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19/03/2002 | SUISSE | N°5C.171/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 mars 2002, 5C.171/2001


«/2»
5C.171/2001

IIe C O U R C I V I L E
***************************

19 mars 2002

Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Nordmann
et Mme Hohl, juges. Greffière: Mme Mairot.
__________

Statuant sur le recours en nullité
formé par

1. B.________,
2. L.________,
tous deux représentés par Me Pierre-Alain Recordon, avocat à
Genève,

contre

la décision prise le 2 mai 2001 par la Cour de justice du
canton de Genève dans la cause qui oppose les recourants à



1. M.________, représenté par Me Alec Reymond, avocat à
Genève,
2. P.________,
3. T.________,
tous deux représentés...

«/2»
5C.171/2001

IIe C O U R C I V I L E
***************************

19 mars 2002

Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Nordmann
et Mme Hohl, juges. Greffière: Mme Mairot.
__________

Statuant sur le recours en nullité
formé par

1. B.________,
2. L.________,
tous deux représentés par Me Pierre-Alain Recordon, avocat à
Genève,

contre

la décision prise le 2 mai 2001 par la Cour de justice du
canton de Genève dans la cause qui oppose les recourants à

1. M.________, représenté par Me Alec Reymond, avocat à
Genève,
2. P.________,
3. T.________,
tous deux représentés par Me Jean-François Ducrest, avocat à
Genève;

(art. 68 ss OJ; administration d'office d'une succession;
compétence ratione loci)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- D.________, née le 17 janvier 1905, ressor-
tissante française légalement domiciliée à Genève, est dé-
cédée à Paris (France) le 7 avril 1999.

D'après un acte de notoriété du 6 octobre 1999, la
défunte n'a laissé aucun héritier réservataire. Ce document
a
été contesté par P.________ et T.________.

Aux termes d'un testament olographe établi à Paris
le 15 octobre 1990, D.________ avait institué comme
légataire
la Fondation X.________, et désigné B.________, comme exécu-
teur testamentaire.

La de cujus avait en outre rédigé plusieurs codicil-
les, datés respectivement du 20 février 1994, du 23 mars ou
23 mai 1994 et du 3 décembre 1995. Dans le premier, elle dé-
signait M.________, médecin demeurant à Paris, en qualité
d'exécuteur testamentaire. Le deuxième prévoyait
l'annulation
de toutes dispositions contraires à son testament et le der-
nier, le legs de ses bijoux à la femme de M.________.

Constatant, au vu des dispositions testamentaires
susmentionnées, que les droits des héritiers légaux éven-
tuels, inconnus, subsistaient, la Justice de paix du canton
de Genève a, le 13 août 1999, ordonné l'administration d'of-
fice de la succession en application des art. 551 al. 1 aCC
et 554 al. 1 ch. 3 CC, nommé en qualité d'administrateurs
B.________ et M.________, dit que ces derniers ne procéde-
raient qu'aux actes administratifs et conservatoires néces-
saires, tous actes de disposition étant subordonnés à l'ac-
cord de l'autorité, invité les administrateurs à dresser un
état des actifs et des passifs de la succession ainsi qu'un

inventaire fiscal, et mandaté lesdits administrateurs pour
recueillir toute information concernant les éventuels héri-
tiers de la défunte. Un inventaire fiscal des biens de la de
cujus situés à Genève a été dûment dressé.

Le 14 septembre 1999, le conseil genevois de
B.________ a notamment demandé à la justice de paix de lever
l'administration d'office de la succession.

Sur requête de B.________, qui reprochait à
M.________ divers comportements répréhensibles en rapport
notamment avec la gestion de la fortune de feu D.________,
le
Tribunal de Grande Instance de Paris a, par ordonnance du 21
décembre 1999, nommé L.________ en qualité d'administrateur
provisoire de la succession.

Par ordonnance du 31 janvier 2000, le Tribunal de
Grande Instance de Paris a envoyé la Fondation X.________,
ainsi que B.________, "en possession du legs universel fait
par le testament olographe pour jouir, faire et disposer de
tout le contenu de ce legs universel, à compter du jour du
décès, aux charges de droit".

B.- Par décision du 27 juin 2000, notifiée le même
jour à M.________, B.________, L.________ et à la Fondation
X.________, la Justice de paix du canton de Genève a déclaré
recevable la requête de B.________ du 14 septembre 1999, à
laquelle s'était jointe ultérieurement L.________, levé
l'administration d'office instaurée le 11 août 1999, réservé
l'approbation des rapports et des comptes de B.________ et
de
M.________, débouté les parties de toutes autres conclusions
et mis un émolument de 10'000 fr. à la charge de la succes-
sion. Cette autorité a considéré, sur la base des pièces du
dossier, que le dernier domicile de la défunte se trouvait
en
réalité à Paris, de sorte que les autorités genevoises

n'étaient pas compétentes pour ordonner, respectivement main-
tenir une administration d'office.

