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19/04/2002 | SUISSE | N°C.326/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 avril 2002, C.326/01


«AZA 7»
C 326/01 Mh

Ière Chambre

MM. les juges Schön, Président, Borella, Rüedi, Meyer et
Frésard. Greffier : M. Métral

Arrêt du 19 avril 2002

dans la cause

D.________, recourant,

contre

Caisse publique cantonale valaisanne de chômage, place du
Midi 40, 1951 Sion, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière de chômage, Sion

A.- D.________ a travaillé au service de X.________ à
partir du 1er juillet 1996. L'employeur ayant obtenu un
sur

sis concordataire le 29 mai 1998, D.________ a présenté
une demande d'indemnité en cas d'insolvabilité, le 10 juin
1998.

Le 19 a...

«AZA 7»
C 326/01 Mh

Ière Chambre

MM. les juges Schön, Président, Borella, Rüedi, Meyer et
Frésard. Greffier : M. Métral

Arrêt du 19 avril 2002

dans la cause

D.________, recourant,

contre

Caisse publique cantonale valaisanne de chômage, place du
Midi 40, 1951 Sion, intimée,

et

Commission cantonale de recours en matière de chômage, Sion

A.- D.________ a travaillé au service de X.________ à
partir du 1er juillet 1996. L'employeur ayant obtenu un
sursis concordataire le 29 mai 1998, D.________ a présenté
une demande d'indemnité en cas d'insolvabilité, le 10 juin
1998.

Le 19 avril 1999, la Caisse publique cantonale
valaisanne de chômage a rendu une décision par laquelle
elle reconnaissait à l'assuré le droit à l'indemnité
prétendue jusqu'à concurrence d'un montant brut de
11 670 fr. 80 pour les salaires de janvier, avril et mai
1998.

B.- D.________ a recouru contre cette décision en con-
cluant au versement par la caisse, en sus de l'indemnité
précitée, d'allocations familiales pour les mois de jan-
vier, avril et mai 1998.
Statuant le 5 juillet 2001, la Commission cantonale
valaisanne de recours en matière de chômage a rejeté le
recours.

C.- D.________ interjette un recours de droit adminis-
tratif en concluant derechef au versement par la caisse de
chômage d'allocations familiales pour les mois de janvier,
avril et mai 1998, en plus des indemnités déjà versées.
La commission de recours et la caisse de chômage
concluent toutes deux au rejet du recours. Invitée à se
déterminer, la Caisse interprofessionnelle valaisanne
d'allocations familiales (CIVAF) conclut à son admission.
Quant au Secrétariat d'Etat à l'économie (seco), il propose
de rejeter le recours. La CIVAF a déposé des déterminations
complémentaires.

Considérant en droit :

1.- La décision attaquée porte sur le refus d'englober
dans l'indemnité en cas d'insolvabilité selon les art. 51
ss LACI les allocations familiales de droit cantonal. Dans
cette mesure, elle statue sur une prétention découlant du
droit public fédéral des assurances sociales. Le recours de

droit administratif est ainsi recevable au regard des
art. 97, 98 let. b à h et 98a OJ, en corrélation avec
l'art. 5 PA, ainsi que de l'art. 128 OJ.

2.- a) Les dispositions des art. 51 ss LACI ont in-
troduit une assurance perte de gain en cas d'insolvabilité
d'un employeur, destinée à combler une lacune dans le sys-
tème de protection sociale. Pour le législateur, le privi-
lège conféré par la LP aux créances de salaire (art. 219
LP) ne donnait en effet pas une garantie suffisante au
travailleur, si bien qu'il était nécessaire de lui assurer
la protection par le droit public, à tout le moins pendant
une période limitée et déterminée. Il s'est donc agi de
protéger des créances de salaire du travailleur pour lui
assurer les moyens d'existence et éviter que des pertes ne
le touchent durement dans son existence (Message du Conseil
fédéral concernant une nouvelle loi fédérale sur l'assuran-
ce-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabili-
té du 2 juillet 1980, FF 1980 III 532 sv; Adrian Staehelin,
Die zeitliche Begrenzung des von der Insolvenzentschädigung
gedeckten Lohnes, in Mélanges en l'honneur de Jean-Louis
Duc, Lausanne 2001, p. 315 sv; Nussbaumer, Arbeitslosen-
versicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht
[SBVR], 1998, ch. 492).
Par ailleurs, l'indemnité en cas d'insolvabilité ne
couvre que des créances de salaire qui portent sur un
travail réellement fourni (ATF 127 V 185 consid. 3b); par
exemple, elle ne peut pas être octroyée pour des préten-
tions en raison d'un congédiement immédiat et injustifié du
travailleur (ATF 125 V 494 consid. 3b et les arrêts et
références cités).

