738 consid. 1b/aa).

1.4 En l'espèce, la cour cantonale a ordonné d'opérer les calculs à
compter
d'une autre date que celle retenue par les juges de première
instance, soit à
partir de la conclusion du contrat et non pas à la fin de la période
d'indexation. Pour refaire les calculs, il suffit de disposer des
documents
nécessaires. A part la production de pièces (qui est habituelle pour
statuer
sur les litiges en matière de loyers), on ne voit pas quelle autre
mesure
probatoire serait prévisible. La défenderesse ne le dit pas non plus.
Certes, la cour cantonale a exigé également un calcul de rendement.
Comme la
défenderesse détient en principe les pièces nécessaires et qu'elle
manifeste
elle-même, dans son recours, le désir qu'il soit procédé à un tel
calcul, il
ne dépend que d'elle de réunir d'ores et déjà les documents idoines,
pour
qu'ils puissent être fournis sans retard. Aucune autre mesure
probatoire ne
paraît s'imposer. La défenderesse n'en fait du reste pas état.

En conséquence, la suite de la procédure n'exige que la production de
pièces
habituelles pour ce genre de litige, de sorte que l'on ne se trouve
pas en
présence d'un cas exceptionnel où la durée et les frais de la
procédure
probatoire prévisible justifieraient un recours immédiat au Tribunal
fédéral.

Le recours doit donc être déclaré irrecevable.

2.
Les frais et dépens seront mis à la charge de la défenderesse qui
succombe
(art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.

3.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 3'500 fr. à titre de
dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à la
Chambre d'appel en matière de baux et loyers du canton de Genève.

Lausanne, le 16 mai 2002

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.70/2002
Date de la décision : 16/05/2002
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-05-16;4c.70.2002 ?
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