Par décision du 2 mai 2001, communiquée le 4 mai
suivant, la Cour de justice du canton de Genève a, à la for-
me, déclaré recevable le recours interjeté par M.________
contre la décision de la justice de paix et admis l'interven-
tion de P.________ et de T.________; au fond, l'autorité can-
tonale a annulé la décision entreprise, ordonné le maintien
de l'administration d'office de la succession, condamné
B.________ et L.________, solidairement, aux dépens du recou-
rant et des intervenants, comprenant des indemnités de procé-
dure de 8'000 fr. et de 4'000 fr. à titre de participation
aux honoraires d'avocat de M.________, de P.________ et de
T.________, condamné B.________ et L.________ à verser soli-
dairement à l'Etat de Genève un émolument de décision de
12'000 fr., enfin, débouté les parties de toutes autres con-
clusions.

C.- a) Agissant par la voie du recours en nullité au
Tribunal fédéral, B.________ et L.________ concluent à l'an-
nulation de la décision du 2 mai 2001 et à la constatation
de
l'incompétence ratione loci des autorités judiciaires gene-
voises à l'égard de la succession de feu D.________. Subsi-
diairement, ils demandent le renvoi de la cause à la Cour de
justice pour qu'elle statue à nouveau dans le sens des consi-
dérants.

M.________ propose principalement l'irrecevabilité
du recours, subsidiairement son rejet dans la mesure où il
est recevable. P.________ et T.________ demandent au
Tribunal
fédéral de débouter les recourants de toutes leurs conclu-
sions.

b) Les recourants ont aussi formé un recours de
droit public visant à l'annulation de la décision attaquée.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Selon la règle générale de l'art. 57 al. 5 OJ -
applicable également au recours en nullité, vu le renvoi de
l'art. 74 OJ (ATF 118 II 521 consid. 1a p. 523 et les réfé-
rences) -, le recours de droit public doit être examiné en
premier lieu. Il se justifie néanmoins de déroger à ce prin-
cipe lorsque le recours en réforme, respectivement le
recours
en nullité, paraît devoir être admis indépendamment des
griefs soulevés dans le recours de droit public (ATF 122 I
81
consid. 1 p. 83; 120 Ia 377 consid. 1 p. 378/379 et les ar-
rêts cités; J.-F. Poudret, Commentaire de la loi fédérale
d'organisation judiciaire, n. 5 ad art. 57). Tel est le cas
en l'espèce.

2.- a) En tant qu'elle ordonne le maintien de l'ad-
ministration d'office d'une succession, la décision attaquée
relève de la juridiction gracieuse. Elle n'est donc pas sus-
ceptible d'un recours en réforme (ATF 98 II 272 et les
arrêts
cités; J.-F. Poudret, op. cit., n. 1.2.39 ad Titre II, p.
17), mais bien d'un recours en nullité (J.-F. Poudret, op.
cit., n. 1.2 ad art. 68, p. 633; cf. ATF 57 II 400 ss). En
l'espèce, les recourants se plaignent de la violation de
prescriptions de droit fédéral quant à la compétence territo-
riale internationale de l'autorité (art. 68 al. 1 let. e
OJ).
Ce grief est recevable, dès lors qu'il suffit d'invoquer les
motifs de nullité prévus par l'art. 68 al. 1 OJ (J.-F.
Poudret, op. cit., n. 2.1 ad Chapitre III, p. 627 et les ré-
férences). S'agissant des conditions objectives du recours,
en particulier de la nature de la décision entreprise et du
grief invoqué, le présent recours est dès lors recevable.

