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12/03/2002 | SUISSE | N°4P.286/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 12 mars 2002, 4P.286/2001


«/2»

4P.286/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

12 mars 2002

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Corboz,
Mme Klett, Mme Rottenberg Liatowitsch et M. Favre, juges.
Greffier: M. Carruzzo.
__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________ et B.________, tous deux représentés par Me Petra
Walther, avocate à Sierre,

contre

le jugement rendu le 11 octobre 2001 par la IIe Cour civile
du Tribunal cantonal du canton

du Valais dans la cause qui
oppose les recourants à 1. X.________ AG, 2. C.________, 3.
D.________, 4. E.________, rep...

«/2»

4P.286/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

12 mars 2002

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Corboz,
Mme Klett, Mme Rottenberg Liatowitsch et M. Favre, juges.
Greffier: M. Carruzzo.
__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

A.________ et B.________, tous deux représentés par Me Petra
Walther, avocate à Sierre,

contre

le jugement rendu le 11 octobre 2001 par la IIe Cour civile
du Tribunal cantonal du canton du Valais dans la cause qui
oppose les recourants à 1. X.________ AG, 2. C.________, 3.
D.________, 4. E.________, représentés par Me Manfred
Stucky,
avocat à Sierre;

(art. 9 Cst.; appréciation des preuves; frais et dépens en
procédure civile valaisanne)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- A fin novembre 1995, dans le cadre d'un diffé-
rend en matière de vente immobilière qui les opposait depuis
plusieurs années, X.________ AG, C.________, D.________ et
E.________ ont ouvert action contre A.________ et
B.________.
Les dernières conclusions des demandeurs tendaient à ce que
les frères A.________ et B.________ soient condamnés à exé-
cuter l'acte de division de parcelles et de vente du 27 no-
vembre 1992 et à ce que l'opposition à la poursuite soit d-
éfinitivement levée à concurrence de la somme de 20 000 fr.
et des intérêts y afférents.

Les défendeurs ont conclu au rejet de la demande et
à la radiation du séquestre.

Par jugement du 11 octobre 2001, la IIe Cour civile
du Tribunal cantonal du canton du Valais a condamné les dé-
fendeurs à exécuter l'acte de division de parcelles et de
vente du 27 novembre 1992, rejeté toute autre conclusion,
mis
les frais du Tribunal, par 9300 fr., à la charge solidaire
des défendeurs et condamné solidairement ceux-ci à verser
aux
demandeurs 12 100 fr. à titre de dépens ainsi que 4650 fr.
en
remboursement de leurs avances.

B.- Contre ce jugement, les défendeurs exercent pa-
rallèlement un recours de droit public et un recours en ré-
forme. Dans le premier recours, ils concluent à l'annulation
du jugement attaqué, motifs pris de l'appréciation
arbitraire
des preuves et de la violation des règles et principes régis-
sant la répartition des frais et dépens cantonaux ainsi que
la fixation de leur montant. Dans le second recours, les dé-
fendeurs concluent au rejet de la demande en invoquant diver-
ses violations du droit fédéral.

Les demandeurs proposent le rejet de l'un et l'au-
tre recours. La cour cantonale déclare n'avoir pas d'observa-
tions à formuler au sujet du recours de droit public.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Dans un premier moyen, les recourants repro-
chent aux juges cantonaux d'avoir procédé à une constatation
arbitraire en retenant qu'ils savaient que Jürgen Müller
comptait au nombre des acquéreurs véritables des parcelles
vendues. Examinant en priorité le recours en réforme
connexe,
la Cour de céans a jugé que la constatation incriminée por-
tait sur un point de fait ne revêtant aucune pertinence pour
la solution du litige. Il s'ensuit que les recourants n'ont
pas un intérêt juridiquement protégé à l'examen de la consti-
tutionnalité d'une constatation qui ne les lèse pas (cf.
art.
88 OJ). Leur premier moyen est, en conséquence, irrecevable.

2.- Est ensuite entreprise, dans un second groupe
de moyens, la partie du jugement déféré qui a trait à la fi-
xation et à la répartition des frais et dépens de la procédu-
re cantonale.

a) Se référant à l'arrêt de principe en la matière
(ATF 120 Ia 171) et procédant à une comparaison avec le
tarif
zurichois, les recourants soutiennent qu'en leur réclamant
un
émolument de 8900 fr. en relation avec une valeur litigieuse
de 140 000 fr., alors que la procédure s'est limitée à une
séance de débat préliminaire de 30 mn et à deux séances en
preuve de 1 h 45 chacune, le Tribunal cantonal n'a pas res-
pecté les principes de l'équivalence et de la proportionnali-
té qui découlent de l'art. 8 Cst., entravant ainsi de
manière
excessive l'accès à la justice en violation de l'art. 6 CEDH.

