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25/02/2002 | SUISSE | N°6S.729/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 février 2002, 6S.729/2001


«/2»
6S.729/2001/DXC

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
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25 février 2002

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président,
M. Karlen et M. Kolly, Juges. Greffière: Mme Kistler.
_________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

Les époux X.________, représentés par Me Vincent Spira,
avocat à Genève,

contre

l'ordonnance du 7 novembre 2001 de la Chambre d'accusa-
tion de la Cour de justice genevoise dans la cause qui<

br> oppose les recourants à A.________ et au Procureur
général du canton de G e n è v e;

(qualité de victime LAVI; ...

«/2»
6S.729/2001/DXC

C O U R D E C A S S A T I O N P E N A L E
********************************************

25 février 2002

Composition de la Cour: M. Schubarth, Président,
M. Karlen et M. Kolly, Juges. Greffière: Mme Kistler.
_________

Statuant sur le pourvoi en nullité
formé par

Les époux X.________, représentés par Me Vincent Spira,
avocat à Genève,

contre

l'ordonnance du 7 novembre 2001 de la Chambre d'accusa-
tion de la Cour de justice genevoise dans la cause qui
oppose les recourants à A.________ et au Procureur
général du canton de G e n è v e;

(qualité de victime LAVI; exposition)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Le Dr A.________, médecin à Genève, a prescrit,
du 21 janvier au 1er février 1999, un traitement antibio-
tique de Podomexef à Z.________, né le 7 mars 1997, qui
souffrait d'une otite moyenne de l'oreille droite. Le
3 février 1999, il a prescrit un autre antibiotique, à
savoir du Bactrim, vu que l'enfant avait fait une rechute
d'otite moyenne aiguë bilatérale. Le 12 février 1999, il
a ordonné la poursuite de ce traitement, dès lors qu'il
avait observé un écoulement nasal postérieur et voulait
éviter que le rhume de l'enfant ne provoque une rechute
de l'otite. Dans la nuit du 16 au 17 février 1999,
Z.________ est décédé au domicile de ses parents en
France voisine.

B.- Le 14 juillet 2000, les époux X.________, les
parents de Z.________, ont déposé une plainte pénale,
avec constitution de partie civile, à l'encontre du
Dr A.________ pour homicide par négligence.

Par ordonnance du 29 août 2001, le Procureur géné-
ral du canton de Genève a classé la procédure dirigée
contre le Dr A.________. Il ressort en effet d'une exper-
tise judiciaire confiée au Dr B.________, à Neuchâtel,
qu'il n'est pas possible de déterminer la cause du décès
de l'enfant Z.________, que les soins et traitements pro-
digués par le Dr A.________ étaient conformes aux règles
de l'art, que le Bactrim est reconnu comme un antibioti-
que de choix contre les otites moyennes aiguës, qu'il en-
gendre des anomalies sanguines dans moins, voire beaucoup

moins, de 0.003 à 0.5 % des patients traités et que l'im-
mense majorité des effets secondaires n'a pas de consé-
quences mortelles; dans tous les cas, des causes de décès
qui seraient directement imputables à un effet secondaire
du Bactrim n'ont pas été constatées à l'autopsie.

C.- Le 10 septembre 2001, les époux X.________ ont
recouru contre cette ordonnance auprès de la Chambre
d'accusation de la Cour de justice genevoise.

Ils admettaient que la prévention d'un homicide par
négligence n'était peut-être pas réalisée, dès lors que
les causes du décès ne pouvaient pas être déterminées se-
lon le rapport d'expertise neuchâtelois, le rapport d'au-
topsie français et l'audition des médecins français. Ils
soutenaient cependant que le Dr A.________ aurait dû être
inculpé du chef du crime d'exposition défini à l'art. 127
CP. Selon eux, les conséquences graves du Bactrim sur la
santé seraient en effet réelles et le Dr A.________ au-
rait exposé leur fils à un danger grave pour sa santé, en
lui administrant un traitement inadéquat de Bactrim et en
poursuivant ce traitement à titre prophylactique, cela
sans effectuer de contrôle sanguin. Ils prétendaient que
le rapport d'expertise, qui arrivait à la conclusion que
le traitement du Dr A.________ était conforme aux règles
de l'art, contenait des contradictions, sur plusieurs
points, au regard de la doctrine médicale et requéraient
en conséquence qu'une contre-expertise soit confiée à un
expert étranger, professant à l'étranger.

Statuant le 7 novembre 2001, la Chambre d'accusa-
tion a confirmé l'ordonnance du 29 août 2001 du procureur
général.

D.- Les époux X.________ se pourvoient en nullité
au Tribunal fédéral contre cette ordonnance. Ils
concluent à l'annulation de celle-ci, soutenant que la
prévention de crime d'exposition au sens de l'art. 127 CP
est réalisée.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis
(ATF 126 IV 107 consid. 1 p. 109).

a) En vertu de l'art. 270 let. e ch. 1 PPF, entré
en vigueur le 1er janvier 2001, seul le lésé qui est une
victime d'une infraction au sens de l'art. 2 LAVI peut
exercer un pourvoi en nullité pour autant qu'il soit déjà
partie à la procédure et dans la mesure où la sentence
touche ses prétentions civiles ou peut avoir des inciden-
ces sur le jugement de celles-ci.

