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24/01/2002 | SUISSE | N°2P.256/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 24 janvier 2002, 2P.256/2001


«/2»

2P.256/2001

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

24 janvier 2002

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Yersin et Merkli. Greffière: Mme Dupraz.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

P.R.________, M.R.________ et S.R.________, tous les trois
représentés par Me Pierre Hack, avocat à Lausanne,

contre

la décision prise le 28 août 2001 par le Département de la


formation et de la jeunesse du canton de V a u d;

(art. 29 al. 2 Cst.: orientation scolaire)

Vu les pièces du ...

«/2»

2P.256/2001

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

24 janvier 2002

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
président, Yersin et Merkli. Greffière: Mme Dupraz.

__________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

P.R.________, M.R.________ et S.R.________, tous les trois
représentés par Me Pierre Hack, avocat à Lausanne,

contre

la décision prise le 28 août 2001 par le Département de la
formation et de la jeunesse du canton de V a u d;

(art. 29 al. 2 Cst.: orientation scolaire)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Né en 1989, S.R.________ a suivi les deux
classes secondaires du cycle de transition durant les années
scolaires 1999/2000 et 2000/2001 dans l'Etablissement sco-
laire de X.________ (ci-après: l'Etablissement).

Le Conseil de classe compétent pour statuer sur
l'évaluation de S.R.________ (ci-après: le Conseil de
classe) s'est prononcé le 30 janvier 2001 pour l'orientation
de l'intéressé vers la voie secondaire générale. Cette pre-
mière estimation a été suivie, le 13 février 2001, d'un en-
tretien auquel ont participé S.R.________ et ses parents.

Le 2 mai 2001, l'Etablissement a envoyé aux parents
de S.R.________ une proposition motivée d'orientation du
23 avril 2001 qui confirmait la première estimation et pré-
conisait la voie secondaire générale. Les parents de
S.R.________ ont contesté cette proposition le 11 mai 2001.
Le Conseil de classe a maintenu sa position. Le 13 juin
2001, les parents de S.R.________ ont transmis leur position
finale à l'Etablissement. Le 27 juin 2001, ils ont produit
un rapport médical datant du 16 juin 2001.

B.- Le 3 juillet 2001, la Conférence des maîtres de
l'Etablissement (ci-après: la Conférence des maîtres) a dé-
cidé d'orienter S.R.________ vers le 7e degré de la voie se-
condaire générale.

C.- P.R.________ et M.R.________, ainsi que leur
fils S.R.________ ont recouru contre la décision de la Con-
férence des maîtres du 3 juillet 2001 auprès du Département
de la formation et de la jeunesse du canton de Vaud (ci-
après: le Département) qui les a déboutés par décision du
28 août 2001.

D.- Agissant par la voie du recours de droit pu-
blic, P.R.________, M.R.________ et S.R.________ demandent
au Tribunal fédéral, sous suite de frais et dépens, d'annu-
ler la décision du Département du 28 août 2001. Les recou-
rants invoquent les art. 9, 11 al. 1, 19, 29 et 62 al. 2
Cst. En substance, ils reprochent à l'autorité intimée
d'avoir violé leur droit d'être entendus et commis des dénis
de justice formels. Ils se plaignent également d'arbitraire,
estimant que le système d'orientation prévu par le règlement
vaudois du 25 juin 1997 d'application de la loi scolaire du
12 juin 1984 (ci-après: le règlement) est inconstitutionnel.

Le Département conclut au rejet du recours et à la
confirmation de la décision entreprise. La Conférence des
maîtres n'a pas déposé de réponse dans le délai imparti.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Le Tribunal fédéral examine d'office et libre-
ment la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATF
127 I 92 consid. 1 p. 93).

a) Aux termes de l'art. 88 OJ, ont qualité pour
former un recours de droit public les particuliers ou les
collectivités lésés par des arrêtés ou décisions qui les
concernent personnellement ou qui sont d'une portée géné-
rale; cette voie de recours ne leur est ouverte que pour
qu'ils puissent faire valoir leurs intérêts juridiquement
protégés. Sont des intérêts personnels et juridiquement pro-
tégés ceux qui découlent d'une règle de droit fédéral ou
cantonal ou directement d'une garantie constitutionnelle
spécifique pour autant que les intérêts en cause relèvent du
domaine que couvre ce droit fondamental (ATF 126 I 81 con-
sid. 3b p. 85 et la jurisprudence citée). Au demeurant, les
recourants doivent avoir un intérêt actuel et pratique à
l'admission de leur recours, condition qui est remplie en

l'espèce puisque cela permettrait à S.R.________ - qui fré-
quente actuellement une école privée - de réintégrer l'école
publique, soit la voie normale et gratuite de la scolarisa-
tion obligatoire, dans une section lui offrant plus de pos-
sibilités d'avenir.