aa) Les émoluments judiciaires sont des contribu-
tions causales qui dépendent des coûts. A ce titre, ils doi-
vent respecter les principes de la couverture des frais et
de
l'équivalence (ATF 120 Ia 171 consid. 2a et les arrêts ci-
tés).
Le principe de la couverture des frais implique que
l'ensemble des ressources provenant d'un émolument ne soit
pas supérieur à l'ensemble des dépenses de la collectivité
pour l'activité administrative en cause. Quant au principe
de
l'équivalence, il suppose que le montant de chaque émolument
soit en rapport avec la valeur objective de la prestation
fournie et reste dans des limites raisonnables (ATF 121 I
230
consid. 3g/bb p. 238 et les arrêts cités). La valeur de la
prestation se mesure soit à son utilité pour le justiciable,
soit à son coût par rapport à l'ensemble des dépenses de
l'activité administrative en cause (ATF 120 Ia 171 consid.
2a
et les références). Pour respecter le principe de l'équiva-
lence, il faut que l'émolument soit raisonnablement propor-
tionné à la prestation de l'administration, ce qui n'exclut
cependant pas une certaine schématisation. S'il n'est pas né-
cessaire que l'émolument corresponde exactement au coût de
l'opération administrative visée, il doit toutefois être éta-
bli selon des critères objectifs et s'abstenir de créer des
différences qui ne seraient pas justifiées par des motifs
pertinents. Le taux de l'émolument ne doit notamment pas em-
pêcher ou rendre difficile à l'excès l'utilisation de certai-
nes institutions (ATF 120 Ia 171 consid. 2a; 106 Ia 241
consid. 3b p. 244 et 249 consid. 3a p. 253).

Une contribution qui dépasse le cadre fixé par les
principes de la couverture des frais et de l'équivalence
doit
reposer sur une base légale plus étendue (ATF 120 Ia 171 con-
sid. 5 p. 179).

bb) Selon l'art. 14 al. 1 de la loi valaisanne du
14 mai 1998 fixant le tarif des frais et dépens devant les

autorités judiciaires et administratives (LTar; RSV 173.8),
pour les contestations civiles de nature pécuniaire soumises
à la procédure ordinaire ou accélérée et tranchées en premiè-
re ou unique instance, l'émolument de justice est fixé entre
5000 fr. et 15 000 fr. pour une valeur litigieuse comprise
entre 100 001 fr. et 200 000 fr. L'émolument est arrêté en
fonction de la valeur litigieuse, de l'ampleur et de la dif-
ficulté de la cause, de la façon de procéder des parties,
ainsi que de leur situation financière (art. 11 al. 1 LTar).
Explicitant ces différents critères, la doctrine expose, no-
tamment, que l'ampleur de la cause peut dépendre du nombre
de
documents traités ou de personnes concernées et qu'il con-
vient d'apprécier la difficulté d'une affaire en ayant égard
à ses particularités de faits ou aux problèmes juridiques
soulevés (Olivier Derivaz, Les frais et dépens, les sûretés
et l'assistance judiciaire, in Le nouveau droit judiciaire
privé valaisan, Séminaire de l'Ordre des avocats valaisans,
Martigny 1998, p. 10). Lorsque les circonstances particuliè-
res le justifient, l'autorité peut majorer les limites
fixées
par le barème jusqu'au double (art. 11 al. 3 LTar).

cc) Contrairement à ce que soutiennent les recou-
rants, les principes de l'équivalence et de la proportionna-
lité ne découlent pas de l'art. 8 Cst., qui traite de l'éga-
lité entre les êtres humains, mais, respectivement, de
l'art.
5 al. 1 (principe de la légalité) et 2 (principe de la pro-
portionnalité) Cst. Pour le surplus, les recourants ne démon-
trent pas que l'art. 6 CEDH fixerait, en matière
d'émoluments
judiciaires, des exigences plus grandes que celles qu'a po-
sées le Tribunal fédéral dans ce domaine d'application de
l'art. 4 aCst.

Le principe de la couverture des frais n'est pas en
cause ici. D'ailleurs et d'une manière générale, les émolu-
ments encaissés n'arrivent de loin pas à couvrir les
dépenses
des tribunaux (ATF 120 Ia 171 consid. 3 et l'arrêt cité).

Quant au principe de l'équivalence, la seule mise
en parallèle du tarif valaisan et du tarif zurichois, édicté
cinq ans plus tôt, ne suffit manifestement pas à établir la
violation alléguée de ce principe par le premier tarif cité.
A cet égard, il ne s'agit pas de procéder à une comparaison
abstraite entre les deux tarifs, mais de vérifier que l'émo-
lument mis à la charge des recourants dans le cas concret
respecte ledit principe. Au demeurant, on peut opposer à
l'exemple mentionné par les recourants celui tiré du tarif
des émoluments judiciaires du Tribunal fédéral (RS 173.118.
1), lequel prévoit exactement la même fourchette que le
tarif
valaisan pour les contestations portant sur une valeur de
100 000 fr. à 200 000 fr. dont le Tribunal connaît en instan-
ce unique.

