{T 0/2}
1A.36/2001/col
Arrêt du 29 janvier 2002
Ire Cour de droit public
Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Aeschlimann, Favre,
greffier Parmelin.
A.________, recourante, représentée par Me Jean-Christophe Diserens,
avocat,
Bel-Air-Métropole 1, case postale 2160, 1002 Lausanne,
contre
Département des infrastructures du canton de Vaud, Service des
améliorations
foncières, place du Nord 7, 1014 Lausanne,
Département des infrastructures du canton de Vaud, Service de
l'aménagement
du territoire, avenue de l'Université 3, 1014 Lausanne,
Tribunal administratif du canton de Vaud, avenue Eugène-Rambert 15,
1014
Lausanne.
refus de morcellement de la parcelle n° 74 sise sur le territoire de
la
Commune de Dully
(recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal
administratif du
canton de Vaud du 22 janvier 2001)
Faits:
A.
B. ________ était propriétaire de la parcelle n° 74 de la commune de
Dully,
au lieu-dit « Es Rechignards ». D'une surface totale de 9'813 mètres
carrés,
cette parcelle, en nature de vigne, était incorporée dans le
périmètre du
Syndicat d'améliorations foncières de Dully constitué le 7 mai 1954;
elle a
bénéficié des subsides fédéraux et cantonaux qui ont été alloués pour
ce
remaniement parcellaire. Elle était délimitée au sud-est par le
chemin du
Pré-aux-Moines et au nord-ouest par le chemin des Rechignards.
Dans sa séance du 7 février 1979, le Conseil d'Etat vaudois a
approuvé le
nouveau plan des zones communal de la Commune de Dully, qui colloque
la
partie nord de la parcelle n° 74 en zone de villas A et le solde de
celle-ci
en zone viticole.
Par décision du 5 mars 1980, le Service cantonal des améliorations
foncières
a délivré l'autorisation de fractionner la parcelle n° 74 sur une
surface de
1'570 mètres carrés classée en zone de villas A. Cette surface est
devenue la
parcelle n° 222 et est bâtie d'une villa. Par décision du 31 octobre
1980,
cette même autorité a accordé l'autorisation de fractionner la
parcelle n° 74
sur une surface supplémentaire de 3'200 mètres carrés, colloquée
partiellement en zone de villas A et partiellement en zone viticole,
et de
radier la mention « améliorations foncières » inscrite au registre
foncier le
24 janvier 1957. La surface détachée de la parcelle n° 74 est devenue
la
parcelle n° 225.
En 1982, les époux C.________ se sont successivement portés
acquéreurs des
parcelles nos 225 et 74. Ils ont érigé une villa de 186 mètres carrés
sur la
portion de la parcelle n° 225 classée en zone de villas A et aménagé
en aval
de cette construction un jardin d'agrément, délimité sur tout son
pourtour
par un muret en ciment surmonté d'un treillis et d'une haie de
thuyas, qui
empiète sur la parcelle n° 74, sur une surface de 641 mètres carrés.
Le solde
de ce bien-fonds accueille une vigne exploitée par D.________,
viticulteur-encaveur à Dully.
Le 7 mai 1994, E.________ a sollicité l'autorisation d'acquérir les
parcelles
nos 225 et 74. La Commission foncière rurale, section I, du canton de
Vaud
(ci-après: la Commission foncière rurale) a, par décision du 27 mai
1994,
refusé de donner suite à cette requête parce que l'acquisition en
cause
comprenait une vigne de 4'402 mètres carrés que le requérant
n'entendait pas
exploiter à titre personnel et qu'il n'établissait pas avoir tenté
sans
succès d'offrir sur le marché à une personne autorisée.
