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04/03/2002 | SUISSE | N°5P.274/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 04 mars 2002, 5P.274/2001


«/2»
5P.274/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

4 mars 2002

Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Nordmann
et Mme Hohl, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________,

contre

l'arrêt rendu les 30 mars/14 juin 2001 par le Président du
Tribunal cantonal du canton de Vaud;

(indemnité de l'avocat d'office)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a

i t s suivants:

A.- Le 22 octobre 1998, le Président du Tribunal du
district de Lausanne a octroyé le bénéfice de l'assistance...

«/2»
5P.274/2001

IIe C O U R C I V I L E
******************************

4 mars 2002

Composition de la Cour: M. Bianchi, président, Mme Nordmann
et Mme Hohl, juges. Greffière: Mme Mairot.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

X.________,

contre

l'arrêt rendu les 30 mars/14 juin 2001 par le Président du
Tribunal cantonal du canton de Vaud;

(indemnité de l'avocat d'office)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le 22 octobre 1998, le Président du Tribunal du
district de Lausanne a octroyé le bénéfice de l'assistance
judiciaire provisoire à dame T.________ dans le cadre de son
divorce. Par décision du 17 novembre suivant, le Bureau de
l'assistance judiciaire du canton de Vaud lui a accordé l'as-
sistance judiciaire de façon définitive et lui a désigné un
conseil d'office en la personne de Me Y.________.

Me X.________, collaboratrice dans l'étude de cet
avocat, s'est finalement constituée pour la défense des inté-
rêts de dame T.________. Celle-ci a ouvert action en divorce
par demande déposée auprès du Tribunal du district de Lau-
sanne le 16 décembre 1998. Un échange d'écritures a eu lieu,
comprenant réplique et duplique. La demanderesse a requis à
titre préprovisoire le blocage des comptes de son mari. Par
convention sur mesures provisoires signée entre les époux le
17 mars 1999 et ratifiée par le juge le 29, les parties ont
confirmé les mesures préprovisoires.

A l'audience du 24 août 2000, les conjoints ont dé-
posé un projet de convention réglant l'entier de leur divor-
ce. Les confirmations écrites prévues par la loi ayant été
effectuées après le délai de deux mois, les mesures provisoi-
res ont été révoquées et le divorce des époux T.________ a
été prononcé par jugement prenant date du 27 novembre 2000.

Le 27 septembre 2000, Me X.________ a remis au Pré-
sident du Tribunal du district de Lausanne la liste des acti-
vités déployées dans ce dossier, représentant un total de
cinquante heures de travail.

Par décision du 26 février 2001, ce magistrat a fixé
l'indemnité due pour les opérations devant le tribunal d'ar-
rondissement à 4'840 fr. d'honoraires, dont 340 fr. de TVA,
et à 55 fr. au titre de débours, dont 5 fr. de TVA.

B.- Me X.________ a recouru contre cette décision,
en concluant à ce que la liste de frais précitée soit recti-
fiée comme il suit: 7'500 fr. d'honoraires, plus 570 fr. de
TVA à 7,6%, et 50 fr. de débours, dont 3 fr.80 de TVA à
7,6%,
soit un total de 8'123 fr.80.

Par arrêt rendu les 30 mars/14 juin 2001, le Prési-
dent du Tribunal cantonal du canton de Vaud a rejeté le re-
cours et maintenu la décision de première instance.

C.- Agissant par la voie du recours de droit public
au Tribunal fédéral, Me X.________ conclut à l'annulation de
cet arrêt et au renvoi de la cause à l'autorité cantonale
pour nouvelle décision dans le sens des considérants.

Des observations n'ont pas été requises.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Déposé en temps utile, compte tenu de la suspen-
sion des délais prévue par l'art. 34 al. 1 let. b OJ, contre
une décision finale prise en dernière instance cantonale, le
recours est recevable selon les art. 86 al. 1 et 89 al. 1
OJ.

Le chef de conclusions tendant au renvoi de la cause
à l'autorité cantonale pour nouvelle décision dans le sens
des considérants est superfétatoire: ce n'est que la consé-
quence d'une annulation éventuelle (cf. ATF 112 Ia 353 con-
sid. 3c/bb p. 354; Messmer/Imboden, Die eidgenössischen
Rechtsmittel in Zivilsachen, p. 226 n. 10).

