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04/04/2002 | SUISSE | N°I.221/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 avril 2002, I.221/01


«AZA 7»
I 221/01 Mh

IIIe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen.
Greffière : Mme von Zwehl

Arrêt du 4 avril 2002

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue
Bel-Air 3, 2350 Saignelégier, recourant,

contre

J.________, intimé, représenté par Maître Alain
Schweingruber, avocat, avenue de la Gare 49, 2800 Delémont,

et

Tribunal cantonal de la République et canton du Jura,
Porrentruy

A.- J.________ a é

té victime, en 1987, d'une chute sur
un chantier dont il a gardé des séquelles à l'épaule droi-
te, demeurées à l'époque sans incide...

«AZA 7»
I 221/01 Mh

IIIe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen.
Greffière : Mme von Zwehl

Arrêt du 4 avril 2002

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, rue
Bel-Air 3, 2350 Saignelégier, recourant,

contre

J.________, intimé, représenté par Maître Alain
Schweingruber, avocat, avenue de la Gare 49, 2800 Delémont,

et

Tribunal cantonal de la République et canton du Jura,
Porrentruy

A.- J.________ a été victime, en 1987, d'une chute sur
un chantier dont il a gardé des séquelles à l'épaule droi-
te, demeurées à l'époque sans incidence sur sa capacité de
travail comme manoeuvre. Au printemps 1994, ses douleurs se
sont toutefois accentuées. Les médecins ont diagnostiqué
une tendinopathie sous-acromiale de l'épaule droite. Le
28 février 1995, une résection latérale de la clavicule

droite a été pratiquée à la Clinique universitaire d'ortho-
pédie X.________ suivie, au mois de juin, d'une arthrosco-
pie pour capsulite adhésive. Ces interventions, ainsi que
l'incapacité de travail en résultant, ont été prises en
charge par la Caisse nationale suisse en cas d'accidents
(CNA). Entre-temps, J.________ a été licencié par son
employeur.
Le 22 décembre 1995, il a présenté une demande de
prestations de l'assurance-invalidité tendant à l'octroi de
mesures de réadaptation professionnelles. L'Office AI du
canton du Jura (ci-après : l'office) a alors requis des
renseignements médicaux auprès des docteurs A.________ et
B.________, respectivement médecin traitant de l'assuré et
médecin assistant à la Clinique universitaire d'orthopédie
X.________ (rapports des 17 janvier, 6 mai et 25 septembre
1996). Ces deux praticiens ayant conclu qu'un réadaptation
dans une profession plus légère s'imposait, l'office a mis
J.________ au bénéfice d'indemnités journalières dès le
20 mai 1996, dans l'attente de mesures d'ordre profession-
nel. Le 20 janvier 1997, le prénommé a commencé un stage
d'observation professionnelle chez Y.________ SA afin de
déterminer ses capacités de réinsertion dans le circuit
économique. Au terme de ce stage qui a duré une année,
l'assuré a été reconnu apte à exercer une activité adaptée
avec un rendement d'au moins 60% (rapport du 8 janvier
1998).
Se fondant sur ces diverses pièces, l'office a alloué
à J.________, du 1er février au 31 mai 1996, une rente en-
tière simple d'invalidité et, dès le 1er mars 1998, un
quart de rente fondée sur un degré d'invalidité de 40 %
(décisions du 8 juillet 1999).