Par acte notarié du 1er juillet 1994, inscrit le 2 septembre 1994 au
registre
foncier, les époux C.________ ont vendu à E.________ la parcelle n°
225. Ce
dernier a constaté que le jardin d'agrément débordait sur la parcelle
n° 74
sur une bande de terrain d'environ quatorze mètres de largeur,
représentant
641 mètres carrés. Afin de corriger cette anomalie, les parties au
contrat
ont envisagé de réunir la surface en question à la parcelle n° 225
par un
fractionnement. A cette fin, E.________ a requis le 7 décembre 1994
de la
Commission foncière rurale l'autorisation d'acquérir par cession à
titre
gratuit 640 mètres carrés de la parcelle n° 74. Par prononcé du 20
janvier
1995, cette autorité a refusé d'accéder à cette requête au motif que
le
Service cantonal des améliorations foncières n'était pas disposé à
délivrer
une autorisation de fractionner et que E.________ n'était pas en
mesure
d'acquérir la totalité de la parcelle, car il n'était pas viticulteur.
B.
Aux termes d'un jugement rendu le 27 février 1997 en complètement du
jugement
de divorce des époux C.________, le Tribunal civil du district de
Rolle a
notamment ordonné au conservateur du registre foncier du district de
Rolle
d'inscrire C.________ comme seul et unique propriétaire de la
parcelle n° 74
de la commune de Dully. Celui-ci s'était remarié le 17 juin 1992 avec
A.________. Il est décédé le 13 janvier 1998, instituant sa nouvelle
épouse
comme seule et unique héritière de ses biens.
Le 13 décembre 1999, A.________ a requis l'autorisation de morceler la
surface de 641 mètres carrés constituant la partie nord de la
parcelle n° 74.
Elle entendait réunir cette surface à la parcelle n° 225 aux fins de
régler
le différend civil qui l'opposait à E.________ à la suite de la vente
de ce
bien-fonds.
Par décision du 21 janvier 2000, le Service cantonal des améliorations
foncières a refusé le morcellement sollicité en l'absence de justes
motifs au
sens des art. 102 al. 3 de la loi fédérale sur l'agriculture (LAgr;
RS 910.1)
et 112 al. 2 de la loi vaudoise sur les améliorations foncières, du 29
novembre 1961 (LAF). Le Tribunal administratif du canton de Vaud
(ci-après:
le Tribunal administratif ou la cour cantonale) a rejeté le recours
interjeté
contre cette décision par A.________ au terme d'un arrêt rendu le 22
janvier
2001; il a considéré en substance que la requérante ne pouvait se
prévaloir
ni du changement d'affectation de la surface en question en jardin
d'agrément, faute d'avoir requis et obtenu une autorisation
dérogatoire
fondée sur l'art. 24 de la loi fédérale sur l'aménagement du
territoire du 22
juin 1979 (aLAT), ni de la suppression de la mention « améliorations
foncières » au registre foncier, ni de la désignation de la surface
litigieuse comme « place-jardin »; il a en outre exclu l'éventualité
d'une
ratification tacite de cet état de fait par les services concernés
cantonaux;
il a enfin nié l'existence d'un motif important au sens des art. 102
al. 3
LAgr et 112 al. 2 LAF propre à justifier le fractionnement, l'intérêt
public
au maintien de l'état parcellaire issu du remaniement l'emportant sur
l'intérêt privé de la requérante et de E.________.
C.
Agissant par la voie du recours de droit administratif, A.________
demande au
Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt et de l'autoriser à procéder au
morcellement de la surface rectangulaire de 641 mètres carrés
constituant la
partie nord de la parcelle n° 74 sise sur la commune de Dully; elle
conclut
subsidiairement au renvoi de la cause au Tribunal administratif pour
nouvelle
décision dans le sens des considérants. Invoquant les art. 104 let. b
et 105
al. 2 OJ, elle reproche à la cour cantonale d'avoir constaté les faits
pertinents de manière inexacte ou incomplète et d'avoir violé des
règles
essentielles de la procédure en écartant sans motifs des éléments
décisifs
dans la pesée des intérêts en présence. Elle conteste en outre
l'application
de la procédure d'autorisation prévue à l'art. 24 aLAT au cas
d'espèce et
dénonce l'attitude incompatible avec la bonne foi des autorités
cantonales
compétentes qui ont toléré une situation non conforme au droit durant
plusieurs années. Elle prétend également que la réaffectation
viticole de la
surface litigieuse ne répondrait pas à un intérêt public prépondérant
et
serait disproportionnée. Elle considère enfin que la pesée des
intérêts en
présence penche en faveur de l'octroi de l'autorisation de morceler
requise à
l'art. 102 al. 1 LAgr.