2.- La recourante se plaint d'une violation de son
droit d'être entendue, grief de nature formelle sur lequel
il
convient de statuer en premier lieu (ATF 126 V 130 consid.
2b
p. 132; 125 I 113 consid. 3 p. 118). Comme elle ne se réfère
à aucune disposition de procédure cantonale, il doit être
examiné au regard de l'art. 29 al. 2 Cst. (art. 4 aCst.) et
avec un plein pouvoir d'examen (ATF 125 I 257 consid. 3a p.
259 et les arrêts cités).

a) La jurisprudence a déduit du droit d'être enten-
du, découlant des dispositions constitutionnelles précitées,
l'obligation pour l'autorité de motiver sa décision, afin
que
le justiciable puisse en saisir la portée, l'attaquer en con-
naissance de cause et l'autorité de recours, exercer son con-
trôle. Pour répondre à ces exigences, il suffit que le juge
mentionne, fût-ce brièvement, les motifs qui l'ont guidé et
sur lesquels il s'est fondé (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102/
103; 124 V 180 consid. 1a p. 181; 123 I 31 consid. 2c p.
34).

b) La recourante reproche au Président du Tribunal
cantonal d'avoir réduit de cinquante à trente le nombre
d'heures consacrées à la cause sans avoir examiné le dossier
qu'elle avait pourtant mis à sa disposition. Elle soutient
en
outre qu'il aurait dû demander au premier juge pour quels mo-
tifs celui-ci n'avait accordé qu'un montant d'honoraires cor-
respondant à un tarif horaire de 90 fr. (4'500 fr. : cinquan-
te heures), dès lors qu'il n'était pas certain qu'il ait lui-
même opéré une réduction des heures. Par ces critiques, la
recourante ne fait pas valoir l'absence ou l'insuffisance de
motivation de la décision attaquée. En prétendant que l'auto-
rité cantonale aurait statué sans avoir examiné le dossier,
elle lui reproche en réalité d'avoir commis arbitraire, sans
toutefois tenter de le démontrer (art. 90 al. 1 let. b OJ;
cf. ATF 110 Ia 1 consid. 2a p. 3/4; 125 II 129 consid. 5b p.
134); au demeurant, l'arrêt attaqué mentionne que le dossier

complet de la cause a été joint d'office au recours. De
même,
lorsque la recourante se plaint de ce que l'autorité cantona-
le n'a pas demandé au juge de première instance d'expliciter
sa décision, son grief n'est pas propre à démontrer une moti-
vation insuffisante de l'arrêt attaqué. On ne voit du reste
pas pour quelle raison le Président du Tribunal cantonal au-
rait dû procéder de la sorte. Même si le juge de première
instance n'a pas indiqué expressément le nombre d'heures de
travail retenu pour fixer la rémunération due à la recouran-
te, il convient de garder à l'esprit qu'en droit vaudois,
l'indemnité de l'avocat d'office est fixée en fonction d'une
appréciation globale du cas et non point, comme dans
d'autres
cantons, sur la base d'un tarif horaire établi à l'avance,
la
mission de l'autorité de taxation se limitant dans ce cas à
déterminer le nombre d'heures de travail à retenir pour la
fixation des honoraires. De toute manière, si la recourante
entend, par ce biais, se plaindre d'une insuffisance de moti-
vation de la décision du Président du Tribunal de district,
son grief est irrecevable, dès lors qu'elle ne prétend pas
l'avoir soulevé devant la précédente autorité (art. 86 al. 1
OJ). En définitive, le moyen tiré de la violation du droit
d'être entendu apparaît manifestement mal fondé, dans la me-
sure où il est recevable.