B.- L'assuré a déféré ces décisions à la Chambre des
assurances du Tribunal cantonal jurassien, en concluant à
la reconnaissance d'un degré d'invalidité supérieur à
66 2/3 % au-delà du 31 mai 1996. Dans sa réponse, l'office
a proposé de reconsidérer sa prise de position et de recon-
naître à l'intéressé le droit à une rente d'invalidité
fondée sur un taux de 53 %. Prenant acte de cette proposi-
tion, le tribunal a déclaré la procédure sans objet et rayé
la cause du rôle (ordonnance du 26 octobre 1999).
L'office a alors rendu, le 12 mai 2000, deux nouvelles
décisions (remplaçant celles du 8 juillet 1999), par les-
quelles il a derechef octroyé à l'assuré une rente entière
simple d'invalidité du 1er février au 31 mai 1996, tout en
augmentant le montant des prestations allouées pour tenir
compte de périodes de cotisations supplémentaires, ainsi
qu'une demi-rente d'invalidité du 1er mars 1998 au 31 jan-
vier 1999.
L'assuré a recouru contre ces décisions, en concluant
à la reconnaissance d'un taux d'invalidité supérieur à
66 2/3 % au-delà du 31 mai 1996. Par jugement du 8 mars
2001, le tribunal a rejeté le recours formé contre la
décision d'octroi d'une rente entière d'invalidité du
1er février au 31 mai 1996; il a en revanche admis celui
visant la décision d'octroi de la demi-rente d'invalidité,
annulé cette dernière et renvoyé la cause à l'office pour
instruction complémentaire au sens des considérants.

C.- L'office interjette recours de droit administratif
contre ce jugement dont il requiert l'annulation, en con-
cluant à la confirmation de sa décision initiale.
J.________ conclut au rejet du recours et demande
l'assistance judiciaire gratuite pour la procédure fédé-
rale. De son côté, l'Office fédéral des assurances sociales
ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- a) La juridiction cantonale a débouté l'intimé de
ses conclusions tendant à l'allocation d'une rente entière
au-delà du 31 mai 1996, motif pris que durant la période
allant du 31 mai 1996 au 5 mars 1998, celui-ci avait été
mis au bénéfice d'indemnités journalières en vertu de
l'art. 22 LAI et que ce type de prestations ne pouvait se
cumuler avec le droit à une rente d'invalidité. En revan-
che, pour la période postérieure, le tribunal a considéré
que l'évaluation de l'invalidité de l'intimé n'avait pas
fait l'objet d'investigations suffisamment étayées de la
part de l'office, ni au plan médical ni sous l'angle écono-
mique, si bien qu'il se justifiait de lui renvoyer la cause
pour instruction complémentaire sur ces deux points.

b) Même si elle ne met pas fin à la procédure, une
décision de renvoi, qui invite l'administration à statuer à
nouveau selon des instructions impératives, est une déci-
sion autonome, susceptible en tant que telle d'être atta-
quée par la voie du recours de droit administratif, et non
une simple décision incidente (ATF 117 V 241 consid. 1,
113 V 159). Il y a dès lors lieu d'entrer en matière sur le
recours.

2.- Dans la mesure où le tribunal cantonal a statué
sur l'ensemble des rapports juridiques à propos desquels
l'office s'est prononcé dans ses deux décisions du 12 mai
2000 et que l'intimé n'a pas interjeté recours de droit
administratif contre ce jugement qui confirme notamment la
décision de l'office lui allouant une rente entière du 1er
février au 31 mars 1996, on peut, en l'espèce, se limiter à
examiner le bien-fondé du renvoi prononcé par les juges
cantonaux (ATF 125 V 413 consid. 3, 110 V 48 consid. 4a in
fine; Meyer-Blaser, Der Streitgegenstand im Streit, in :
Aktuelle Rechtsfragen der Sozialversicherungspraxis,
St Gall 2001, p. 33).

3.- Les dispositions légales et les principes juris-
prudentiels régissant l'évaluation de l'invalidité (art. 4
et 28 LAI) ont été correctement exposés dans le jugement
attaqué, de sorte qu'il suffit d'y renvoyer.
On ajoutera que selon la jurisprudence, une décision
par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'in-
validité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit
la réduction de cette rente, correspond à une décision de
révision au sens de l'art. 41 LAI (ATF 125 V 417 sv. con-
sid. 2d et les références). Aux termes de cette disposi-
tion, si l'invalidité d'un bénéficiaire de rente se modifie
de manière à influencer le droit à la rente, celle-ci est,
pour l'avenir, augmentée, réduite ou supprimée. Tout chan-
gement important des circonstances, propre à influencer le
degré d'invalidité, donc le droit à la rente, peut donner
lieu à une révision de celle-ci.

