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08/04/2002 | SUISSE | N°5P.470/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 avril 2002, 5P.470/2001


«/2»
5P.470/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

8 avril 2002

Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Escher et
Mme Hohl, juges. Greffier: M. Braconi.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________, représenté par Me Olivier Derivaz, avocat à
Monthey,

contre

l'arrêt rendu le 31 octobre 2001 par la Cour de droit public
du Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause qui
oppose le recourant à l'E

tat du V a l a i s , à Sion;

(art. 6 CEDH; obligation de dissoudre la réserve de
cotisations LPP constituée par l'OPF...

«/2»
5P.470/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

8 avril 2002

Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Escher et
Mme Hohl, juges. Greffier: M. Braconi.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________, représenté par Me Olivier Derivaz, avocat à
Monthey,

contre

l'arrêt rendu le 31 octobre 2001 par la Cour de droit public
du Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause qui
oppose le recourant à l'Etat du V a l a i s , à Sion;

(art. 6 CEDH; obligation de dissoudre la réserve de
cotisations LPP constituée par l'OPF de Monthey);

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) X.________ est préposé de l'Office des pour-
suites et faillites du district de Y.________. En vertu de
l'art. 2 de la décision du Grand Conseil du canton du
Valais,
du 15 novembre 1996, concernant le statut des offices des
poursuites et faillites, cet office est soumis au statut de
la régie.

Le 1er avril 1987, le Conseil d'Etat valaisan a dé-
cidé d'affilier les préposés et leur personnel à une institu-
tion de prévoyance professionnelle. X.________, ainsi que
d'autres de ses collègues, s'y sont opposés, mais ils ont
été
déboutés par le Tribunal cantonal des assurances, puis, le
14
décembre 1989, par le Tribunal fédéral des assurances (arrêt
B 6/88, résumé in: SZS 34/1990 p. 181).

b) Depuis le 1er janvier 1997, le statut des offices
et des préposés est régi par la loi du 20 juin 1996 d'appli-
cation de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la
faillite (LALP/VS) et par l'ordonnance du 18 septembre 1996
d'application de la législation sur la poursuite pour dettes
et la faillite (OLALP/VS).

Aux termes de ces nouvelles dispositions, pour les
offices en régie, le préposé engage le personnel nécessaire
au fonctionnement de son office et le rémunère (art. 12 al.
2
et 3 LALP/VS). Le préposé, le substitut, ainsi que le person-
nel de l'office sont assurés en matière de prévoyance profes-
sionnelle par une des institutions auxquelles l'Etat s'est
affilié (art. 2 OLALP/VS). Le préposé tient un compte d'ex-
ploitation spécifique, dans lequel il doit enregistrer les
charges et les produits de l'office (art. 12 al. 1 LALP/VS
et
10 al. 1 OLALP/VS), et qui doit être bouclé à la fin de cha-
que année et remis à l'Inspection cantonale des finances

(art. 10 al. 2 OLALP/VS). Doivent, notamment, figurer dans
le
compte d'exploitation les charges patronales en matière de
prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invali-
dité pour l'année en cours; la constitution de réserves de
cotisations d'employeur au sens de l'art. 331 al. 3 CO est
exclue (art. 15 al. 5 OLALP). Le revenu du préposé est cons-
titué par le résultat du compte d'exploitation, c'est-à-dire
le rendement net de l'office, mais il est limité à un
maximum
de 150'000 fr. (art. 12 al. 1 et 13 al. 1 LALP/VS; art. 14
al. 1 OLALP/VS), l'excédent revenant à l'Etat (art. 14 al. 4
OLALP/VS). Celui-ci garantit au préposé un revenu minimal de
80'000 fr. (art. 13 al. 1 LALP/VS et 14 al. 1 OLALP/VS).

L'Inspection cantonale des finances procède au con-
trôle du compte annuel d'exploitation de l'office, consigne
dans son rapport le résultat de ses investigations, arrête
les mesures correctrices à apporter (art. 10 al. 1 à 3
OLALP/VS) et détermine le montant que le préposé doit à la
caisse de l'Etat ou que la caisse de l'Etat doit au préposé
(art. 14 al. 4 OLALP/VS). Les décisions de l'Inspection can-
tonale des finances deviennent exécutoires si elles ne font
pas l'objet, dans les 30 jours dès leur notification, d'une
réclamation auprès de l'autorité de décision, puis d'un re-
cours auprès du Conseil d'Etat qui statue en dernière instan-
ce cantonale (art. 10 al. 4 et 14 al. 5 OLALP/VS).

c) Précédemment, à savoir jusqu'au 31 décembre 1996,
le revenu du préposé n'était pas plafonné. Comme un
employeur
privé, il assumait, au titre de charges d'exploitation de
l'office, les salaires des employés et les cotisations patro-
nales LPP; son revenu était constitué par le rendement net
de
l'office.