b) Sous le titre "Recevabilité du recours",
B.________ soutient qu'il a qualité pour recourir en tant
qu'exécuteur testamentaire et administrateur d'office de la
succession. Sur ce point, il sied de relever que l'adminis-

tration d'office suspend l'exécution testamentaire (Paul

Piotet, Traité de droit privé suisse, vol. IV, p. 623). Tant
l'administrateur officiel que l'exécuteur testamentaire ont
toutefois qualité pour ester en justice en leur propre nom
dans les procès concernant la succession, notamment ceux qui
touchent à leur désignation ou à leurs fonctions (ATF 97 II
11), à condition qu'ils se désignent comme tels (Martin
Karrer, Commentaire bâlois, n. 68 ss ad art. 518 CC, n. 50
ss
ad art. 554 CC; J.-F. Poudret, op. cit., n. 2.2 ad art. 53,
p. 381 et les citations). En l'occurrence, il est dans l'in-
térêt de la succession de déterminer le dernier domicile de
la défunte, afin de connaître le lieu d'ouverture de cette
succession et de définir, le cas échéant, l'autorité compé-
tente pour désigner un administrateur d'office. B.________ a
donc bien qualité pour agir par la voie du recours en nulli-
té, contrairement à ce que soutient M.________; l'ATF 98 II
276, auquel celui-ci se réfère, ne traite du reste pas cette
question. Se fondant sur l'art. 518 al. 3 CC, qui prévoit
que
lorsque plusieurs exécuteurs testamentaires ont été
désignés,
ils sont réputés avoir reçu un mandat collectif, l'intimé
soutient en outre que le recourant ne pouvait agir sans son
autorisation. Cet argument, qui ne concerne d'ailleurs pas
les administrateurs d'office, apparaît infondé. Selon la ju-
risprudence, il suffit en effet que l'ensemble des consorts
matériels nécessaires soient parties au procès (ATF 112 II
308 consid. 2 p. 310), sans être forcément tous demandeurs
ou
défendeurs (Fabienne Hohl, Procédure civile, t. I, Berne
2001, n. 500 ss p. 107/108 et les arrêts cités).

Ces considérations valent également dans la mesure
où le recours est formé par L.________. Contrairement à ce
que prétend l'intimé, il est de surcroît sans incidence
qu'elle n'ait pas requis l'exequatur de l'ordonnance françai-
se la nommant administrateur provisoire. En effet, l'octroi
de l'exequatur aurait impliqué que la compétence de l'autori-
té dont émanait la décision fût donnée, et donc, en l'occur-

rence, que le dernier domicile de la défunte fût en France;
or cette question est précisément litigieuse.

c) Le chef de conclusions tendant au prononcé de
l'incompétence des autorités genevoises à l'égard de la suc-
cession de la défunte est recevable (art. 73 al. 2 OJ).

d) Selon l'art. 63 al. 2 OJ, applicable en vertu du
renvoi de l'art. 74 OJ (ATF 127 III 390 consid. 1f p. 393),
le Tribunal fédéral fonde son arrêt sur les faits tels
qu'ils
ont été constatés par la dernière autorité cantonale, à
moins
que des dispositions fédérales en matière de preuve n'aient
été violées ou que des constatations de fait ne reposent sur
une inadvertance manifeste. Il ne peut être présenté de
griefs contre les constatations de fait - ou l'appréciation
des preuves à laquelle s'est livrée l'autorité cantonale
(ATF
126 III 59 consid. 2a p. 65; 125 III 368 consid. 3 p. 372) -
et les faits nouveaux sont irrecevables (art. 55 al. 1 let.
c
OJ). Ces principes sont également applicables à la réponse
(art. 59 al. 3 OJ, en relation avec l'art. 74 OJ). Contraire-
ment à ce que soutient l'intimé M.________, lorsque, comme
en
l'espèce, l'autorité supérieure n'a pas fait siennes les
constatations de fait pertinentes de la juridiction inférieu-
re, le Tribunal fédéral ne peut les prendre en considération
(cf. J.-F. Poudret, op. cit., n. 4.7 ad art. 63, p. 564).

3.- a) La Cour de justice a considéré qu'il n'appar-
tenait pas à l'autorité de première instance de statuer de
manière définitive concernant le lieu du dernier domicile de
la défunte. Sa compétence était donnée prima facie puisqu'au
moment de son décès, la de cujus était administrativement do-
miciliée à Genève. Selon l'autorité cantonale, le juge de
paix devait s'en tenir à cette apparence, et cela d'autant
plus que la question dudit domicile était débattue, apparem-
ment en procédure ordinaire, devant le juge compétent du
lieu
du décès. Au demeurant, même si la défunte avait eu son der-

nier domicile à l'étranger, le juge de paix était compétent,
selon l'art. 89 LDIP, pour ordonner les mesures conservatoi-
res relatives aux biens situés à Genève et pour veiller à
l'exécution de la mesure de sûreté ainsi ordonnée, celle-ci
n'étant pas destinée à assurer la dévolution de la succes-
sion.

