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18/03/2002 | SUISSE | N°1A.83/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 18 mars 2002, 1A.83/2001


{T 0/2}
1A.83/2001/col

Arrêt du 18 mars 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Reeb, Catenazzi,
greffier Thélin.

A.________, recourant, représenté par Me Benoît Bovay, avocat, case
postale
3673, 1002 Lausanne,

contre

Département de la sécurité et de l'environnement du canton de Vaud,
place du
Château 1, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15,

1014
Lausanne.

remplacement d'une conduite d'eau

(recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal
admini...

{T 0/2}
1A.83/2001/col

Arrêt du 18 mars 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Reeb, Catenazzi,
greffier Thélin.

A.________, recourant, représenté par Me Benoît Bovay, avocat, case
postale
3673, 1002 Lausanne,

contre

Département de la sécurité et de l'environnement du canton de Vaud,
place du
Château 1, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15,
1014
Lausanne.

remplacement d'une conduite d'eau

(recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal
administratif du
28 mars 2001)

Le Tribunal fédéral considère en fait et en droit:

Faits:

A.
A. ________ est propriétaire de la parcelle n° 112 du registre
foncier de
Goumoens-la-Ville, située en zone agricole. Depuis 1922, cet immeuble
est
grevé d'une servitude personnelle en faveur de la commune de Bavois,
relative
au passage de canalisations d'eau potable. Une conduite de 125 mm de
diamètre, réalisée en 1954, est effectivement établie dans le
terrain; elle
alimente les réseaux de Bavois et Goumoens-le-Jux, depuis le
réservoir du
Mont qui se trouve au nord de Goumoens-la-Ville. Par ailleurs, un
réseau de
captage est également établi dans ce terrain; il alimente en eau dite
"industrielle", destinée à l'abreuvement du bétail, une ferme
appartenant à
un autre propriétaire.

B.
Du 7 mai au 5 juin 1999, sur requête de la commune de Bavois, la
Municipalité
de Goumoens-la-Ville a soumis à l'enquête publique le projet du
remplacement
de la conduite existante par une canalisation de 250 mm de diamètre;
cette
opération était destinée à accroître le débit disponible de façon à
satisfaire, principalement, les besoins de la défense contre
l'incendie de
l'aire de ravitaillement de Bavois sur l'autoroute A1. La nouvelle
conduite,
accompagnée d'un câble de télécommande des appareils, serait enterrée
sur un
tracé d'environ 3,5 km à travers la campagne, du réservoir du Mont à
l'aire
de ravitaillement. Elle remplacerait le tuyau existant, qui ne serait
plus
utilisé, pour l'alimentation et la défense contre l'incendie des
villages de
Goumoens-le-Jux et Bavois; au surplus, à la différence de l'équipement
actuel, elle garantirait un débit et une pression permettant de lutter
efficacement contre un éventuel incendie sur l'aire de
ravitaillement. La
réserve disponible au réservoir du Mont paraissant insuffisante en
pareil
cas, le projet comportait également le remplacement d'une conduite de
raccordement existant entre ce réservoir et le réseau de l'Association
intercommunale d'amenée d'eau d'Echallens et environs, afin de
permettre un
débit de réapprovisionnement suffisant depuis ce réseau.

A. ________ et divers autres intéressés se sont opposés au projet;
ils ont
fait valoir, notamment, que sa réalisation porterait atteinte aux
réseaux de
captage et de drainage situés sur le tracé; ce propriétaire demandait
que la
nouvelle conduite fût installée en bordure de la parcelle n° 112. Des
pourparlers eurent lieu avec les opposants, portant surtout sur les
modalités
d'exécution des travaux et sur l'indemnisation consécutive à
l'endommagement
des cultures. Selon le procès-verbal d'une séance du 13 septembre
1999, la
qualité et l'état de chaque drain rencontré devront être constatés
dans un
état des lieux, et le choix du mode de remblayage sera effectué sur
place, en
accord avec les propriétaires; ceux-ci seront avertis avant cette
opération,
de façon à pouvoir vérifier le respect de la solution retenue et la
bonne
façon du travail.