Le Tribunal administratif et l'Office fédéral du développement
territorial
concluent au rejet du recours. Le Service de l'aménagement du
territoire du
canton de Vaud, agissant également au nom du Service cantonal des
améliorations foncières, propose de le rejeter dans la mesure où il
est
recevable.
A. ________ a répliqué.
Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
1.1 Le Tribunal administratif a fondé son arrêt sur les art. 102 LAgr
et 109
ss LAF. L'art 102 al. 1 LAgr prévoit une interdiction de morceler les
terrains ayant été compris dans le périmètre d'un remaniement
parcellaire.
L'art. 102 al. 3 LAgr autorise les cantons à accorder des dérogations
à cette
règle lorsque des motifs importants le justifient. L'art. 109 LAF
reprend sur
le plan cantonal l'interdiction générale de morceler résultant du
droit
fédéral, sans limite dans le temps et quelle que soit la surface des
parcelles à créer. L'art. 110 LAF prévoit une dérogation en faveur
d'immeubles non agricoles, s'il s'agit de terrains compris dans une
zone
réservée à la construction ou à l'industrie selon un plan
d'affectation prévu
par la loi sur l'aménagement du territoire et les constructions, ou
soustraite à l'application de la législation immobilière agricole,
ainsi que
de terrains en nature de place ou de jardin. L'art. 111 LAF instaure
en outre
une dérogation en faveur des biens-fonds agricoles, viticoles et
forestiers
qui n'ont pas bénéficié de subventions à titre d'améliorations
foncières.
L'art. 112 LAF permet enfin de déroger aux règles interdisant le
morcellement
du sol pour de justes motifs. Cette disposition ne précise en
revanche pas la
nature des justes motifs qui autoriseraient une exception à
l'interdiction de
morceler. De ce point de vue, le droit cantonal n'a pas de portée
propre par
rapport au droit fédéral qui admet l'octroi de dérogations pour des
motifs
importants. La question est en revanche plus délicate s'agissant de
l'art.
110 LAF, qui implique une dérogation légale à l'interdiction de
morceler
consacrée aux art. 102 al. 1 LAgr et 109 LAF, eu égard à la faculté
laissée
aux cantons d'accorder des dérogations à cette interdiction. La cour
cantonale a cependant laissé ouvert le point de savoir si cette
disposition
était applicable, car le droit fédéral imposait de toute manière
l'octroi
d'une autorisation de morcellement; la recourante ne soulève aucun
grief à ce
propos et ne prétend pas qu'il se justifierait de déroger à
l'interdiction de
morceler en application de l'art. 110 LAF. Dans ces conditions, seule
la voie
du recours de droit administratif est ouverte (cf. ATF 116 Ib 447
consid. 1
p. 449).
1.2 Dans ses observations, le Service cantonal de l'aménagement du
territoire
a mis en doute la qualité pour recourir de A.________, faute pour
celle-ci
d'avoir établi sa qualité de propriétaire de la parcelle n° 74 de la
commune
de Dully.
Selon un extrait du registre foncier du district de Rolle du 11
juillet 2000,
feu C.________ est toujours inscrit avec son ex-épouse comme
propriétaire de
cette parcelle alors même qu'il est décédé le 13 janvier 1998 et que
le
Tribunal civil du district de Rolle ordonnait au Conservateur du
registre
foncier de l'inscrire comme seul et unique propriétaire de la
parcelle n° 74,
au terme de son jugement en complètement de jugement de divorce rendu
le 27
février 1997. La recourante a en outre produit un extrait du
testament de son
défunt mari et un affidavit de l'exécuteur testamentaire passé devant
notaire
le 28 juin 1999, certifiant qu'elle est l'unique héritière des biens
de feu
C.________. Le Tribunal administratif a estimé que ces documents
suffisaient
pour établir la qualité pour agir de A.________ quand bien même elle
n'était
pas formellement inscrite au registre foncier en tant que
propriétaire de la
parcelle n° 74. Vu l'issue du recours, cette question peut rester
indécise.
