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03/05/2002 | SUISSE | N°2P.304/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 03 mai 2002, 2P.304/2001


{T 0/2}
2P.304/2001
2A.492/2001 /viz

Arrêt du 3 mai 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Merkli et Berthoud, juge suppléant,
greffière Dupraz.

Association A.________,
B.________ SA,
recourantes,
toutes les deux représentées par Me Pascal Pétroz, avocat,
avenue de Champel 24, case postale 123, 1211 Genève 12,

contre

Département de justice et police et des transports du canton de
Genève, rue
de l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3962,
1

211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue des Chaudronniers 3,
1204
Genève.

art. 8, 9 et 27 Cst...

{T 0/2}
2P.304/2001
2A.492/2001 /viz

Arrêt du 3 mai 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Merkli et Berthoud, juge suppléant,
greffière Dupraz.

Association A.________,
B.________ SA,
recourantes,
toutes les deux représentées par Me Pascal Pétroz, avocat,
avenue de Champel 24, case postale 123, 1211 Genève 12,

contre

Département de justice et police et des transports du canton de
Genève, rue
de l'Hôtel-de-Ville 14, case postale 3962,
1211 Genève 3,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue des Chaudronniers 3,
1204
Genève.

art. 8, 9 et 27 Cst.: autorisation d'exploiter des jeux

(recours de droit administratif et recours de droit public contre
l'arrêt du
Tribunal administratif du canton de Genève du
2 octobre 2001)
Faits:

A.
Le 19 septembre 1995, le Département de justice et police et des
transports -
actuellement Département de justice, police et sécurité - du canton
de Genève
(ci-après: le Département cantonal) a autorisé à titre exceptionnel la
Fondation C.________ (ci-après: la Fondation) à exploiter les jeux «
X.________ » et « Y.________ » dans le canton de Genève, moyennant le
respect
de différentes conditions. Cette autorisation provisoire d'une année
a été
accordée en raison du but de bienfaisance poursuivi et de
l'affectation
exclusive des recettes à la Fondation. Elle a été régulièrement
renouvelée,
toujours à titre exceptionnel, jusqu'au 31 décembre 2000, date à
laquelle la
Fondation a mis un terme à ses activités.

En décembre 2000, la société propriétaire des automates « X.________
» et «
Y.________ » a vendu son parc de machines à B.________ SA, qui en a
confié
l'exploitation à l'Association A.________ (ci-après: l'Association) -
dont le
secrétaire est à la tête de B.________ SA.

Le 15 janvier 2001, B.________ SA a demandé au Département cantonal
une
décision formelle au sujet de l'enlèvement des machines
susmentionnées. Le 16
janvier 2001, l'Association a sollicité l'octroi de patentes pour
exploiter
les jeux « X.________ » et « Y.________ ». Le 1er février 2001, le
Département cantonal a adressé à B.________ SA et à l'Association une
décision par laquelle il refusait de les autoriser à exploiter
lesdits jeux
et ordonnait que les machines en cause soient immédiatement mises hors
service et enlevées des locaux dans lesquels elles étaient exploitées
illégalement.

B.
L'Association et B.________ SA ont recouru au Tribunal administratif
du
canton de Genève (ci-après: le Tribunal administratif) contre la
décision
prise le 1er février 2001 par le Département cantonal. Elles ont
demandé que
cette décision soit annulée et que l'Association soit autorisée à
exploiter
les machines « X.________ » et « Y.________ ». Elles ont requis la
restitution de l'effet suspensif.

Par décision du 9 mars 2001, le Vice-Président du Tribunal
administratif a
rejeté la requête de mesures provisionnelles. Saisi de deux recours
contre
cette décision, l'un de droit administratif, l'autre de droit public,
le
Tribunal fédéral a, par arrêt du 31 juillet 2001, rejeté le premier
dans la
mesure où il était recevable et déclaré le second irrecevable.

Le Tribunal administratif a rejeté le recours cantonal, par arrêt du 2
octobre 2001. Il a retenu en substance que le refus d'autoriser
l'exploitation des jeux « X.________ » et « Y.________ » était
justifié dès
lors que les appareils en cause devaient être qualifiés de machines à
sous
servant à des jeux de hasard. En outre, ce refus ne constituait pas
une
violation de la liberté économique ni des principes de
proportionnalité ainsi
que d'égalité.

