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17/01/2002 | SUISSE | N°2P.272/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 17 janvier 2002, 2P.272/2000


«/2»
2P.272/2000
2A.525/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

17 janvier 2002

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger, Pré-
sident, Hungerbühler, Müller, Yersin et Merkli.
Greffier: M. Addy.
__________

Statuant sur le recours de droit administratif
et le recours de droit public
formés par

la société Grande Dixence SA, à Sion, représentée par
Me Xavier Oberson, avocat à Genève,

contre

l'a

rrêt rendu le 20 septembre 2000 par la Cour de droit pu-
blic du Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la cause
qui opp...

«/2»
2P.272/2000
2A.525/2000

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
**********************************************

17 janvier 2002

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger, Pré-
sident, Hungerbühler, Müller, Yersin et Merkli.
Greffier: M. Addy.
__________

Statuant sur le recours de droit administratif
et le recours de droit public
formés par

la société Grande Dixence SA, à Sion, représentée par
Me Xavier Oberson, avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 20 septembre 2000 par la Cour de droit pu-
blic du Tribunal cantonal du canton du Valais, dans la cause
qui oppose la recourante au Conseil d'Etat du canton du
Valais, représenté par Me Dominique Sierro, avocat à Sion;

(impôt spécial valaisan sur les forces hydrauliques:
légalité de l'impôt et droits acquis)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- La société Grande Dixence SA (ci-après: la So-
ciété) bénéficie de deux concessions octroyées par l'Etat du
Valais pour l'utilisation des eaux du Rhône provenant de la
Viège et de la Borgne; elle est également au bénéfice de con-
cessions délivrées par diverses communes valaisannes pour
l'exploitation des forces hydrauliques des eaux de la Viège,
de la Borgne et de la Fara. Certaines de ces concessions
avaient initialement été établies, en 1948, en faveur de la
société Energie de l'Ouest-Suisse SA (sur l'état actuel et
la
répartition de ces concessions, cf. Hans Wyer, Rechtsfragen
der Wasserkraftnutzung, thèse Berne 2000, Annexe II: Extrait
du Répertoire des concessions de forces hydrauliques valai-
sannes [état 1999], p. 34/35).

Le 3 décembre 1997, le Conseil d'Etat du canton du
Valais (ci-après: le Conseil d'Etat) a décidé que, pour l'an-
née civile 1997, le calcul de la redevance hydraulique et de
l'impôt spécial se ferait sur la base d'un taux maximum de
54 fr. par kilowatt théorique jusqu'au 30 avril 1997, et de
80 fr. par kilowatt théorique dès le 1er mai 1997. Ce
nouveau
taux faisait suite à une modification, intervenue le 1er mai
1997 (RO 1997 p. 991 ss, p. 998), de l'art. 49 al. 1 de la
loi fédérale du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des
forces
hydrauliques (ci-après: LFH ou loi fédérale; RS 721.80).

Le 31 janvier 1998, le Département de la santé, des
affaires sociales et de l'énergie du canton du Valais (ci-
après: le Département) a notifié à la Société trois
décisions
de taxation définitive qui fixaient l'impôt spécial sur les
forces hydrauliques de l'année civile 1997 pour les bassins
de la Viège, de la Borgne et de la Fara à hauteur de, res-
pectivement, ... fr., ... fr. et ... fr. Le 31 janvier 1999,

le Département a rendu deux nouvelles décisions de taxation
définitive arrêtant cet impôt, pour l'année civile 1998, à
... fr. pour les eaux de la Viège, et ... fr. pour les eaux
de la Borgne et de la Fara.

B.- La Société a formé réclamation contre les cinq
décisions précitées, en faisant valoir que, malgré la modi-
fication de la législation fédérale intervenue le 1er mai
1997, l'impôt spécial sur les forces hydrauliques devait con-
tinuer de se calculer selon l'ancien taux de 32 fr. 40 par
kilowatt théorique (correspondant à 60 pour cent du taux
maximum admis par la législation fédérale, qui était de
54 fr. jusqu'au 30 avril 1997). Elle soutenait en effet que
l'application du nouveau taux de 48 fr. par kilowatt théo-
rique (correspondant à 60 pour cent du taux maximum de 80
fr.
admis par la législation fédérale à partir du 1er mai 1997),
violait le principe de la légalité et portait atteinte à ses
droits acquis. Elle se réservait également le droit, selon
l'issue de discussions qui étaient en cours avec le Conseil
d'Etat, de contester l'existence même d'une base légale suf-
fisante permettant de prélever l'impôt spécial.

Par décision du 30 septembre 1999, le Département a
partiellement admis la réclamation élevée contre les trois
décisions de taxation du 31 janvier 1998, en ce sens que le
montant de l'impôt spécial concernant l'année civile 1997 a
été ramené à ... fr. pour les eaux de la Viège, ... fr. pour
les eaux de la Borgne et ... fr. pour les eaux de la Fara.
Ces nouveaux montants résultaient de l'application de l'an-
cien taux d'imposition (32 fr. 40) en lieu et place du nou-
veau taux (48 fr.) pour les quatre premiers mois de l'année
1997, avant l'entrée en vigueur de l'art. 49 al. 1 LFH le
1er
mai 1997 (application prorata temporis de l'ancien et du nou-
veau taux d'imposition). Pour le surplus, le Département a
considéré que la base légale permettant de prélever l'impôt

spécial était suffisante et que le nouveau taux d'imposition
ne portait nullement atteinte à des droits acquis de la ré-
clamante. Dans une décision séparée du même jour (30 septem-
bre 1999), il a rejeté la réclamation formée contre les deux
décisions de taxation du 31 janvier 1999 portant sur l'impôt
spécial de l'année civile 1998.

C.- Saisi par la Société de deux recours adminis-
tratifs contre les décisions prises par le Département le
30 septembre 1999, le Conseil d'Etat, avec l'accord de la
recourante, a transmis ces écritures, aux fins de jugement,
à
la Cour de droit public du Tribunal cantonal du canton du
Valais (ci-après: le Tribunal cantonal). Pour l'essentiel,
la
Société reprenait, en les développant, les motifs qu'elle
avait invoqués à l'appui de ses réclamations.

Après avoir prononcé la jonction des causes, le Tri-
bunal cantonal a rejeté les recours, dans un seul et même ar-
rêt du 20 septembre 2000. En bref, il a considéré que le ren-
voi, opéré par la législation cantonale, au taux maximum ad-
mis par la loi fédérale était un procédé admissible qui per-
mettait de déterminer aussi bien le taux que l'assiette de
l'impôt spécial, de sorte que le principe de la légalité
était respecté.

D.- La Société dépose au Tribunal fédéral un recours
de droit administratif (cause no 2A.525/2000) et un recours
de droit public (cause no 2P.272/2000) contre l'arrêt rendu
le 20 septembre 2000 par le Tribunal cantonal. Dans son re-
cours de droit administratif, elle conclut, sous suite de
frais et dépens, à l'annulation de l'arrêt attaqué et au ren-
voi du dossier au Département pour, s'il y a lieu, nouvelle
taxation. Aux termes de son recours de droit public, elle
conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué sous suite de
frais
et dépens. Elle se plaint de l'absence de base légale et de
l'arbitraire de l'impôt spécial qui lui est réclamé et invo-

que la force dérogatoire du droit cantonal (sic) ainsi que
la
violation de ses droits acquis, du principe de la bonne foi
et de la garantie de la propriété.

Le Tribunal cantonal a renoncé à se déterminer sur
les recours. De son côté, l'Etat du Valais conclut, sous
suite de frais et dépens, principalement à l'irrecevabilité
des recours et, à titre subsidiaire, à la confirmation de
l'arrêt attaqué. Interpellée au sujet du recours de droit ad-
ministratif, l'Administration fédérale des contributions a
estimé qu'elle n'était pas compétente pour s'exprimer au su-
jet de l'impôt spécial sur les forces hydrauliques.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- La recourante a déposé simultanément contre
l'arrêt entrepris deux recours, l'un de droit administratif,
l'autre de droit public. Par économie de procédure, il y a
lieu de prononcer la jonction des causes et de statuer sur
ces recours dans un seul et même arrêt (art. 24 PCF et 40
OJ).

