La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2002 | SUISSE | N°I.481/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 mai 2002, I.481/01


«AZA 7»
I 481/01 Kt

IIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Ursprung et Frésard.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 10 mai 2002

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

T.________, intimé, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), place Grand-
Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A

.- Victime d'un infarctus du myocarde inférieur éten-
du, thrombolysé le 6 janvier 1997, T.________, né en 1947,
a été en incapacité t...

«AZA 7»
I 481/01 Kt

IIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Ursprung et Frésard.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 10 mai 2002

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

T.________, intimé, représenté par la Fédération suisse
pour l'intégration des handicapés (FSIH), place Grand-
Saint-Jean 1, 1003 Lausanne,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- Victime d'un infarctus du myocarde inférieur éten-
du, thrombolysé le 6 janvier 1997, T.________, né en 1947,
a été en incapacité totale de travail depuis cette date,
jusqu'au 28 février de la même année tout au moins; il a
ensuite repris son activité de jardinier à mi-temps jus-
qu'au 31 janvier 1998, date à laquelle il a été licencié
pour motifs économiques. Son salaire mensuel, versé douze

fois l'an, était de 4650 fr. Souffrant, par ailleurs, de
lombalgies, il a déposé une demande de prestations de l'as-
surance-invalidité le 6 avril 1998. Après avoir été opéré
le 10 février 1999 pour une greffe de la cornée, l'assuré a
encore subi, le 6 mars 2000, un triple pontage aorto-coro-
narien pour maladie coronarienne tritronculaire sévère et
angor d'effort de stade II-III.
Dans un rapport du 14 décembre 1999, le docteur
N.________, cardiologue FMH, expose que, du seul point de
vue cardiologique, près de trois ans après un infarctus
inférieur, l'évolution est satisfaisante, sans apparition
de signes d'ischémie résiduelle et avec une capacité fonc-
tionnelle très satisfaisante; le travail de jardinier, sans
gros travaux de terrassement, semble envisageable, en tout
cas à temps partiel. Ce praticien réserve cependant les
effets d'un syndrome lombo-vertébral, susceptible de limi-
ter cette activité.
A la demande de l'office, l'assuré a, par ailleurs,
été examiné le 9 février 2000 par le docteur S.________,
spécialiste en médecine interne et maladies rhumatismales.
Ce médecin retient les diagnostics de lombalgies chroniques
de type mécanique, intermittentes (origine discale L5-S1 et
articulaire postérieure L5-S1) dans le cadre d'un décondi-
tionnement physique important, maladie coronarienne tri-
tronculaire, status après infarctus myocardique inférieur
thrombolysé le 6 janvier 1997, greffe de cornée de l'oeil
droit en janvier ou février 1999 ensuite d'une brûlure en
1969 et obésité de classe I. Selon ce praticien, sur le
plan purement rhumatologique, le patient peut effectuer un
travail à 100 % qui ne nécessite ni port de charges très
lourdes, ni travail en flexion prolongée du tronc ou en
«positions vicieuses» du tronc (extension excessive,
torsions).
Par décision du 20 septembre 2000, l'Office de l'assu-
rance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après : l'offi-
ce) a rejeté la demande de prestation au motif que le degré

de l'invalidité (19,78 %) demeurait insuffisant pour ouvrir
le droit à une rente. Il a toutefois indiqué à l'assuré
qu'à l'échéance d'un délai d'attente d'une année, son droit
à une rente serait réexaminé, compte tenu d'une aggravation
de son état de santé survenue le 19 janvier 2000 et ayant
entraîné une réduction de sa capacité de travail à 50 %
dans un emploi adapté.

B.- Par jugement du 25 juin 2001, le Tribunal des
assurances du canton de Vaud a admis le recours formé par
l'assuré contre cette décision et accordé à ce dernier une
demi-rente d'invalidité à partir du 1er janvier 1998.

C.- L'office interjette recours de droit administratif
contre ce jugement, dont il requiert l'annulation.
T.________ conclut principalement à l'irrecevabilité et
subsidiairement au rejet du recours, le tout sous suite de
frais et dépens, cependant que l'Office fédéral des assu-
rances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Il ressort très clairement de l'écriture déposée
par l'office recourant le 16 août 2001 que ce dernier en-
tend obtenir l'annulation du jugement du 25 juin 2001.
L'office conteste expressément l'appréciation de la capaci-
té résiduelle de gain de l'assuré soit, en particulier, la
déduction de 40 % opérée par les juges cantonaux sur le
revenu d'invalide retenu dans la décision du 20 septembre
2000. Contrairement à l'opinion de l'intimé, cette motiva-
tion topique répond aux réquisits de l'art. 108 al. 2 OJ,
si bien qu'il convient d'entrer en matière sur le fond du
recours.

2.- Le jugement entrepris expose correctement les
principes légaux et jurisprudentiels régissant l'évaluation
de l'invalidité et le droit à une rente, si bien qu'il
suffit d'y renvoyer sur ce point.