C.
L'Association et B.________ SA ont déposé au Tribunal fédéral un
recours de
droit administratif (n° 2A.492/2001) et un recours de droit public (n°
2P.304/2001) contre l'arrêt rendu le 2 octobre 2001 par le Tribunal
administratif. Dans les deux recours, elles concluent, sous suite de
frais et
dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué. Dans le recours de droit
administratif, elles demandent en outre au Tribunal fédéral
d'ordonner au
Département cantonal d'autoriser l'exploitation par l'Association des
machines « X.________ » et « Y.________ » dans le canton de Genève.
Dans le
recours de droit public, elles demandent encore au Tribunal fédéral de
renvoyer la cause au Tribunal administratif afin qu'il statue dans le
sens
des considérants.

Le Tribunal administratif a renoncé à déposer des observations sur les
recours, tout en se référant à l'arrêt attaqué. Le Département
cantonal
conclut, sous suite de frais, à ce que le Tribunal fédéral rejette le
recours
de droit administratif dans la mesure où il est recevable et déclare
le
recours de droit public irrecevable, subsidiairement, le rejette.

Au nom du Département fédéral de justice et police, la Commission
fédérale
des maisons de jeu (ci-après: la Commission fédérale) propose le
rejet du
recours de droit administratif. L'Office fédéral de la justice a,
pour sa
part, formulé des observations sur le statut juridique des appareils «
Z.________ ».

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 127 I 92 consid. 1 p. 93; 127 II 198 consid.
2 p.
201).

Les recourantes ont déposé un recours de droit administratif et un
recours de
droit public contre le même arrêt. Comme les deux recours reposent
sur le
même état de fait et invoquent des moyens en grande partie
identiques, il se
justifie de joindre les causes par économie de procédure et de
statuer sur
les mérites des deux recours dans un seul et même arrêt.

Vu le caractère subsidiaire du recours de droit public (art. 84 al. 2
OJ), il
convient d'examiner d'abord si la voie du recours de droit
administratif est
ouverte. Si tel est le cas, le recours de droit public est exclu.

2.
2.1Déposé en temps utile et dans les formes prescrites par la loi
contre un
arrêt rendu en dernière instance cantonale et fondé sur le droit
public
fédéral ainsi que sur le droit cantonal d'application du droit
fédéral (cf.
arrêt 2P.217/2001 du 3 décembre 2001, consid. 2), le recours de droit
administratif est en principe recevable au regard des art. 97 ss OJ.
En
particulier, il ne tombe pas sous le coup des exceptions mentionnées
à l'art.
99 al. 1 lettre e OJ qui exclut le recours de droit administratif
notamment
contre l'octroi ou le refus d'autorisations de mettre en service des
installations techniques. Cette notion comprend les dispositifs
servant à un
but déterminé et dont la fabrication ainsi que l'usage exigent des
connaissances spéciales; il peut s'agir d'appareils mobiles ou
d'aménagements
fixes de grandes dimensions (ATF 103 Ib 152 consid. 2 p. 153; arrêt
1A.196/1999 du 24 novembre 1999, consid.1b). Il n'est pas nécessaire
de
rechercher si les appareils en cause ici entrent ou non dans cette
catégorie.
La restriction posée par l'art. 99 al. 1 lettre e OJ ne se rapporte
en effet
qu'au fonctionnement technique de l'installation (ATF 121 II 156
consid. 2d
p. 157). Le recours de droit administratif est en revanche ouvert
lorsque la
décision est fondée sur des raisons qui ne sont pas principalement de
nature
technique (ATF 104 Ib 123 consid. 1a p. 125; arrêt 1A.196/1999 du 24
novembre
1999, consid. 1b). En l'espèce, le litige porte sur l'exploitation
d'appareils autorisés avant l'entrée en vigueur de la loi fédérale du
18
décembre 1998 sur les jeux de hasard et les maisons de jeu (loi sur
les
maisons de jeu; LMJ; RS 935.52), question qui ne relève pas de la
technique.

Dès lors, le recours de droit administratif est recevable et le
recours de
droit public irrecevable.