3.- La recourante prétend en outre que le Président
du Tribunal cantonal a fait preuve d'arbitraire en réduisant
de vingt heures, soit de 40%, le temps nécessaire à la défen-
se des intérêts de sa cliente. En particulier, elle reproche
à ce magistrat d'avoir considéré que l'activité de l'avocat
d'office ne devait pas être composée à 80% d'opérations non
judiciaires. Elle relève que, dans le cadre de la procédure
sur requête commune avec accord complet, prévue par le nou-
veau droit du divorce, l'activité judiciaire proprement dite
peut se résumer à sa plus simple expression, ce qui
n'empêche
pas que de longs pourparlers soient parfois nécessaires pour

aboutir à une transaction. En l'occurrence, les opérations
et
le nombre d'heures indiqués dans sa liste de frais correspon-
draient au travail effectué et seraient justifiés par les
circonstances.

a) Le règlement d'exécution de la loi vaudoise du 24
novembre 1981 sur l'assistance judiciaire en matière civile,
édicté le 3 juin 1988 par le Conseil d'Etat vaudois, accorde
au défenseur d'office, outre le remboursement de ses
impenses
(art. 2), une indemnité correspondant aux 80% des montants
calculés conformément aux art. 2 et 3 du tarif des
honoraires
d'avocat dus à titre de dépens, du 17 juin 1986 (art. 1er
al.
1 let. b). Dans le cadre fixé par cette disposition, l'auto-
rité chargée d'arrêter le montant de l'indemnité due à l'avo-
cat d'office jouit d'un très large pouvoir d'appréciation:
le
Tribunal fédéral n'intervient que si cette autorité a abusé
de ce pouvoir, ou si elle l'a excédé. Tel est le cas lorsque
sa décision repose sur une appréciation insoutenable des cir-
constances, qu'elle est inconciliable avec les règles du
droit et de l'équité, qu'elle omet de tenir compte de tous
les éléments de fait propres à fonder la décision, ou encore
lorsqu'elle prend au contraire en considération des circons-
tances qui ne sont pas pertinentes (ATF 122 I 1 consid. 3a
p.
2; 118 Ia 133 consid. 2b p. 134; 109 Ia 107 consid. 2c p.
109). Pour que la décision soit annulée, il ne suffit pas
que
l'autorité ait apprécié de façon erronée un poste de l'état
de frais ou se soit fondée sur un argument déraisonnable; en-
core faut-il que le montant global alloué à l'avocat
d'office
à titre d'indemnisation apparaisse comme ayant été fixé de
manière arbitraire (sur cette notion, cf. ATF 127 I 54 con-
sid. 2b p. 56 et les références). Le Tribunal fédéral fait
preuve d'une grande réserve dans les cas où une autorité can-
tonale estime exagérés le temps ou les opérations déclarés
par l'avocat dans le cadre de son mandat d'office. Il appar-
tient en effet aux autorités cantonales de juger de l'adéqua-

tion entre les activités déployées par l'avocat et celles
qui
sont justifiées par l'accomplissement de sa tâche. Partant,
le Tribunal fédéral n'intervient que lorsque l'autorité a
clairement excédé son pouvoir d'appréciation en refusant
d'indemniser des activités qui relèvent incontestablement de
la mission de l'avocat d'office (ATF 118 Ia 133 consid. 2d
p.
136 et les arrêts cités).

b) En l'espèce, l'autorité cantonale a considéré que
l'indemnité accordée à titre d'honoraires, d'un montant de
4'840 fr., couvrait plus de trente heures de travail si l'on
appliquait le tarif horaire de 160 fr. La recourante
estimait
le temps consacré au dossier à cinquante heures, dont plus
de
vingt-trois heures de conférences et plus de seize heures de
correspondance, si bien que les audiences et les actes de
procédure l'avait occupée pendant une dizaine d'heures.
Selon
la liste de frais établie par la recourante, les quatre cin-
quièmes du temps de travail accompli dans le cadre de cette
affaire correspondaient à des démarches extrajudiciaires.
Pour l'autorité cantonale, même si le juge doit tenir compte
de ces opérations lors de son calcul de l'indemnité, elles
ne
sauraient constituer plus de 80% de l'activité de l'avocat.
Cette proportion laissait entrevoir que la recourante avait
surévalué les heures de conférences et de correspondance
nécessaires. Partant, celles-ci ne pouvaient pas toutes être
prises en considération dans le décompte de l'assistance ju-
diciaire. Par ailleurs, le fait d'avoir rédigé une demande
en
divorce comportant cent quatorze allégués, une réplique de
quatorze allégués ainsi que deux requêtes de mesures provi-
sionnelles ne signifiait pas forcément que l'affaire était
complexe. Concernant la demande, la majeure partie des allé-
gués retraçait l'histoire des époux. Quant à la convention
de
divorce, elle contenait quatre articles et tenait sur à
peine
deux pages. A la lecture de ces documents, le divorce ne ré-
vélait pas de difficultés juridiques particulières. Preuve
en