4.- a) Pour sa part, l'office estime qu'il a recueilli
suffisamment de renseignements pour évaluer correctement
l'invalidité de l'intimé. Il se réfère aux rapports médi-
caux des docteurs A.________ et B.________ selon lesquels
l'assuré dispose, malgré les limitations liées à son handi-
cap, d'une importante capacité de travail résiduelle, ainsi
qu'aux conclusions auxquelles sont parvenus les responsa-
bles de la réadaptation à l'issue du stage d'observation.
Toujours selon l'office, ces données sont convaincantes et
il n'existe pas de motif sérieux de les compléter par une
expertise médicale supplémentaire. Quant au calcul de
l'invalidité, il a été effectué dans le respect des dispo-
sitions légales applicables (méthode de comparaison des re-
venus).

b) En l'occurrence, il existe certes des indices don-
nant à penser que l'état de santé de J.________ a subi une
évolution favorable depuis 1995 et que le prénommé présen-
te, malgré des douleurs résiduelles, une capacité de

travail importante. Le docteur B.________ a en effet pu
constater dès le mois de mai 1996 une lente mais nette
amélioration fonctionnelle de l'épaule droite (rapport du
6 mai 1996); quant au docteur A.________, il a fait état,
une année plus tard, d'une échographie normale sans signes
de calcification tendineuse ou de lésions du tendon, ainsi
que d'une bonne mobilité de l'épaule (rapport du 9 juin
1997). Tous deux ont exprimé l'opinion que si l'assuré
n'était plus apte à reprendre son ancienne profession de
manoeuvre, une activité adaptée lui restait encore accessi-
ble. Mais comme l'ont fait remarquer à juste titre les
premiers juges, les rapports de ces médecins portent sur
une période bien antérieure au 1er mars 1998 ainsi qu'à la
date de la décision litigieuse, et aucun d'entre eux ne
précise ni le type de travaux, ni le taux d'activité que
l'on peut encore raisonnablement exiger de l'intimé, alors
que ces données médicales sont essentielles pour calculer
le degré d'invalidité (ATF 125 V 261 consid. 4, 115 V 134
consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1). Le
rapport du stage d'observation professionnelle ne saurait y
suppléer contrairement à ce que voudrait l'office recou-
rant. Il est en effet extrêmement succinct et les seuls
éléments qu'il contient renseignent mal dans quelle activi-
té l'intimé serait à même, concrètement, de mettre en va-
leur sa capacité de travail et de gain. Enfin, l'estimation
du revenu d'invalide à laquelle a abouti l'office (à savoir
un salaire horaire de 10 fr.) ne repose sur aucune donnée
économique vérifiable, de sorte que sur ce plan également,
un complément d'instruction s'avère nécessaire.
Compte tenu du manque de précision des indications
médicales versées au dossier et de l'absence d'une enquête
économique documentée, il n'est ainsi pas possible de dé-
terminer si le degré d'invalidité de l'intimé s'est modifié
au point de réduire notablement son droit aux prestations
dès le 1er mars 1998. Partant, le renvoi de la cause à
l'office se révèle en tous points justifié.

5.- L'intimé, qui obtient gain de cause, a droit à une
indemnité de dépens à charge de l'office recourant
(art. 159 al. 1 OJ). Dans cette mesure, sa requête d'assis-
tance judiciaire est sans objet.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'Office AI pour le canton du Jura versera à l'intimé
une indemnité de dépens de 1200 fr. (y compris la taxe
à la valeur ajoutée) pour l'instance fédérale.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Chambre des assurances du Tribunal cantonal de la
République et canton du Jura, ainsi qu'à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 4 avril 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.221/01
Date de la décision : 04/04/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-04-04;i.221.01 ?
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