B.- a) En 1990, 1991, 1993 et 1994, X.________ a
constitué, sur la base de l'art. 331 al. 3 CO, des réserves
volontaires de cotisations patronales LPP pour son
personnel;

cette opération augmentait les charges d'exploitation de
l'office, ce qui diminuait le bénéfice net et, par voie de
conséquence, dans une mesure identique, le revenu du
préposé.
Dans son rapport du 17 septembre 1992, l'Inspection
cantonale
des finances a admis, d'entente avec celui-ci, la constitu-
tion de telles réserves - en la considérant néanmoins comme
injustifiée - "pour une valeur maximale de 5 ans de cotisa-
tions patronales, dans la mesure où la réserve sera progres-
sivement dissoute dès 1992, par le paiement des cotisations
patronales LPP relatives aux employés de l'OPF". En 1994,
l'Inspection cantonale des finances a réitéré cet avis et,
en
1997, elle a émis des directives prescrivant que les "réser-
ves existantes au début 1998 doivent être utilisées pour
payer les contributions patronales, ce jusqu'à leur épuise-
ment", la constitution de nouvelles réserves étant exclue.

A fin 1999, les réserves de cotisations LPP de l'Of-
fice de Monthey, qui étaient placées sur un compte de la fon-
dation de prévoyance professionnelle Swiss Life, s'élevaient
à 183'336 fr. 70, plus 10'373 fr. d'intérêts. Ces réserves
figurent au bilan de l'office.

b) X.________ ne s'est pas conformé aux directives
de l'Inspection cantonale des finances et n'a pas utilisé
les
réserves pour payer les cotisations patronales, sauf partiel-
lement en 1992; à son avis, ces réserves ont été constituées
par prélèvement sur le rendement de l'office et ont diminué
son revenu; elles doivent donc lui revenir. Pour
l'Inspection
cantonale des finances, la constitution de ces réserves
avait
pour but de présenter un revenu réduit du préposé, qui était
alors devenu beaucoup trop important et politiquement inac-
ceptable, par une rétrocession volontaire en faveur de l'of-
fice.

Un délai au 31 décembre 1999 - prolongé jusqu'au 29
décembre 2000 - a été imparti à Alfred Levet pour se confor-
mer aux directives. Puis, lors du contrôle de la gestion
annuelle de l'office pour l'exercice 1999, l'Inspection can-
tonale des finances a corrigé les comptes, fixé la dissolu-
tion de la réserve à 82'567 fr. 80 pour 1999 et, en raison
d'autres corrections non litigieuses, demandé au préposé de
verser à l'Etat la somme de 69'839 fr. 50.

Invitée à rendre une décision formelle, sujette à
recours, l'Inspection cantonale des finances a prononcé, le
12 juillet 2000, la dissolution de la réserve de cotisations
LPP figurant au passif du bilan de l'office par prélèvement
annuel du montant des cotisations patronales LPP, et ce jus-
qu'à épuisement de cette réserve, et corrigé en conséquence
les comptes 1999 de l'office, astreignant ainsi le préposé à
rétrocéder à l'Etat le montant de 69'839 fr. 50 dans un
délai
de 30 jours dès l'entrée en force de la décision.

c) La réclamation déposée par X.________ a été reje-
tée par l'Inspection cantonale des finances le 5 septembre
2000. Le recours administratif adressé par l'intéressé au
Conseil d'Etat a connu le même sort le 25 avril 2001.

Contre cette décision, le préposé a formé un recours
de droit administratif à la Cour de droit public du Tribunal
cantonal valaisan, qui l'a déclaré irrecevable le 31 octobre
2001.

C.- a) Agissant par la voie du recours de droit pu-
blic au Tribunal fédéral pour violation de l'art. 6 § 1
CEDH,
X.________ conclut à l'annulation de l'arrêt du Tribunal can-
tonal.

L'Inspection cantonale des finances conclut au rejet
du recours dans la mesure où il est recevable; elle produit
un bordereau de pièces et demande que le recourant soit invi-
té à déposer "sa déclaration fiscale 1999/2000 faisant état
de la provision comme sa propriété".

b) Parallèlement, X.________ a interjeté un recours
de droit public contre la décision du Conseil d'Etat, assor-
tie d'une demande en restitution de délai au sens de l'art.
35 OJ; il sollicite la suspension de cette procédure jusqu'à
droit connu sur le recours dirigé contre l'arrêt de la cour
cantonale (5P.469/2001).