1.3 Sous réserve des nouvelles pièces que la recourante a produites à
l'appui
de ses observations, après l'échéance du délai de recours, sans qu'un
second
échange d'écritures n'ait été ordonné, et qui sont de ce fait
irrecevables
(cf. ATF 109 Ib 246 consid. 3c p. 249/250; 99 Ib 87 consid. 1 p. 89),
les
conditions de recevabilité des art. 97 ss OJ sont réunies, de sorte
qu'il
convient d'entrer en matière sur le fond.
2.
La recourante se plaint à divers titres d'une constatation inexacte ou
incomplète des faits et d'une violation des règles essentielles de la
procédure. Ces griefs d'ordre formel sont en principe recevables en
vertu des
art. 104 al. 1 let. b et 105 al. 2 OJ et doivent être examinés en
premier
lieu dès lors que leur admission conduirait à l'annulation de l'arrêt
attaqué
sans qu'un examen du litige sur le fond soit nécessaire (ATF 124 V 90
consid.
2 p. 92).
2.1 Selon la recourante, la cour cantonale aurait tout d'abord retenu
à tort
que les ex-époux auraient pu s'apercevoir du fait qu'une partie du
jardin
d'agrément débordait sur la parcelle n° 74, à l'occasion de la
réinscription
au registre foncier d'une surface de 4'402 mètres carrés de ce
bien-fonds en
nature de vigne, intervenue en octobre 1993. Ils n'auraient en
réalité pas
été conscients que la configuration des lieux ne correspondait pas à
l'état
parcellaire lorsqu'ils ont aménagé leur jardin d'agrément et ils
n'auraient
eu connaissance de ce fait qu'après la conclusion du contrat
de vente
avec
E.________. La bonne ou la mauvaise foi des ex-époux C.________ est
dénuée de
toute pertinence pour apprécier l'existence d'un juste motif propre à
justifier l'octroi de l'autorisation de morceler sollicitée, mais
pourrait
tout au plus jouer un rôle dans le cadre d'une procédure éventuelle
de remise
en état des lieux. Supposée établie, une constatation inexacte des
faits sur
ce point ne conduirait dès lors pas à l'annulation de l'arrêt
attaqué, de
sorte que cette question peut demeurer indécise.
2.2 La recourante reproche ensuite au Tribunal administratif d'avoir
ignoré
les observations de E.________ selon lesquelles tous les travaux de
la vigne
se font depuis le chemin du Pré-aux-Moines, en aval de la parcelle n°
74, en
retenant que la réintégration en vigne de la surface concernée
permettrait au
chemin d'exploitation délimitant les parcelles voisines nos 284 et
289 de se
poursuivre en ligne droite sur la parcelle n° 74 et qu'elle
faciliterait
ainsi les conditions d'exploitation de la vigne par rapport à la
situation
existante. Si l'exploitant actuel n'utilise peut-être pas ce chemin
pour
effectuer les travaux de la vigne, cela ne signifie pas encore qu'un
autre
exploitant en ferait de même et que l'exploitation de la parcelle n°
74 ne
serait pas améliorée par un accès facilité en amont. La cour
cantonale n'a
donc pas procédé à une constatation incomplète des faits pertinents
en ne
relevant pas dans son arrêt les remarques de E.________ quant à la
manière
dont est actuellement exploitée la vigne et en examinant les effets du
morcellement sollicité sous un angle purement objectif.