était que selon son propre décompte, ces rédactions avaient
occupé la recourante pendant un peu plus de dix heures seule-
ment. L'autorité cantonale a par conséquent estimé que le
nombre d'heures invoqué par la recourante devait être revu à
la baisse. Considérant que le montant de 4'840 fr. alloué
par
le juge de première instance représentait un peu plus de
trente heures de travail rémunérées à 160 fr. chacune, elle
a
jugé que cette indemnité apparaissait adéquate, dès lors
qu'une dizaine d'heures seulement correspondaient à des au-
diences et à des actes de procédure.

c) Ces considérations résistent au grief d'arbitrai-
re. Au vu des opérations énumérées dans la liste de frais et
de la teneur des actes rédigés par la recourante, le nombre
d'heures de conférences et de correspondance apparaît effec-
tivement élevé. Certes, ce genre d'affaires, au caractère
conflictuel souvent exacerbé, nécessite une activité parfois
intense du mandataire, notamment lorsqu'il s'agit, comme
dans
le cas particulier, d'amener les époux à conclure une tran-
saction tant sur le principe du divorce que sur ses effets
accessoires. Il est également concevable que l'accord signé
entre les parties, le contenu des actes de procédure ou le
nombre d'audiences tenues devant le juge ne révèlent pas for-
cément la quantité de travail et d'efforts fournis par l'avo-
cat. Le temps que le conseil d'office peut vouer aux opéra-
tions extrajudiciaires par rapport à celui consacré à la
procédure proprement dite ne saurait dès lors être fixé de
façon schématique. En l'occurrence, il n'est toutefois pas
établi que la cause ait présenté des difficultés particuliè-
res impliquant un investissement accru de l'avocat. Même si
ses activités ont exigé de la recourante une disponibilité
et
un engagement certain, dont on doit en principe tenir compte
dans le cadre de la rémunération de son mandat, le travail
allégué, qui ne se retrouve pas dans les
actes de procédure,

ne justifie pas l'ampleur des heures de travail alléguées.
Sur ce point, la recourante prétend en substance que de
longs
pourparlers ont été nécessaires pour aboutir à une transac-
tion et qu'il a fallu commettre un notaire français pour li-
quider le régime matrimonial, ce qui résulterait du dossier
mis à disposition des autorités cantonales. Cette argumenta-
tion, de nature appellatoire, ne peut être prise en compte
dans le présent recours de droit public (ATF 125 I 492 con-
sid. p. 495). En définitive, la recourante se contente d'af-
firmer que ses heures de travail ne pouvaient être réduites
pour le motif que 80% de son activité avait été de nature
extrajudiciaire. Elle n'explique cependant pas en quoi, ni a
fortiori ne démontre (art. 90 al. 1 let. b OJ), que l'estima-
tion effectuée par le Président du Tribunal cantonal serait
insoutenable dans son résultat (ATF 127 I 54 précité).
Autant
qu'il est recevable, le grief est dès lors mal fondé.

4.- En conclusion, le recours doit être rejeté dans
la mesure de sa recevabilité. La recourante, qui succombe,
supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours dans la mesure où il est rece-
vable.

2. Met à la charge de la recourante un émolument ju-
diciaire de 1'000 fr.

3. Communique le présent arrêt en copie à la recou-
rante et au Président du Tribunal cantonal du canton de
Vaud.

__________

Lausanne, le 4 mars 2002
MDO/frs

Au nom de la IIe Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE :
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.274/2001
Date de la décision : 04/03/2002
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-03-04;5p.274.2001 ?
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