b) Selon l'art. 52 al. 1 LACI (dans sa version en
vigueur jusqu'au 30 août 1999), l'indemnité en cas d'insol-
vabilité couvre les créances de salaire portant sur les six
derniers mois du rapport de travail, jusqu'à concurrence,
pour chaque mois, du montant maximum selon l'article 3,

1er alinéa. Les allocations dues au travailleur sont répu-
tées partie intégrante du salaire.
La référence à l'art. 3 al. 1 LACI (qui figure égale-
ment dans la nouvelle rédaction de l'art. 52 al. 1 LACI, en
vigueur depuis le 1er septembre 1999) signifie que par
«créance de salaire» on entend le salaire déterminant au
sens de la législation sur l'AVS (Nussbaumer, op. cit.,
ch. 519; Gerhards, Kommentar zum Arbeitslosenversicherungs-
gesetz, note 6 ad art. 52). Il s'agit en règle ordinaire du
salaire contractuel, plafonné jusqu'à concurrence du mon-
tant maximum du gain mensuel assuré dans l'assurance-acci-
dents obligatoire (art. 3 al. 1 LACI en corrélation avec
l'art. 22 al. 1 OLAA; voir aussi Gabriel Aubert, L'emplo-
yeur insolvable, in : Journée 1992 du droit du travail et
de la sécurité sociale, p. 133). Le montant plafonné com-
prend toutes les allocations dues au travailleur, y compris
celles versées en compensation d'inconvénients liés à
l'exécution du travail, soit notamment les suppléments de
salaire pour le travail de nuit ou du dimanche, pour heures
supplémentaires etc. (Aubert, loc. cit.; cf. aussi Kurt
Meier, Lohnforderungen im Arbeitgeber-Konkurs in : Plädoyer
2/1998, p. 44).

c) Le salaire déterminant, au sens de l'art. 5 al. 2
LAVS, comprend toute rémunération pour un travail dépen-
dant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé. Font
partie de ce salaire déterminant, par définition, toutes
les sommes touchées par le salarié, si leur versement est
économiquement lié au contrat de travail; peu importe, à ce
propos, que les rapports de service soient maintenus ou
aient été résiliés, que les prestations soient versées en
vertu d'une obligation ou à titre bénévole. On considère
donc comme revenu d'une activité salariée, soumis à cotisa-
tions, non seulement les rétributions versées pour un
travail effectué, mais en principe toute indemnité ou
prestation ayant une relation quelconque avec les rapports
de service, dans la mesure où ces prestations ne sont pas

franches de cotisations en vertu de prescriptions légales
expressément formulées (ATF 126 V 222 consid. 4a, 124 V 101
consid. 2 et la jurisprudence citée).
Selon l'art. 5 al. 4 LAVS, le Conseil fédéral peut
excepter du salaire déterminant les prestations sociales,
ainsi que les prestations d'un employeur à ses employés ou
ouvriers lors d'événements particuliers. Le Conseil fédéral
a fait usage de cette délégation de compétence, notamment à
l'art. 6 al. 2 let. f RAVS. Selon cette disposition régle-
mentaire, ne sont pas comprises dans le revenu déterminant
provenant d'une activité lucrative, les allocations fami-
liales qui sont accordées conformément aux usages locaux ou
professionnels, au titre d'allocation pour enfants et
d'allocation de formation professionnelle, d'allocation de
ménage ou d'allocation de mariage ou de naissance (voir
aussi SVR 1995 AHV n° 50, p. 137).
Dans la mesure où les allocations familiales ne font
pas partie du salaire déterminant au sens du droit de
l'AVS, elles ne sauraient, vu ce qui a été dit plus haut
(supra consid. 2b), être portées en compte dans le salaire
mensuel couvert par l'assurance en cas d'insolvabilité
selon la LACI.