Etant donné le caractère subsidiaire du recours de
droit public (art. 84 al. 2 OJ), les mérites du recours de
droit administratif doivent être examinés en priorité.

2.- a) Selon les art. 97 et 98 lettre g OJ, mis en
relation avec l'art. 5 PA, la voie du recours de droit admi-
nistratif est ouverte contre les décisions des autorités can-
tonales de dernière instance qui sont fondées sur le droit
public fédéral - ou qui auraient dû l'être -, pour autant
qu'aucune des exceptions prévues aux art. 99 à 102 OJ ou
dans
la législation spéciale ne soit réalisée (ATF 127 II 1 con-

sid. 2b/aa p. 3/4; 126 I 50 consid. 1 p. 52; 126 II 171 con-
sid. 1a p. 173, 300 consid. 1a p. 301/302; 125 I 10 con-
sid. 2a p. 13 et les arrêts cités). Le recours de droit admi-
nistratif est aussi recevable contre les décisions
cantonales
fondées à la fois sur le droit fédéral et sur le droit canto-
nal dans la mesure où la violation de dispositions du droit
fédéral directement applicables est en jeu (cf. art. 104
lettre a OJ; ATF 126 V 30 consid. 2 p. 31, 252 consid. 1a
p. 253/254; 125 II 10 consid. 2a p. 13; 124 II 409 con-
sid. 1d/dd p. 414/415, et les arrêts cités).

En revanche, c'est la voie du recours de droit pu-
blic qui est ouverte contre des décisions fondées sur le
droit cantonal autonome, ne présentant pas de rapport de con-
nexité suffisamment étroit avec l'application du droit
public
de la Confédération (ATF 127 II 198 consid. 2a p. 201 s.;
126
II 171 consid. 1a p. 173; 126 V 252 consid. 1a p. 253/254;
124 II 409 consid. 1d/dd p. 414; 123 II 359 consid. 1a/aa
p. 361; 121 II 72 consid. 1b p. 75). De simples règles de
principe ou des dispositions-cadres de droit public fédéral
qui, pour être applicables au cas d'espèce, nécessitent des
mesures d'exécution relevant du droit cantonal, ne consti-
tuent pas la base de la décision, de sorte que celle-ci ne
repose pas sur le droit fédéral. Si le droit cantonal indé-
pendant devait violer une règle de principe ou une disposi-
tion-cadre du droit public fédéral, seule serait ouverte la
voie du recours de droit public pour violation de la force
dérogatoire du droit fédéral (ATF 122 II 241 consid. 2a
p. 243 s.).

b) D'après l'art. 49 al. 1 et 2 LFH, les usines fai-
sant l'objet d'une concession et l'énergie qu'elles produi-
sent ne peuvent pas être grevées d'impôts spéciaux, sauf si
la législation cantonale fixe une redevance maximum infé-
rieure au taux admis par les prescriptions fédérales (ci-
après: le taux maximum); en ce cas, les cantons peuvent per-

cevoir, en sus de la redevance, un impôt spécial, pourvu que
les deux taxes réunies n'excèdent pas le taux maximum, de
54 fr. par kilowatt théorique jusqu'au 30 avril 1997, puis
de
80 fr. par kilowatt théorique à partir du 1er mai 1997 (cf.
RO 1997 p. 991 ss, p. 998). Hormis le taux maximum, la loi
fédérale ne contient aucune indication ou restriction concer-
nant l'impôt spécial ou la manière de le coordonner avec la
redevance.

Dans cette mesure, l'art. 49 LFH ne fait que fixer
le cadre (limite supérieure) dans lequel doit s'inscrire
l'impôt spécial. A l'intérieur de ce cadre, les cantons res-
tent donc pleinement libres d'aménager à leur guise cette
contribution; ils peuvent même renoncer à la prélever (cf.
Message du Conseil fédéral du 19 novembre 1975 relatif à une
modification de la loi fédérale sur l'utilisation des forces
hydrauliques, in: FF 1975 II p. 2140 ss, p. 2143). Au plan
valaisan, la loi du 28 mars 1990 sur l'utilisation des
forces
hydrauliques (ci-après: LFH/VS ou loi cantonale) prévoit à
son art. 71 al. 1 le prélèvement d'un impôt spécial sur les
forces hydrauliques égal à 60 pour cent du taux maximum
prévu
dans la loi fédérale.

Par conséquent, en tant qu'elles fixent l'impôt spé-
cial dû par la recourante pour les années civiles 1997 et
1998, les décisions de taxation litigieuses doivent être con-
sidérées comme exclusivement fondées sur le droit cantonal,
singulièrement l'art. 71 al. 1 LFH/VS. Seule la voie du re-
cours de droit public est dès lors ouverte, étant précisé
que
l'application du droit fédéral à titre de droit cantonal sup-
plétif - comme c'est le cas ici par le renvoi de l'art. 71
al. 1 LFH/VS au taux maximum prévu dans la loi fédérale -
n'est pas non plus propre à ouvrir la voie du recours de
droit administratif (cf. ATF 115 Ib 206 consid. 2 p. 207 et
les arrêts cités).

c) Certes la recourante fait valoir, dans son re-
cours de droit administratif, que le droit cantonal "empêche
une saine application du droit fédéral", parce que l'impôt
spécial tendrait à prendre, depuis plusieurs années déjà,
une
importance grandissante par rapport au taux maximum admis
par
la législation fédérale, et cela au détriment de la rede-
vance. Or, la recourante y voit une violation de l'art. 74
al. 3bis LFH, selon lequel "l'article 49, 1er alinéa est ap-
plicable dans la mesure où il ne porte pas atteinte à des
droits acquis". En réalité, l'argumentation de la recourante
revient à se plaindre d'une violation du principe de la
force
dérogatoire du droit fédéral (art. 49 al. 1 Cst.). Son grief
n'est donc recevable que dans le cadre d'un recours de droit
public (cf. supra lettre a in fine).

En outre, contrairement à ce que laisse implicite-
ment entendre la recourante, le présent litige n'a pas pour
objet une contestation, au sens de l'art. 71 al. 1 LFH,
entre
le concessionnaire et l'autorité concédante. Il porte seule-
ment sur la légalité et, le cas échéant, la mesure de
l'impôt
spécial qui est réclamé à la recourante, et non sur des pres-
tations ou conditions imposées au concessionnaire au sens de
l'art. 48 al. 1 LFH, telle que la redevance (cf. ATF 126 II
171 consid. 1 p. 173 s.). Que l'impôt spécial doive être con-
sidéré comme un véritable impôt ou comme un simple
supplément
de redevance est une question de fond, qui n'influe pas sur
la voie de droit à adopter (cf. infra consid. 10c, 10d).

d) Le recours de droit administratif est dès lors
irrecevable, sans qu'il soit nécessaire d'examiner s'il peut
être converti en recours de droit public, car les griefs
qu'il contient ont déjà été largement repris dans l'écriture

séparée envoyée le même jour et rédigée sous la forme d'un
recours de droit public.

3.- Déposé en temps utile contre une décision finale
prise en dernière instance cantonale sur la base du droit
cantonal (cf. supra consid. 2c), le recours de droit public
est, en principe, recevable au regard des art. 84 ss OJ.

a) En vertu de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ, l'acte
de recours doit, à peine d'irrecevabilité, contenir un
exposé
succinct des droits constitutionnels ou des principes juridi-
ques violés et préciser en quoi consiste la violation. Lors-
qu'il est saisi d'un recours de droit public, le Tribunal fé-
déral n'a donc pas à vérifier de lui-même si la décision en-
treprise est en tous points conforme au droit et à l'équité.
Il n'examine que les griefs d'ordre constitutionnel invoqués
et suffisamment motivés dans l'acte de recours (ATF 125 I 71
consid. 1c p. 76; 115 Ia 27 consid. 4a p. 30; 114 Ia 317 con-
sid. 2b p. 318).