2.3 A.________ conteste également la constatation du Tribunal
administratif
suivant laquelle le rétablissement de la vocation viticole de la
bande de
terrain litigieuse entraînerait relativement peu de frais pour les
intéressés. Une telle opération nécessiterait au contraire
l'arrachage d'une
haie de thuyas dotés de racines très profondes et résistantes et de
plusieurs
arbres fruitiers, l'enlèvement d'un muret en ciment et du treillis
qui le
surmonte, puis la réimplantation de ces aménagements quelque quatorze
mètres
en amont. La cour cantonale s'est toutefois bornée à prendre acte des
déclarations du Service cantonal de l'aménagement du territoire sur
ce point,
en réservant l'examen de cette question lors d'une procédure
ultérieure de
recours contre une éventuelle décision de remise en état des lieux.
On ne
discerne ainsi aucune constatation inexacte des faits à ce propos. Par
ailleurs, c'est à juste titre que le Tribunal administratif n'a pas
pris
position sur le coût d'une éventuelle remise en état des lieux, car
cet
élément n'est pas pertinent pour apprécier l'existence de justes
motifs à
l'octroi d'une autorisation de morceler, sauf à donner une prime à la
politique du fait accompli.
2.4 La recourante est d'avis que la cour cantonale aurait aussi
constaté les
faits pertinents de manière incomplète en admettant l'existence d'un
intérêt
public au maintien de parchets relativement étendus eu égard aux
mesures de
limitation de la production imposées aux vignerons et de
l'engorgement du
marché. Ce faisant, elle remet en cause le fondement même du
remaniement
parcellaire qui consiste à regrouper dans toute la mesure du possible
les
parcelles d'un même propriétaire afin d'en améliorer l'exploitation
(ATF 101
Ib 198 consid. 3a p. 200). Par ailleurs, l'évolution actuelle du
marché axée
sur une limitation quantitative de la production viticole
s'accompagne d'une
orientation vers l'amélioration de la qualité, laquelle exige
également des
surfaces importantes. Dans ces conditions, on ne saurait dire que
l'intérêt
public au maintien de parchets relativement étendus serait
anachronique ou
purement idéal. En ne tenant pas compte des problèmes de surproduction
rencontrés sur le marché viticole dans la pesée des intérêts en
présence, le
Tribunal administratif n'a pas méconnu des faits pertinents en
violation de
l'art. 104 let. b OJ.
2.5 La recourante prétend enfin qu'en omettant de prendre en
considération
sans le motiver les éléments précités dans la pesée des intérêts en
présence,
l'autorité intimée aurait violé les art. 53 et 54 al. 1 de la loi
vaudoise
sur la juridiction et la procédure administratives (LJPA) et, partant,
contrevenu à des règles essentielles de la procédure. Ce faisant,
elle perd
de vue que les faits constatés doivent être pertinents pour l'issue
de la
cause, ce qui n'est pas le cas de ceux mentionnés aux considérants
précédents. La cour cantonale n'a donc pas manqué à son devoir
d'établir les
faits d'office, tel qu'il résulte de l'art. 53 LJPA. De même,
l'obligation
faite aux autorités de motiver leurs décisions ne s'étend qu'aux
éléments
décisifs pour trancher le litige (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102). Il
n'en va
pas différemment dans le cadre de l'art. 54 al. 1 LJPA. Aussi, pour
les
raisons exposées ci-dessus, la cour cantonale n'a pas violé cette
dernière
disposition en n'évoquant pas dans l'arrêt attaqué les propos de
E.________
quant à la manière de travailler la vigne implantée sur la parcelle
n° 74 ou
les problèmes de surproduction rencontrés actuellement sur le marché
viticole.
3.
3.1Afin d'empêcher que les objectifs visés par les améliorations
foncières ne
soient mis en échec par des morcellements ultérieurs, l'art. 102 al.
1 LAgr
prévoit l'obligation d'obtenir une autorisation de l'autorité
cantonale
compétente pour fractionner à nouveau un bien-fonds qui a été compris
dans
une réunion parcellaire, autorisation qui est délivrée s'il existe de
justes
motifs (art. 102 al. 3 LAgr). L'interdiction de morceler a pour but de
prolonger aussi longtemps que possible l'effet recherché lors de
l'octroi des
subsides pour des entreprises d'améliorations foncières, c'est-à-dire
de
conserver les avantages résultant de ces opérations afin de maintenir
les
biens-fonds concernés à la disposition de leurs exploitants (cf.