Le recourant se plaint d'une violation des art. 551
al. 1 aCC, 86 al. 1 et 89 LDIP. Il soutient que le juge de
paix ne pouvait pas admettre que sa compétence était donnée
prima facie et s'en tenir à cette apparence sans violer les
règles précitées. En effet, il ne s'agissait pas d'une déci-
sion prise dans le cadre d'une procédure de mesures provi-
sionnelles, fondée sur la vraisemblance des faits et du
droit
et appelant une validation au fond, mais dans le cadre d'une
procédure gracieuse destinée à assurer la dévolution de l'hé-
rédité. En particulier, le fait que la question du dernier
domicile de la défunte fasse l'objet d'une action constata-
toire en France ne dispensait nullement les autorités gene-
voises de se livrer à un examen exhaustif de cette question.
Il était en outre inexact de soutenir, à l'instar de la Cour
de justice, que la réponse à la question du dernier domicile
de la défunte pouvait, le cas échéant, entraîner la libéra-
tion des biens situés à Genève, dès lors que
l'administration
provisoire de l'ensemble des biens de la succession avait
été
ordonnée par le Tribunal de Grande Instance de Paris. Au sur-
plus, il était totalement contradictoire de considérer,
d'une
part, que les autorités genevoises n'avaient pas à statuer
définitivement sur leur compétence et d'admettre, d'autre
part, que ces mêmes autorités étaient compétentes pour ordon-
ner le maintien de l'administration d'office sur l'ensemble

de la succession. Enfin, l'art. 89 LDIP n'autorisait nulle-
ment la Cour de justice à ordonner le maintien de cette admi-
nistration, une telle décision ne faisant manifestement pas
partie des mesures provisionnelles visées par cette disposi-
tion et la compétence des autorités suisses ne s'étendant,

selon les termes clairs de la loi, qu'aux biens sis en
Suisse. La Cour de justice avait par conséquent retenu à
tort, sur la base d'une simple vraisemblance, que les autori-
tés genevoises étaient compétentes ratione loci pour
ordonner
le maintien de la mesure d'administration litigieuse.

b) Les mesures de sûretés des art. 551 ss CC, notam-
ment l'administration d'office, ressortissent à la juridic-
tion gracieuse. En droit international, elles sont en princi-
pe de la compétence exclusive des autorités du dernier domi-
cile du défunt (art. 86 al. 1 LDIP). Toutefois, si le défunt
avait son dernier domicile à l'étranger et laisse des biens
en Suisse, les autorités suisses du lieu de situation de ces
biens prennent les mesures nécessaires à la protection provi-
sionnelle de ceux-ci (art. 89 LDIP). Comme le relève le re-
courant, les mesures de l'art. 89 LDIP ne peuvent viser qu'à
sauvegarder les valeurs patrimoniales, et non à assurer la
dévolution de l'hérédité, qui relève de l'autorité
compétente
pour l'ouverture de la succession. Il appartient à
l'autorité
de déterminer selon son propre pouvoir d'appréciation la na-
ture des mesures conservatoires à prendre, en s'inspirant du
but de sa compétence et des exigences du cas particulier
(Message du Conseil fédéral concernant une loi fédérale sur
le droit international privé, FF 1983 I p. 373 n. 262.4; An-
ton Heini, IPRG Kommentar, n. 3 ad art. 89; Anton K. Schny-
der, Das neue IPR-Gesetz, 2e éd., p. 83 in limine; arrêt du
Tribunal fédéral 5P.283/1995 du 21 novembre 1995, consid.
2b).

Savoir si les mesures conservatoires de l'art. 89
LDIP comprennent l'administration d'office de la succession
est controversé (pour: Martin Karrer, op. cit., n. 17 ad Vor-
bemerkungen zu Art. 551-559 CC; Poudret/Wurzburger/Haldy,
Procédure civile vaudoise, 2e éd., n. 1 ad art. 529);
contre:
Pattocchi/Geisinger, Internationales Privatrecht, Zurich
2000, n. 1 ad art. 89 LDIP; Bernard Dutoit, Commentaire
LDIP,