Par ailleurs, sous réserve d'une atteinte grave à un
droit constitutionnel spécial, le Tribunal fédéral n'examine
que sous l'angle restreint de l'arbitraire l'interprétation
de la norme cantonale litigieuse, respectivement son applica-
tion par les autorités cantonales. En revanche, il examine
librement si la norme cantonale contestée est compatible
avec
le droit fédéral pertinent (ATF 126 I 76 consid. 1 p. 78 s.;
cf. Walter Kälin, Das Verfahren der staatsrechtlichen Be-
schwerde, 2ème éd., Berne 1994, p. 164 ss).

b) C'est à la lumière de ces principes que doivent
être appréciés les moyens soulevés par la recourante.

4.- a) Aux termes de l'art. 76 al. 4 Cst. - qui a
clarifié l'art. 24bis al. 3 aCst. sans y apporter de change-
ment matériel (cf. Message du Conseil fédéral du 20 novembre
1996 relatif à une nouvelle Constitution fédérale, in FF
1997
I 1, p. 254 ad art. 60 al. 4 du projet de nouvelle Cons-

titution; Hans Wyer, op. cit., p. 16) -, les cantons dispo-
sent des ressources en eau et peuvent prélever, dans les li-
mites prévues par la législation fédérale, une taxe pour
leur
utilisation.

Les limites que doit prévoir la législation fédé-
rale, selon la disposition constitutionnelle précitée, sont
fixées à l'art. 49 LFH, dont la teneur est la suivante:

"1La redevance hydraulique annuelle ne peut excéder
80 francs par kilowatt théorique (...).

2Les usines faisant l'objet d'une concession et
l'énergie qu'elles produisent ne peuvent être gre-
vées d'impôts spéciaux. Toutefois, si la législa-
tion cantonale fixe une redevance maximum infé-
rieure au taux admis par les prescriptions fédéra-
les, le canton peut percevoir un impôt spécial,
pourvu que les deux taxes réunies n'excèdent pas ce
taux.

3 (...)

4 (...)".

b) Le prélèvement de la redevance et de l'impôt spé-
cial font l'objet, dans la loi cantonale, de deux chapitres
distincts (respectivement des chapitres 2 et 3).

aa) Intitulé "Des concessions des forces hydrauli-
ques", le chapitre 2 de la loi cantonale traite notamment,
sous la lettre D, des "taxes et redevances" (art. 63 ss
LFH/VS).

Ainsi, l'art. 63 LFH/VS pose le principe d'une "taxe
initiale" que doit payer le concessionnaire au concédant
pour
tout octroi, renouvellement ou transfert de concession de
droits d'eau, tandis que l'art. 64 LFH/VS met à la charge du
concessionnaire un "émolument" en faveur de l'Etat dans un
certain nombre de situations proches de celles décrites à
l'art. 63 (notamment en cas d'octroi, de modification, de re-

nouvellement ou de transfert d'une concession de forces hy-
drauliques cantonales ou communales). Quant aux art. 65 et
66
LFH/VS, ils fixent le principe et les modalités de calcul de
la redevance de la manière suivante:

"Art. 65 Redevance

1Dès le moment où le premier groupe commence à pro-
duire régulièrement du courant, le concessionnaire
est tenu de verser à la communauté qui dispose de
la force la redevance pour le droit d'eau concédé,
redevance calculée d'après la puissance théorique
et payable pour chaque année à la fin janvier de
l'année suivante.

2Aussi longtemps que le prix de la matière première
force hydraulique n'est pas déterminé selon le mar-
ché libre, la redevance correspond au plus à 40% du
montant maximum tel que fixé par la loi fédérale
sur l'utilisation des forces hydrauliques et dans
la mesure où la concession de droit d'eau n'a pas
expressément prévu un montant inférieur. Si la re-
devance maximum selon le droit fédéral est modi-
fiée, le maximum de la redevance appliqué dans le
canton subira une modification proportionnelle.

3 (...)

Art. 66 Calcul de la puissance théorique

1Fait règle pour le calcul de la redevance hydrau-
lique la puissance théorique moyenne, calculée
d'après la hauteur de chute et le débit utilisa-
bles.

2La hauteur de chute utilisable correspond à la
différence de niveau dans le cours d'eau naturel
entre la prise d'eau et le point de restitution.

3Est considérée comme débit utilisable la quantité
d'eau disponible en vertu de la concession de
droits d'eau pour autant que celle-ci ne dépasse
pas la capacité d'absorption des installations au-
torisées.

4Si la détermination de la puissance théorique
moyenne rencontre des difficultés d'ordre technique
particulières, celle-ci peut être calculée sur la
base de l'énergie produite, compte tenu de la hau-
teur de chute et du débit disponible non utilisés.
Le département décide dans quels cas ce mode de

calcul peut être adopté et ordonne au besoin les
mesures nécessaires. Il tient à la disposition des
communes toutes les données techniques nécessaires
et les assiste de ses conseils pour le calcul de la
redevance.

5 (...)"

bb) L'impôt spécial fait, quant à lui, l'objet du
chapitre 3 de la loi cantonale, qui comprend les art. 71 à
74
LFH/VS.

L'art. 71 LFH/VS dispose notamment ceci:

"1Le canton perçoit de toute entreprise utilisant
des forces hydrauliques, dès la mise en service de
l'usine, un impôt spécial sur les forces hydrauli-
ques égal à 60% du taux maximum prévu dans la loi
fédérale sur l'utilisation des forces hydrauli-
ques.

2Le 15% de l'impôt spécial brut revenant au canton
est versé chaque année dans un fonds de financement
destiné à l'augmentation du capital social des For-
ces motrices valaisannes (FMV). Ce fonds est à dis-
position du canton et des communes qui pourront
l'utiliser proportionnellement à leurs droits dans
la société organisée selon la présente loi.

3Ce fonds de financement est exempté de tous impôts
et est géré par le département compétent.

4 (...)

5Le Conseil d'Etat peut, sur demande, réduire pour
une durée indéterminée l'impôt spécial sur l'éner-
gie produite dans le canton, si cette énergie est
consommée par des exploitations économiquement im-
portantes installées dans le canton et que celles-
ci en tirent profit directement.

6 (...)"

Les art. 72 et 73 LFH/VS règlent des questions par-
ticulières (répartition de l'indemnité versée par la Confédé-
ration pour perte d'impôts et calcul de l'impôt spécial en
cas de modernisation des installations) alors que l'art. 74
LFH/VS délègue au Conseil d'Etat la compétence d'édicter
dans

un règlement d'exécution les dispositions concernant notam-
ment les modalités du calcul et de la perception des redevan-
ces et de l'impôt spécial sur les forces hydrauliques.

5.- La recourante fait valoir que l'art. 71 LFH/VS
ne constitue pas une base légale suffisante pour la percep-
tion d'un impôt spécial sur les forces hydrauliques.

a) En matière de contributions publiques, le prin-
cipe de la légalité est un droit constitutionnel indépendant
dont la violation peut être directement invoquée dans un re-
cours de droit public (cf. dans ce sens, en rapport avec
l'art. 4 aCst., ATF 126 I 180 consid. 2a/aa p. 182). Il est
concrétisé par l'art. 127 al. 1 Cst. qui prévoit que la qua-
lité de contribuable, l'objet de l'impôt et son mode de cal-
cul sont définis par la loi. Cette disposition reprend la ju-
risprudence rendue sous l'empire de l'ancienne Constitution
fédérale et vaut aussi bien pour les impôts fédéraux que can-
tonaux (cf. Message du Conseil fédéral du 20 novembre 1996
relatif à une nouvelle Constitution fédérale, FF 1997 I p. 1
ss, p. 351 s.).