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
128
I 46 consid. 1a p. 48 et les arrêts cités).

a) En vertu de l'art. 2 al. 5 LP, hormis les règles
prévues à l'art. 2 al. 1 à 4 LP, l'organisation des offices
incombe aux cantons; selon l'art. 3 LP, ceux-ci déterminent
le mode de traitement des préposés et de leurs substituts.
En
exécution de ces normes, le canton du Valais a réglé l'orga-
nisation des offices et le traitement du préposé et de son
substitut dans la loi du 20 juin 1996 d'application de la
loi
fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, entrée
en vigueur le 1er janvier 1997 (cf. supra, let. A/b).

Les prétentions du préposé à l'égard du canton ne
relèvent pas de l'Ordonnance sur les émoluments perçus en
application de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes
et la faillite (OELP; RS 281.35) et, partant, n'entrent pas
dans la compétence de la Chambre des poursuites et faillites

du Tribunal fédéral (cf. art. 2 OELP); elles ressortissent
au
droit public cantonal. Le présent recours est dès lors
ouvert
de ce chef.

b) Dans la mesure où elles sont nouvelles, les piè-
ces produites par l'intimé doivent être écartées (ATF 119 II
6 consid. 4a p. 7); en raison de la prohibition des nova, la
requête tendant à l'édition de la déclaration d'impôt du re-
courant est aussi irrecevable (cf. Messmer/Imboden, Die eid-
genössischen Rechtsmittel in Zivilsachen, p. 231 et n. 34).

2.- En l'espèce, le recourant reproche à la cour
cantonale d'avoir, en déclarant son recours irrecevable,
violé l'art. 6 § 1 CEDH; il soutient que le présent litige
revêt le caractère d'une "contestation de nature civile" et
que, par conséquent, sa cause doit être tranchée par un
tribunal, et non seulement par une autorité administrative.

a) Aux termes de l'art. 6 § 1 CEDH, toute personne a
droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publi-
quement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indé-
pendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit
des contestations sur ses droits et obligations de caractère
civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière
pénale dirigée contre elle. Cette norme peut ainsi être invo-
quée par quiconque, estimant illégale une ingérence dans
l'exercice de l'un de ses droits (notamment de caractère
civil), se plaint de n'avoir pas eu l'occasion de soumettre
pareille contestation à un tribunal répondant aux exigences
conventionnelles (ATF 127 I 115 consid. 5 p. 120 et la juris-
prudence citée).

aa) La notion de "droits et obligations de caractère
civil" est autonome: l'art. 6 CEDH ne donne par lui-même
aucun contenu matériel déterminé dans l'ordre juridique des
Etats contractants. Cette disposition implique l'existence

d'une "contestation" réelle et sérieuse; elle peut concerner
aussi bien l'existence même d'un droit que son étendue ou
ses
modalités d'exercice. L'issue de la procédure doit être
directement déterminante pour le droit en question. Un lien
ténu ou des répercussions lointaines ne suffisent pas à
faire
entrer en jeu l'art. 6 § 1 CEDH (ATF 127 I 115 consid. 5b p.
120/121 et les arrêts cités). En définitive, le droit à un
tribunal ne vaut que pour les "contestations" relatives à
des
"droits et obligations de caractère civil" que l'on peut pré-
tendre, au moins de manière défendable, reconnus en droit
interne, qu'ils soient ou non protégés de surcroît par la
Convention; bien que de caractère autonome, cette notion
implique donc l'examen de la prétention selon le droit inter-
ne (ATF 127 I 115 consid. 5b p. 121).

bb) Par contestation, au sens de l'art. 6 § 1 CEDH,
il faut entendre tout litige surgissant entre deux parti-
culiers ou entre un particulier et une autorité étatique,
par
exemple lorsque cette dernière supprime ou restreint l'exer-
cice d'un droit. Il en va ainsi lorsque sont invoqués des
droits de nature privée, telles la garantie de la propriété
et la liberté économique (voir les références citées in:
Frowein/Peukert, EMRK-Kommentar, 2e éd., N. 19 et 21 ad art.
6). Les prétentions en indemnités élevées contre la collec-
tivité présentent un caractère patrimonial et entrent dans
le
champ d'application de l'art. 6 § 1 CEDH (Villiger, Handbuch
der EMRK, 2e éd., §§ 384 et 387).