3e éd., n. 2 ad art. 89; Andreas Bucher, Droit international
privé suisse, II, p. 313 n. 965; cf. aussi Justin Thorens,
Application des art. 88 et 89 LDIP, in SJ 1999 II p. 47 ss;
sous l'empire de la LRDC, arrêt du Tribunal fédéral P.3130/
1985, in SJ 1986 p. 385). Dans le cas particulier, la ques-
tion ne se pose toutefois pas en ces termes. La décision ren-
due le 13 août 1999 par la Justice de paix du canton de Genè-
ve se fondait notamment sur l'art. 551 al. 1 aCC, qui enjoi-
gnait à l'autorité compétente du dernier domicile du défunt
de prendre d'office les mesures nécessaires pour assurer la
dévolution de la succession. Les mesures contestées par les
recourants n'ont pas été prises en application de l'art. 89
LDIP, qui vise la situation dans laquelle le dernier
domicile
du défunt est à l'étranger. En l'occurrence, il n'y a pas
lieu de déterminer si, dans le cas où cette dernière hypothè-
se serait réalisée, l'autorité compétente pourrait ordonner
l'administration d'office des biens situés en Suisse. Une
telle mesure est en effet différente de celles ordonnées par
la justice de paix, dont la décision attaquée impose le main-
tien. Seule doit par conséquent être résolue la question de
la compétence des autorités genevoises pour ordonner l'admi-
nistration d'office sur l'ensemble des biens de la succes-
sion, compétence qui ne peut être donnée que si le dernier
domicile de la de cujus était à Genève. Il convient dès lors
d'examiner ce point.

c) Si la compétence se détermine en règle générale
sur la base des allégations de fait et de droit ainsi que
des
conclusions de la demande, indépendamment du fait qu'elles
soient fondées ou démontrées (cf. arrêt du Tribunal fédéral
5C.194/1996 du 5 décembre 1996, consid. 2 et les références
citées), le dernier domicile du défunt au sens de l'art. 86
al. 1 LDIP - comme de l'art. 551 al. 1 aCC (Escher, Commen-
taire zurichois, 2e éd., n. 1 ad art. 551 aCC et les arrêts
cités) - est défini selon les critères prévus aux art. 23 ss
CC (Bernard Dutoit, op. cit., n. 1 ad art. 20). Par dernier

domicile du défunt, il faut ainsi entendre le lieu où la per-
sonne a résidé avec l'intention de s'y établir, ou le lieu

sont situés ses centres d'intérêts (cf. ATF 120 III 7
consid.
2a p. 8; 119 II 64 consid. 2b/bb p. 65 et les références).
Il
est dès lors possible qu'un domicile interne n'existe pas du
point de vue de la police des étrangers, alors qu'il faut en
admettre un sous l'angle du droit international privé. A
l'inverse, l'admission d'un domicile fiscal en Suisse n'en-
traîne pas nécessairement la création d'un domicile interna-
tional (Bernard Dutoit, op. cit., n. 2 ad art. 20 et les ci-
tations). La Cour de justice ne pouvait par conséquent repro-
cher à l'autorité de première instance d'avoir examiné dans
quel Etat la de cujus avait les liens les plus étroits, sans
s'en tenir au domicile administratif. En considérant que sa
décision devait être annulée de ce fait, la Cour de justice
a
violé les prescriptions de droit fédéral sur la compétence
applicables en la matière (art. 68 al. 1 let. e OJ). Le re-
cours apparaît donc fondé à cet égard.

4.- En conclusion, le recours doit être admis et la
décision de la Cour de justice annulée. En vertu de l'art.
73
al. 2 OJ, le Tribunal fédéral, lorsqu'il déclare le recours
en nullité fondé, peut se prononcer lui-même sur la question
de compétence si la cause est en état d'être jugée. Tel
n'est
pas le cas en l'espèce. Les faits constatés, sur lesquels la
cour de céans doit fonder son arrêt (art. 63 al. 2 OJ, appli-
cable en vertu du renvoi de l'art. 74 OJ; ATF 127 III 390
consid. 1f p. 393), ne permettent en effet pas de
déterminer,
selon les critères prévus aux art. 23 ss CC, le lieu du der-
nier domicile de la défunte, l'autorité cantonale n'ayant
pas
examiné cette question. Il convient ainsi de lui renvoyer la
cause pour qu'elle statue à nouveau en tenant compte de ce
qui précède.

Les intimés, qui succombent, supporteront les frais
judiciaires et verseront en outre des dépens aux recourants,

solidairement entre eux (art. 156 al. 1 et 7, art. 159 al. 1
et 5 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours, annule la décision attaquée et
renvoie la cause à l'autorité cantonale pour qu'elle statue
à
nouveau dans le sens des considérants.

2. Met à la charge des intimés, solidairement entre
eux:

a) un émolument judiciaire de 5'000 fr.
b) une indemnité de 5'000 fr. à payer aux

recourants à titre de dépens.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Cour de justice du canton de
Genève.

__________

Lausanne, le 19 mars 2002
MDO/frs
Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président, La Greffière


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5C.171/2001
Date de la décision : 19/03/2002
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-03-19;5c.171.2001 ?
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