Le principe de la légalité, qui vise notamment à
protéger l'administré contre tout comportement arbitraire de
l'Etat, s'applique de façon générale à toutes les contribu-
tions publiques, mais avec des nuances visant à tenir compte
de la nature spécifique de certaines contributions. Ainsi,
il
peut notamment être assoupli lorsque d'autres principes rem-
plissent également une fonction protectrice, tels ceux de la
couverture des frais et de l'équivalence qui permettent,
dans
une certaine mesure, de contrôler le montant de la contribu-
tion (cf. ATF 126 I 180 consid. 3a p. 188). Ces principes ne
sauraient toutefois remplacer complètement et entièrement
l'exigence d'une base légale formelle (cf. ATF 125 I 173 con-
sid. 9c p. 180).

b) Dans le cas particulier, l'impôt spécial est des-
tiné, pour une petite part seulement, à alimenter des fonds
spéciaux (cf. art. 70 al. 1 et art. 71 al. 2 LFH/VS), sans
toutefois qu'on puisse dire que ceux-ci servent directement
les intérêts des entreprises qui y sont assujetties (sur les
buts de ces fonds, cf. art. 70 al. 2 et 89 LFH/VS). La con-
tribution en cause ne saurait donc être qualifiée de charge
de préférence (sur cette notion, cf. ATF 122 I 305 consid.
4b
p. 309 s.). Au demeurant, dans sa plus grande part, il faut
admettre - en l'absence d'indications contraires - que l'im-
pôt spécial sert au financement des dépenses générales du
canton. Il doit par conséquent reposer sur une base légale
formelle possédant la densité normative requise pour les im-
pôts au sens strict du terme (cf. ATF 125 I 182 consid. 4a
p. 193; 124 I 11 consid. 6a p. 19).

6.- a) Selon la recourante, la loi cantonale ne dé-
finit pas l'objet de l'impôt spécial, le renvoi de l'art. 71
al. 1 LFH/VS à la législation fédérale ne permettant pas de
remédier à cette insuffisance. Elle considère en effet que
ce
point devrait être réglé directement dans la loi cantonale
elle-même, la possibilité de déterminer l'objet de l'impôt
par le recours à une interprétation systématique de la loi
n'étant pas, à ses yeux, en accord avec les exigences qui dé-
coulent du principe de la légalité. Par ailleurs, en ce qui
concerne l'assiette de l'impôt spécial, l'art. 71 al. 1
LFH/VS ne comporterait pas réellement de renvoi au droit fé-
déral, le texte de la disposition précitée étant "muet à ce
sujet". Un tel renvoi ne serait d'ailleurs pas suffisamment
clair pour être pris en considération, car la loi fédérale
ne
définit nullement l'assiette de l'impôt spécial, mais seule-
ment celle de la redevance (cf. art. 51 LFH). Enfin, la re-
courante souligne que la législation fédérale ne pose qu'une
seule limite, à savoir que, cumulés, redevance et impôt spé-
cial ne doivent pas dépasser le taux maximum fixé à l'art.
49
al. 1 LFH. L'application de l'art. 71 LFH/VS conduirait
ainsi

à "un résultat absurde qui débouche en réalité sur un renvoi
circulaire", allant de la législation cantonale à la législa-
tion fédérale pour fixer le taux d'imposition, puis de la lé-
gislation fédérale à la législation cantonale pour
déterminer
les bases de calcul applicables.

b) Il est vrai que, considéré isolément, l'art. 71
al. 1 LFH/VS ne permet pas de déterminer précisément l'objet
de l'impôt spécial et la manière de le calculer. Toutefois,
en prévoyant que cet impôt "est égal à 60 pour cent du taux
maximum prévu dans la loi fédérale sur l'utilisation des for-
ces hydrauliques", la disposition précitée renvoie
clairement
au montant maximum prévu à l'art. 49 al. 1 LFH, soit 80 fr.
par kilowatt théorique (54 fr. jusqu'au 30 avril 1997). Avec
l'autorité intimée, il faut donc convenir que ce renvoi per-
met aisément de déterminer tant l'objet de l'impôt spécial
(les kilowatts théoriques) que son taux (48 fr. par kilowatt
théorique, soit les 60 pour cent du taux maximum admis par
la
loi fédérale). Que seule soit définie dans la loi fédérale
la
manière de calculer la redevance (cf. art. 51 LFH), mais non
celle de calculer l'impôt spécial, n'est d'aucun secours à
la
recourante. En effet, le législateur cantonal a manifesté de
manière reconnaissable son intention, par le renvoi à la lé-
gislation fédérale, d'établir un impôt spécial qui reprenne
l'objet et les bases de calcul applicables à la redevance,
tant il serait contraire à toute logique que le taux d'impo-
sition prévu à l'art. 71 al. 1 LFH/VS, qui est égal à 60
pour
cent du montant - exprimé en kilowatt théorique - fixé à
l'art. 49 al. 1 LFH, soit finalement destiné à taxer autre
chose que des kilowatts théoriques.

c) Certes, on peut se demander si le droit cantonal
peut valablement, par le simple jeu d'un renvoi, laisser au
droit fédéral le soin de définir l'objet et l'assiette d'un
impôt cantonal. Cette question peut toutefois rester ouverte.

Il apparaît en effet que, dans le cas particulier,
la loi cantonale décrit de manière claire et précise les con-
tours de la redevance hydraulique, en prévoyant que c'est la
puissance théorique moyenne, calculée d'après la hauteur de
chute et le débit utilisables, qui fait généralement règle
pour le calcul de cette contribution (cf. art. 65 al. 1 et
66
al. 1 LFH/VS), sauf difficultés d'ordre technique particuliè-
res (cf. art. 66 al. 4 LFH/VS). Or, le renvoi à la loi fédé-
rale qui, s'agissant de la redevance,
procède de l'art. 65
al. 2 LFH/VS, est formulé de manière tout à fait comparable
à
celui que consacre l'art. 71 al. 1 LFH/VS pour déterminer le
taux de l'impôt spécial. Il existe donc, dans la loi canto-
nale, une évidente symétrie entre la redevance et l'impôt
spécial en ce qui concerne l'objet et l'assiette de ces con-
tributions. Cette symétrie est encore soulignée par la com-
plémentarité que présentent les taux d'imposition
applicables
à chacune des contributions en cause, soit respectivement 60
et 40 pour cent (au plus) du montant maximum fixé à l'art.
49
al. 1 LFH. Ces similitudes témoignent clairement de la volon-
té du législateur cantonal de voir appliquer à l'impôt spé-
cial les mêmes bases d'imposition qu'à la redevance, à
savoir
la puissance théorique moyenne calculée selon la hauteur de
chute et le débit utilisables. Cette volonté a d'ailleurs
été
explicitée à l'art. 13 du règlement valaisan du 4 juillet
1990 concernant l'exécution de la loi du 28 mars 1990 sur
l'utilisation des forces hydrauliques (ci-après: RLFH/VS ou
le règlement cantonal).

Il s'ensuit que, bien que la disposition formelle de
droit cantonal instituant l'impôt spécial (art. 71 LFH/VS)
ne
définisse pas elle-même directement l'objet et l'assiette de
cette contribution, l'un et l'autre de ces paramètres se
laissent facilement déduire d'autres dispositions du texte
même de la loi cantonale (soit les art. 65 ss LFH/VS
relatifs
à la redevance), sans que celui-ci ne puisse donner lieu à
aucune autre interprétation, ce qui satisfait à l'exigence

d'une base légale formelle (cf. ATF 109 Ib 308 consid. 6b
p. 316).

d) L'analyse historique que propose la recourante ne
permet pas d'aboutir à une autre conclusion.

Certes, il est exact qu'avant l'entrée en vigueur de
la loi valaisanne du 5 février 1957 sur l'utilisation des
forces hydrauliques (ci-après: la loi cantonale de 1957),
l'impôt spécial ne se calculait pas, comme aujourd'hui, sur
la base d'une puissance théorique (kilowatt théorique), mais
sur la base de l'énergie qui était effectivement produite
(cf. art. 1er de la loi valaisanne du 25 mai 1923 concernant
l'établissement d'un impôt sur les forces hydrauliques; cf.
art. 3 de la loi valaisanne du 15 novembre 1946, modifiée le
13 novembre 1953, concernant les redevances et l'impôt spé-
cial sur les forces hydrauliques [ci-après: la loi cantonale
de 1946]). Il en allait différemment pour la redevance qui
était déterminée en cheval-moyen année calculé sur l'arbre
de
la turbine (cf. art. 1 de la loi de 1946), soit,
semble-t-il,
par référence à l'énergie pouvant être produite par l'eau
concédée (cf. art. 2 de la convention du 24 mars 1948 entre
la commune d'Evolène et la société Energie de l'Ouest-Suisse
SA, pièce 4/2); certaines concessions établies en 1948 fai-
saient toutefois également référence à l'énergie effective-
ment produite (cf. art. 1 de la convention du 4 mars 1948
entre la commune d'Hérémence et la société Energie de
l'Ouest-Suisse SA, pièce 3/6; art. 2 de la convention du 4
mars 1948 entre la commune de Vex et la société Energie de
l'Ouest-Suisse SA, pièce 3/8).

Dans le souci de coordonner et de compléter la lé-
gislation cantonale sur les forces hydrauliques et de l'adap-
ter à la législation fédérale, le législateur cantonal a tou-
tefois clairement opté, lors de l'adoption de la loi canto-
nale de 1957 (cf. le préambule de cette loi), pour le sys-

tème qui est encore actuellement en vigueur, à savoir la dé-
termination de l'impôt spécial et de la redevance en prenant
en compte, comme matière imposable, la puissance théorique
(calculée à l'époque en cheval-théorique) et, comme taux
d'imposition, un pourcentage du montant maximum admis par
l'art. 49 al. 1 LFH (cf. Message du Conseil d'Etat du 27 sep-
tembre 1955 concernant la loi sur l'utilisation des forces
hydrauliques, Bulletin des séances du Grand Conseil du
Canton
du Valais, session ordinaire de mai 1956, p. 33 ss, p. 37-
41). L'art. 70 de la loi cantonale de 1957 reflète particu-
lièrement bien la volonté du législateur d'harmoniser le
droit cantonal avec le droit supérieur en disposant que "le
canton perçoit de toute entreprise utilisant des forces hy-
drauliques, dès la mise en service de l'usine, un impôt spé-
cial sur les forces hydrauliques égal à la différence entre
le maximum de la redevance prévu à l'art. 65 (alors calculée
en cheval-théorique) et le maximum autorisé par l'art. 49 mo-
difié de la loi fédérale".

Par ailleurs, lorsqu'il s'est agi de remplacer la
loi cantonale de 1957, le législateur s'est expressément pro-
noncé en faveur du maintien des mêmes principes
qu'auparavant
en matière de taxes et de redevances, en considérant que ce
système avait "fait ses preuves" (cf. Message accompagnant
le
projet de révision de la loi du 5 février 1957 sur l'utilisa-
tion des forces hydrauliques [LFH/VS], Bulletin des séances
du Grand conseil du Canton du Valais, session prorogée de
mai
1989 [deuxième partie septembre/octobre 1989], p. 304 ss,
p. 321, p. 337 ss).

Est donc sans fondement le doute émis par la recou-
rante qui l'amène à "se demander si l'impôt (spécial), tel
qu'il est prévu par la loi valaisanne de 1990, ne devrait
pas
être toujours perçu sur l'énergie effectivement produite":
depuis plus de quarante ans maintenant, le législateur valai-
san a ouvertement choisi, en harmonie avec le droit fédéral,

d'imposer la force hydraulique (redevance et impôt spécial)
sur la base de la puissance théorique.

e) C'est en vain que la recourante cherche à mettre
en doute cette conclusion en s'appuyant sur l'art. 71 al. 4
(recte: 71 al. 5) LFH/VS.

Cette disposition vise à attirer dans le canton du
Valais des entreprises nouvelles en leur fournissant de
l'énergie bon marché (cf. les débats parlementaires
consacrés
à cette disposition in Bulletin des séances du Grand conseil
du Canton du Valais, session prorogée de mai 1989 [deuxième
partie septembre/octobre 1989], p. 677 ss, en particulier
p. 682). A cette fin, l'art. 71 al. 5 LFH/VS autorise le Con-
seil d'Etat, sur demande, à réduire pour une durée indétermi-
née l'impôt spécial sur l'énergie produite dans le canton,
si
cette énergie est consommée par des exploitations économique-
ment importantes installées dans le canton et que celles-ci
en tirent profit directement. Au regard du but recherché, la
référence à l'énergie produite, par opposition à l'énergie
théorique, se comprend dès lors aisément et n'est pas de na-
ture à jeter un doute sur l'objet de l'impôt spécial qui de-
meure, en règle générale, la puissance théorique.

D'ailleurs, le fait que le concessionnaire doive, en
cas de modernisation des installations, faire une demande ex-
presse pour que l'impôt spécial soit calculé sur la force hy-
draulique "réellement utilisée" durant la période de cons-
truction (cf. art. 73 LFH/VS) atteste bien que c'est ordinai-
rement la puissance théorique qui sert de base de calcul.

A l'argumentation de la recourante s'oppose donc non
seulement l'interprétation historique de la loi cantonale,
mais encore son interprétation téléologique et systématique.

f) En résumé, tant l'objet de l'impôt spécial que
son assiette trouvent un fondement suffisant dans la loi
cantonale (art. 71 en relation avec les art. 65 ss LFH/VS).

7.- La recourante conteste également la légalité du
renvoi à la législation fédérale pour déterminer le taux de
l'impôt spécial.

Comme l'a justement rappelé l'autorité intimée dans
l'arrêt attaqué, le Tribunal fédéral s'est déjà prononcé sur
une question analogue (cf. arrêt 2A.517/1998 du 13 avril
2000
dans la cause Kraftwerke Oberhasli AG c/ canton de Berne,
partiellement publié aux ATF 126 II 171 ss). Il s'agissait,
dans cette affaire, d'examiner la légalité de l'art. 72 al.
1
(let. b) de la loi bernoise du 3 décembre 1950 sur
l'utilisation des eaux (ci-après: la loi bernoise), en
vigueur jusqu'au 31 décembre 1997. Pour la détermination du
montant de la redevance, la disposition cantonale précitée
renvoyait au "taux maximal fixé par le droit fédéral". Or,
sans trancher la question de manière générale et définitive,
le Tribunal fédéral a considéré qu'un tel renvoi était
compatible avec les exigences découlant du principe de la
légalité, car la valeur prise comme référence par le jeu du
renvoi à la loi fédérale (soit le taux maximal fixé par
l'art. 49 al. 1 LFH) était dans un rapport direct et
particulier avec la contribution cantonale litigieuse
(consid. 5b non publié de l'arrêt précité). Ces considéra-
tions sont transposables mutatis mutandis à la présente
affaire.

En effet, contrairement à ce que soutient la recou-
rante, la loi fédérale ne traite pas seulement de la rede-
vance, puisqu'elle réserve précisément aux cantons le droit
de percevoir un impôt spécial, pourvu que les deux contribu-
tions réunies (impôt et redevance) n'excèdent pas le taux ma-
ximum de 80 fr. par kilowatt théorique. Pour ce motif déjà,
il existe donc bel et bien, comme l'a retenu l'autorité inti-

mée, un rapport privilégié entre l'impôt spécial et le taux
maximum autorisé par la loi fédérale. Ce rapport est
d'autant
plus étroit, en l'occurrence, que le législateur cantonal a
fait le choix, comme on l'a vu (supra consid. 6b à 6f), de
déterminer l'impôt spécial selon le même objet et la même as-
siette que la redevance, seul le taux applicable à chacune
de
ces contributions étant différent.

Sous cet angle également, le moyen tiré de la viola-
tion du principe de la légalité apparaît ainsi mal fondé.

8.- a) La recourante soutient encore que l'autorité
intimée aurait violé de manière grossière les art. 74 et 107
LFH/VS en procédant à une taxation directement fondée sur
l'art. 71 LFH/VS, sans que le règlement cantonal n'ait été
modifié.

C'est un fait que le nouveau taux maximum admis par
la loi fédérale à partir du 1er mai 1997 (80 fr.) n'a pas
été
transposé dans le règlement d'exécution (cf. l'art. 13
RLFH/VS où il est toujours question d'un taux maximum de
54 fr.). Du moment toutefois que l'art. 71 LFH/VS constitue,
ainsi qu'on l'a vu, une base légale suffisante (en relation
avec les art. 65 ss LFH/VS ainsi que l'art. 49 al. 1 LFH)
pour déterminer l'objet, l'assiette et le taux de l'impôt
spécial, le principe de la hiérarchie des normes conduit à
rejeter purement et simplement le grief de la recourante,
les
dispositions de la loi devant, en cas de conflit avec des
dispositions réglementaires, l'emporter sur celles-ci (cf.
ATF 111 V 310 consid. 2b p. 314). Au demeurant, l'art. 74
LFH/VS prévoit expressément que seules les modalités du cal-
cul et de la perception de l'impôt spécial doivent être pré-
cisées dans le règlement d'exécution; or, le taux d'imposi-
tion applicable est assurément un élément essentiel pour dé-
terminer l'impôt spécial, et non une simple modalité de son
calcul. Au demeurant, la loi cantonale ne laisse aucune la-

titude au Conseil d'Etat pour influencer le taux de l'impôt
spécial, qui correspond invariablement à 60 pour cent du mon-
tant maximum admis par la loi fédérale.

