{T 0/2}
2P.57/2002 /svc
Arrêt du 7 mai 2002
IIe Cour de droit public
Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler, Müller,
greffier Langone.
A. D.________,
N.D.________,
V.M.________, recourants, tous les trois représentés par Me Ralph
Oswald
Isenegger, avocat, rue du Vieux-Collège 10, case postale 3260, 1211
Genève 3,
contre
Office cantonal de la population, case postale 51, 1211 Genève 8,
Commission cantonale de recours de police des étrangers, Boulevard
Helvétique
27, 1207 Genève.
art. 31 et 36 OLE (non renouvellement d'une autorisation de séjour
pour
études)
(recours de droit public contre la décision de la Commission
cantonale de
recours de police des étrangers du 18 décembre 2001)
Faits:
A.
A. D.________, de nationalité russe, née en 1989, est entrée en
Suisse en
1995 pour y fréquenter une école privée en qualité d'interne et a
obtenu une
autorisation de séjour pour études au sens de l'art. 31 de
l'ordonnance du 6
octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE; RS 823.21).
Ses parents, N.D.________ et V.M.________, sont arrivés en Suisse en
décembre
1998 et y ont déposé une demande d'asile.
Le 22 septembre 2000, A.D.________ a sollicité le renouvellement de
l'autorisation de séjour pour études, tout en annonçant qu'elle serait
désormais domiciliée chez ses parents et qu'elle suivrait l'école en
tant
qu'externe. L'Office cantonal de la population du canton de Genève a
répondu
qu'il était disposé à lui délivrer une autorisation de séjour
temporaire
limitée au séjour en Suisse de ses parents au sens de l'art. 36 OLE,
sous
réserve de l'approbation de l'Office fédéral des étrangers. Celui-ci
a, le 18
décembre 2000, refusé de donner son approbation, en indiquant qu'il
n'était
pas opportun de délivrer une autorisation de séjour sous l'angle de
l'art. 36
OLE (autres étrangers n'exerçant pas d'activité lucrative), l'enfant
(mineure) pouvant être comprise dans la demande d'asile de ses
parents. Ce
prononcé n'a pas été attaqué.
B.
Par décision du 27 mars 2001, l'Office cantonal de la population a
refusé de
renouveler l'autorisation pour études d'A.D.________ et lui a fixé un
délai
au 27 juin 2001 pour quitter le territoire cantonal.
Statuant sur recours le 18 décembre 2001, la Commission cantonale de
recours
de police des étrangers du canton de Genève a confirmé cette
décision, tout
en invitant l'Office cantonal de la population à demander à l'Office
fédéral
des réfugiés l'admission provisoire de l'enfant, car le renvoi de
celle-ci ne
lui paraissait pas raisonnablement exigible, vu que ses parents
pouvaient
résider régulièrement en Suisse.
C.
Agissant par la voie du recours de droit public, N.D.________ et
V.M.________
et leur fille A.D.________ demandent au Tribunal fédéral d'annuler la
décision précitée du 18 décembre 2001 et de renvoyer la cause à
l'autorité
compétente pour que soit renouvelée l'autorisation de séjour pour
études de
cette dernière.
Les autorités cantonales concernées ont renoncé à déposer leurs
observations.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
Les recourants demandent qu'un deuxième échange d'écritures - qui n'a
lieu
qu'exceptionnellement (art. 93 al. 3 OJ) - soit ordonné. Cette
requête doit
être d'emblée rejetée, puisque les autorités cantonales ont renoncé à
déposer
leur réponse au recours.
2.
2.1 Vu le caractère subsidiaire du recours de droit public (art. 84
al. 2
OJ), il y a lieu d'examiner d'abord si le recours de droit
administratif au
sens des art. 97 ss OJ est recevable.
2.2 Selon l'art. 100 al. 1 lettre b ch. 3 OJ, le recours de droit
administratif n'est pas recevable en matière de police des étrangers
contre
l'octroi ou le refus d'autorisations auxquelles le droit fédéral ne
confère
pas un droit. D'après l'art. 4 de la loi fédérale sur le séjour et
l'établissement des étrangers (LSEE; RS 142.20), les autorités
compétentes
statuent librement, dans le cadre des prescriptions légales et des
traités
avec l'étranger, sur l'octroi ou le refus d'autorisations de séjour ou
d'établissement. Ainsi, le recours de droit administratif est
irrecevable, à
moins que ne puisse être invoquée une disposition particulière du
droit
fédéral ou d'un traité accordant le droit à la délivrance d'une telle
autorisation (ATF 127 II 60 consid. 1a, 161 consid. 1a et les arrêts
cités).
En l'espèce, A.D.________ ne peut invoquer aucune disposition
particulière du
droit fédéral ou d'un traité international lui accordant le droit à
une
autorisation de séjour sous quelque forme que ce soit.