De même, le seul argument concret avancé par les
recourants pour tenter de démontrer la violation du principe
de l'équivalence - soit la durée des trois séances tenues
par
le juge chargé d'instruire la cause et l'absence de débat fi-
nal devant le Tribunal cantonal - n'est pas déterminant. Com-
me on l'a souligné plus haut, l'ampleur et la difficulté
d'une cause ne se mesurent pas ou, du moins, pas seulement à
cette aune. En l'espèce, la cour cantonale met en évidence,
sans être contredite par les recourants, "la nature et la
difficulté non négligeables de l'affaire". On ne peut d'ail-
leurs que lui emboîter le pas, tant il est vrai que les pro-
blèmes liés à l'exécution d'une vente immobilière prétendu-
ment entachée d'un vice de forme figurent parmi les
questions
juridiques les plus délicates et les plus controversées. Les
recourants sous-estiment la difficulté d'une affaire dont
les
circonstances de fait étaient assez complexes et dont le dos-
sier couvre quelque 400 pages. Dans ces conditions, un émolu-
ment de justice de 8900 fr., certes élevé, est néanmoins en
rapport avec la prestation fournie et se tient dans des limi-
tes raisonnables.

Quoi qu'il en soit, force est de constater que le
tarif incriminé figure dans une loi au sens formel, contrai-
rement au tarif vaudois examiné dans l'ATF 120 Ia 171, si
bien qu'il respecte en tout état de cause le principe de la
légalité.

b) Les recourants reprochent, en outre, à la cour
cantonale d'avoir fait une application arbitraire de l'art.
252 CPC val. en ne tenant pas compte, pour décider de répar-
tir ou non l'émolument de justice, du rejet de la conclusion
des intimés tendant au paiement de 20 000 fr. à titre de dom-
mages-intérêts.

Il ressort du considérant 7 du jugement attaqué
que, pour trancher ce point, le Tribunal cantonal a appliqué
l'art. 302 al. 1 de l'ancien Code de procédure civile valai-
san (aCPC). Les recourants ne lui font pas grief d'avoir vio-
lé la disposition de droit transitoire invoquée par lui à
cet
effet (art. 317 al 1 CPC). Ils n'exposent pas non plus en
quoi la disposition appliquée - i. e. l'art. 302 al. 1 aCPC
-
l'aurait été de manière arbitraire. Dans ces conditions, il
n'appartient pas au Tribunal fédéral d'examiner si la solu-
tion critiquée est compatible ou non, sous l'angle de l'arbi-
traire, avec une disposition de droit cantonal que les pre-
miers juges n'ont pas appliquée.

c) Dans un dernier moyen, les recourants s'en pren-
nent au montant des dépens. A leur avis, en fixant celui-ci
à
11 800 fr., la cour cantonale a versé dans l'arbitraire, du
moment qu'il n'y avait pas à prendre en compte les dépens af-
férents à d'autres procédures déjà liquidées (mesures provi-
sionnelles, exception d'incompétence ratione loci, etc.) et
qu'il aurait fallu retenir, d'autre part, le fait que les in-
timés n'ont pas obtenu gain de cause en totalité.

Sur ce point, le recours est irrecevable, faute
d'une motivation suffisante. La IIe Cour civile a fondé sa
décision relative aux dépens sur des dispositions du droit
cantonal qu'elle mentionne expressément dans son jugement.
Or, les recourants, non seulement ne citent pas les disposi-
tions appliquées par la cour cantonale, mais surtout ne dé-
montrent pas en quoi elles auraient été gravement méconnues
en l'espèce. Partant, il n'est pas possible d'entrer en ma-
tière sur ce dernier grief (art. 90 al. 1 let. b OJ).

3.- Les frais et dépens relatifs à la présente
procédure seront mis solidairement à la charge des recou-
rants, qui succombent (art. 156 al. 1 et 7 OJ, art. 159 al.
1
et 5 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est
recevable;

2. Met un émolument judiciaire de 5000 fr. à la
charge des recourants, solidairement entre eux;

3. Condamne solidairement les recourants à verser
aux intimés, créanciers solidaires, une indemnité de 5000
fr.
à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux man-
dataires des parties et à la IIe Cour civile du Tribunal
cantonal du canton du Valais.

___________

Lausanne, le 12 mars 2002
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.286/2001
Date de la décision : 12/03/2002
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-03-12;4p.286.2001 ?
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