b) L'interdiction de l'arbitraire consacrée à
l'art. 9 Cst. constitue certes un droit fondamental mais, vu
son très large champ d'application, cette garantie ne peut
pas en elle-même fonder l'intérêt juridiquement protégé
qu'exige l'art. 88 OJ pour ouvrir la voie du recours de
droit public. La possibilité de se prévaloir de cette garan-
tie présuppose l'existence d'un droit de fond. Il faut en
particulier que les dispositions légales dont le recourant
invoque l'application arbitraire lui accordent un droit ou
servent à protéger ses intérêts prétendument lésés (ATF 126
I 81 consid. 3 à 6 p. 85 ss; 126 II 377 consid. 4 p. 388).

c) Le Tribunal fédéral s'est prononcé à plusieurs
reprises sur la qualité pour former un recours de droit pu-
blic à l'encontre de décisions refusant des promotions sco-
laires. Dans un arrêt concernant une affaire genevoise (ATF
105 Ia 318 consid. 2b p. 321) en particulier, il a reconnu
le droit du recourant - comme de tout adolescent fréquentant
le collège - à ce que la décision par laquelle on lui refuse
sa promotion dans une classe supérieure soit exempte d'arbi-
traire (cf. aussi RDAT 1997 II n° 16 p. 47 consid. 1b
p. 49).

d) Les recourants invoquent le caractère inconsti-
tutionnel et, par conséquent, arbitraire du système d'orien-
tation prévu par les art. 26e de la loi scolaire vaudoise du
12 juin 1984 (ci-après: la loi scolaire) et 28 ss du règle-
ment. Ils justifient leur qualité pour agir en soutenant que
la loi scolaire et le règlement donnent aux élèves, du moins
en principe, un droit à une évaluation correcte et motivée

de leurs prestations. Au regard de la jurisprudence rappelée
ci-dessus (lettre c), il y a lieu de reconnaître la qualité
pour recourir de S.R.________ et, par conséquent, de ses pa-
rents qui le représentent.

2.- Les recourants se plaignent de violations de
leur droit d'être entendus et de déni de justice formel. En
l'espèce, le dernier moyen se confond avec celui de viola-
tion du droit d'être entendu, qui est l'un des aspects de
l'interdiction du déni de justice formel (cf. le message du
Conseil fédéral du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle
Constitution fédérale, in FF 1997 I 1 ss, p. 183).

a) Le droit d'être entendu est de nature formelle,
de sorte que sa violation entraîne en principe l'annulation
de la décision entreprise sans qu'il soit même nécessaire de
vérifier si, au fond, la décision apparaît justifiée ou non
(ATF 121 I 230 consid. 2a p. 232; 120 Ib 379 consid. 3b
p. 383). En conséquence, il convient d'examiner en priorité
les griefs relatifs à ce droit.

b) Le contenu du droit d'être entendu est déterminé
en premier lieu par les dispositions cantonales de procé-
dure, dont le Tribunal fédéral ne contrôle l'application et
l'interprétation que sous l'angle de l'arbitraire; dans tous
les cas, l'autorité cantonale doit cependant observer les
garanties minimales déduites directement de l'art. 29 al. 2
Cst. (cf. l'art. 4 aCst.), dont le Tribunal fédéral examine
librement le respect (ATF 127 III 193 consid. 3 p. 194; 125
I 257 consid. 3a p. 259).

Les recourants n'invoquant pas la violation d'une
disposition cantonale relative au droit d'être entendu, les
griefs soulevés doivent être examinés exclusivement à la lu-
mière des principes déduits directement de l'art. 29 al. 2
Cst. (cf. l'art. 4 aCst.; ATF 125 I 257 consid. 3a p. 259).

Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par
l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. l'art. 4 aCst.), comprend le droit
pour l'intéressé de prendre connaissance du dossier, de
s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision
ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire
des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à
ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'admi-
nistration des preuves essentielles ou à tout le moins de
s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à
influer sur la décision à rendre (ATF 124 II 132 consid. 2b
p. 137 et la jurisprudence citée). Le droit de consulter le
dossier n'est pas absolu; son étendue doit être définie de
cas en cas, en tenant compte des intérêts en présence et de
toutes les circonstances du cas d'espèce. Il peut être res-
treint, voire supprimé, lorsque l'intérêt public ou l'inté-
rêt prépondérant de tiers exige que des documents soient te-
nus secrets, du moins partiellement. Une pièce dont la con-
sultation a été refusée à la partie ne peut être utilisée à
son désavantage que si l'autorité lui en a communiqué, ora-
lement ou par écrit, le contenu essentiel se rapportant à
l'affaire et lui a donné en outre l'occasion de s'exprimer
et de fournir des contre-preuves (ATF 126 I 7 consid. 2b
p. 10; 122 I 153 consid. 6a p. 161; cf. les art. 27 et 28
PA). Au surplus, la jurisprudence admet que le droit d'être
entendu n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'ins-
truction lorsque les preuves administrées lui ont permis de
former sa conviction et que, procédant d'une manière non ar-
bitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui
sont encore proposées, elle a la certitude qu'elles ne pour-
raient l'amener à modifier son opinion (ATF 124 I 208 con-
sid. 4a p. 211).

Le droit d'être entendu implique également pour
l'autorité l'obligation de motiver sa décision (ATF 126 I 97
consid. 2b p. 102). La motivation d'une décision est suffi-
sante lorsque l'intéressé est mis en mesure d'en apprécier

la portée et de la déférer à une instance supérieure en
pleine connaissance de cause (ATF 122 IV 8 consid. 2c p. 14/
15). Il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement
les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé son
prononcé, sans qu'elle soit tenue de répondre à tous les ar-
guments avancés (SJ 1994 p. 161 consid. 1b p. 163). L'éten-
due de l'obligation de motiver dépend de la complexité de la
cause à juger (ATF 111 Ia 2 consid. 4b p. 4).

3.- Les recourants reprochent au Département de
n'avoir pas motivé la décision entreprise et, par consé-
quent, d'avoir violé leur droit d'être entendus. Cette at-
teinte serait d'autant plus grave que, dans leur recours
cantonal, ils s'étaient déjà plaints du défaut de motivation
de la décision de la Conférence des maîtres du 3 juillet
2001.

a) D'après le dossier, la première estimation du
Conseil de classe a été discutée avec les intéressés le
13 février 2001. Puis, l'Etablissement a envoyé aux parents
de S.R.________ une proposition motivée d'orientation qu'ils
ont contestée le 11 mai 2001, en justifiant leur point de
vue. Le 7 juin 2001, l'Etablissement a fait savoir à
P.R.________ et M.R.________ que le Conseil de classe
maintenait sa proposition en se fondant sur les domaines de
référence cités à l'art. 28 al. 2 du règlement. Ce courrier
n'indiquait pas l'argumentation du Conseil de classe, en
particulier sur l'avis des parents de S.R.________. Invités
à transmettre leur position finale, ces derniers l'ont en-
voyée par lettre du 13 juin 2001. Dans cette écriture, ils
se sont d'abord plaints que les appréciations communiquées
en cours d'année, d'où ressortait à leur avis une progres-
sion constante de leur fils S.R.________, n'aient pas été
prises en compte. Puis, ils ont analysé les observations sur
les évaluations spécifiques par discipline qui correspon-
daient, selon eux, aux appréciations communiquées durant

l'année et les épreuves cantonales qu'ils considéraient éga-
lement comme bonnes. Ils en ont déduit que leur enfant au-
rait dû être orienté en voie secondaire de baccalauréat, en
se référant à l'art. 28 du règlement. Ils ont donc critiqué
la proposition d'orientation en voie secondaire générale,
estimant qu'elle se fondait uniquement sur les évaluations
globales du travail et du comportement, qui divergeaient de
façon incompréhensible et incohérente des évaluations spéci-
fiques par discipline. A leur avis, l'orientation litigieuse
reposait sur une appréciation purement subjective de la per-
sonnalité ou du caractère de leur fils S.R.________, plus
particulièrement sur son manque d'assurance, et elle allait
à l'encontre de la mission de l'école consistant à favoriser
le développement harmonieux de la personnalité de l'enfant.
Ils adressaient les mêmes critiques au tableau de synthèse
pour l'orientation. Invoquant l'arbitraire et l'inégalité de
traitement (par rapport à d'autres élèves se trouvant dans
la classe de leur enfant), ils ont conclu à l'orientation de
leur fils S.R.________ en voie secondaire de baccalauréat.