2.2 D'après l'art. 104 OJ, le recours de droit administratif peut
être formé
pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du
pouvoir
d'appréciation (lettre a) ainsi que pour constatation inexacte ou
incomplète
des faits pertinents, sous réserve de l'art. 105 al. 2 OJ, (lettre
b). Le
Tribunal fédéral vérifie d'office l'application du droit fédéral, qui
englobe
notamment les droits constitutionnels des citoyens (ATF 126 V 252
consid. 1a
p. 254; 125 II 508 consid. 3a p. 509), sans être lié par les motifs
invoqués
par les parties (art. 114 al. 1 in fine OJ). En revanche, lorsque le
recours
est dirigé, comme en l'espèce, contre la décision d'une autorité
judiciaire,
le Tribunal fédéral est lié par les faits constatés dans cette
décision, sauf
s'ils sont manifestement inexacts ou incomplets ou s'ils ont été
établis au
mépris de règles essentielles de procédure (art. 105 al. 2 OJ). En
outre, le
Tribunal fédéral ne peut pas revoir l'opportunité de l'arrêt
entrepris, le
droit fédéral ne prévoyant pas un tel examen en la matière (art. 104
lettre c
ch. 3 OJ).

3.
Les recourantes reprochent au Tribunal administratif d'avoir violé le
droit
fédéral en retenant que les appareils litigieux ne sont pas des jeux
d'adresse. Elles estiment que la poursuite de leur exploitation serait
possible au regard de l'art. 60 al. 2 LMJ, même s'ils devaient être
considérés comme des jeux de hasard.

3.1 L'art. 58 al. 1 de l'ordonnance du 23 février 2000 sur les jeux
de hasard
et les maisons de jeu (ordonnance sur les maisons de jeu; OLMJ; RS
935.521)
dispose que toute personne qui entend exploiter un appareil à sous
servant à
des jeux d'adresse ou de hasard (appareil à sous) doit, avant sa mise
en
exploitation, le présenter à la Commission fédérale. Conformément à
l'art. 61
al. 1 1ère phrase, cette autorité décide, sur la base des documents
produits,
si l'appareil à sous présenté sert à des jeux d'adresse ou à des jeux
de
hasard. Les recourantes n'ont jamais sollicité une telle décision.
Selon
toute vraisemblance, elles s'en sont abstenues parce qu'elles
connaissent la
décision que prendrait la Commission fédérale. En effet, dans deux
courriers
des 15 février et 5 mars 2001, cette autorité a confirmé que les jeux
«
X.________ » et « Y.________ » étaient exploités illégalement; elle a
également précisé qu'une seule demande d'homologation pour un appareil
servant aux jeux d'adresse avait été présentée et d'ailleurs rejetée,
et
qu'aucun appareil servant aux jeux d'adresse au sens de l'art. 3 al.
3 LMJ
n'existait en Suisse. Au demeurant, c'est en vain que les recourantes
invoquent l'art. 59 lettre b OLMJ, selon lequel l'appareil à sous ne
doit pas
être présenté à la Commission fédérale lorsque le même appareil à
sous a déjà
été présenté et que l'exploitant peut apporter la preuve que le type
et le
logiciel sont identiques à ceux de l'appareil présenté. En effet,
cette
exception implique qu'un appareil ait été soumis à la Commission
fédérale
afin qu'elle statue en appliquant les critères consacrés par la
législation
en vigueur depuis le 1er avril 2000; une décision d'homologation
prise par le
Département fédéral de justice et police sur la base de l'ancien
droit ne
saurait justifier l'application de l'art. 59 lettre b OLMJ. Dès lors,
l'autorité intimée n'a pas violé le droit fédéral en considérant que
les jeux
« X.________ » et « Y.________ » devaient être qualifiés de jeux de
hasard.

Au surplus, même si les intéressées avaient pu faire homologuer les
appareils
litigieux comme jeux d'adresse, elles n'auraient pu les exploiter en
dehors
des casinos qu'avec une autorisation cantonale. Or, il ressort d'un
communiqué du Département cantonal du 1er septembre 2000 sur les
automates de
jeu à points atypiques, publié dans la Feuille d'Avis Officielle du
canton de
Genève du 13 septembre 2000, que toute exploitation de machines à
sous en
dehors des casinos est interdite dans le canton de Genève.

Enfin, compte tenu de ce qui précède, la circulaire de la Commission
fédérale
du 29 mai 2000, relative notamment au changement de détendeur de
l'autorisation d'exploiter des appareils à sous servant aux jeux
d'argent,
n'est d'aucun secours pour les recourantes. Il en va de même de
l'art. 10 de
l'ordonnance du 22 avril 1998 concernant les appareils automatiques
servant
aux jeux d'argent (OAJA; RO 1998 p. 1518) qui a été abrogée par
l'entrée en
vigueur de la loi sur les maisons de jeu (art. 13 al. 2 OAJA).