d) Cette solution, du reste, est conforme au but et à
la systématique de la loi qui ne règle la question du
droit aux allocations familiales que pour les périodes de
chômage. En effet, selon l'art. 22 al. 1 LACI, l'indemnité
journalière pleine et entière s'élève à 80 pour cent du
gain assuré. L'assuré touche en outre un supplément qui
correspond au montant, calculé par jour, des allocations
légales pour enfants et formation professionnelle auxquel-
les il aurait droit s'il avait un emploi. Le supplément
n'est versé que dans la mesure où les allocations pour
enfants ne sont pas servies durant la période du chômage.
Aux termes de l'art. 34 al. 1 OACI, le supplément corres-
pondant aux allocations légales pour enfants et formation
professionnelle est calculé d'après la loi régissant les

allocations familiales dans le canton où l'assuré est domi-
cilié. Ces dispositions visent à mettre la personne au
chômage sur le même pied que le salarié en ce qui concerne
les allocations familiales (ATF 124 V 141 consid. 5b). Si
la LACI ne prévoit pas le versement d'allocations familia-
les en supplément de l'indemnité en cas d'insolvabilité,
c'est précisément parce que cette indemnité concerne des
périodes d'activité durant lesquelles l'assuré a fourni un
travail et était de ce fait réputé salarié.

e) La CIVAF fait valoir que les caisses de chômage
sont considérées comme employeurs quand elles versent les
indemnités en cas d'insolvabilité. En effet, selon la
CIVAF, elles versent le salaire déterminant selon la LAVS.
Par conséquent, elles seraient également tenues de payer
les allocations familiales.
Mais cette argumentation n'est pas pertinente. Dans
les régimes cantonaux d'allocations familiales, les presta-
tions en faveur des salariés sont financées par des cotisa-
tions des employeurs, fixées généralement en pour cent des
salaires versés. La mise en oeuvre des régimes cantonaux
est confiée, en règle ordinaire, à des caisses d'alloca-
tions familiales (voir à ce sujet, Pascal Mahon, Les allo-
cations familiales, in : SBVR, ch. 60 et 61). En aucun cas,
l'allocation familiale n'est versée par l'employeur au
moyen de ses propres deniers. Dès lors, même si l'on admet-
tait que la caisse d'assurance-chômage se substitue à
l'employeur quand elle verse l'indemnité en cas d'insolva-
bilité, cela ne signifierait d'aucune manière qu'elle
serait tenue de verser, en sus, les allocations familiales
de droit cantonal. En réalité, la caisse prend plutôt la
place du travailleur puisqu'elle est légalement subrogée
dans les droits de l'assuré, en opérant le versement de
l'indemnité, jusqu'à concurrence de l'indemnité versée et
des cotisations des assurances sociales qu'elle a acquit-
tées (art. 54 al. 1 LACI; voir ATF 123 V 75).

3.- Il résulte de ce qui précède que le recours est
mal fondé. La procédure porte sur l'octroi ou le refus de
prestations d'assurance sociale, de sorte qu'elle est
gratuite (art. 134 OJ). Elle ne donne par ailleurs pas lieu
à l'octroi de dépens (art. 159 al. 1 et al. 2 in fine OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Caisse interprofessionnelle valaisanne d'allocations
familiales, à la Commission cantonale valaisanne de
recours en matière de chômage et au Secrétariat d'Etat
à l'économie.

Lucerne, le 19 avril 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.326/01
Date de la décision : 19/04/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-04-19;c.326.01 ?
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