Le 3 juillet 2001, l'Etablissement a communiqué à
P.R.________ et M.R.________ la décision prise le jour même
par la Conférence des maîtres. Ladite décision, non motivée,
précisait que les parents de S.R.________ avaient pris con-
naissance des éléments qui la motivaient.

P.R.________, M.R.________ et S.R.________ ont re-
couru au Département contre la décision de la Conférence des
maîtres du 3 juillet 2001. Ils ont repris et complété l'ar-
gumentation contenue dans l'écriture susmentionnée du 13
juin 2001, en critiquant aussi comme tel le système d'orien-
tation prévu par le règlement; ils se sont alors plaints de
violation du droit d'être entendu, d'arbitraire et d'inéga-
lité de traitement, en invoquant les art. 8, 9 et 29 Cst.
ainsi que, par conséquent, les art. 11, 19 et 62 Cst. Ils
demandaient de pouvoir encore s'exprimer en particulier sur

les déterminations
de l'Etablissement, ce qui permettrait de
réparer l'absence de motivation qu'ils faisaient valoir. Ils
requéraient en outre la production des dossiers de quatre
élèves, à savoir de S.R.________ et de trois autres élèves
de sa classe. Dans la décision attaquée, l'autorité intimée,
qui a prétendu avoir procédé à un examen détaillé du dos-
sier, a rejeté le recours, en déclarant que la procédure
légale avait été entièrement respectée, notamment en ce qui
concernait l'information des intéressés, et que la décision
d'orientation en voie secondaire générale était conforme au
dossier et aux règles en vigueur. De plus, elle a écarté la
demande de production de dossiers d'autres élèves que
S.R.________ pour des raisons "évidentes" de protection des
données et de confidentialité. Au demeurant, le Département
n'a pas transmis aux intéressés les déterminations de l'Eta-
blissement du 23 juillet 2001.

b) Dans la décision entreprise qui est pour le
moins laconique, l'autorité intimée procède par affirmations
sans motiver sa position. En particulier, elle n'explique
pas pourquoi elle écarte l'argumentation contenue dans le
recours cantonal des intéressés. Cette absence de motivation
ne serait admissible que si la justification de la décision
attaquée résultait d'autres documents connus des intéressés,
étant entendu que le renvoi à des circulaires ne suffit pas.
En réalité, la décision de la Conférence des maîtres du
3 juillet 2001 souffre du même défaut de motivation que la
décision attaquée. En particulier, elle ne dit rien de l'ar-
gumentation développée par P.R.________ et M.R.________ dans
leur écriture précitée du 13 juin 2001 et elle ne saurait
donc suppléer aux carences de la décision entreprise. Le Dé-
partement fait certes valoir que les recourant connaissaient
les éléments fondant la décision prise le 3 juillet par la
Conférence des maîtres. Cependant, les éléments que les in-
téressés connaissaient ont été contestés par eux-mêmes le
11 mai 2001 puis, de façon plus détaillée et approfondie,

les 13 juin et 13 juillet 2001. Or, ni le Conseil de classe,
ni la Conférence des maîtres, ni le Département ne se sont
expressément prononcés sur la position des intéressés.
L'avis des recourants a été écarté sans aucune justifica-
tion. Pourtant, la dernière instance cantonale au moins au-
rait dû étayer sa position sur une motivation qui, même brè-
ve, devait répondre aux griefs soulevés. La décision atta-
quée souffre sur ce point d'un vice qu'aucune pièce du dos-
sier n'est à même de réparer. Cela suffit pour annuler la
décision entreprise.

c) Au surplus, rien n'autorisait le Département à
se soustraire à l'obligation de transmettre aux intéressés,
fût-ce à titre purement informatif, les déterminations de
l'Etablissement du 23 juillet 2001 sur leur recours canto-
nal.