Est une victime au sens de l'art. 2 al. 1 LAVI
toute personne qui a subi, du fait d'une infraction, une
atteinte directe à son intégrité corporelle, sexuelle ou
psychique. Le conjoint, les enfants, les père et mère
ainsi que d'autres personnes unies à la victime par des
liens analogues sont assimilés à celle-ci pour ce qui est
des droits dans la procédure dans la mesure où ces per-
sonnes peuvent faire valoir des prétentions civiles con-
tre l'auteur de l'infraction (art. 2 al. 2 let. b LAVI).

La LAVI exige que la victime ait subi, du fait de
l'infraction, une atteinte "directe". L'atteinte doit

être réalisée. Un simple risque de dommage ne suffit pas.
Dans le message, le Conseil fédéral explique ainsi que
"les infractions de mise en danger sont exclues du champ
d'application de la loi puisque, par définition, elles ne
comportent pas une atteinte à un bien juridique" (FF 1990
II 909 ss, 925). Le Tribunal fédéral a jugé, pour sa
part, que la personne blessée dans un accident de la cir-
culation était une victime au sens de l'art. 2 LAVI si
elle avait subi des lésions corporelles par négligence,
imputables aux autres personnes impliquées dans l'acci-
dent et non pas si elle n'invoquait qu'une simple viola-
tion des règles de la circulation ou une ivresse au vo-
lant (ATF 122 IV 71 consid. 3a p. 77).

La doctrine partage unanimement cette manière de
voir, précisant toutefois qu'une personne dont la vie a
été mise en danger, au sens de l'art. 129 CP, peut souf-
frir de troubles psychologiques en relation directe avec
l'acte du délinquant (Gomm/Stein/Zehnter, Kommentar zum
Opferhilfegesetz, Berne 1995, p. 44, n. 12; Corboz, Les
droits procéduraux découlant de la LAVI, dans: SJ 118
(1996), p. 53 ss, 58; Thomas Koller, Das Opferhilfege-
setz: Auswirkungen auf das Strassenverkehrsrecht, dans:
PJA 1996, p. 578 ss, 580 s.; Ulrich Weder, Das Opfer,
sein Schutz und seine Rechte im Strafverfahren, unter
besonderer Berücksichtigung des Kantons Zürich, dans: RPS
113 (1995), p. 39 ss, 41; Michel Ducrot, La qualité de
partie du lésé, en particulier sa qualité pour recourir
contre les prononcés rendus sur l'action publique, dans:
RVJ 1995 p. 333 ss, 339; Eva Weishaupt, Die verfahrens-
rechtlichen Bestimmungen des Opferhilfegesetzes (OHG),
Zurich 1998, p. 29, 36).

Il convient encore de préciser que l'atteinte ne
peut résulter d'une infraction commise sur autrui
(Corboz, op. cit., p. 57).

b) Pour déterminer si le recourant revêt la qualité
de victime avant le jugement, on doit se fonder sur les
allégués du lésé et sur la vraisemblance des actes et de
l'atteinte (ATF 126 IV 147 consid. 1 p. 149).

Les parents d'un enfant victime d'un homicide ou
d'une lésion corporelle grave peuvent invoquer l'art. 2
al. 2 LAVI. En l'espèce, les recourants ne se plaignent
cependant pas que le traitement prodigué par le
Dr A.________ aurait causé la mort de leur enfant ou même
des lésions corporelles. Ils admettent qu'une prévention
d'homicide par négligence ou de lésions corporelles n'est
pas réalisée, dès lors que les causes du décès n'ont pu
être déterminées.

Ils soutiennent que le Dr A.________ devrait être
inculpé du chef d'exposition au sens de l'art. 127 CP.
Cette disposition réprime le fait d'exposer une personne
à un danger de mort ou à un danger grave ou imminent pour
la santé. Il s'agit d'un délit de mise en danger, qui
sanctionne la création d'un danger, indépendamment de
toute lésion. Le Dr A.________ aurait seulement mis en
danger la vie et la santé de Z.________ en lui prescri-
vant du Bactrim et en ne faisant pas les analyses néces-
saires. On ne peut donc pas parler d'atteinte "directe" à
l'intégrité physique au sens de l'art. 2 al. 1 LAVI, et
Z.________ ne peut être considéré comme une victime selon
la LAVI. Ses parents n'ont en conséquence pas la qualité
pour agir en application de l'art. 270 let. e PPF et le
pourvoi est donc irrecevable.

2.- Succombant, les recourants doivent supporter
les frais judiciaires (art. 278 al. 1 PPF; art. 156 al. 1
OJ).

Il n'y a pas lieu d'allouer d'indemnité à l'intimé
qui n'a pas déposé de mémoire dans la procédure devant le
Tribunal fédéral.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Déclare le pourvoi irrecevable.

2. Met à la charge des recourants un émolument ju-
diciaire de 2'000 francs, solidairement entre eux.

3. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, au Procureur général du canton de
Genève et à la Chambre d'accusation de la Cour de justice
genevoise.
_________

Lausanne, le 25 février 2002

Au nom de la Cour de cassation pénale
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président, La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.729/2001
Date de la décision : 25/02/2002
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-02-25;6s.729.2001 ?
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