L'art. 6 § 1 CEDH ne vise donc pas seulement les
contestations de droit privé au sens étroit - à savoir les
litiges entre les particuliers ou entre les particuliers et
l'Etat agissant au même titre qu'une personne privée -, mais
aussi les actes administratifs adoptés par une autorité dans
l'exercice de la puissance publique, pour autant qu'ils pro-
duisent un effet déterminant sur des droits de caractère ci-
vil; de ce point de vue également, sont décisifs le contenu

du droit matériel et les effets que lui confère la législa-
tion nationale (ATF 125 I 209 consid. 7a p. 215/216 et les
références citées). Il convient dès lors de s'interroger
préalablement sur l'existence d'un droit subjectif, fondé
sur
la législation interne. Un tel droit est nié quand
l'autorité
agit de manière discrétionnaire, par exemple dans les cas de
concessions (ATF 125 I 209 consid. 7 p 215 ss), d'autorisa-
tions
d'entrée ou de séjour d'un étranger (CourEDH, arrêt
Maoui c. France du 5 octobre 2000), ou lorsque des habitants
voisins d'une centrale nucléaire recourent contre l'autorisa-
tion d'exploitation (JAAC 64/2000 n° 136), ou que des concur-
rents attaquent l'autorisation d'exploiter un commerce (ATF
125 I 7 consid. 4b p. 13; 128 I 59 consid. 2a/bb p. 61). Il
est admis, en revanche, dans le cas des voisins qui se plai-
gnent de la violation de normes tendant à leur protection
(ATF 127 I 44 consid. 2c p. 45/46), s'agissant d'une alloca-
tion sociale à laquelle l'intéressé peut prétendre en vertu
du droit national (CourEDH, arrêt Mennitto c. Italie du 5 oc-
tobre 2000; cf. pour le contentieux de l'assurance sociale:
Villiger, op. cit., N. 389 et les citations), ou dans les
actions en responsabilité dirigées contre l'Etat (ATF 126 I
144 consid. 3a p. 150/151).

b) D'après l'autorité inférieure, l'art. 10 al. 4
OLALP/VS prescrit que les décisions de l'Inspection
cantonale
des finances peuvent faire l'objet d'un recours au Conseil
d'Etat, qui statue en dernière instance cantonale. Cette dis-
position a été adoptée en application de l'art. 8 LALP/VS,
en
vertu duquel la gestion financière des offices doit être con-
trôlée conformément aux dispositions de la loi sur la
gestion
et le contrôle administratifs et financiers du canton, et
cette loi n'ouvre pas de recours au Tribunal cantonal, ce
qui
correspond à l'art. 75 let. d de la loi sur la procédure et
la juridiction administratives (LPJA/VS), qui dispose que le
recours de droit administratif n'est pas recevable contre
les
décisions relatives à l'exercice de la haute surveillance
sur

l'administration cantonale; l'intervention judiciaire n'est
donc pas prévue dans le cadre de l'application de l'art. 8
LALP/VS.

En outre, la cour cantonale a estimé que le recou-
rant n'a pas démontré en quoi l'art. 6 § 1 CEDH l'obligerait
à entrer en matière, nonobstant le texte clair de l'art. 10
al. 4 OLALP/VS. Examinant si la contestation porte sur des
droits et obligations de caractère civil au sens de la norme
précitée, l'autorité inférieure a constaté que le préposé ne
soutient pas que les réserves affectées aux cotisations LPP
lui appartiennent, que ces réserves ont été créées en faveur
des employés de l'office et que l'intéressé n'a donc aucune
prérogative de caractère civil sur elles. Le préposé ne pou-
vait constituer de réserves patronales pour lui-même, ainsi
que l'a jugé le Tribunal fédéral des assurances le 14 décem-
bre 1989; même si elles ont été alimentées au moyen de son
revenu, il n'a plus de droit sur elles. Le litige a, en réa-
lité, pour objet la façon dont l'Inspection cantonale des
finances entend dissoudre ces réserves; or, un tel objet
relève du contrôle financier des comptes d'exploitation de
l'office.

c) Le recourant critique les motifs de la cour can-
tonale au terme d'une argumentation touffue et parfois confu-
se. En effet, il soutient tout d'abord que les corrections
imposées par l'Inspection cantonale des finances ont pour ré-
sultat d'augmenter la part qu'il doit verser à l'Etat et de
diminuer d'autant son revenu; plus loin, il affirme exacte-
ment le contraire, à savoir que le paiement de la part patro-
nale des charges sociales pour les employés de l'office, qui
font partie des charges d'exploitation, n'a pas d'incidence
sur son revenu de préposé, mais seulement sur la part qui
échoit à l'Etat.