2.3 La prénommée ne peut déduire un tel droit des art. 31 ss OLE.
Une simple
ordonnance ne saurait en effet conférer un droit à l'autorisation de
séjour,
car cela serait incompatible avec l'art. 4 LSEE, qui autorise les
autorités
cantonales à statuer librement en la matière. L'ordonnance en cause
ne peut
que rendre plus restrictives les conditions d'octroi d'une
autorisation de
police des étrangers par les cantons, mais ne saurait obliger ceux-ci
à
délivrer une telle autorisation (ATF 119 Ib 91 consid. 2b p. 96/97;
115 Ib 1
consid. 1b. Voir aussi plus récemment ATF 122 II 186 consid. 1a; 126
II 335
consid. 1c/aa p. 338).
2.4 L'intéressée ne peut pas non plus se prévaloir du droit au
respect de la
vie familiale garanti par l'art. 8 CEDH à l'égard de ses parents pour
obtenir
une autorisation de séjour, dans la mesure où ceux-ci ne disposent,
en tant
que requérants d'asile, d'aucun droit de présence assuré en Suisse au
sens de
la jurisprudence (ATF 119 Ib 91 consid. 1c; cf. aussi ATF 122 II 1
consid.
1e, 385 consid. 1c; 125 II 633 consid. 2e; ATF 126 II 335 consid. 2a
p. 339
s. et les références citées). Le Tribunal fédéral a déjà eu
l'occasion de
juger que ni les réfugiés admis provisoirement (ATF 126 II 335
consid. 2b/bb
p. 341), ni a fortiori les requérants d'asile, dont le statut était
encore
plus précaire, ne disposaient d'un droit de présence assuré en Suisse
au sens
de l'art. 8 CEDH (arrêt 2A.137/2002 du 25 mars 2002, consid. 2.2). Du
reste,
on ne saurait parler ici d'atteinte à l'art. 8 CEDH, puisque
l'intéressée a
la possibilité d'être incluse dans la demande d'asile de ses parents
et, par
conséquent, de vivre auprès d'eux en Suisse jusqu'au terme de la
procédure
d'asile.
3.
Les recourants n'ont pas qualité pour former un recours de droit
public sur
le fond au sens de l'art. 88 OJ, faute de droit à l'octroi d'une
autorisation
de séjour. Ils seraient certes habilités à agir par cette voie de
droit pour
se plaindre de la violation de leurs droits de partie (garantis par la
Constitution ou par la procédure cantonale) équivalant à un déni de
justice
formel (ATF 126 I 81 consid. 7b et les arrêts cités). Les recourants
ne
soulèvent toutefois pas de tels griefs - du moins pas de manière
conforme aux
exigences de motivation de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ -, si bien que
le
recours est également irrecevable sous cet aspect.
3.1 Les recourants prétendent que le Conseil fédéral aurait
outrepassé ses
compétences législatives en édictant l'ordonnance limitant le nombre
des
étrangers, dans la mesure où la LSEE ne contiendrait aucune norme de
délégation suffisante. Ils laissent entendre ainsi que le canton de
Genève
aurait été empêché de délivrer une autorisation de séjour en se
fondant sur
une ordonnance illégale. Or, comme on vient de le voir, un tel grief
de fond
ne peut être soulevé ni par la voie du recours de droit administratif
ni par
celle du recours de droit public. Un tel moyen aurait tout au plus pu
être
invoqué dans un recours formé contre le refus d'approbation du 18
décembre
2000 de l'Office fédéral des étrangers auprès du Département fédéral
de
justice et police (art. 20 al. 1 lettre a et al. 3 LSEE), voie de
droit que
les recourants n'ont pas utilisée. Quoi qu'il en soit, le Tribunal
fédéral a
maintes fois admis que l'ordonnance limitant le nombre des étrangers
était
compatible avec la loi et la Constitution (ATF 123 II 472 consid. 3
et 4b;
122 II 113 ss, 126 ss,186 ss, 120 Ib 6 consid. 3 et 119 Ib 91 consid.
2b). Du
reste, même si l'on ne devait pas appliquer cette ordonnance, les
cantons
resteraient entièrement libres, en vertu de l'art. 4 LSEE, de refuser
une
autorisation de séjour à laquelle un étranger n'a pas droit.
3.2 Pour le surplus, on ne voit pas en quoi la décision attaquée
serait
contraire à l'art. 14 CEDH (interdiction de discrimination), lequel
n'est du
reste pas applicable en l'espèce (ATF 123 II 472 consid. 4c p. 477).
Il en va
de même de l'art. 13 CEDH (droit à un recours effectif), étant
précisé que
les recourants ont eu accès à une autorité de recours sur le plan
cantonal
(sur la portée de cette disposition, ATF 126 II 377 consid. 8d/bb p.
396).
4.
En conclusion, le recours doit être déclaré irrecevable. Vu l'issue du
litige, la requête d'effet suspensif devient sans objet. Succombant,
les
recourants doivent supporter, solidairement entre eux, un émolument
judiciaire (art. 156 al. 1 et 7 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge des
recourants,
solidairement entre eux.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des
recourants, à
l'Office cantonal de la population et à la Commission cantonale de
recours de
police des étrangers, ainsi qu'à l'Office fédéral des étrangers pour
information.
Lausanne, le 7 mai 2002
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le président: Le greffier: