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08/01/2002 | SUISSE | N°2P.289/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 08 janvier 2002, 2P.289/2000


«/2»
2P.289/2000/otd

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
********************************************

8 janvier 2002

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
Président, Hungerbühler, Müller, Yersin et Merkli.
Greffier: M. Dubey.

_____________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

R.________ SA, à Genève, représentée par Me Xavier Oberson,
avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 7 novembre 2000 par le Tribunal administra-
t

if du canton de Vaud, dans la cause qui oppose la recou-
rante à l'Administration cantonale des impôts du canton de

V a u ...

«/2»
2P.289/2000/otd

IIe C O U R D E D R O I T P U B L I C
********************************************

8 janvier 2002

Composition de la Cour: MM. et Mme les Juges Wurzburger,
Président, Hungerbühler, Müller, Yersin et Merkli.
Greffier: M. Dubey.

_____________

Statuant sur le recours de droit public
formé par

R.________ SA, à Genève, représentée par Me Xavier Oberson,
avocat à Genève,

contre

l'arrêt rendu le 7 novembre 2000 par le Tribunal administra-
tif du canton de Vaud, dans la cause qui oppose la recou-
rante à l'Administration cantonale des impôts du canton de

V a u d;

et

les décisions de taxation rendues les 25 décembre 1995 et 18
mars 1997 par l'Administration fiscale cantonale du canton
de G e n è v e;

(double imposition intercantonale: gain immobilier,
commission de courtage)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- R.________ SA est une société anonyme de droit
suisse dont le siège est à Genève, spécialisée notamment
dans la vente aux étrangers de résidences secondaires sises
en Suisse romande (courtage immobilier). Ses exercices com-
merciaux commencent le 1er avril et sont clos le 31 mars de
chaque année.

Le 18 septembre 1991, R.________ SA, qui interve-
nait en qualité d'intermédiaire, a perçu une somme de
102'500 fr. à titre d'indemnité payée par des promettants-
acquéreurs ayant renoncé à acheter deux objets immobiliers
sis dans le canton de Vaud.

Les 6 janvier, 8 juillet, 11 août et 31 octobre
1994, divers appartements et places de parc sis dans le can-
ton de Vaud ont été vendus par l'intermédiaire de R.________
SA à des acheteurs étrangers. Les commissions perçues par
R.________ SA ont été calculées de la manière suivante:

Prix de vente Taux Commissions

1'330'000 12% 159'600
1'020'000 12,25% 125'000
1'083'000 12% 129'960
1'230'000 11,21% 138'000
1'070'000 12% 128'400

Les 25 décembre 1995 et 18 mars 1997, l'Administra-
tion fiscale cantonale du canton de Genève (ci-après: l'Ad-
ministration fiscale cantonale genevoise) a imposé ces com-

missions au titre de l'impôt sur le bénéfice des personnes
morales pour la période fiscale 1995. R.________ SA s'est
acquittée de cet impôt.

Le 17 juin 1998, l'Administration cantonale des im-
pôts du canton de Vaud (ci-après: l'Administration cantonale
des impôts vaudoise) a adressé à R.________ SA un bordereau
d'impôt sur les gains immobiliers de 79'480 fr. 80. Considé-
rant que les commissions perçues sont supérieures au taux
usuel de 5%, elle a imposé une partie des commissions en-
caissées, soit la différence entre le taux pratiqué et le
taux usuel (783'460 - 341'900 = 441'560) au taux de 18% en
application de l'art. 40 al. 3 de la loi vaudoise du 26 no-
vembre 1956 sur les impôts directs cantonaux (ci-après:
LI).

Par décision sur réclamation du 28 mars 2000, l'Ad-
ministration cantonale des impôts vaudoise a réduit l'impôt
à fr. 70'975,80 considérant que la dédite du 18 septembre
1991 ne pouvait pas être qualifiée de gain immobilier; elle
a rejeté les autres griefs invoqués.

B.- Le 27 avril 2000, R.________ SA a interjeté re-
cours auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud
(ci-après: le Tribunal administratif), l'invitant à annuler
la décision sur réclamation et à refuser au canton de Vaud
le droit d'imposer les commissions en cause. Subsidiaire-
ment, elle a conclu à une réduction de l'impôt, divers frais
devant être admis en déduction du montant éventuellement im-
posable. A l'appui de ses conclusions, elle a invoqué l'in-
terdiction de la double imposition intercantonale et impli-
citement celle de l'arbitraire dans l'application de l'art.
40 al. 1 et 3 LI.