En définitive, bien qu'on puisse regretter que le
Conseil d'Etat n'ait pas pris soin de répercuter dans le rè-
glement d'exécution le nouveau taux maximum, sa négligence
est sans incidence sur le taux de l'impôt spécial. La modifi-
cation de l'art. 71 al. 1 LFH entraînait donc, à partir du
1er mai 1997, ipso iure le prélèvement de l'impôt spécial
sur
la base d'un taux maximum de 80 fr. par kilowatt théorique
(cf. consid. 5b de l'arrêt précité Kraftwerke Oberhasli AG
c/
canton de Berne).

L'arrêt attaqué échappe donc, de ce point de vue
également, à toute critique.

b) Il est certes exact que le renvoi au droit fédé-
ral, tel qu'aménagé dans la loi cantonale, conduit à l'adap-
tation quasi automatique du taux de l'impôt spécial sur le
nouveau taux maximum autorisé par la loi fédérale, c'est-à-
dire en dehors de toute intervention ponctuelle du législa-
teur valaisan. Celui-ci a toutefois voulu cet automatisme en
adoptant le renvoi prévu à l'art. 71 al. 1 LFH/VS. Vu par
ailleurs le lien objectif et étroit qui existe entre l'impôt
spécial et ledit taux maximum, cette solution est, comme on
l'a déjà dit, tout à fait admissible dans son principe (cf.
supra consid. 7). Au demeurant, rien n'empêche le
législateur
cantonal de modifier en tout temps l'art. 71 LFH/VS si ce
système devait ne plus lui paraître satisfaisant, par
exemple
en prévision ou à la suite d'une modification du taux maxi-
mum.

Les craintes de la recourante relatives à une en-
torse au principe démocratique sont donc, en toute
hypothèse,
infondées.

9.- a) Se référant à certains auteurs, (Andreas
Auer/Giorgio Malinverni/Michel Hottelier, Droit constitu-
tionnel suisse, vol. I, Berne 2000, n. 1011 ss p. 355 ss),
la
recourante invoque également, en se fondant sur l'art. 3
Cst., le "principe de la force dérogatoire du droit canto-
nal". Selon ce principe, le droit fédéral ne primerait le
droit cantonal que pour autant que le premier soit lui-même
conforme à la répartition des compétences opérée par la Cons-
titution et la législation fédérales; quant au second, lors-
qu'il est conforme à la répartition des compétences, il de-
vrait l'emporter sur le droit fédéral, même si ce dernier
prend la forme d'une loi fédérale (Andreas Auer/Giorgio
Malinverni/Michel Hottelier, op. cit. n. 1016 p. 358 s.).
Ceci exposé, la recourante fait valoir qu'en laissant à la
Confédération, par le renvoi de l'art. 71 al. 1 LFH/VS, le
soin de déterminer le taux de l'impôt spécial, le
législateur
cantonal aurait porté atteinte à la répartition des
compéten-
ces découlant de l'art. 24bis aCst.

On comprend mal cette argumentation, qui est formu-
lée de manière confuse et contradictoire. En effet, dès
l'instant où la loi cantonale ne serait pas conforme à la ré-
partition des compétences prévue par la Constitution fédé-
rale, comme semble finalement le soutenir la recourante,
l'invocation du principe de la force dérogatoire du droit
cantonal n'a pas de sens. Pour peu qu'on en saisisse le sens
et la portée, ce principe présupposerait en effet que le
droit cantonal soit lui-même en accord avec la répartition
des compétences prévue dans la Constitution fédérale, con-
trairement au droit fédéral. Or, tel ne serait précisément
pas le cas en l'occurrence si l'on en croit la recourante.

Tel qu'il est allégué, le grief ne semble donc pas
répondre aux exigences de motivation posées par la jurispru-
dence (cf. supra consid. 3a). Peu importe toutefois, puisque
le moyen est de toute façon manifestement mal fondé.

b) D'une part, on ne voit en effet pas que le droit
fédéral serait de quelque manière que ce soit contraire à
l'art. 76 al. 4 Cst. (ou 24bis al. 3 aCst.) en réservant aux
cantons le droit de prévoir un impôt spécial sur les forces
hydrauliques (sur la répartition des compétences entre la
Confédération et les cantons, cf. Hans Wyer, op. cit., p. 4
ss). Au demeurant, la recourante se trompe lorsqu'elle
laisse
entendre que la nouvelle Constitution fédérale (cf. art. 191
Cst.) autoriserait désormais l'examen de la constitutionnali-
té des lois fédérales (cf. ATF 126 IV 236 consid. 4b p.
248).

D'autre part, il est inexact de prétendre que le
canton du Valais se serait dessaisi d'une de ses compétences
propres en renvoyant à l'art. 49 al. 1 LFH pour la détermina-
tion du taux de l'impôt spécial: un tel renvoi, loin de s'ap-
parenter à un dessaisissement de compétence, reflète au con-
traire la volonté et la détermination du législateur
cantonal
d'imposer l'énergie hydraulique jusqu'à concurrence du maxi-
mum autorisé par le droit fédéral. De surcroît, le législa-
teur cantonal reste parfaitement libre, ainsi qu'on l'a vu,
d'adopter une nouvelle solution si et quand bon lui semble
(cf. supra consid. 8b), de sorte qu'il est tout simplement
abusif de parler d'un dessaisissement de compétence.

10.- Invoquant la garantie de la propriété et le
principe de la bonne foi, la recourante soutient qu'elle est
au bénéfice de droits acquis qui lui permettent de s'opposer
au relèvement de l'impôt spécial, voire même à son prélève-
ment.

a) Le Tribunal fédéral admet que la protection des
droits acquis peut découler aussi bien de la garantie de la
propriété que du principe de la bonne foi. Selon que sont
avant tout en cause, dans les relations juridiques considé-
rées, la réglementation de droits réels (voire de droits ana-

logues) ou des rapports de confiance entre l'administré et
l'Etat, il faut considérer au premier chef comme décisif,
soit la garantie de la propriété, soit le principe de la
bonne foi, l'autre droit constitutionnel devant être pris en
compte à titre secondaire (cf. ATF 118 Ia 245 consid. 5a
p. 255; 106 Ia 163 consid. 1b p. 167 et les références
citées; René Rhinow/Beat Krähenmann, Schweizerische
Verwaltungsrechtsprechung, Ergänzungsband, n. 122 III p.
366).

En l'espèce, il y a lieu d'envisager la problémati-
que des droits acquis sous ses deux aspects, dès lors que la
recourante soutient, d'une part, que l'Etat du Valais aurait
manqué à sa parole en lui imposant des charges nouvelles pos-
térieurement à l'octroi de la concession et, d'autre part,
que celles-ci emporteraient les effets d'une expropriation
matérielle.

b) aa) Ancré à l'art. 9 Cst. et valant pour l'ensem-
ble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi con-
fère au citoyen, à certaines conditions, le droit d'exiger
des autorités qu'elles se conforment aux promesses ou assu-
rances précises qu'elles lui ont faites et ne trompent pas
la
confiance qu'il a légitimement placée dans ces dernières
(cf.
ATF 126 II 377 consid. 3a p. 387; 124 II 265 consid. 4a
p. 269/270; 118 Ia 245 consid. 4b p. 254 et les arrêts ci-
tés). Ce principe lie également le législateur, en particu-
lier s'il a promis dans la loi que celle-ci ne serait pas
modifiée ou serait maintenue telle quelle pendant un certain
temps, créant ainsi un droit acquis (ATF 102 Ia 331 con-
sid. 3c et les références citées; voir aussi ATF 118 Ia 245
consid. 5b p. 256; Blaise Knapp, Précis de droit administra-
tif, éd. 1991, n. 514 p. 109 s.).

bb) La garantie de la propriété inscrite à l'art. 26
Cst. (cf. art. 22ter aCst.) s'étend aussi aux droits acquis
découlant, par exemple, d'actes de concession (René Rhinow,

Wirtschafts- und Eigentumsverfassung in Daniel Thürer/
Jean-François Aubert/Jörg Paul Müller, Droit constitutionnel
suisse, Zurich 2001, n. 27 ad par. 35; Georg Müller, Commen-
taire de la Constitution fédérale de la Confédération
suisse,
Zurich 1993, n. 2 ad art. 22ter).