3.2 Selon l'art. 60 al. 2 LMJ, les cantons peuvent autoriser, dans un
délai
de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi sur les
maisons de
jeu, la continuation de l'exploitation, hors des grands casinos et des
casinos, de cinq appareils à sous considérés comme servant à des jeux
de
hasard pour autant qu'ils aient été mis en exploitation avant le 1er
novembre
1997. Les cantons ont donc la possibilité (« Kann-Vorschrift »), mais
non
l'obligation, de faire usage de cette disposition transitoire. Le
canton de
Genève, qui a toujours suivi une pratique restrictive en la matière, a
clairement manifesté son intention de ne pas admettre d'exception au
principe
de l'art. 60 al. 1 LMJ, d'après lequel toute exploitation de machines
à sous
en dehors des casinos est prohibée (cf. communiqué précité du 1er
septembre
2000). En renonçant à faire usage d'une faculté qui lui est
expressément
réservée par la loi sur les maisons de jeu et en s'en tenant au
principe
consacré par l'art. 60 al. 1 LMJ, le canton de Genève n'a pas violé
le droit
fédéral. L'arrêt attaqué rendu sur cette base n'est pas critiquable à
cet
égard.

4.

Les recourantes se plaignent de violation de la liberté économique.
Elles
font valoir que, dans la mesure où l'arrêt entrepris est fondé sur
l'art. 14
al. 1 lettre e de la loi genevoise du 27 octobre 1923 sur l'exercice
des
professions ou industries permanentes, ambulantes et temporaires
(ci-après:
la loi cantonale ou LEP), il manque de base légale, restreint de façon
inadmissible leur liberté économique et est disproportionné.

4.1 Selon l'art. 27 al. 1 Cst., la liberté économique est garantie.
Elle
comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à
une
activité économique lucrative privée et son libre exercice (art. 27
al. 2
Cst.). Cette liberté protège toute activité économique privée,
exercée à
titre professionnel et tendant à la production d'un gain ou d'un
revenu (cf.
le message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une
nouvelle
Constitution fédérale, in FF 1997 I 1 ss, p. 176). Elle peut être
invoquée
aussi bien par les personnes physiques que par les personnes morales
(FF 1997
I 179).

Aux termes de l'art. 36 al. 1 Cst., toute restriction d'un droit
fondamental
doit être fondée sur une base légale; les restrictions graves doivent
être
prévues par une loi; les cas de danger sérieux, direct et imminent
sont
réservés. Toute restriction d'un droit fondamental doit être
justifiée par un
intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui
(art. 36
al. 2 Cst.) et proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.).
L'essence des
droits fondamentaux est inviolable (art. 36 al. 4 Cst.).
Les restrictions à la liberté économique peuvent prendre la forme de
prescriptions cantonales instaurant des mesures de police proprement
dites,
mais également d'autres mesures d'intérêt général tendant à procurer
du
bien-être à l'ensemble ou à une grande partie des citoyens ou à
accroître ce
bien-être, telles que les mesures sociales ou de politique sociale.
Ces
restrictions cantonales doivent reposer sur une base légale, être
justifiées
par un intérêt public prépondérant et, selon le principe de la
proportionnalité, se limiter à ce qui est nécessaire à la réalisation
des
buts d'intérêt public poursuivis. Les restrictions cantonales à la
liberté
économique ne peuvent toutefois se fonder sur des motifs de politique
économique et intervenir dans la libre concurrence pour favoriser
certaines
formes d'exploitation en dirigeant l'économie selon un certain plan,
à moins
que cela ne soit prévu par une disposition constitutionnelle spéciale
(ATF
125 I 209 consid. 10a p. 221 et la jurisprudence citée).