Par arrêt du 7 novembre 2000, le Tribunal adminis-
tratif a rejeté le recours de R.________ SA. Il a considéré
en substance que la jurisprudence du Tribunal fédéral en ma-
tière de double imposition intercantonale n'excluait pas,
dans des cas particuliers, que l'intermédiaire immobilier,
au même titre qu'un partenaire dans une promotion immobi-
lière, soit imposable au lieu de situation de l'immeuble,
lorsque sa rémunération pouvait être considérée comme un in-
téressement, une participation à la plus-value immobilière.
Dans cette mesure, l'art. 40 al. 3 LI était conforme à la
jurisprudence fédérale en la matière. Faisant application de
cet article, il a constaté que le taux usuel de commission
en matière de courtage immobilier s'élève à 5%; il a toute-
fois considéré que l'ensemble des commissions encaissées
apparaissait comme le résultat d'une activité de commerce
professionnel d'immeubles, imposable dès lors exclusivement
à titre de gain immobilier. Finalement, appliquant par ana-
logie les "Recommandations concernant les répartitions in-
tercantonales dans le cadre du commerce professionnel immo-
bilier établies par les administrations des cantons romands,
de Berne et du Tessin", il a estimé que la déduction d'un
forfait de 5% du prix de vente pour frais généraux apparais-
sait comme généreuse, à défaut d'éléments plus sûrs, dans le
cas d'un courtier, et il a confirmé, par substitution de mo-
tifs, le montant de l'impôt fixé dans la décision sur récla-
mation du 28 mars 2000.

C.- Agissant par la voie du recours de droit public
contre les cantons de Vaud et de Genève, R.________ SA in-
vite le Tribunal fédéral, avec suite de frais et dépens, à
annuler l'arrêt du Tribunal administratif et à interdire au
canton de Vaud d'imposer les commissions reçues. Subsidiai-
rement, elle lui demande d'annuler l'arrêt du Tribunal admi-
nistratif ainsi que la décision du 25 décembre 1995 et les
deux du 18 mars 1997 de l'Administration fiscale cantonale
genevoise et d'indiquer, d'une part, que les commissions en

cause sont exclusivement imposables dans les cantons de si-
tuation des immeubles en rapport avec les commissions per-
çues et, d'autre part, que les cantons de situation des im-
meubles doivent admettre en déduction l'ensemble des frais
directement liés aux commissions encaissées, l'impôt relatif
à ces commissions et une quote-part des frais généraux,
l'Administration fiscale genevoise devant restituer le sur-
plus d'impôt payé en trop avec intérêt au taux légal dès la
date du versement du montant payé en trop. Plus subsidiaire-
ment, elle requiert l'autorisation d'apporter la preuve des
faits allégués dans son mémoire de recours.

A l'appui de ses conclusions, R.________ SA invoque
la violation du principe de l'interdiction de la double im-
position intercantonale. Elle serait victime d'une double
imposition effective sinon virtuelle ainsi que d'une imposi-
tion discriminatoire. La compétence de taxer les commissions
en cause reviendrait, à son avis, intégralement au canton de
Genève, parce que le versement d'une commission de courtage
doit être rattaché à une activité commerciale et non à un
immeuble, sous réserve de situations clairement abusives non
réalisées en l'espèce. Au demeurant, retenir une autre solu-
tion irait à l'encontre de l'art. 21 al. 2 let. b de la loi
sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des
communes (LHID; RS 642.14). Elle invoque aussi la violation
des principes de la légalité et de l'interdiction de l'arbi-
traire dans la mesure où seule la part de la commission su-
périeure au taux usuel et le gain net au sens de l'art. 40
al. 1 LI pourraient être imposés; en outre, l'impôt prévu
par l'art. 40 al. 3 LI ne pourrait être mis à sa charge,
puisqu'elle n'est pas l'aliénateur au sens de l'art. 50 bis
al. 1 LI.

Le Tribunal administratif conclut au rejet du re-
cours en tant qu'il concerne l'imposition vaudoise et s'en
remet à justice pour ce qui a trait à l'imposition gene-

voise. L'Administration cantonale des impôts vaudoise con-
clut, avec suite de frais et dépens, au rejet du recours
dans la mesure où il est recevable. L'Administration fiscale
cantonale genevoise conclut à l'admission des conclusions
principales du recours et au rejet des conclusions subsi-
diaires.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Le contribuable qui se plaint d'être imposé
à double peut former un recours de droit public pour viola-
tion de l'interdiction de la double imposition intercanto-
nale (art. 46 al. 2 aCst. et 127 al. 3 1ère phrase Cst. dont
la portée est similaire, cf. Message du Conseil fédéral du
20 novembre 1996 relatif à une nouvelle Constitution fédé-
rale in: FF 1997 I 1 ss, p. 352/353) au plus tard dans les
trente jours dès la notification de la dernière prétention
fiscale qui, selon lui, constitue la double imposition.
L'épuisement des instances cantonales de recours n'est pas
nécessaire (art. 86 al. 2 OJ). Le recours déposé en temps
utile contre la décision du dernier canton qui a statué peut
également être dirigé contre la décision de taxation anté-
rieure qui a été prise par l'autre canton et qui est déjà
entrée en force (cf. art. 89 al. 3 OJ; ATF 123 I 289 consid.
1a p. 291).