4.- Les recourants reprochent à l'autorité intimée
de n'avoir pas donné suite à leur réquisition d'instruction
tendant à la production des dossiers de trois élèves de la
classe de S.R.________. Ils voient une violation de leur
droit d'être entendus dans le fait qu'ils n'ont pas pu con-
sulter l'ensemble du dossier de la cause. En revanche, ils
ne contestent pas avoir eu accès au dossier de S.R.________.

a) En matière d'orientation, les appréciations et
évaluations des autres élèves ne font en principe pas partie
du dossier à consulter, quand bien même on ne saurait nier
toute comparaison entre les élèves d'une même classe. Cepen-
dant, on doit faire une exception lorsque l'intéressé a
l'intention de se plaindre d'une inégalité de traitement et
qu'il est alors pratiquement obligé de prendre connaissance
des autres dossiers pour pouvoir motiver son grief de ma-
nière plus complète. Cette exception ne peut toutefois être
admise que de façon restrictive: il faut que le grief d'iné-
galité de traitement repose sur des faits concrets ou des

soupçons en rapport avec l'orientation litigieuse (cf., au
sujet de la jurisprudence rendue en matière d'examens, ATF
121 I 225 consid. 2c p. 228 et la critique de cette juris-
prudence parue in PJA 12/95 p. 1617 ch. 1.3). S'il ne paraît
dès lors pas exclu qu'un élève ait, de même que ses repré-
sentants, le droit de consulter les dossiers d'autres élèves
en vue d'établir une inégalité de traitement en sa défaveur,
il faut cependant qu'il rende vraisemblable un intérêt digne
de protection.

b) Les recourants ont demandé la production, en vue
de consultation, de trois dossiers précis, à savoir ceux de
O.________, H.________ et N.________, indiquant que ces
trois élèves avaient été orientés en voie secondaire de bac-
calauréat alors que leurs résultats étaient inférieurs à
ceux de S.R.________. Ils considéraient la production de ces
dossiers comme nécessaire, puisqu'ils se plaignaient d'iné-
galité de traitement par rapport aux trois élèves susmen-
tionnés - grief proche de l'arbitraire en l'espèce.

Dans la décision attaquée, le Département a écarté
cette réquisition d'instruction en invoquant des raisons de
protection des données et de confidentialité. En réalité, il
aurait dû examiner si les recourants avaient un intérêt di-
gne de protection à la consultation des trois dossiers en
question, au regard du grief d'inégalité de traitement
qu'ils soulevaient. S'il niait cet intérêt, il devait alors
motiver sa décision sur ce point. Dans le cas contraire, il
devait procéder à une pesée des intérêts en présence. Il de-
vait en particulier vérifier si l'intérêt des élèves concer-
nés à la protection de leur vie privée (par exemple, quant
aux détails de leur état de santé) s'opposait à la consulta-
tion de l'intégralité de leurs dossiers et rechercher, le
cas échéant, si une solution intermédiaire (par exemple, la
communication d'extraits des dossiers en question) pouvait
concilier les différents intérêts en cause. L'autorité inti-

mée a écarté la demande d'instruction des recourants par un
refus de principe, sans effectuer la démarche décrite ci-
dessus. Dans ces circonstances, elle a aussi violé le droit
d'être entendus des recourants en les empêchant globalement
et sans justification circonstanciée d'accéder aux dossiers
de O.________, H.________ et N.________. Dans ses observa-
tions sur le recours, le Département a certes fait valoir
que les dossiers en cause étaient sans influence sur la dé-
cision d'orientation de S.R.________. Il n'a toutefois pas
nié que les trois élèves en question avaient été orientés en
voie secondaire de baccalauréat en dépit de résultats infé-
rieurs à ceux de S.R.________ ni réfuté l'argument d'inéga-
lité de traitement qu'en déduisaient les recourants.

5.- Vu ce qui précède, le recours doit être admis
et la décision attaquée annulée.

Bien qu'il succombe, le canton de Vaud n'a pas à
supporter les frais judiciaires (art. 156 al. 2 OJ).

Les recourants ont droit à des dépens (art. 159
al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours et annule la décision prise le
28 août 2001 par le Département de la formation et de la
jeunesse du canton de Vaud.

2. Dit qu'il n'est pas perçu d'émolument judi-
ciaire.

3. Met à la charge du canton de Vaud une indemnité
de 2'000 fr. à verser aux recourants à titre de dépens.

4. Communique le présent arrêt en copie au manda-
taire des recourants, à la Conférence des maîtres de l'Eta-
blissement scolaire de X.________ et au Département de la
formation et de la jeunesse du canton de Vaud.

__________

Lausanne, le 24 janvier 2002
DAC/svc

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.256/2001
Date de la décision : 24/01/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-01-24;2p.256.2001 ?
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