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15/02/2002 | SUISSE | N°H.307/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 février 2002, H.307/01


«AZA 7»
H 307/01 Mh

Ière Chambre

MM. les juges Schön, Président, Borella, Meyer, Ursprung et
Kernen. Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 15 février 2002

dans la cause

Z.________, recourant,

contre

Caisse suisse de compensation, avenue Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimée,

et

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les
personnes résidant à l'étranger, Lausanne

A.- Le 20 septembre 2000, Z.________ a demandé à la
Caisse suis

se de compensation (ci-après : la caisse) le
remboursement des cotisations versées à l'AVS au cours de
son activité lucrative en Suisse ...

«AZA 7»
H 307/01 Mh

Ière Chambre

MM. les juges Schön, Président, Borella, Meyer, Ursprung et
Kernen. Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 15 février 2002

dans la cause

Z.________, recourant,

contre

Caisse suisse de compensation, avenue Edmond-Vaucher 18,
1203 Genève, intimée,

et

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les
personnes résidant à l'étranger, Lausanne

A.- Le 20 septembre 2000, Z.________ a demandé à la
Caisse suisse de compensation (ci-après : la caisse) le
remboursement des cotisations versées à l'AVS au cours de
son activité lucrative en Suisse de 1982 à 1988.
Par décision du 15 mars 2001, la caisse a rejeté la
demande, motif pris d'un comportement indigne.

B.- Par jugement du 16 juillet 2001, la Commission
fédérale de recours en matière d'assurance-vieillesse,
survivants et invalidité pour les personnes résidant à
l'étranger (ci-après : la commission) a rejeté le recours
formé par l'intéressé contre cette décision.

C.- Z.________ interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il demande l'annulation, en
concluant au remboursement des cotisations.
La caisse conclut au rejet du recours; l'Office
fédéral des assurances sociales (OFAS) renonce à se
déterminer.

Considérant en droit :

1.- La caisse a refusé le remboursement des cotisa-
tions au motif que le recourant s'en était montré indigne
par son comportement personnel. La commission, de son côté,
a considéré que le remboursement ne pouvait intervenir vu
la mesure d'expulsion de dix ans du territoire suisse et la
condamnation à deux ans de réclusion pour infraction grave
à la LStup prononcées à l'encontre du recourant. A cet
égard, il ressort du dossier que Z.________ n'a pas fui du
territoire suisse pour se soustraire à sa condamnation,
mais a été expulsé à l'issue de l'exécution de sa peine.

2.- a) Selon l'art. 18 al. 3 LAVS (dans sa version en
vigueur depuis le 1er janvier 1997, applicable en l'espèce
par renvoi de la let. h, dernière phrase, des dispositions
finales de la modification du 7 octobre 1994 [10ème révi-
sion de l'AVS]), les cotisations payées conformément aux
articles 5, 6, 8, 10 ou 13 par des étrangers originaires
d'un État avec lequel aucune convention n'a été conclue
peuvent être, en cas de domicile à l'étranger, remboursées
à eux-mêmes ou à leurs survivants. Le Conseil fédéral règle
les détails, notamment l'étendue du remboursement.

Se fondant sur cette délégation, le Conseil fédéral a
édicté l'ordonnance sur le remboursement aux étrangers des
cotisations versées à l'assurance-vieillesse et survivants
du 29 novembre 1995 (OR-AVS; RS 831.131.12), entrée en
vigueur le 1er janvier 1997. L'art. 1er pose le principe
selon lequel le remboursement peut être demandé par un
étranger (avec le pays d'origine duquel aucune convention
n'a été conclue) si les cotisations ont été payées, au
total, pendant une année entière au moins et n'ouvrent pas
droit à une rente. Aux termes de l'art. 5 OR-AVS, le rem-
boursement des cotisations peut être refusé lorsqu'un
étranger n'a pas accompli ses devoirs à l'égard des
collectivités publiques.
Explicitant les «motifs d'exclusion (art. 5 OR)», le
chiffre 12 des directives préliminaires de l'OFAS à propos
du remboursement aux étrangers des cotisations versées à
l'AVS (DEA/Remb), valables dès le 1er janvier 1997,
précisent qu'on refusera le remboursement lorsque, par son
comportement personnel, l'ayant droit s'en est montré indi-
gne. Il y a lieu d'admettre que tel est le cas en cas d'ex-
pulsion du territoire suisse; lorsque l'ayant droit s'est
soustrait, par la fuite, à l'exécution d'une peine; en cas
de non paiement des impôts ou lorsque, intentionnellement
ou en commettant un crime ou un délit, l'ayant droit a
causé la mort de la personne tenue de verser les
cotisations.

b) Ces directives reprennent peu ou prou le chiffre 16
des instructions administratives en vigueur dès le 1er sep-
tembre 1985, élaborées sous l'empire des articles 18 al. 3
aLAVS et 4 aOR-AVS.
Ces dispositions prévoyaient que les cotisations
payées conformément aux art. 5, 6, 8 et 10 par des étran-

gers originaires d'un État avec lequel aucune convention
n'avait été conclue pouvaient, à titre exceptionnel et sous
réserve de réciprocité, être remboursées à eux-mêmes ou à
leurs survivants, à moins que ces cotisations n'ouvrissent
droit à une rente. Le Conseil fédéral devait fixer les
autres conditions mises au remboursement et l'étendue de
celui-ci (art. 18 al. 3 phrases 1 et 3 aLAVS). Le rembour-
sement pouvait être totalement ou partiellement refusé dans
les cas où il aurait été contraire à l'équité, lorsque
l'ayant droit s'en était montré indigne par son comporte-
ment personnel ou n'avait pas accompli ses devoirs à
l'égard des collectivités publiques (art. 4 aOR-AVS).

3.- a) A l'examen de l'ancien et du nouveau droit
(art. 18 al. 3 LAVS), le remboursement des cotisations a
été étendu aux cotisations payées par l'employeur, ne
nécessite plus la condition de réciprocité et a perdu tout
caractère exceptionnel. Le législateur a en fait consacré
le principe du droit au remboursement (Message concernant
la 10ème révision de l'AVS du 5 mars 1990, FF 1990 II 89,
60 et 61; Procès-verbal de la Commission du Conseil des
États du 22 octobre 1990, p. 26). En outre, la délégation
au Conseil fédéral, qui s'étendait aux autres conditions
mises au remboursement, a été ramenée aux détails.

b) Selon l'art. 5 OR-AVS, le remboursement des cotisa-
tions peut être refusé lorsqu'un étranger n'a pas accompli
ses devoirs à l'égard des collectivités publiques. Sous
l'ancien droit, la pratique administrative et la jurispru-
dence entendaient par là le comportement du ressortissant
étranger qui restait débiteur d'impôts dans notre pays (RCC
1972 p. 556 consid. 2a et arrêt cité; Felix Bendel,
Rückvergütung und Überweisung von AHV-Beiträgen, in : RSAS
1976 p. 120). Un tel comportement permet-il encore, à
l'heure

actuelle, de justifier le refus d'un remboursement ? La
question, qui ne se pose pas dans le cas d'espèce, peut
rester ouverte.
En revanche, la condamnation à une peine d'emprisonne-
ment ou de réclusion, ou le prononcé d'une mesure d'expul-
sion du territoire suisse, en eux-mêmes et pris en tant que
tels, n'apparaissent plus susceptibles de justifier le re-
fus du remboursement des cotisations. D'une part, l'art. 5
OR-AVS ne fait expressément mention ni de ces différentes
hypothèses, ni du terme générique de comportement personnel
indigne, sous lequel elles étaient regroupées précédemment
et sur lequel s'appuyaient de manière générale les instruc-
tions administratives valables dès le 1er septembre 1985.
En outre, il apparaît douteux que ces hypothèses puissent
être maintenant assimilées à la notion de non-accomplisse-
ment des devoirs envers des collectivités publiques, eu
égard au sens de cette expression au plan littéral tel que
l'ont consacré la pratique et la jurisprudence antérieures.
D'autre part, la délégation au Conseil fédéral, limitée au
règlement des détails (art. 18 al. 3, deuxième phrase,
LAVS), ne peut en aucun cas couvrir la mise en place de
conditions permettant de justifier le refus du
remboursement des cotisations qui n'auraient pas leur
fondement dans la loi. Or, à l'examen, on ne trouve pas
dans le droit actuel la mention d'une clause d'exclusion du
droit au remboursement en raison, toute générale et sans
autre précision, d'une condamnation pénale ou d'une mesure
d'expulsion.
En définitive, les directives préliminaires de l'OFAS,
en tant qu'elles consacrent de manière générale un refus du
remboursement des cotisations en raison d'une expulsion du
territoire suisse ou d'une condamnation à une peine d'em-
prisonnement ou de réclusion s'avèrent contraires à la loi.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement de la Commission
fédérale de recours en matière d'assurance-vieillesse,
survivants et invalidité pour les personnes résidant à
l'étranger du 16 juillet 2001, ainsi que la décision
de la Caisse suisse de compensation du 15 mars 2001
sont annulés; l'affaire est renvoyée à la caisse pour
qu'elle rende une nouvelle décision concernant le
droit du recourant au remboursement des cotisations.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
recourant par voie édictale, à la Commission fédérale
de recours en matière d'assurance-vieillesse, sur-
vivants et invalidité pour les personnes résidant à
l'étranger et à l'Office fédéral des assurances
sociales.

Lucerne, le 15 février 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la Ière Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.307/01
Date de la décision : 15/02/2002
Cour des assurances sociales

Analyses

Art. 18 al. 3 LAVS; art. 5 OR-AVS: Refus de remboursement aux étrangers des cotisations versées à l'assurance-vieillesse et survivants. - Les directives préliminaires de l'Office fédéral des assurances sociales à propos du remboursement aux étrangers des cotisations versées à l'AVS (DEA/Remb; ch. 12), valables dès le 1er janvier 1997, sont contraires à la loi en tant qu'elles consacrent de manière générale un refus du remboursement des cotisations en raison d'une expulsion du territoire suisse ou d'une condamnation à une peine d'emprisonnement ou de réclusion. - Question laissée ouverte: conformité de l'art. 5 OR-AVS à la loi, au regard de la délégation au Conseil fédéral (art. 18 al. 3, deuxième phrase, LAVS) qui se limite au règlement des détails?


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-02-15;h.307.01 ?
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