En matière fiscale, elle ne va toutefois pas au-delà
de l'interdiction d'une imposition confiscatoire. Ainsi, une
prétention fiscale ne doit pas porter atteinte au noyau es-
sentiel de la propriété privée. Il incombe au législateur de
conserver la substance du patrimoine du contribuable et de
lui laisser la possibilité d'en former un nouveau. Pour
juger
si une imposition a un effet confiscatoire, le taux de l'im-
pôt exprimé en pour cent n'est pas seul décisif; il faut exa-
miner la charge que représente l'imposition sur une assez
longue période, en faisant abstraction des circonstances ex-
traordinaires; à cet effet, il convient de prendre en consi-
dération l'ensemble des circonstances concrètes, la durée et
la gravité de l'atteinte ainsi que le cumul avec d'autres
taxes ou contributions et la possibilité de reporter l'impôt
sur d'autres personnes (cf. ATF 122 I 305 consid. 7 p. 313;
112 Ia 240 consid. 6 p. 247; 106 Ia 342 consid. 6a p. 348;
105 Ia 134 consid. 3a p. 139 et les références; sur l'évolu-
tion de cette jurisprudence, voir Danielle Yersin, Les pro-
tections constitutionnelles et légales contre les
impositions
confiscatoires in Publications de l'Institut suisse de droit
comparé, vol. 12, Zurich 1990, p. 271 ss, en particulier
p. 274-278).

c) En matière de concessions de forces hydrauliques,
la redevance hydraulique, soit la contre-prestation annuelle
due en échange du droit d'utiliser les droits d'eau concédés
(cf. Dominik Strub, Wohlerworbene Rechte insbesondere im Be-
reich des Elektrizitätsrechts, thèse Fribourg 2001, p. 196;
Werner Dubach, Die wohlerworbenen Rechte im Wasserrecht, ex-
pertise publiée par l'Office fédéral des eaux, novembre
1979,

p. 104), est un élément essentiel du rapport juridique entre
le concédant et le concessionnaire; à ce titre, elle doit im-
pérativement figurer dans l'acte même de concession en vertu
de l'art. 54 let. f LFH.

La jurisprudence a très tôt admis que la redevance
hydraulique relevait des droits acquis. A cet égard,
l'art. 74 al. 3bis LFH - en vigueur depuis le 8 octobre 1976
(RO 1977 p. 171) - n'a donc fait que formaliser un principe
établi depuis longtemps en posant que c'est seulement dans
la
mesure où il ne porte pas atteinte à des droits acquis que
le
taux maximum de l'art. 49 al. 1 LFH est applicable (cf.
ATF 126 II 171 consid. 3b p. 177 et les références; Dominik
Strub, eod. loc.; André Grisel, Traité de droit administra-
tif, Neuchâtel 1984, vol. II, p. 594). Au plan valaisan, la
loi cantonale instaure également une protection semblable en
prévoyant que "les prestations et charges du concessionnaire
en vertu de la concession relèvent de la législation en
force
au moment de l'octroi de la concession de droits d'eau, pour
autant que celle-ci n'ait pas réservé expressément ou dans
le
cas d'espèce l'application du nouveau droit" (art. 102 al. 3
LFH/VS lettre b).

En raison de sa nature, la redevance hydraulique ne
peut être modifiée par l'autorité concédante que s'il
existe,
dans l'acte même de concession, une réserve expresse et pré-
cise l'y autorisant (cf. ATF 126 II 171 consid. 3b p. 177
ss;
Dominik Strub, op. cit., p. 199).

d) A l'inverse, l'impôt spécial n'a pas le caractère
d'une contre-prestation, mais est indépendant de la décision
d'octroi de la concession hydraulique. Il n'est donc pas un
simple supplément de redevance, mais un véritable impôt (cf.
Charles Oser, Les concessions hydrauliques dans le canton du
Valais, thèse, Lausanne 1927, p. 83 s.; Walter Spillmann,
Die
bundesrechtliche Beschränkung der öffentlichen Abgaben der

Wasserkraftwerke, thèse Zurich 1936, p. 55; voir aussi
Dominik Strub, op. cit., p. 98). En conséquence, l'impôt spé-
cial ne relève pas des prestations économiques imposées au
concessionnaire, au sens de l'art. 54 lettre f LFH in
initio,
telle que notamment la redevance hydraulique annuelle; en ou-
tre, vu son caractère de contribution publique, il n'entre
pas non plus dans les "autres prestations qui, en vertu de
prescriptions spéciales, résultent de l'utilisation de la
force hydraulique", au sens de l'art. 54 lettre f LFH in
fine
(cf. l'art. 54 lettre d LFH dans sa version en vigueur jus-
qu'au 30 avril 1997, qui parlait "de charges ne résultant
pas
de prescriptions généralement obligatoires"). Au reste, est
assujetti à l'impôt spécial valaisan toute entreprise utili-
sant des forces hydrauliques (art. 71 al. 1 LFH/VS), mais
non
nécessairement le concessionnaire lui-même. Redevance et im-
pôt spécial visent donc, abstraitement du moins, des "contri-
buables" distincts, même si ceux-ci se recoupent le plus sou-
vent dans la pratique. Enfin, sous réserve du cas - excep-
tionnel - où l'Etat du Valais est lui-même autorité concé-
dante, la redevance et l'impôt spécial sont tous deux ratta-
chés à la souveraineté fiscale de collectivités publiques
différentes, soit les communes concédantes pour la première
des contributions en cause, et l'Etat du Valais pour la se-
conde.

Ainsi donc, contrairement à la redevance hydraulique
qui ne peut en principe pas être modifiée - du moins pendant
un certain temps - après l'octroi de la concession (sauf si
l'acte de concession réserve cette possibilité), l'impôt spé-
cial n'est pas à l'abri de modifications ultérieures (cf.
Werner Dubach, op. cit., p. 105 s. à propos de l'art. 54 let-
tre d aLFH précité, disposition dont le contenu était sembla-
ble à celui de l'art. 54 lettre f LFH, en dépit d'un texte
sensiblement différent); réserve doit néanmoins être faite
de
l'existence de droits acquis qui auraient valablement été
constitués, soit par l'effet de la loi, soit par une disposi-

tion prise dans l'acte même de concession, pour peu toute-
fois, dans cette dernière hypothèse, que l'impôt spécial en-
tre bien dans la sphère de compétence de l'autorité concé-
dante (cf. Werner Dubach, op. cit., p. 106; voir aussi
Dominik Strub, op. cit., p. 98 s. et p. 198 s.).

e) En l'espèce, ni la loi fédérale, ni la loi canto-
nale ne contiennent de disposition ayant pour effet de confé-
rer à l'impôt spécial la protection des droits acquis. Il
n'existe, par ailleurs, aucune promesse ou assurance à ce su-
jet, ni de la part de l'autorité intimée, ni de la part de
l'une des autorités concédantes. Les actes de concession
n'en
font en tout cas pas mention et la recourante ne soutient
pas
que de telles garanties lui auraient été accordées. Au demeu-
rant, à l'exception de l'Etat du Valais, qui n'intervient
comme autorité concédante que dans deux conventions
octroyant
le droit d'utiliser une partie des eaux du Rhône, les autres
autorités concédantes sont toutes des communes (Riddes,
Sion,
Evolène, St-Martin...) qui, l'auraient-elles souhaité, n'au-
raient de toute façon pas eu la compétence d'accorder des ga-
ranties au sujet de l'impôt spécial, cette contribution
étant
du ressort exclusif du canton.