Message du
Conseil fédéral du 19 janvier 1951 à l'appui d'un projet de loi sur
l'amélioration de l'agriculture et le maintien de la paysannerie, FF
1951 I
249). Selon l'art. 35 al. 6 de l'ordonnance fédérale sur les
améliorations
structurelles (OAS; RS 913.1), elle est illimitée.
Se fondant sur la doctrine (Josette Moullet Auberson, La division des
biens-fonds: conditions, procédure et effets en droit privé et en
droit
public, thèse Fribourg, 1993, p. 25; Adolf Pfenninger, Communications
de
droit agraire 1970, p. 98), le Tribunal administratif a estimé que
l'interdiction de morceler ne serait illimitée dans le temps que si
le fonds
considéré a conservé sa destination agricole; en revanche, dans le cas
contraire, il ne serait plus concerné par cette interdiction. Il n'y
a pas
lieu de se prononcer sur ce point. Une dérogation à l'interdiction de
morceler ne pourrait en effet tout au plus se concevoir pour ce motif
que si
le changement d'affectation avait fait l'objet d'une autorisation
exceptionnelle fondée sur l'art. 24 de la loi fédérale sur
l'aménagement du
territoire (cf. art. 36 let. b OAS) ou ne nécessitait pas une telle
autorisation, ce qui n'est pas le cas en l'occurrence, s'agissant de
l'aménagement d'un terrain planté en vigne, sis en zone viticole, en
un
jardin d'agrément entouré d'un muret en ciment surmonté d'un treillis
caché
par des thuyas (cf. ATF 119 Ib 222 consid. 3a p. 226/227; 118 Ib 49
consid.
2b p. 52/53; voir aussi l'arrêt non publié du 2 mai 2001 dans la cause
opposant le canton du Valais et la Commune de Vionnaz à Pro Natura, à
propos
de l'aménagement de mares et de rigoles pour abreuver le bétail). De
même, on
peut laisser ouverte la question de savoir si la requête de
morcellement
n'aurait pas dû déjà être refusée en application de la législation
fédérale
sur l'aménagement du territoire ou sur le droit foncier rural, comme
le
prétend l'Office fédéral du développement territorial, car elle doit
de toute
manière être rejetée au regard de l'art. 102 al. 3 LAgr.
Les motifs importants justifiant une dérogation à l'interdiction de
morceler
au sens de cette disposition ne sont définis ni dans la loi, ni dans
les
travaux préparatoires de l'actuelle ou de l'ancienne loi sur
l'agriculture
(cf. Message du Conseil fédéral du 19 janvier 1951 à l'appui d'un
projet de
loi sur l'amélioration de l'agriculture et le maintien de la
paysannerie, FF
1951 I 249 et 293; BO CN 1951 p. 126; Message du Conseil fédéral du
26 juin
1996 concernant la réforme de la politique agricole: Deuxième étape,
FF 1996
IV 250). En vertu de l'art. 36 OAS, sont notamment considérés comme
tels
l'assignation exécutoire à une zone à bâtir, une zone de protection
ou une
autre zone d'affectation non agricole (let. a), une autorisation de
construire exécutoire délivrée en vertu de l'art. 24 de la loi sur
l'aménagement du territoire (let. b), l'inutilité du point de vue de
l'agriculture, de la reconstruction de bâtiments et d'installations
détruits
par un incendie ou une catastrophe naturelle (let. c) et
l'utilisation pour
une construction de la Confédération, pour les chemins de fer
fédéraux ou
pour les routes nationales (let. d). Pour le surplus, l'art. 102 al.
3 LAgr
renvoie au droit cantonal pour la détermination des motifs
importants. A cet
égard, l'art. 112 al. 2 LAF se borne à subordonner l'octroi d'une
autorisation de morceler à des justes motifs, sans toutefois les
énumérer.
Aucune des hypothèses visées à l'art. 36 OAS n'est réalisée en
l'occurrence;
en particulier, le fait - au demeurant formellement contesté - que le
changement d'affectation aurait été toléré par les autorités
cantonales
concernées ne saurait pallier l'absence d'une autorisation
dérogatoire fondée
sur l'art. 24 LAT. L'existence de justes motifs est donc une question
d'appréciation qui doit être résolue en conformité avec le sens et le
but de
la loi, dans le respect du principe de l'égalité de traitement (ATF
88 I 213;
cf. Hans-Ulrich Huber, Das Verbot der Zerstückelung und
Zweckentfremdung von
melioriertem Grundeigentum, Revue mensuelle pour le droit
administratif et le
notariat du canton de Berne 1957, p. 161). L'autorité doit procéder à
une
pesée des intérêts en présence, soit entre l'intérêt public à voir la
répartition des biens-fonds maintenue telle qu'elle a été fixée lors
de la
réunion parcellaire et l'intérêt privé du propriétaire à effectuer une
nouvelle division. C'est seulement lorsque le second intérêt prévaut
que
l'existence d'un juste motif doit être admise et que l'autorisation
doit être
octroyée (cf. ATF 111 Ib 116 consid. 3c p. 121-124, concernant une
autorisation de désaffecter un terrain remanié avec l'aide des
subsides
fédéraux). Tel est le cas lorsque l'application stricte des règles
légales
entraîne des conséquences rigoureuses que le législateur n'a pas
voulues (cf.
ZBl 83/1982 p. 174). L'octroi cumulé d'autorisations exceptionnelles
ne doit
pas avoir pour effet de vider de sa substance la réglementation en
vigueur
(Moullet Auberson, op. cit., p. 23; Pfenninger, op. cit., p. 104). Le
Tribunal fédéral examine en principe librement la pesée des intérêts,
mais il
fait preuve de retenue s'agissant d'apprécier des circonstances
locales que
les autorités cantonales sont censées mieux connaître que lui (ATF
127 I 164
consid. 3c in fine p. 172; 125 II 29 consid. 3d/dd p. 39; 111 Ib 116
consid.
3c p. 122, concernant l'application de l'art. 85 al. 3 aLAgr).
3.2 En l'occurrence, le morcellement sollicité consacrerait une
atteinte
supplémentaire aux principes du remaniement parcellaire résultant de
la
collocation en zone de villas A d'une partie de la parcelle n° 74, de
l'attribution de cette surface à deux nouvelles parcelles (nos 222 et
225),
puis de l'aménagement en un jardin d'agrément d'une partie de ce
dernier
bien-fonds sise en zone viticole. Même si l'octroi de l'autorisation
de
morceler ne viderait pas totalement de sa substance les avantages
issus du
remaniement pour la parcelle n° 74, l'intérêt public à ne pas aggraver
l'atteinte qui lui a déjà été portée et à maintenir l'état
parcellaire tel
qu'il résulte du remaniement réalisé avec le financement des pouvoirs
publics
ne saurait être contesté. L'amélioration des dessertes constitue l'un
des
buts du remaniement parcellaire (RDAF 1984 p. 477 consid. 2d et les
références citées; cf. art. 60 LAF; voir aussi, ATF 98 Ia 43 consid.
3 p.
48). Or, les morcellements successifs de la parcelle n° 74 ont eu pour
conséquence de supprimer l'accès direct à la vigne depuis le chemin
des
Rechignards. Le Tribunal administratif a dès lors souligné à juste
titre les
nouvelles facilités d'exploitation que permettrait le retour de la
bande
litigieuse à son affectation viticole antérieure par le prolongement
en ligne
droite le chemin séparant les parcelles voisines nos 284 et 289. Pour
les
raisons évoquées au considérant 2.2, il importe peu que l'exploitant
actuel
effectue les travaux de la vigne depuis le chemin du Pré-aux-Moines,
en aval
de la parcelle n° 74. La cour cantonale n'a donc pas excédé son
pouvoir
d'appréciation en admettant que si le maintien de la parcelle dans sa
configuration initiale n'était pas de nature à augmenter la valeur
d'exploitation de celle-ci de manière considérable, il n'en restait
pas moins
que cette parcelle, non amputée de la surface litigieuse, présenterait
quelques avantages au plan de l'exploitation de la vigne par rapport
à la
situation actuelle.