C.
Par décision du 1er mars 2000, le Département de la sécurité et de
l'environnement du canton de Vaud a levé les oppositions qui
subsistaient
encore, en particulier celle de A.________, et a autorisé l'exécution
des
travaux. La décision constate, sur la base des études techniques
effectuées
pour le compte du maître d'oeuvre, que la variante proposée par cet
opposant
entraînerait un surcoût disproportionné; elle constate également que
les
mesures nécessaires ont été prévues pour prévenir toute conséquence
néfaste
sur les conditions hydrodynamiques locales, y compris sur
l'alimentation du
captage situé dans la parcelle précitée.

A. ________ a déféré ce prononcé au Tribunal administratif du canton
de Vaud;
statuant le 28 mars 2001, cette juridiction a rejeté le recours. Elle
a
considéré, notamment, que la décision attaquée constituait
l'approbation d'un
plan d'affectation, de rang équivalant au plan d'affectation communal
qui
attribue la parcelle n° 112 à la zone agricole.

D.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________
requiert
le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal administratif et la
décision du Département; subsidiairement, il demande l'annulation de
l'arrêt
et le renvoi de la cause au Tribunal administratif, pour nouveau
jugement. Le
projet est, à son avis, incompatible avec l'art. 24 de la loi
fédérale sur
l'aménagement du territoire.

Invités à répondre, le Tribunal administratif, le Département et
l'Office
fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage proposent le
rejet du
recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit administratif est ouvert contre les décisions
cantonales
de dernière instance fondées sur le droit public fédéral (art. 97, 98
let. g
OJ), ou qui auraient dû être fondées sur ce droit, à condition
qu'aucune des
exceptions légales ne soit réalisée. Le recours de droit
administratif est
également recevable contre des décisions fondées à la fois sur le
droit
cantonal ou communal et sur le droit fédéral, dans la mesure où la
violation
de dispositions de droit fédéral directement applicables est en jeu.
Le
Tribunal fédéral examine aussi, dans le cadre de cette procédure, les
mesures
prises en vertu de dispositions cantonales d'exécution du droit
fédéral
dépourvues de portée indépendante; il examine en outre les mesures
prises sur
la base d'autres dispositions cantonales, lorsque celles-ci
présentent un
rapport de connexité suffisamment étroit avec les questions de droit
fédéral
à élucider (ATF 124 II 409 consid. 1d/dd p. 414; voir aussi ATF 125
II 10
consid. 2a p. 13, 123 II 231 consid. 2 p. 233, 122 II 274 consid. 1a
p. 277).
Le recours est en principe irrecevable contre les décisions relatives
à
l'approbation de plans d'affectation (art. 34 al. 3 de la loi
fédérale sur
l'aménagement du territoire, ci-après LAT), sauf si le plan comporte
des
mesures régies par des prescriptions fédérales spéciales, concernant
notamment la protection de l'environnement, et qu'il présente, à cet
égard,
les caractéristiques d'une décision susceptible de recours (ATF 125
II 18
consid. 4c/cc in fine p. 25, 123 II 231 consid. 2 p. 233, avec
références).
Le recours de droit administratif est également recevable pour faire
valoir
que le plan élude, le cas échéant, les art. 24 à 24d LAT concernant
les
autorisations exceptionnelles de construire hors de la zone à bâtir
(ATF 123
II 289 consid. 1b et 1c p. 291, 117 Ib 9 consid. 2b p. 12).

Les art. 24 à 24d LAT n'entrent en considération que si une
construction ou
installation est prévue dans une zone non affectée à la construction
et
qu'elle n'est pas conforme à l'affectation de cette zone; cette
dernière
condition résulte de l'art. 22 al. 2 let. a LAT. Il est toutefois
possible de
faire valoir à titre préjudiciel, par la voie du recours de droit
administratif pour violation de ces dispositions, prévu par l'art. 34
al. 1
LAT, que la conformité du projet à la destination de la zone agricole
a été
admise ou, au contraire, déniée à tort; le Tribunal fédéral examine
alors si
les principes de droit fédéral relatifs à la zone agricole,
actuellement
fixés aux art. 16 et 16a LAT, ont été respectés (ATF 114 Ib 131
consid. 2 p.
132; voir aussi ATF 120 Ib 48 consid. 1a p. 50, 118 Ib 49 consid. 1a
p. 51,
118 Ib 335 consid. 1a p. 337).

En l'espèce, les griefs soulevés par le recourant s'inscrivent dans
ce cadre,
de sorte que le Tribunal fédéral doit entrer en matière.

2.
Selon la loi vaudoise sur la distribution de l'eau, du 30 novembre
1964, les
communes sont chargées de fournir au public l'eau nécessaire à la
consommation et à la lutte contre le feu (art. 1er). Elles réalisent
les
installations principales nécessaires à cette fin et en assurent
l'entretien;
ces installations comprennent les ouvrages de captage, traitement,
adduction
et stockage, ainsi que le réseau principal de distribution jusqu'aux
bornes
hydrantes (art. 8 al. 1). Elles doivent faire l'objet d'un plan
directeur
comportant les options possibles d'amélioration et de développement,
soumis à
l'approbation du Département de la sécurité et de l'environnement
(art. 7a).
Les projets de création ou de transformation desdites installations
doivent
être soumis à l'enquête publique dans les communes concernées; ils
sont
ensuite transmis, pour approbation, au Département; cette autorité
statue
sur les oppositions (art. 7b).

Un règlement du 25 février 1998 fixe en détail les procédures
d'élaboration
des projets et de traitement des oppositions. Les dossiers comprennent
notamment une notice descriptive et justificative des travaux (art.
6). Ils
sont soumis, avant l'enquête publique, à un examen préalable du
laboratoire
cantonal rattaché au Département, qui peut associer à la procédure
les autres
services concernés (art. 7). Les projets concernant aussi la lutte
contre le
feu sont obligatoirement soumis à l'Etablissement cantonal
d'assurance contre
l'incendie (art. 10). La Municipalité du lieu de situation doit
entendre les
opposants, en présence du maître d'oeuvre et de l'auteur du projet, et
émettre un préavis sur chacune des oppositions maintenues (art. 8).

3.
La décision du 1er mars 2000, prise sur la base de ces dispositions,
valide
un projet de transformation de l'installation actuelle.

3.1 La conduite nouvelle desservira essentiellement, sinon
exclusivement, des
bâtiments et installations situés en dehors de la zone agricole, de
sorte
qu'il s'agira d'une réalisation non conforme à l'affectation de cette
zone
(ATF 118 Ib 497 consid. 3a p. 498/499).
Lorsqu'une telle réalisation est autorisée par la voie d'un plan
d'affectation spécifique, l'autorité doit préalablement examiner les
diverses
configurations ou implantations possibles pour l'ouvrage en cause,
compte
tenu, d'une part, de leurs avantages et inconvénients pour le
constructeur
et, d'autre part, des buts et objectifs de l'aménagement du
territoire (ATF
115 Ib 508 consid. 6b p. 514, 114 Ia 114 consid. 4c/cf. p. 125). Si
ledit
examen est omis alors que plusieurs solutions seraient peut-être
envisageables, et que le plan d'affectation comporte la création
d'une petite
zone à bâtir nouvelle, la justification de cette zone n'est pas
établie et
l'adoption du plan aboutit à éluder les art. 24 à 24d LAT (ATF 124 II
391
consid. 2c in fine, p. 394; voir aussi ATF 120 Ib 207 consid. 6 p.
213).

3.2 En l'occurrence, la longueur du tracé, sur les territoires de
trois
communes différentes, et la relative complexité des mesures à prévoir,
comportant la modification du raccordement à un autre réseau et la
conclusion
d'une convention avec la collectivité partenaire, justifient un plan
d'affectation spécifique. Une variante sans remplacement du tuyau de
1954,
comportant un nouveau réservoir à proximité de l'aire de
ravitaillement de
Bavois, a été étudiée, puis écartée au motif qu'elle serait plus
coûteuse et
que la pression disponible serait inférieure. La variante proposée
par le
recourant, comportant un déplacement du tracé en bordure de sa
parcelle, a
également été étudiée; elle a aussi été écartée en raison de son
surcoût. Par
ailleurs, seules des surfaces minimes, à l'emplacement des vannes et
autres
appareils, seront durablement soustraites à l'utilisation agricole du
sol, et
le Département a aussi constaté que le tronçon à établir en forêt ne
nécessitera aucun défrichement.

L'incidence du projet sur les conditions hydrodynamiques locales a
fait
l'objet d'un rapport détaillé, et il est prévu qu'une surveillance
soit
maintenue après l'exécution des travaux. Les modalités d'exécution des
travaux ont aussi été étudiées de façon détaillée.

3.3 La procédure cantonale, telle que prévue par la loi et le
règlement
précités et effectivement suivie en l'espèce, répond aux exigences
des art.
33 al. 1 LAT (enquête publique) et 26 al. 1 LAT (approbation par une
autorité
cantonale) concernant les plans d'affectation; elle a également
permis la
coordination requise par l'art. 25a al. 4 LAT. La documentation
incorporée au
dossier satisfait aussi aux exigences de l'art. 47 al. 1 de
l'ordonnance sur
l'aménagement du territoire.

Le Département assumait la responsabilité d'assurer la coordination.
Selon la
jurisprudence, il ne pouvait pas, simultanément, statuer sur les
oppositions
à titre d'autorité de recours exerçant un pouvoir d'examen complet
selon
l'art. 33 al. 2 let. b LAT (ATF 127 II 238 consid. 3b/bb p. 242), et
le
Tribunal administratif ne pouvait pas, ensuite, se borner à redresser
une
éventuelle violation du droit ou une éventuelle constatation inexacte
ou
incomplète des faits (cf. art. 36 let. a et b de la loi vaudoise sur

la
juridiction et la procédure administratives, ci-après LJPA); il se
trouvait,
au contraire, saisi d'un cas où la loi prévoyait aussi un contrôle de
l'opportunité, selon l'art. 36 let. c LJPA (même arrêt, consid. 3b/cc
p.
244), et il est effectivement entré en matière sur tous les griefs
soulevés
devant lui, hormis une critique étrangère à l'objet du litige.
Dans ces conditions, le Tribunal administratif n'a pas violé le droit
fédéral
en retenant que la décision du Département constituait l'approbation
d'un
plan spécial ayant pour effet de conférer, dans la mesure
nécessaire, une
affectation spécifique au terrain traversé par l'ouvrage (ATF 112 Ib
164
consid. 2b p. 166, concernant un plan d'ouvrage routier; voir aussi
ATF 120
Ib 27 consid. 2c/cc p. 32). Il n'apparaît pas non plus que ce plan
aboutisse
à éluder les art. 24 à 24d LAT.

3.4 Au sujet de la conduite qui ne sera plus utilisée, le recourant
se réfère
à diverses dispositions de droit fédéral concernant notamment les
atteintes
portées au sol, les installations de transport par conduites et le
traitement
des déchets, dispositions manifestement hors de cause dans la présente
affaire. Le recours de droit administratif se révèle donc entièrement
privé
de fondement, ce qui entraîne son rejet.

4. Le recourant qui succombe doit acquitter l'émolument judiciaire.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Le recourant acquittera un émolument judiciaire de 3'000 fr.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Département de la sécurité et de l'environnement et au Tribunal
administratif
du canton de Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral du développement
territorial
et à l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage.

Lausanne, le 18 mars 2002

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.83/2001
Date de la décision : 18/03/2002
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-03-18;1a.83.2001 ?
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