La recourante soutient toutefois que l'impôt spécial
doit, au même titre que la redevance hydraulique, bénéficier
de la protection des droits acquis, à défaut de quoi les
cantons seraient libres, pourvu qu'ils respectent le taux
maximum fixé à l'art. 49 al. 1 LFH, de réduire de manière
substantielle le montant de la redevance pour augmenter dans
la même proportion le montant de l'impôt spécial. De l'avis
qu'une telle manière de procéder "n'a rien d'hypothétique si
l'on considère qu'en Valais, l'impôt spécial représente,
pour
les concessionnaires, aujourd'hui déjà, une charge plus
lourde que la redevance", la recourante y voit le risque de
voir ses droits acquis en matière de redevance hydraulique
être vidés de leur substance.

f) Pour être pertinente, cette argumentation présup-
pose que l'intéressée soit au bénéfice de la protection des
droits acquis en ce qui concerne le montant de la redevance.
On peut toutefois se demander si tel est le cas ou, du
moins,
si la protection en cause est aussi nette et rigide que ne
le
soutient la recourante. En effet, toutes les concessions con-
cernées (soit dix-sept au total selon les pièces au dossier)
soumettent la redevance au principe de la révision
décennale;
par ailleurs, sur l'ensemble de ces concessions, douze d'en-
tre elles précisent que la révision est également possible
en
cas d'augmentation du taux maximum, tandis que trois d'entre
elles vont jusqu'à prévoir une adaptation automatique en cas
d'augmentation dudit taux maximum (sur les principes applica-
bles pour interpréter de telles clauses d'une concession,
cf.
ATF 126 II 171 consid. 4 p. 179 ss; voir aussi Werner
Dubach,
op. cit., p. 107 ss).

La question n'a toutefois pas à être examinée plus
avant ici, car
le moyen tiré de la protection des droits ac-
quis est, comme on le verra, mal fondé pour une autre raison.

g) En 1953, lorsque le taux maximum a été porté de
6 fr. à 10 fr. par cheval théorique, il n'a pas échappé au
Conseil fédéral que, "sous le titre de l'impôt spécial, (les
cantons pourraient) chercher à utiliser la marge qui
pourrait
exister entre la redevance maximum fixée par le droit canto-
nal et le taux maximum prescrit par le droit fédéral" (Mes-
sage du 13 novembre 1951 du Conseil fédéral relatif à une mo-
dification partielle de la loi sur l'utilisation des forces
hydrauliques, FF 1951 III p. 565 ss, p. 572). Ce risque
avait
cependant alors été jugé limité, si bien qu'aucune mesure
n'avait été proposée (cf. Message précité du Conseil
fédéral,
eod. loc.).

Par ailleurs, dans deux arrêts déjà anciens (ATF 38
I 341; 48 I 580), le Tribunal fédéral avait jugé admissible

l'introduction d'un impôt spécial cantonal bien qu'une rede-
vance n'eût - en raison notamment du caractère privé des
eaux
utilisées - pas pu être prélevée. Pour l'essentiel, le Tribu-
nal fédéral avait alors considéré que le prélèvement de l'im-
pôt spécial répondait à d'autres motivations et exigences
que
celui de la redevance, vu la nature différente de ces contri-
butions. Il n'y avait dès lors ni violation du principe de
l'égalité de traitement ou de la bonne foi, ni atteinte à la
garantie de la propriété, ni même fraude à la loi, dans le
fait d'introduire, en lieu et place d'une redevance que la
législation ne permettait pas de prélever, un impôt spécial.
Seul comptait que le taux maximum fixé par le droit fédéral
ne fût pas dépassé. Critiquée par Walter Spillmann (op.
cit.,
p. 56 ss, p. 58), cette jurisprudence a été abandonnée, le
Tribunal fédéral ayant finalement estimé qu'il était
contraire au principe de l'égalité de traitement de mettre à
la charge des usines exploitées en vertu de droits privés -
exemptes de toute redevance - un impôt spécial équivalant au
montant de la redevance prélevée sur les usines exploitées
en
vertu du droit public (ATF 68 I 18 consid. 4 et 5 p. 30ss).

L'argumentation de la recourante n'est donc, en soi,
pas dénuée de pertinence lorsqu'elle s'en prend au risque -
ou à la tentation - pouvant exister de prélever sous couvert
de l'impôt spécial des contributions qui ne pourraient
l'être
au titre de la redevance en raison de la protection des
droits acquis dont cette dernière bénéficie. La présente con-
testation se situe toutefois sur un tout autre terrain.

h) Ce qui est en cause en effet, ce n'est pas de sa-
voir si l'impôt spécial contesté a été utilisé comme un
moyen
déguisé pour augmenter, au mépris des droits acquis de la re-
courante, le montant de la redevance. Une telle situation se
présenterait notamment si, dans la charge contributive to-
tale, la proportion entre la redevance et l'impôt spécial
était soudainement modifiée au profit de cette dernière con-

tribution. Mais rien de tel ne s'est passé en l'occurrence,
puisque le relèvement de l'impôt spécial à l'origine de la
présente contestation résulte de la seule augmentation du
taux maximum et ne s'accompagne nullement d'un transfert des
charges dues sous le titre de la redevance vers celles préle-
vées au titre de l'impôt spécial: aujourd'hui comme avant la
modification légale intervenue le 1er mai 1997, l'impôt spé-
cial représente toujours 60 pour cent du taux maximum,
contre
40 pour cent (au plus) pour la redevance.

Dans cette mesure, l'impôt spécial peut, comme n'im-
porte quelle autre contribution générale, subir une augmenta-
tion, à la seule réserve que celle-ci n'ait pas un effet con-
fiscatoire mettant en péril la pérennité de l'activité concé-
dée. La recourante ne démontre toutefois pas que tel serait
le cas en l'espèce, se bornant à émettre à ce sujet de
vagues
allégués qui ne satisfont pas aux exigences de motivation dé-
duites de l'art. 90 al. 1 lettre b OJ (cf. p. 22 du recours
de droit public).

i) En définitive, c'est donc sans fondement que la
recourante se plaint d'une violation de ses droits acquis.

11.- Au vu de ce qui précède, le recours de droit
administratif est irrecevable. Quant au recours de droit
public, il doit être rejeté dans la mesure où il est rece-
vable.

Succombant, la recourante doit supporter les frais
judiciaires (art. 156 al. 1, 153 et 153a OJ) et n'a pas
droit
à des dépens (art. 159 al. 1 OJ). En outre, bien qu'il ob-
tienne gain de cause et qu'il soit représenté par un avocat,
l'Etat du Valais ne peut prétendre une indemnité à titre de
dépens, car une exception à la règle de l'art. 159 al. 2 OJ
ne se justifie pas dans le cas d'espèce (cf. ATF 125 I 182
consid. 7 p. 202 et les références citées).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Joint les causes 2A.525/2000 et 2P.272/2000.

2. Déclare le recours de droit administratif irrece-
vable.

3. Rejette le recours de droit public dans la mesure
où il est recevable.

4. Met un émolument judiciaire de 30'000 fr. à la
charge de la recourante.

5. N'alloue pas de dépens.

6. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties, à la Cour de droit public du Tribunal
cantonal du canton du Valais et à l'Administration fédérale
des contributions.

Lausanne, le 17 janvier 2002
ADD/dxc

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.272/2000
Date de la décision : 17/01/2002
2e cour de droit public

Analyses

Art. 76 al. 4 Cst.; art. 49 al. 1 et 2 LFH: légalité de l'impôt spécial valaisan sur les forces hydrauliques; droits acquis éventuels du concessionnaire. Bien que la disposition de droit cantonal instituant l'impôt spécial ne définisse directement ni l'objet ni l'assiette de cette contribution, le principe de la légalité est respecté, car ces paramètres se laissent facilement déduire d'autres dispositions du texte même de la loi cantonale, dont l'interprétation systématique, historique et téléologique est sur ce point univoque (consid. 5 et 6). La loi cantonale peut valablement renvoyer au taux maximum prévu par le droit fédéral pour déterminer le taux de l'impôt spécial (consid. 7-9). Nature de l'impôt spécial par rapport à la redevance hydraulique; portée d'éventuels droits acquis du concessionnaire déduits du principe de la bonne foi et de la garantie de la propriété en cas d'augmentation de l'impôt spécial (consid. 10).


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-01-17;2p.272.2000 ?
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