Il existe par ailleurs un intérêt public important, mis en évidence
dans le
cadre de la réponse du Conseil d'Etat vaudois à l'interpellation
déposée par
le député Willy Baumgartner (cf. Bulletin des séances du Grand
Conseil du
canton de Vaud, décembre 1986, p. 875), à maintenir dans des
proportions
raisonnables l'utilisation de terres agricoles attenantes à une zone
à bâtir
comme jardin d'agrément ou comme surface de dégagement. Comme le
relève à
juste titre l'autorité intimée, le jardin d'agrément aménagé par les
ex-époux
C.________ présente des dimensions très importantes par rapport à la
surface
totale de la parcelle n° 225 et à la surface de la villa et ne
devrait pas
perdre beaucoup de son charme ou de sa valeur s'il était réduit sur
une bande
de quelque quatorze mètres de largeur, sur sa partie aval (cf. à
titre de
comparaison, l'art. 60 al. 1 let. d de la loi fédérale du 4 octobre
1991 sur
le droit foncier rural, qui autorise une exception à l'interdiction de
morcellement lorsque la partie à séparer sert à arrondir un immeuble
non
agricole sis en dehors de la zone à bâtir, pour autant que ce moyen
n'ait pas
déjà été utilisé et que l'agrandissement de l'immeuble non agricole
n'excède
pas 1'000 mètres carrés). De ce point de vue également, le refus de
morceler
ne relève pas d'un excès du pouvoir d'appréciation.
Il est vrai en revanche que la réunion de la surface litigieuse à la
parcelle
n° 225 permettrait de faire coïncider la situation réelle avec celle
qui
ressort au registre foncier et qu'elle permettrait de mettre fin au
litige
civil opposant la recourante à E.________; toutefois, ce litige est
essentiellement dû au fait que le jardin d'agrément a été réalisé
avant de
présenter la demande de morcellement. La prise en compte de cette
circonstance reviendrait à donner une prime injustifiée à celui qui
procède
d'abord à un changement d'affectation avant de solliciter une
autorisation de
morceler par rapport à celui qui présente une telle demande
préalablement à
tout travail. Il importe à cet égard peu que les parties à l'acte de
vente
aient été de bonne foi ou que cet état de fait ne soit pas imputable
à la
recourante, mais aux précédents propriétaires de la parcelle. En
requérant un
motif important, le législateur fédéral a entendu limiter l'octroi
d'une
autorisation exceptionnelle de morceler à des cas de rigueur (cf. ZBl
83/1982
p. 174 consid. 2 p. 175). Tel n'est pas le cas d'un morcellement
opéré en vue
de régler un litige successoral, alors même que le terrain
continuerait à
être exploité (cf. Pfenninger, op. cit., p. 105; voir également
l'arrêt non
publié du 12 novembre 1990 dans la cause S. contre Commission
centrale des
améliorations foncières du canton de Genève, consid. 2c). Il doit a
fortiori
en aller de même d'un morcellement destiné à régler un différend de
droit
civil. Aussi, en refusant de voir dans ces circonstances de justes
motifs de
morcellement au sens de l'art. 102 al. 3 LAgr, l'autorité intimée n'a
pas
violé le droit fédéral.
3.3 En définitive, le refus d'octroyer l'autorisation de morceler
requise par
la recourante ne résulte pas d'un abus du pouvoir d'appréciation des
autorités cantonales compétentes.
4.
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est
recevable, aux frais de la recourante qui succombe (art. 156 al. 1
OJ). Il
n'y a pas lieu à l'octroi de dépens (art. 159 al. 2 OJ).
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Un émolument judiciaire de 5'000 fr. est mis à la charge de la
recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la
recourante, au
Département des infrastructures et au Tribunal administratif du
canton de
Vaud, ainsi qu'à l'Office fédéral du développement territorial.
Lausanne, le 29 janvier 2002
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier: