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19/02/2002 | SUISSE | N°C.219/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 février 2002, C.219/01


«AZA 7»
C 219/01 Tn

IIIe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Meyer et Kernen.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 19 février 2002

dans la cause

Service de l'emploi, première instance cantonale de recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lau-
sanne, recourant,

contre

P.________, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

A.- a) La caisse de chômage du syndicat industrie &
bâtiment (ci-après : la caiss

e SIB) a, par décision du
6 août 1998, réclamé à P.________ la restitution d'un
montant de 1903 fr. 70, correspondant à des prestat...

«AZA 7»
C 219/01 Tn

IIIe Chambre

MM. les juges Borella, Président, Meyer et Kernen.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 19 février 2002

dans la cause

Service de l'emploi, première instance cantonale de recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lau-
sanne, recourant,

contre

P.________, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

A.- a) La caisse de chômage du syndicat industrie &
bâtiment (ci-après : la caisse SIB) a, par décision du
6 août 1998, réclamé à P.________ la restitution d'un
montant de 1903 fr. 70, correspondant à des prestations
reçues indûment de l'assurance-chômage. La prénommée, invo-
quant sa bonne foi et sa situation financière précaire, a
demandé, le 18 août 1998, que l'obligation de restitution
du montant réclamé lui soit remise. Cette demande a été

transmise, le 21 août 1998, au Service de l'emploi du can-
ton de Vaud (ci-après : Service de l'emploi) comme objet de
sa compétence.

b) Par courrier du 16 octobre 2000, le Service de
l'emploi a adressé à l'assurée un questionnaire en la
priant de le lui renvoyer dans les trente jours, dûment
rempli et «accompagné, dans la mesure du possible, des
justificatifs requis». Sans réponse de P.________, le
Service de l'emploi lui a, le 12 décembre 2000, imparti un
délai de dix jours pour produire le questionnaire et les
pièces justificatives, en lui rappelant le devoir de
collaboration des assurés à l'instruction de la cause. Le
14 décembre 2000, le Service de l'emploi a accusé réception
dudit questionnaire, accompagné de la copie de la taxation
définitive pour la période fiscale 1999-2000, et a imparti
à l'assurée un nouveau délai de dix jours, sous peine
d'irrecevabilité de sa demande, pour lui transmettre
certains documents justificatifs manquants («déclaration
d'impôt, bail à loyer, fiches de salaires, etc.»). Le
8 janvier 2001, le Service de l'emploi a reçu le bail à
loyer et le certificat de salaire du mois d'octobre 2000 de
P.________.

c) Par décision du 11 janvier 2001, le Service de
l'emploi a «rejeté» la demande de remise de l'obligation de
restitution et «confirmé» la décision de la caisse SIB, au
motif que la requête de l'assurée était irrecevable.

B.- Le Tribunal administratif du canton de Vaud a, par
jugement du 25 juin 2001, admis le recours formé par
P.________ contre cette décision et renvoyé la cause au
Service de l'emploi pour qu'il statue à nouveau. Il a
considéré en substance que la décision d'irrecevabilité
n'était fondée sur aucune base légale.

C.- Le Service de l'emploi interjette recours de droit
administratif contre ce jugement, en concluant à son annu-

lation et à la confirmation de sa décision du 11 janvier
2001.
P.________ et le Secrétariat d'Etat à l'économie ont
renoncé à se déterminer sur le recours.

Considérant en droit :

1.- L'objet du présent litige se détermine d'après la
décision du 11 janvier 2001 rendue par le Service de l'em-
ploi. Nonobstant le dispositif de cette décision, il res-
sort clairement de ses motifs que le recourant n'est pas
entré en matière sur le fond du litige. Il y a donc lieu de
lever d'office cette contradiction et, à l'instar des pre-
miers juges, de comprendre la décision non pas de manière
littérale, mais conformément à sa signification juridique
concrète (cf. ATF 120 V 497 consid. 1a et les références),
à savoir comme une décision de non-entrée en matière. Seul
doit donc être examiné ici si c'est à juste titre que les
premiers juges ont annulé la décision d'irrecevabilité pri-
se par le recourant; on ne saurait en revanche se prononcer
sur le fond du litige (ATF 123 V 336 et les références),
soit sur le point de savoir si les conditions d'une remise
de l'obligation de restitution au sens de l'art. 95 al. 2
LACI sont remplies.

2.- a) L'instance cantonale de recours considère que
le recourant n'était pas en droit de déclarer la demande de
l'intimée irrecevable pour défaut de collaboration à l'ins-
truction, dès lors que le droit cantonal de procédure ne
prévoit pas une telle sanction. En revanche, le recourant
invoque l'art. 35 de la loi vaudoise sur la juridiction et
la procédure administrative du 18 décembre 1989 (RSVD 1.5
LJPA) pour justifier son prononcé d'irrecevabilité. L'ap-
plication du droit cantonal de procédure ne peut être revue
à l'occasion d'un recours de droit administratif que pour
violation du droit fédéral (art. 104 let. a OJ), y compris

le droit constitutionnel fédéral. Cela implique, pratique-
ment, que le Tribunal fédéral des assurances examine, non
pas librement, mais uniquement sous l'angle restreint de
l'arbitraire, l'interprétation et l'application du droit
cantonal (ATF 126 V 146 consid. 1b).

b) En dehors des exigences minimales prévues aux
art. 100, 103 al. 1 et 3, et 104 LACI, la procédure devant
les autorités cantonales chargées de l'application du
régime de l'assurance-chômage est soumise au droit cantonal
de procédure. Or, comme le relèvent les premiers juges, le
droit cantonal vaudois ne contient aucune disposition to-
pique permettant à une autorité de décision de première
instance de déclarer irrecevable la demande d'un administré
pour défaut ou manque de collaboration de sa part. En par-
ticulier, la loi vaudoise sur l'emploi et l'aide aux chô-
meurs du 25 septembre 1996 (RSVD 8.1 D) qui règle notamment
l'exécution de la LACI (art. 1 let. b) est muette sur ce
point. En outre, la référence que fait le recourant à
l'art. 35 LJPA n'est pas pertinente, dans la mesure où
cette norme s'applique à la procédure de recours contre les
décisions administratives. Cette disposition permet à
l'autorité de recours de déclarer un recours irrecevable
s'il ne satisfait pas aux exigences de forme posées par
l'art. 31 LJPA ou si les conclusions ou motifs indiqués ne
sont pas suffisamment clairs pour qu'elle puisse saisir les
intentions de l'auteur, lorsque celui-ci n'a pas régularisé
sa procédure dans le délai imparti. Cette règle relative
aux exigences de forme que doit respecter un recours ne
saurait être appliquée, même par analogie, à la demande
d'un assuré devant une autorité de décision de première
instance dans le cadre d'une procédure non contentieuse.
Par conséquent, on constate, avec les premiers juges,
que la décision du recourant n'était fondée sur aucune
disposition du droit de procédure cantonal.

3.- a) A défaut de base légale cantonale, le recourant
invoque, de manière subsidiaire, la violation du devoir
général de chaque assuré de collaborer à l'instruction de
la cause, découlant des principes généraux du droit admi-
nistratif.
Dans le domaine des assurances sociales notamment, la
procédure est régie par le principe inquisitoire, selon
lequel les faits pertinents de la cause doivent être cons-
tatés d'office par le juge. Mais ce principe n'est pas
absolu. Sa portée est restreinte par le devoir des parties
de collaborer à l'instruction de l'affaire (ATF 122 V 158
consid. 1a, 121 V 210 consid. 6c et les références). Celui-
ci comprend en particulier l'obligation des parties d'ap-
porter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement
exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du
litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent
de devoir supporter les conséquences de l'absence de preu-
ves (ATF 117 V 264 consid. 3b et les références).

b) Au regard de ce principe, on peut admettre, mais à
de strictes conditions, - soit lorsqu'une décision au fond
ne peut pas être prise au vu du dossier et que les faits ne
peuvent pas être élucidés sans difficulté et sans complica-
tions spéciales -, qu'une autorité, en application de
l'art. 13 PA par analogie, n'entre pas en matière sur la
demande de l'assuré lorsqu'il refuse ou omet de coopérer
(cf. Kieser, Das Verwaltungsverfahren in der Sozialversi-
cherung, no 220 ss., p. 180; voir aussi ATF 108 V 229 ss.).
Or, ces conditions ne sont pas remplies en l'espèce.
En effet, l'intimée n'a certes pas répondu à la pre-
mière demande du Service de l'emploi du 16 octobre 2000 de
lui renvoyer, dans un délai de trente jours, le question-
naire permettant d'établir sa situation financière. Toute-
fois, elle a immédiatement donné suite à l'injonction du
recourant du 12 décembre 2000, puisqu'elle a déposé le jour
même le questionnaire dûment rempli ainsi que la copie de
sa taxation pour l'impôt 2000. Par ailleurs, suite au cour-

rier du Service de l'emploi du 14 décembre 2000 lui récla-
mant certaines pièces justificatives («déclaration d'impôt,
bail à loyer, fiches de salaire, etc.»), l'intimée lui a
fait parvenir son bail à loyer ainsi que sa fiche de sa-
laire du mois d'octobre 2000.
Ainsi, même si le recourant estimait insuffisante la
collaboration de l'intimée à l'établissement des faits, on
ne voit pas en quoi ce manquement l'empêchait d'entrer en
matière sur l'affaire. En effet, il était en possession des
pièces versées à la procédure par l'assurée, ainsi que des
documents de la caisse SIB et de l'office régional de pla-
cement compétent. Il disposait dès lors de suffisamment
d'éléments pour statuer sur la cause en l'état du dossier,
l'intimée supportant alors les conséquences de l'absence de
certaines preuves.

4.- Dans ces conditions, le jugement entrepris n'est
pas critiquable, de sorte que le recours doit être rejeté.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal administratif du canton de Vaud et au Secréta-
riat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 19 février 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.219/01
Date de la décision : 19/02/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-02-19;c.219.01 ?
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