4.2 L'interdiction cantonale d'exploiter des machines à sous est
fondée sur
l'art. 14 al. 1 lettre e LEP, selon lequel les distributeurs
automatiques
basés sur le jeu d'argent sont interdits. D'après les recourantes,
l'autorité
intimée aurait omis de prendre en compte l'art. 4 al. 1 du règlement
d'exécution du 18 juillet 1990 de la loi cantonale (ci-après: RLEP),
qui se
réfère, pour définir les distributeurs automatiques basés sur le jeu
d'argent, à l'art. 3 de la loi fédérale du 5 octobre 1929 sur les
maisons de
jeu (ci-après: l'ancienne loi sur les maisons de jeu; RS 10 p. 270
ss). Elles
déduisent de l'art. 4 al. 1 RLEP que le droit cantonal ne peut
prohiber que
les jeux considérés comme étant de hasard au regard des critères
fixés par
l'ancienne législation fédérale en la matière. Ce raisonnement ne
saurait
être suivi. Lesdits critères n'ont plus de portée depuis l'abrogation
de
l'ancienne loi sur les maisons de jeu et l'art. 4 RLEP, invoqué par
les
recourantes, n'est plus conforme au droit fédéral. La délimitation
entre les
jeux de hasard et les jeux d'adresse relève exclusivement de la loi
sur les
maisons de jeu, soit du droit actuellement en vigueur; elle est du
ressort de
la Commission fédérale. Une disposition contraire contenue dans un
règlement
d'exécution d'une loi cantonale ne saurait faire obstacle au droit
fédéral.
En attendant l'adoption de la loi genevoise d'application de la loi
sur les
maisons de jeu, actuellement en préparation, l'art. 14 al. 1 lettre e
LEP
constitue une base légale suffisante pour permettre au canton de
Genève de
refuser l'exploitation, hors des casinos, d'appareils à sous servant
aux jeux
de hasard, en application de l'art. 60 al. 2 LMJ.

4.3 Se fondant sur le principe de la proportionnalité, les recourantes
soutiennent que la poursuite de l'exploitation des jeux litigieux
demeurerait
possible, en relevant que, dans une lettre du 10 août 2000 adressée à
la
Fondation, la Commission fédérale avait évoqué une telle possibilité,
à
certaines conditions. Dans le courrier précité, la Commission
fédérale a
rappelé le contenu de l'art. 60 al. 2 LMJ et précisé qu'elle ne
s'opposerait
pas à la poursuite de l'exploitation des jeux « X.________ » et «
Y.________
» à la double condition que les autorités cantonales compétentes
renouvellent
l'autorisation spéciale et que les appareils aient été mis en
exploitation
avant le 1er novembre 1997. Or, les autorités genevoises compétentes
ont
précisément refusé le renouvellement de ladite autorisation pour
l'année
2001. En conséquence, la continuation de l'exploitation des appareils
litigieux n'était plus possible. C'est donc à juste titre que le
Tribunal
administratif a estimé qu'il n'y avait pas d'alternative légale à
l'interdiction d'exploitation. Pour le surplus, compte tenu des
objectifs
poursuivis par la loi sur les maisons de jeu, l'autorité intimée n'a
pas
violé le principe de la proportionnalité en retenant que l'intérêt
public au
refus d'autoriser l'exploitation des jeux litigieux l'emportait sur
l'intérêt
privé des recourantes à l'exercice d'une activité économique grâce à
l'exploitation desdits jeux.

4.4 Dès lors, les moyens que les recourantes tirent d'une prétendue
violation
de la liberté économique ne sont pas fondés.

5.
Les recourantes reprochent au Tribunal administratif d'avoir violé les
principes de l'égalité et de l'interdiction de l'arbitraire.

La protection de l'égalité (art. 8 Cst.) et celle contre l'arbitraire
(art. 9
Cst.) sont étroitement liées. Une décision est arbitraire lorsqu'elle
ne
repose pas sur des motifs sérieux et objectifs ou n'a ni sens ni but.
Elle
viole le principe de l'égalité lorsqu'elle établit des distinctions
juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard
de la
situation de fait à réglementer ou lorsqu'elle omet de faire des
distinctions
qui s'imposent au vu des circonstances, c'est-à-dire lorsque ce qui
est
semblable n'est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est
dissemblable ne l'est pas de manière différente. Il faut que le
traitement
différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait
importante. L'inégalité apparaît ainsi comme une forme particulière
d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait
l'être
de manière semblable ou inversement (ATF 127 I 185 consid. 5 p. 192).

5.1 Les intéressées prétendent faire l'objet d'un traitement
discriminatoire
contraire au principe de l'égalité par rapport à la Fondation, d'une
part, et
à E.________, autorisée à exploiter les jeux « Z.________ », d'autre
part.