L'intéressée dirige son recours contre les cantons
de Vaud et de Genève. Elle conclut à l'annulation de l'arrêt
du Tribunal administratif vaudois du 7 novembre 2000. Son
recours est recevable à cet égard. Il est également receva-
ble en tant qu'il est dirigé contre la décision de l'Admi-
nistration fiscale genevoise du 25 décembre 1995 et celles
du 18 mars 1997.

b) Le recours de droit public n'a en principe qu'un
caractère cassatoire (cf. ATF 127 II 1 consid. 2c p. 5; 126
II 377 consid. 8b p. 395; 125 II 86 consid. 5a p. 96). Il
est toutefois fait exception à cette règle lorsque le re-
cours est fondé sur le principe de l'interdiction de la dou-
ble imposition intercantonale et qu'il apparaît nécessaire
de donner des instructions aux cantons concernés sur les
limites de leur compétence fiscale ou pour ordonner le rem-
boursement d'impôts perçus au mépris de l'interdiction cons-
titutionnelle de la double imposition. Les conclusions de
l'intéressée allant au-delà de la simple annulation de l'ar-
rêt attaqué sont donc recevables (arrêt du 2 février 2001
in: Revue fiscale 2001 p. 340 consid. 1b p. 341 et les réfé-
rences citées), sous réserve de celle relative à l'alloca-
tion d'un intérêt sur un éventuel trop-perçu d'impôt à res-
tituer (cf. consid. 2a ci-dessous).

c) Saisi d'un recours en matière de double imposi-
tion intercantonale, le Tribunal fédéral dispose d'un libre
pouvoir d'examen en fait et en droit (Martin Arnold, Der
steuerrechtliche Wohnsitz natürlicher Personen im interkan-
tonalen Verhältnis nach der neueren bundesgerichtlichen
Rechtsprechung, in: Archives 68 p. 449 ss, p. 488; Peter
Locher, Die staatsrechtliche Beschwerde wegen Verletzung von
Art. 46 Abs. 2 BV, in: ZBl 91/1990 p. 105 et les références
citées). Des faits et moyens de preuves nouveaux peuvent
être invoqués; ils doivent être correctement allégués et
prouvés dans le délai légal de recours de trente jours
(Peter Locher, Einführung in das interkantonale Steuerrecht,
Berne 1999, p. 169; Walter Kälin, Das Verfahren der staats-
rechtlichen Beschwerde, Berne 1994, p. 369). Par conséquent,
la demande de la recourante tendant à être "autorisée à ap-
porter, par toutes voies de droit utiles, la preuve des
faits allégués dans les présentes écritures" sans que soit
précisé sur quels faits elle souhaite fournir des preuves
supplémentaires est irrecevable.

2.- a) En dehors des affaires de double imposition
et d'autres exceptions non réalisées en l'espèce, le recours
de droit public est de nature purement cassatoire (ATF 127
II 1 consid. 2c p. 5; 126 III 534 consid. 1c p. 536) et
n'est recevable qu'à l'encontre d'une décision de dernière
instance cantonale (art. 86 OJ). Par conséquent, la conclu-
sion tendant à ce qu'un intérêt au taux légal rémunère les
montants d'impôt éventuellement perçus en trop par le canton
de Genève est irrecevable. En effet, l'allocation d'un inté-
rêt moratoire ne relève pas de l'interdiction de la double
imposition, mais de l'application du droit cantonal (cf. sur
ce point, Kurt Locher/Peter Locher, Die Praxis der Bundes-
steuern, III. Teil, Das interkantonale Doppelbesteuerungs-
recht, par. 12, III C 2, n° 8) et les décisions genevoises
mises en cause par la recourante n'examinent nullement cette
question ni n'émanent d'une dernière instance cantonale.

b) En tant que dirigé contre le canton de Vaud, le
présent recours a été déposé en temps utile contre un arrêt
final pris en dernière instance cantonale, qui ne peut être
attaqué que par la voie du recours de droit public et qui
touche la recourante dans ses intérêts juridiquement proté-
gés; il est donc recevable au regard des art. 84 ss OJ, en
tant qu'il porte sur l'interprétation et l'application du
droit cantonal vaudois que le Tribunal fédéral examine sous
l'angle de l'arbitraire (Walter Kälin, op. cit., p. 164 ss).