3.- a) En substance, les premiers juges ont exposé que
les conclusions des docteurs N.________ et S.________ ne
concordaient pas nécessairement, à leurs yeux. Ils ont
relevé que, alors que le docteur N.________ est d'avis que
son patient peut encore exercer la profession de jardinier
sous certaines conditions - activité se déroulant par prin-
cipe en plein air -, le docteur S.________ évoque la possi-
bilité d'un emploi adapté exercé à plein temps, en d'autres
termes, d'une activité déployée exclusivement en intérieur.
Ils ont encore constaté que les affections dont souffre
l'assuré, considérées globalement, sont à l'évidence de na-
ture à réduire sa capacité de rendement. Forts de ces cons-
tatations, les premiers juges ont indiqué avoir acquis la
conviction que l'assuré aurait pu être engagé dans un poste
correspondant à sa capacité résiduelle de travail, soit
100 %, mais pour une rétribution égale à 60 % du gain d'in-
valide déterminé par l'office.

b) Pour sa part, l'office objecte que si les médecins
qui se sont prononcés sur le cas préconisent certaines
limitations de l'activité (absence de travaux de force,
stricte limitation du port de charges et exclusion des
flexions et positions inadéquates du tronc), aucun d'entre
eux ne fait état d'une possible réduction du rendement dans
une activité adaptée. Les emplois d'opérateur en galvanisa-
tion, d'ouvrier de production (adoucissage circulaire ou
affûtage d'instruments dentaires), ou des activités de mon-
tage industriel, de magasinage léger ou de conditionnement,
tous compatibles avec les limitations fonctionnelles de
l'assuré, permettraient à ce dernier de réaliser un revenu

annuel brut moyen de 44 629 fr. sans qu'aucune déduction
soit justifiée.

4.- a) De l'avis des spécialistes consultés, l'assuré
était, à tout le moins jusqu'au mois de décembre 1999, en
mesure d'exercer sa profession de jardinier, d'un point de
vue cardiologique. Dans ce contexte, le docteur N.________
relève en effet, notamment, une capacité fonctionnelle
satisfaisante sur la base des tests d'effort réalisés (rap-
port du 14 décembre 1999). D'un autre côté, sur le plan
purement rhumatologique, le docteur S.________ retient une
capacité de travail entière dans une activité ne nécessi-
tant ni le port de charges très lourdes, ni travaux en
flexion prolongée ou en positions inadéquates du tronc.
Contrairement à l'avis des premiers juges, aucun de
ces rapports médicaux ne permet de justifier un abattement
global de 40 % du revenu d'invalide retenu par l'office. Ni
les considérations émises en relation avec les conditions
de travail - en plein air ou en milieu fermé - ni l'obésité
du recourant, qualifiée de modérée par le docteur
N.________, ne permettent d'étayer cette appréciation. On
ne voit, du reste, pas ce qui, dans ce contexte, autorise-
rait une telle réduction globale, supérieure à celle admise
par la jurisprudence de la Cour de céans en relation avec
les revenus hypothétiques déterminés sur la base des sta-
tistiques salariales (ATF 126 V 78 consid. 5)
On ne saurait toutefois non plus s'en remettre au
revenu d'invalide tel que déterminé par l'office recourant.
Dans son écriture du 14 août 2000, ce dernier indique s'ê-
tre référé à des données établies sur la base du listing
REA et du fichier DPT CNA-AI. Les indications fournies
- aucune description de poste de travail n'ayant, au demeu-
rant, été produite formellement - ne permettent de détermi-
ner ni à quelle année de référence se rapportent les salai-
res en question, ni même si les postes de travail en ques-
tion existent toujours. Elles ne renseignent, par ailleurs,

que de manière très succincte sur les activités en cause.
On ignore ainsi, notamment, si elles sont concrètement
accessibles à une personne qui, comme l'intimé, ne bénéfi-
cie pratiquement que d'une vision monoculaire (rapport du
docteur S.________, anamnèse personnelle, p. 2).

b) Cela étant, l'assuré n'ayant pas repris d'activité
lucrative, sa capacité résiduelle de gain peut être déter-
minée sur la base de données statistiques (ATF 126 V 76
consid. 3). Au regard du large éventail d'activités simples
et répétitives offertes par les secteurs de la production
et des services, on doit convenir qu'un marché du travail
équilibré offre un nombre significatif de postes de travail
n'exigeant ni port de charges très lourdes, ni travail en
flexion prolongée ou position inadéquate du tronc et pou-
vant, par ailleurs, être occupés sans risque ni difficulté
particulière par une personne atteinte d'une importante
diminution de l'acuité visuelle d'un oeil.

c) Selon les données de l'enquête suisse sur la struc-
ture des salaires (ESS) 1998, le revenu mensuel standardisé
d'un homme exerçant une activité simple et répétitive s'é-
levait, tous domaines confondus, à 4268 fr. par mois (va-
leur médiane). Ce montant correspond, pour un horaire de
travail moyen de 41,9 heures (cf. ATF 126 V 81 consid. 7a)
à un salaire annuel brut, en 1998, de 53 648 fr. 75. Compte
tenu, par ailleurs, de l'ensemble des circonstances du cas
d'espèce (soit en particulier l'âge de l'assuré, né en
1947, sa scolarité interrompue à l'âge de 12 ans, la dimi-
nution de son acuité visuelle et les diverses limitations
posées par les médecins à son activité), qui justifient la
réduction maximale de 25 % de ce salaire statistique, le
revenu d'invalide peut être arrêté à 40 236 fr. 55.
En comparaison du revenu de 55 800 fr. (4650 fr. x 12)
ressortant du compte individuel de l'intimé, ce gain sans
invalidité fait apparaître un taux d'incapacité de gain de

27,89 % ([55 800 - 40 236] / 55 800], qui demeure insuffi-
sant pour lui ouvrir le droit à une rente (art. 28 al. 1
LAI), si bien que le recours de l'office se révèle fondé
dans son principe.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal des
assurances du canton de Vaud du 25 juin 2001 est annu-
lé.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud, à la Caisse
cantonale vaudoise de compensation ainsi qu'à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 10 mai 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.481/01
Date de la décision : 10/05/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-05-10;i.481.01 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award