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20/03/2002 | SUISSE | N°I.433/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 mars 2002, I.433/01


«AZA 7»
I 433/01 Tn

IIIe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 20 mars 2002

dans la cause

F.________, recourant, représenté par Maître Jean-Charles
Bornet, avocat, rue du Scex 3, 1950 Sion,

contre

Office cantonal de l'assurance-invalidité du Valais, avenue
de la Gare 15, 1951 Sion, intimé,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- F.________ travaillait depuis 1985 comme chauf-
feur-livreur.

Il exerçait en outre, à titre accessoire, une
activité d'agriculteur au sein de l'exploitation familiale.
Souffrant du dos et ...

«AZA 7»
I 433/01 Tn

IIIe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Lustenberger et Kernen.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 20 mars 2002

dans la cause

F.________, recourant, représenté par Maître Jean-Charles
Bornet, avocat, rue du Scex 3, 1950 Sion,

contre

Office cantonal de l'assurance-invalidité du Valais, avenue
de la Gare 15, 1951 Sion, intimé,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- F.________ travaillait depuis 1985 comme chauf-
feur-livreur. Il exerçait en outre, à titre accessoire, une
activité d'agriculteur au sein de l'exploitation familiale.
Souffrant du dos et de la nuque, il a cessé son activité
principale au mois de janvier 1998 et présenté, en septem-
bre de la même année, une demande de prestations de l'assu-
rance-invalidité tendant à l'octroi de mesures d'ordre pro-
fessionnel et d'une rente. Depuis lors, il a progressive-

ment repris, en l'augmentant, son activité d'agriculteur,
désirant ainsi mettre en valeur sa capacité résiduelle de
travail en exploitant le domaine à titre indépendant avec
l'aide de ses proches. Il a, par ailleurs, assumé durant
quelques temps ad interim une charge de conseiller commu-
nal. Toutes activités confondues, son revenu annuel avant
la survenance de l'invalidité a été estimé à 68 881 fr. 75.
Par décision du 23 octobre 2000, l'Office cantonal AI
du Valais (ci-après : l'office) a nié le droit de l'assuré
à une rente au motif que son invalidité, évaluée selon la
méthode extraordinaire n'était que de 29 %. En substance,
l'office a retenu, en procédant à une comparaison des
champs d'activité avec pondération économique, que
F.________ était encore en mesure, malgré ses atteintes à
la santé, de réaliser un gain annuel de 48 798 fr. 55. Ce
revenu hypothétique aurait pu être acquis, selon l'office,
par l'exercice à temps plein d'une activité légère et
adaptée, sans port de charges et permettant l'alternance
des positions (gain annuel : 40 495 fr.), de l'activité
accessoire d'agriculteur, compte tenu d'une limitation de
25 % de sa capacité de travail (2303 fr. 55 par année) et
des indemnités de conseiller communal (6000 fr. l'an).

B.- Par jugement du 25 juin 2001, le Tribunal cantonal
des assurances du canton du Valais a rejeté le recours for-
mé contre cette décision par l'assuré.

C.- F.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement. Il conclut à son annulation et à
l'octroi d'une demi-rente d'invalidité, sous suite de frais
et dépens. L'office et l'Office fédéral des assurances so-
ciales ont renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.- Le jugement entrepris expose correctement les
dispositions légales et la jurisprudence relatives à l'éva-
luation de l'invalidité, en particulier lorsqu'il s'agit
d'appliquer la méthode extraordinaire d'évaluation, ainsi
qu'au droit à une rente. Il suffit d'y renvoyer sur ces
points.

2.- a) Quant au choix de la méthode d'évaluation de
l'invalidité, les premiers juges ont exposé que l'office
avait appliqué à juste titre la méthode extraordinaire, eu
égard à la difficulté d'établir le revenu que le recourant
serait à même de réaliser malgré son invalidité dans son
activité agricole, notamment en considération de l'aide de
son épouse et de son père, du fait qu'aucune donnée fiscale
n'était encore disponible et des grandes variations de tels
revenus d'une année à l'autre.
Pour sa part, le recourant soutient qu'il n'y avait
pas lieu d'appliquer la méthode d'évaluation extraordinaire
dès lors que l'office aurait été en mesure, dans le cadre
de l'enquête économique, de déterminer avec suffisamment
d'exactitude ses gains.

b) En réalité, un examen attentif de la décision du
23 octobre 2000 révèle que l'office a appliqué de manière
combinée la méthode générale de comparaison des revenus
- en relation avec l'activité principale - et la méthode
extraordinaire - en relation avec l'activité accessoire
agricole. Le point de savoir si un tel procédé est admis-
sible peut toutefois demeurer indécis en l'espèce. Comme on
le verra, en effet, la prise en compte ou non de l'activité
agricole dans la comparaison de la capacité de gain de
l'assuré avec et sans invalidité demeure sans incidence sur
son droit à une rente (consid. 4d).
Pour la même raison, il n'est pas nécessaire d'exami-
ner en l'espèce s'il y a lieu de prendre en compte dans la

comparaison les revenus d'une activité accessoire en tant
que cette dernière s'ajoute à une activité principale elle-
même déjà exercée à plein temps (cf. Ulrich Meyer-Blaser,
Bundesgestz über die Invalidenversicherung [IVG], ad
art. 28 LAI, p. 207 et la référence citée; question égale-
ment laissée indécise dans l'arrêt non publié L. du 28 août
2000 [I 486/99]).

3.- En ce qui concerne le revenu sans invalidité, les
premiers juges ont retenu un montant annuel de 62 881 fr.
provenant à raison de 59 810 fr. de l'activité de chauffeur
et de 3071 fr. de l'activité agricole. Le recourant ne
conteste pas ces chiffres qui ressortent au demeurant des
pièces du dossier en ce qui concerne le premier et, en par-
ticulier, des renseignements fournis pas l'Ecole X.________
en ce qui concerne le second. Ils ont par ailleurs considé-
ré qu'il n'y avait pas lieu de prendre en compte dans le
calcul le revenu annuel de conseiller communal de 6000 fr.,
le recourant n'ayant pas été reconduit dans cette fonction
qu'il n'avait exercée que durant une brève période.

4.- a) Quant au revenu d'invalide, les premiers juges
ont retenu un montant annuel de 42 798 fr. correspondant à
celui admis par l'office après déduction du revenu de con-
seiller communal de 6000 fr., pour la raison exposée ci-
dessus.
Pour sa part, le recourant estime que seul un revenu
hypothétique de 25 969 fr. 90 (revenu d'agriculteur, compte
tenu d'une capacité de travail attestée médicalement de
75 % dans cette activité) voire de 30 371 fr. (moyenne des
revenus des activités proposées par l'office sous déduction
d'une fraction de 25 % tenant compte de son handicap) peut
être retenu dans la comparaison.

b) En cours d'instruction de sa demande de presta-
tions, l'assuré a été soumis à l'expertise des docteurs
A.________ (spécialiste FMH en psychiatrie et psychothéra-

pie) et B.________ (médecin-chef du service de réadaptation
de la Clinique Y.________). A l'issue d'un examen détaillé,
ce dernier ne relève aucune limitation de la mobilité du
rachis et aucune évidence de souffrance médullaire ou radi-
culaire malgré les anomalies radiologiques. Il existe une
nette discordance entre les anomalies cliniques fortement
mineures et les plaintes majeures et chroniques rapportées
par le patient. Le docteur B.________ retient le diagnostic
de syndrome somatoforme douloureux persistant, nosologique-
ment superposable à celui de fibromyalgie. Il relève encore
que les troubles dégénératifs mis en évidence radiologique-
ment participent de manière évidente aux douleurs du pa-
tient mais peuvent tout au plus justifier une incapacité de
travail de 25 % en tant que chauffeur-livreur ou agricul-
teur. Toutefois, dans une activité bien adaptée, sans port
de charge, lui permettant de changer de position régulière-
ment, l'assuré ne devrait ressentir aucune limitation fonc-
tionnelle et être en mesure d'assumer une activité à plein
temps.

c) En règle générale, lorsque l'assuré exerce une
activité, il faut admettre que le gain effectivement réali-
sé équivaut à une prestation de travail correspondante. La
jurisprudence admet cependant que des circonstances, dont
la preuve de l'existence est soumise à des exigences sévè-
res, justifient de s'écarter du revenu effectif en faveur
ou en défaveur de l'assuré, qu'il s'agisse de l'évaluation
du revenu avec ou sans invalidité (arrêts non publiés M. du
10 décembre 2001 [I 320/01], W. du 23 juillet 1999
[I 200/98]; cf. en relation avec l'évaluation du revenu
d'invalide, ATF 117 V 18; 110 V 277 consid. 4c). Par ail-
leurs, la seule circonstance qu'un assuré disposerait de
meilleures possibilités de gain que celles qu'il met en
valeur et qui lui permettent d'obtenir un revenu modeste ne
justifie pas encore que l'on s'écarte du gain qu'il perçoit
effectivement; on peut toutefois renoncer à se référer à ce
dernier lorsqu'il ressort de l'ensemble des circonstances