Toutefois, il fait aussi valoir que la correction
des comptes 1999 présente un aspect véritablement confisca-
toire et touche à son droit de propriété, car elle a pour
effet de faire bénéficier l'Etat, par l'augmentation de la
part qui lui est rétrocédée aujourd'hui, d'une réserve qu'il
avait lui-même constituée sur son propre revenu sous
l'empire
de l'ancienne loi. La décision de dissolution a une
incidence
directe sur son patrimoine, eu égard à ses obligations d'em-
ployeur selon le droit privé; il s'agit donc manifestement
d'une contestation civile, même si elle se situe dans le con-
texte des relations du préposé avec l'Inspection cantonale
des finances et le Conseil d'Etat. La contestation est patri-
moniale puisqu'il s'agit de savoir à qui - au préposé ou à
l'Etat - doit revenir la part de rendement de 82'567 fr. 80
pour l'exercice 1999. A cela s'ajoute que le litige a pour
objet la dissolution de réserves de cotisations au sens de
l'art. 331 al. 3 CO, lesquelles relèvent ainsi du droit
civil.

Pour le recourant, l'art. 10 al. 4 OLALP/VS, à te-
neur duquel le Conseil d'Etat statue définitivement, est dès
lors contraire à l'art. 6 § 1 CEDH, cette autorité ne
pouvant
pas être assimilée à un tribunal.

d) Il est établi que les réserves volontaires de
cotisations patronales ont été constituées en 1990, 1991,
1993 et 1994, par prélèvement sur le rendement de l'office
et
portées en charge du compte d'exploitation; elles l'ont été
valablement sous l'empire du droit en vigueur avant le 1er
janvier 1997, opération à laquelle l'Inspection cantonale
des
finances avait d'ailleurs donné son aval. Il n'est pas con-
testé que, comme le revenu du préposé correspondait alors au
rendement net de l'office, la constitution de ces réserves a
diminué d'autant ses gains.

Depuis l'entrée en vigueur du nouveau droit, le 1er
janvier 1997, la constitution de telles réserves est exclue
(art. 15 al. 5 OLALP/VS). La nouvelle loi ne dit toutefois
rien de la dissolution de celles qui ont été créées sous
l'ancien droit.

Puisque le recourant a, en qualité d'employeur, fi-
nancé volontairement ces réserves de ses propres deniers, et
que leur constitution a entraîné directement une diminution
correspondante de son revenu, la contestation relative au
sort de ces réserves porte sur un droit de caractère civil
du
préposé sur ces avoirs en tant qu'employeur. Dans ses obser-
vations, l'Inspection cantonale des finances parle même de
"l'affectation d'une partie du salaire du préposé" au profit
d'une prise en charge des coûts LPP futurs, et indique que
l'intéressé aurait eu "tout loisir de procéder à une dissolu-
tion de cette réserve avant le changement de base légale".

Les raisons pour lesquelles, au dire de l'Inspection
cantonale des finances, le préposé aurait constitué ces ré-
serves n'y changent rien (cf. supra, let. B/b). Ce sont des
questions qui devront précisément être examinées au fond,
tout comme - ce qui a échappé à l'autorité inférieure - le
bien-fondé de la décision de dissolution.

La décision du Conseil d'Etat confirmant celle de
l'Inspection cantonale des finances, laquelle impose la dis-
solution annuelle de la réserve et la rétrocession d'un mon-
tant correspondant à l'Etat, doit donc pouvoir être portée
devant un tribunal, conformément à l'art. 6 § 1 CEDH.

3.- En conclusion, le recours doit être admis et
l'arrêt attaqué annulé.

La dissolution litigieuse est une mesure ordonnée
dans le cadre du contrôle financier exercé par l'Etat; le
présent litige ne met donc pas en cause l'intérêt pécuniaire
du canton intimé, au sens de l'art. 156 al. 2 OJ. En revan-
che, les dépens doivent être mis à la charge de l'Etat du
Valais (art. 159 al. 2 OJ; ATF 125 I 389 consid. 5 p. 393 et
la jurisprudence citée).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours et annule l'arrêt attaqué.

2. Dit qu'il n'est pas perçu de frais de justice.

3. Dit que l'Etat du Valais versera au recourant une
indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie aux parties
et à la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton
du Valais.

_________

Lausanne, le 8 avril 2002
BRA/frs
Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président, Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.470/2001
Date de la décision : 08/04/2002
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-04-08;5p.470.2001 ?
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