5.1.1 D'après les recourantes, les autorités genevoises compétentes
auraient
accordé l'autorisation de poursuivre l'exploitation des jeux «
X.________ »
et « Y.________ » si la Fondation l'avait requise et le refus qui
leur a été
opposé n'aurait été dicté que par le changement de requérante. Cette
supposition n'est étayée par aucun fait concret. Il y a lieu de
penser au
contraire que les autorités genevoises compétentes auraient signifié
un refus
à la Fondation également. C'est en effet à titre tout à fait
exceptionnel et
à la suite de l'intervention de l'Office fédéral de la police que le
Département cantonal a finalement autorisé à titre temporaire et sous
certaines conditions précises l'exploitation des jeux litigieux par la
Fondation. Le 22 décembre 1999, lors du dernier renouvellement de
cette autorisation, le Département cantonal a expressément réservé une
éventuelle modification des dispositions légales (fédérales ou
cantonales).
Le communiqué précité du 1er septembre 2000 interdisant dorénavant
l'exploitation des automates de jeu à points atypiques en dehors des
casinos
ne laisse place à aucune exception. D'ailleurs, c'est apparemment
ainsi que
l'a compris la Fondation, puisqu'elle a mis un terme à ses activités
à la fin
du mois de décembre 2000. En outre, il faut rappeler que, le 21
décembre
2000, le Département cantonal n'est même pas entré en matière sur la
demande
de la société D.________ SA tendant à pouvoir reprendre
l'exploitation des
jeux « X.________ » et « Y.________ ». A cette occasion, le
Département
cantonal a clairement fait état de sa volonté de lutter contre les
automates
de jeu à points atypiques, à la suite de l'entrée en vigueur de la
loi sur
les maisons de jeu.

5.1.2 Les recourantes s'estiment victimes d'une inégalité du fait que
E.________ peut exploiter, dans les établissements publics du canton
de
Genève, les jeux « Z.________ » qu'elles qualifient de jeux de
hasard. En
l'état, les jeux proposés par les appareils « Z.________ » sont
assimilés à
des loteries et relèvent de la loi fédérale du 8 juin 1923 sur les
loteries
et les paris professionnels (LLP; RS 935.51). Ils ne font que
transférer le
jeu de loterie au sens de l'art. 1 al. 2 LLP d'un support papier sur
un
support électronique, sans altérer de façon essentielle la nature du
jeu de
loterie. La loi sur les maisons de jeu les exclut de son champ
d'application
(art. 1 al. 2 LMJ). Le traitement différent réservé aux appareils «
Z.________ » d'une part et aux jeux « X.________ » et « Y.________ »
d'autre
part ne saurait être constitutif d'une inégalité dans la mesure où les
conditions d'exploitation de ces machines relèvent de réglementations
distinctes. Au demeurant, les recourantes ne développent aucune
argumentation
tendant à démontrer que l'exploitation des appareils « Z.________ »
devrait
être soumise à la loi sur les maisons de jeu.

5.1.3 Les moyens que les intéressées tirent de prétendues violations
du
principe de l'égalité ne sont donc pas fondés.

5.2 Les recourantes reprochent à l'autorité intimée d'être tombée dans
l'arbitraire en omettant de prendre en considération l'art. 4 RLEP.
Ce moyen,
invoqué à l'appui de la prétendue violation de la liberté économique
des
intéressées, a déjà été écarté pour les motifs énoncés ci-dessus
(consid.
4.2). En l'absence d'argumentation complémentaire topique, le grief
d'arbitraire est insuffisamment motivé au regard de l'art. 108 al. 2
OJ; il
est donc irrecevable. Au demeurant, si ce moyen était recevable, il
devrait
être rejeté. En effet, l'arrêt attaqué fait clairement état des
modifications
apportées par la loi sur les maisons de jeu dans le régime des
autorisations
et de la politique adoptée par le canton de Genève en la matière; en
outre,
il expose de manière convaincante la prépondérance des intérêts
publics en
cause sur les intérêts privés des recourantes; dès lors, il échappe
au grief
d'arbitraire.

6.
Vu ce qui précède, le recours de droit administratif doit être rejeté
dans la
mesure où il est recevable. Le recours de droit public doit être
déclaré
irrecevable.
Succombant, les recourantes doivent supporter les frais judiciaires
(art. 156
al. 1, 153 et 153a OJ) et n'ont pas droit à des dépens (art. 159 al.
1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
La jonction des causes 2A.492/2001 et 2P.304/2001 est prononcée.

2.
Le recours de droit administratif est rejeté dans le mesure où il est
recevable.

3.
Le recours de droit public est déclaré irrecevable.

4.
Un émolument judiciaire de 4'000 fr. est mis à la charge des
recourantes.

5.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire des
recourantes, au
Département de justice, police et sécurité et au Tribunal
administratif du
canton de Genève ainsi qu'au Département fédéral de justice et police.

Lausanne, le 3 mai 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.304/2001
Date de la décision : 03/05/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-05-03;2p.304.2001 ?
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