du cas que l'assuré, sans invalidité, ne se contenterait
pas d'une telle rémunération de manière durable (RCC 1992
p. 96 consid. 4a).
En l'espèce, initialement chauffeur-livreur, le recou-
rant n'a envisagé de reprendre l'exploitation du domaine
familial qu'après le dépôt de sa demande de prestations
d'invalidité. Selon ses propres déclarations, il s'agissait
là de la meilleure solution lui permettant de travailler à
son rythme et de se faire aider par les membres de sa fa-
mille pour les travaux les plus pénibles. Il faut ainsi
admettre que, sans invalidité, le recourant n'aurait pas
exercé à titre principal cette activité qui ne lui assure
qu'un revenu modeste, de l'ordre de 12 fr. 70 de l'heure,
ce qui justifie déjà, au sens de la jurisprudence citée
ci-dessus, que l'on ne retienne pas ce seul revenu à titre
de revenu d'invalide. Par ailleurs, contrairement à ce que
soutient le recourant, le seul fait que le docteur
B.________ indique que dans l'hypothèse où il ne serait pas
à même d'assurer une activité à 75 % dans l'agriculture,
les activités proposées par l'office seraient exigibles de
lui, ne justifie pas une autre solution. Si le docteur
B.________ paraît certes privilégier l'activité agricole
aux autres activités de substitution proposées par l'of-
fice, qu'il ne présente que comme subsidiaires, ce médecin
n'invoque aucun motif médical à l'appui de cette conclu-
sion, mais bien plutôt le fait que l'assuré a déjà organisé
son activité agricole, physiquement plus exigeante, de
manière à pouvoir néanmoins l'exercer malgré une capacité
de travail réduite. Force est, dès lors, de constater que
cette activité, qui ne lui permet pas d'exploiter pleine-
ment sa capacité résiduelle de travail et n'offre qu'une
faible rémunération, ne lui permet pas de mettre en valeur,
de manière optimale, sa capacité résiduelle de gain. Il
convient, en conséquence, de déterminer sa capacité rési-
duelle de gain sur la base des données statistiques (ATF
126 V 76 consid. 3).

Pour le surplus, les critiques formulées par le recou-
rant à l'égard des activités suggérées par l'office sont
sans pertinence. Au regard du large éventail d'activités
simples et répétitives offertes par les secteurs de la pro-
duction et des services, on doit convenir qu'un nombre si-
gnificatif d'entre elles sont légères, permettent l'alter-
nance des positions, et sont donc adaptées à ses problèmes
physiques.

d) Selon les données de l'enquête suisse sur la struc-
ture des salaires (ESS) 1998, le revenu mensuel standardisé
d'un homme exerçant une activité simple et répétitive
s'élevait, tous domaines confondus, à 4268 fr. par mois
(valeur médiane). Ce montant correspond, compte tenu d'un
horaire de travail moyen de 41,8 heures et après adaptation
à l'évolution des salaires nominaux de 1998 à 2000 (base
1993 = 100, 1998 = 105,3, 2000 = 106,9 [Annuaire statis-
tique de la Suisse 2001, T 3.4.3.2, p. 204; La Vie écono-
mique 12/2001, B 10,4, p. 82]), à un salaire annuel de
54 333 fr. 95. Il s'ensuit que même en procédant à l'abat-
tement maximal de ce salaire statistique admis par la ju-
risprudence (25 %), alors qu'une déduction de l'ordre de
10 % tout au plus apparaît indiquée en l'espèce, et même en
faisant abstraction d'un revenu accessoire dans l'agricul-
ture (cf. consid. 2b supra) - pourtant pris en compte dans
le revenu sans invalidité retenu par les premiers juges
(cf. consid. 3 supra) -, le taux d'invalidité du recourant
(62 881 - 40 750,45 / 62 881 = 35,19 %) n'atteint pas le
seuil de 40 % lui ouvrant le droit à une rente d'invalidité
(art. 28 al. 1 LAI).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Caisse cantonale valaisanne de compensation, au Tri-
bunal cantonal des assurances du canton du Valais
ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 20 mars 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

p. le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.433/01
Date de la décision : 20/03/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-03-20;i.433.01 ?
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