c) Les arguments développés par l'intéressée qui
reposent sur des éléments de fait qui n'ont pas été invoqués
en procédure cantonale sont en principe irrecevables, sous
réserve d'exceptions qui ne sont pas réalisées en l'espèce.
Cela signifie que, pour vérifier si le droit a ou non été
appliqué de manière arbitraire, le Tribunal fédéral se fonde
sur l'état de fait tel qu'il a été retenu dans l'arrêt atta-
qué, à moins que l'autorité cantonale n'ait constaté les
faits de manière inexacte ou incomplète en violation de la

Constitution (ATF 118 Ia 369 consid. 4d p. 371/372; 118 III
37 consid. 2a p. 39; 107 Ia 265 consid. 2a et les arrêts ci-
tés; Walter Kälin, op. cit., p. 369-371).

C'est à la lumière de ces principes que doivent
être appréciés les moyens soulevés par la
recourante à
l'encontre de l'application du droit cantonal.

3.- a) Le principe de l'interdiction de la double
imposition intercantonale (art. 46 al. 2 aCst. et 127 al. 3
1ère phrase Cst.) s'oppose à ce qu'un contribuable soit con-
crètement soumis, par deux ou plusieurs cantons, sur le même
objet, pendant la même période, à des impôts analogues (dou-
ble imposition effective) ou qu'un canton excède les limites
de sa souveraineté fiscale et, violant des règles de conflit
jurisprudentielles, prétende prélever un impôt dont la per-
ception est de la seule compétence d'un autre canton (double
imposition virtuelle); en outre, le Tribunal fédéral a dé-
duit des art. 46 al. 2 aCst. et 127 al. 3 1ère phrase Cst.,
le principe selon lequel un canton ne peut imposer plus
lourdement un contribuable du fait qu'il est assujetti aux
impôts dans un autre canton (ATF 125 I 458 consid. 2a p.
466/467, 54 consid. 1b p. 55/56; 121 I 259 consid. 2a p. 261
et références).

b) En l'espèce, les commissions de courtage en
cause ont été assujetties par le canton de Genève à l'impôt
sur le bénéfice des personnes morales de la période fiscale
1995 et par le canton de Vaud à l'impôt sur les gains immo-
biliers. Il appartient donc au Tribunal fédéral - qui n'a
encore jamais posé de règles de conflit explicites concer-
nant les commissions de courtage immobilier - de déterminer
à quel canton revient le droit de les imposer.

4.- a) L'Administration cantonale des impôts vau-
doise, se fondant sur l'art. 40 al. 3 LI, attribue la part
de la commission qui n'excède pas le montant usuel au canton
de domicile ou de siège du bénéficiaire et l'autre partie,
qualifiée de bénéfice immobilier, au canton de situation de
l'immeuble, le taux usuel de la commission de courtage ré-
sultant en règle générale des tarifs établis par les Cham-
bres de courtiers (Jean-Blaise Paschoud, Quelques aspects de
l'imposition des gains immobiliers en droit fiscal intercan-
tonal, in: RDAF 1970, p. 285 ss, 296). La Conférence suisse
des impôts adopte la même position dans son commentaire de
l'art. 4 al. 1 LHID.

Dans l'arrêt attaqué, le Tribunal administratif a
jugé en revanche que, lorsque la commission de courtage im-
mobilier excède le tarif usuel, l'intégralité de la commis-
sion doit être considérée comme gain immobilier imposable
dans le canton de situation de l'immeuble.

La recourante et l'Administration fiscale cantonale
genevoise estiment que la commission de courtage immobilier
est un produit de l'activité commerciale du courtier dont
l'imposition appartient au canton du domicile ou du siège de
ce dernier.

b) Selon l'art. 412 CO, le courtage est un contrat
par lequel le courtier est chargé, moyennant un salaire,
soit d'indiquer à l'autre partie l'occasion de conclure une
convention, soit de lui servir d'intermédiaire pour la négo-
ciation d'un contrat. La rémunération qui n'est pas détermi-
née s'acquitte, s'il existe un tarif, par le paiement du
salaire qui y est prévu; à défaut de tarif, le salaire usuel
est réputé convenu (art. 414 CO).

La rémunération du courtier en immeubles est en
principe proportionnelle au prix de vente de l'immeuble (cf.
à ce sujet, Werner Schweiger, Der Mäklerlohn - Voraussetzun-
gen und Bemessung, thèse Zurich, 1986, p. 205). A titre
d'exemple, tel que cela ressort de l'article premier du Ta-
rif professionnel adopté par la Société vaudoise des régis-
seurs et courtiers en immeubles et en fonds de commerce (en
vigueur en 1994), celle-ci recommande à ses membres un taux
de 5% sur la première tranche jusqu'à 500'000 fr., 3% sur la
tranche entre 500'000 fr. et 4'000'000 fr. et 2% sur la
tranche au-delà de 4'000'000 fr., au minimum 2'000 fr.

L'examen des rapports juridiques et économiques qui
constituent une relation de courtage immobilier démontre
qu'il existe un rapport de connexité étroit entre la commis-
sion de courtage et l'immeuble aliéné par l'entremise d'un
courtier. Le propriétaire qui stipule pareille rémunération
renonce à une part de la valeur de son immeuble, qu'il mobi-
lise au profit d'un courtier. De même, le courtier, par le
contrat de courtage, obtient une partie de la valeur du bien
immobilier. Dans cette mesure, le courtier réalise un gain
en étroite connexité avec l'immeuble. Ce lien n'est pas dé-
noué du seul fait que le courtier n'est pas propriétaire de
l'immeuble aliéné, puisque précisément il participe à son
aliénation et en dispose en partie, à tout le moins économi-
quement (Jean-Blaise Paschoud, L'imposition des immeubles et
de leur rendement en droit fiscal intercantonal [ci-après:
L'imposition des immeubles], thèse Lausanne 1970, p. 50). Il
perçoit ainsi un gain en rapport étroit avec l'immeuble,
même s'il ne bénéficie que d'un droit personnel tiré d'un
contrat de courtage et même si, comme pour le commerçant en
immeubles, il s'agit aussi pour une part de la rémunération
de son activité personnelle. Au demeurant, le commerçant qui
s'acquitte personnellement des travaux et services offerts
par un courtier est imposé sur le total de son gain au lieu
de situation de l'immeuble. On ne voit pas ce qui justifie-

rait qu'une activité identique soit imposée tantôt au lieu
de situation de l'immeuble tantôt au siège du contribuable
selon qu'elle est le fait d'un commerçant ou d'un courtier
en immeubles.

En outre, il est inutile et serait d'ailleurs dif-
ficile, tant le marché immobilier a subi de profonds change-
ments ces dernières années, de distinguer la part - même
usuelle - de la rémunération due à l'activité profession-
nelle du courtier et celle qui provient d'une plus-value de
l'immeuble résultant des circonstances extérieures. A cet
égard, la présente espèce en est l'illustration, les taux
dits "usuels" variant, selon la recourante, à la fois en
fonction de la nationalité des clients, selon le type de
marché et les prestations fournies.

Par conséquent, le droit d'imposer la commission de
courtage doit être attribué exclusivement au canton de si-
tuation de l'immeuble, à l'instar de ce que le Tribunal fé-
déral a décidé dès 1953 en matière de commerce professionnel
d'immeubles (cf. sur ce point ATF 79 I 142 consid. 2 p. 145,
148; Jean-Blaise Paschoud, L'imposition des immeubles, p. 31
s. et Ferdinand Zuppinger, Die Besteuerung des Liegenschaf-
tenhändlers im interkantonalen Verhältnis, Berne 1971, p.
29). Dans un ancien arrêt du 18 juillet 1935, le Tribunal
fédéral avait d'ailleurs déjà considéré que le courtier en
immeubles et le commerçant d'immeubles devaient être traités
de manière identique (Kurt Locher/Peter Locher, op. cit.,
par. 7, I D, Vorbemerkung, n° 4).

c) aa) A l'appui du droit exclusif d'imposition du
canton du domicile ou du siège du courtier, la recourante se
prévaut d'un arrêt du Tribunal fédéral du 23 octobre 1957
selon lequel "à l'inverse des situations dans lesquelles il
y a simple relation de courtage, le gain résultant de la
vente d'un droit d'emption provient directement de l'immeu-

ble et non pas de l'activité commerciale de l'aliénateur"
(ATF 83 I 329 consid. 3 p. 334). Cet arrêt, encore largement
inspiré de la jurisprudence antérieure à 1953, n'avait tou-
tefois pas pour objet l'attribution du droit d'imposer une
commission de courtage immobilier, de sorte qu'il ne saurait
préjuger la solution résultant d'un examen complet de la
question.

bb) La recourante invoque aussi, à l'appui de sa
position, les art. 4 al. 1 et 21 al. 2 LHID.

Art. 4 al. 1 LHID.
"Les personnes physiques qui, au regard du droit
fiscal, ne sont ni domiciliées ni en séjour dans
le canton sont assujetties à l'impôt à raison du
rattachement économique lorsqu'elles [...] servent
d'intermédiaires dans des opérations immobilières
ou font du commerce immobilier."

Art. 21 al. 2 LHID.
"Les personnes morales qui ont leur siège ou leur
administration effective à l'étranger sont en ou-
tre assujetties à l'impôt, lorsque:
[...]
b. Elles font le commerce d'immeubles sis dans le
canton ou servent d'intermédiaires dans de tel-
les opérations."

L'art. 21 LHID ne mentionne aucun rattachement
équivalent pour les personnes morales dont le siège ou l'ad-
ministration effective se trouve hors du canton.

En vertu de ces articles, qui ne sont pas applica-
bles au cas d'espèce antérieur à leur entrée en vigueur le
1er janvier 2001 mais qu'il convient de ne pas ignorer pour
le choix d'une solution qui doit garder sa valeur à l'ave-
nir, le commerce et le courtage immobiliers constituent un
rattachement économique sur le plan international et inter-
cantonal pour les personnes physiques. Pour les personnes
morales en revanche, il n'en constitue un que sur le plan
international.

Citant la doctrine unanime, la recourante est
d'avis que la réglementation de l'art. 4 al. 1 LHID est dé-
ficiente (Ernst Höhn/Peter Mäusli, Interkantonales Steuer-
recht, 4ème éd., Berne 2000, p. 19 et les références citées;
Maja Bauer-Balmelli/Philip Robinson, in: Kommentar zum
Schweizerischen Steuerrecht I/1, Bâle 1997, n° 9 et 33 ad
art. 4 LHID; Jean-Marc Rivier, L'assujettissement à l'impôt
des personnes physiques, in: Archives 61, p. 286; Peter Lo-
cher, Einführung in das interkantonale Steuerrecht, Berne
1999, p. 55 et références citées dans la note 67; COHA, ch.
3 ad art. 4 al. 1 LHID; Peter Locher, Steuerharmonisierung
und interkantonales Steuerrecht, in: Archives 65, 609 ss, p.
622). Selon elle, le législateur ne voulait pas traiter dif-
féremment les personnes physiques et les personnes morales.
Il ne voulait pas non plus déroger aux règles jurispruden-
tielles actuelles concernant les relations intercantonales.
Il conviendrait donc d'adopter pour les personnes physiques
une disposition analogue à celle prévue par l'art. 21 al. 2
lettre b LHID pour les personnes morales et d'attribuer,
dans les relations intercantonales, le droit d'imposer la
commission de courtage immobilier au canton de domicile ou
du siège du courtier.

Cette opinion n'est que partiellement fondée. S'il
faut convenir avec la doctrine que le législateur n'a, sem-
ble-t-il, pas voulu instituer un régime différent pour les
personnes morales et les personnes physiques, en revanche,
on doit constater que ni les travaux parlementaires, muets
sur ce point précis, ni les motifs de la doctrine ne per-
mettent d'affirmer qu'entre les deux solutions celle de
l'art. 21 al. 2 lettre b LHID serait celle que voulait le
législateur. En particulier, on ne saurait admettre que la
solution de l'art. 4 al. 1 LHID, selon laquelle l'intermé-
diaire dans des opérations immobilières a un domicile fiscal
spécial dans le canton de situation de l'immeuble, conduit à
mettre en péril l'ensemble de la jurisprudence du Tribunal

fédéral relative à l'imposition du commerce d'immeubles dans
les relations intercantonales (Peter Locher, Steuerharmoni-
sierung und interkantonales Steuerrecht, in: Archives 65,
609 ss, p. 622; cf. aussi COHA, ch. 2 ad art. 4 al. 1 LHID).
En effet, force est de constater que l'art. 21 al. 2 lettre
b LHID met également en péril la jurisprudence du Tribunal
fédéral en supprimant le rattachement économique intercan-
tonal pour les personnes morales qui font commerce d'immeu-
bles (cf. par exemple: Kurt Locher/Peter Locher, op. cit.,
par. 9, II n° 18 résumé in: ATF 98 I 198). La solution prô-
née par la doctrine n'étant par conséquent pas exempte de
critique, il suffit de constater que les art. 4 et 21 LHID
ne sont d'aucune aide en la présente cause.

d) Il résulte de ce qui précède que le droit d'im-
poser les commissions de courtage immobilier appartient ex-
clusivement au canton de situation des immeubles. Par consé-
quent, en confirmant le droit du canton de Vaud d'imposer
l'intégralité du montant des commissions de courtage, le
Tribunal administratif n'a pas violé l'art. 127 al. 3 1ère
phrase Cst. (art. 46 al. 2 aCst.).

En revanche, en incluant dans l'assiette de calcul
de l'impôt sur le bénéfice de la recourante les commissions
litigieuses, les décisions des 18 mars 1997 et du 25 décem-
bre 1995 rendues par l'Administration fiscale cantonale ge-
nevoise violent l'art. 127 al. 3 1ère phrase Cst. (art. 46
aCst.).

5.- La recourante demande, à titre subsidiaire,
dans l'hypothèse où le droit d'imposer reviendrait au canton
de situation de l'immeuble, que ce droit exclusif soit as-
sorti de l'obligation pour ce canton de déduire toutes les
dépenses qui ont servi à sa réalisation.

a) Selon la jurisprudence en matière de bénéfices
immobiliers réalisés par des commerçants d'immeubles, le
Tribunal fédéral a considéré que le canton du siège ou de
domicile du commerçant, privé du droit d'imposer le bénéfice
réalisé lors de la vente d'immeubles situés hors du canton
doit être en contrepartie libéré de l'obligation de déduire
les dépenses consenties pour obtenir ce revenu. Pareille li-
bération, a-t-il précisé, ne saurait toutefois avoir lieu au
détriment du contribuable, dont toutes les dépenses ayant
servi à l'acquisition du revenu doivent être prises en con-
sidération. Par conséquent, en contrepartie de son droit
exclusif d'imposer le bénéfice immobilier, le canton de si-
tuation de l'immeuble doit admettre la déduction de l'ensem-
ble des frais en relation avec le gain (Kurt Locher/Peter
Locher, op.cit., par. 7, I D n° 17, 21, 40, 41 et 43; cf.
Ernst Höhn/Peter Mäusli, op. cit., p. 50 ss, p. 525 ss et
les nombreuses références jurisprudentielles). Parmi les
frais déductibles dans le canton de situation de l'immeuble,
la jurisprudence range les frais directs, les intérêts pas-
sifs (Kurt Locher/Peter Locher, op. cit., par. 7, I D n° 17,
par. 9, II n° 15, 17, 18, 24, 26, 31), une part des frais
généraux du siège de l'entreprise, fixée de manière forfai-

taire à 5% du prix de vente (Kurt Locher/Peter Locher, op.
cit., par. 7, ID n° 22, 31, 33, 38, 39) ainsi que, le cas
échéant, l'impôt sur les gains immobiliers (Kurt Locher/
Peter Locher, op. cit., par. 9, II n° 18, 20).

La commission de courtage immobilier étant soumise
à une règle de conflit semblable à celle appliquée au com-
merce professionnel d'immeubles, il appartient au canton de
situation de l'immeuble de déduire l'ensemble des dépenses
en relation avec l'obtention des commissions de courtage im-
mobilier qu'il entend imposer.

b) En l'espèce, l'autorité intimée a considéré que
la défalcation d'un montant forfaitaire de 5% du prix de
vente des immeubles qui étaient l'objet des courtages à ti-
tre de frais constituait une déduction globale "correcte,
voire même généreuse", la recourante n'ayant pas établi les
montants des dépenses relatives à l'acquisition des commis-
sions en cause ni démontré que certaines commissions consen-
ties par elle étaient en relation avec les ventes d'immeu-
bles dans le canton de Vaud.

Si un forfait de 5% du prix de vente peut certes se
justifier pour les frais généraux présumés d'un commerçant
d'immeubles au titre de règle générale, il n'en va pas né-
cessairement de même pour les courtiers en immeubles dont
les activités et par conséquent les frais généraux ne sont
pas identiques aux premiers, d'autant que la rémunération du
courtier ne correspond, dans la règle, qu'à un petit pour-
centage du prix de vente de l'immeuble. Le Tribunal adminis-
tratif a retenu que les frais généraux du courtier devraient
être plus bas que ceux du commerçant en immeubles, il n'a
toutefois pas établi de proportion, puisqu'il s'est attaché
à définir un montant global pour l'ensemble des frais d'ob-
tention des commissions, sans distinguer entre les types de
frais décrits ci-dessus. Dans ces conditions, la recourante
doit avoir encore une fois la possibilité d'établir ses
frais effectifs. A défaut de collaboration de sa part, il
conviendra de fixer un forfait, le cas échéant, propre à
l'activité du courtier en immeubles.

c) Par conséquent, le dossier doit être retourné à
l'Administration cantonale des impôts vaudoise pour réexamen
dans le sens des considérants.

6.- La recourante se plaint d'être plus lourdement
imposée que les sociétés de courtage immobilier dont le
siège se trouve dans le canton de Vaud; l'impôt sur les

gains immobiliers serait moins avantageux que l'impôt sur le
bénéfice des personnes morales; en particulier elle n'aurait
pas bénéficié des mêmes déductions que les sociétés indigè-
nes.

a) La jurisprudence a déduit de l'art. 46 al. 2
aCst. (art. 127 al. 3 1ère phrase Cst.) le principe selon
lequel un canton ne peut imposer plus lourdement un contri-
buable du fait qu'il n'est pas soumis entièrement à sa sou-
veraineté fiscale, mais qu'il est aussi assujetti aux impôts
dans un autre canton (ATF 125 I 458 consid. 2a p. 467; 121 I
259 consid. 2a p. 261 et références). Toutefois, il a été
admis que la différence des régimes fiscaux auxquels sont
soumis les commerçants d'immeubles sur le plan intercantonal
par rapport à ceux qui ont leur siège (ou un établissement
stable) dans le canton de situation de l'immeuble n'est pas
contraire à l'interdiction de la double imposition intercan-
tonale (Archives 33 p. 169 consid. 3; Revue fiscale 49 422
consid. 3 p. 424). En outre, en vertu des règles de double
imposition intercantonale, le canton de situation de l'im-
meuble doit admettre en déduction l'ensemble des dépenses
relatives à l'obtention du bénéfice immobilier sans égard à
la manière dont il a réglé son impôt sur les gains immobi-
liers (Ernst Höhn/Peter Mäusli, op. cit., p. 525, n° 50 ss
et les nombreuses références jurisprudentielles). Il n'y a
pas de motifs de revenir sur cette jurisprudence, maintes
fois confirmée et qui doit être appliquée de manière analo-
gue aux commissions de courtage soumises à l'impôt sur les
gains immobiliers du canton de situation de l'immeuble (cf.
consid. 5 ci-dessus).

b) Il résulte de ce qui précède qu'en confirmant
que les commissions de courtage perçues par la recourante
pouvaient être soumises à l'impôt sur les gains immobiliers
par le canton de Vaud, qui plus est, compte tenu des dépen-
ses qui ont servi à leur obtention, le Tribunal administra-

tif n'a pas violé l'interdiction de l'imposition discrimina-
toire prévue par l'art. 127 al. 3 1ère phrase Cst. (art 46
al. 2 aCst.).

Il reste à examiner si le droit vaudois, interprété
sans arbitraire, autorise une telle imposition.

7.- La recourante soutient que l'interprétation et
l'application du droit cantonal vaudois relatif à l'impôt
sur les gains immobiliers par le Tribunal administratif se-
rait arbitraire et porterait atteinte au principe de la lé-
galité. Le grief de violation du principe de la légalité ne
revêt toutefois pas de portée propre en la présente cause.

a) Appelé, comme en l'espèce par la voie du recours
de droit public, à revoir l'interprétation d'une norme sous
l'angle restreint de l'arbitraire (art. 9 Cst.), le Tribunal
fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité
cantonale de dernière instance que si celle-ci apparaît in-
soutenable, en contradiction manifeste avec la situation ef-
fective, adoptée sans motifs objectifs et en violation d'un
droit certain. En revanche, si l'application de la loi dé-
fendue par l'autorité cantonale ne s'avère pas déraisonnable
ou manifestement contraire au sens et au but de la disposi-
tion ou de la législation en cause, cette interprétation
sera confirmée, même si une autre solution - éventuellement
plus judicieuse - paraît possible (ATF 117 Ia 97 consid. 5b
p. 106, 292 consid. 3a p. 294 et les références citées; sur
la notion d'arbitraire, cf. ATF 125 I 166 consid. 2a p. 168
et la jurisprudence citée).

b) En vertu de l'art. 40 al. 1 LI, l'impôt sur les
gains immobiliers a pour objet le gain net provenant de
l'aliénation d'immeubles situés dans le canton ou d'une par-
tie de ceux-ci. En outre lorsque le contribuable est domici-
lié ou a son siège hors du canton, tout gain qui découle de

sa participation à une opération immobilière dans le canton
et dont le montant excède celui d'une commission ou d'un in-
térêt usuels est assimilé à un gain immobilier (art. 40 al.
3 LI). Le gain imposable est constitué par la différence en-
tre le produit de l'aliénation et le prix d'acquisition aug-
menté des impenses (art. 42 al. 1 LI). L'impôt est dû par
l'aliénateur (art. 50 bis al. 1 LI).

c) aa) Dans un premier grief, la recourante re-
proche au Tribunal administratif d'être tombé dans l'arbi-
traire en lui appliquant l'art. 40 al. 3 LI. Selon elle,
l'imposition de la commission de courtage ne devrait inter-
venir que dans la mesure où elle est supérieure au taux
usuel. Or, elle aurait démontré avoir appliqué un taux usuel
pour les ventes en cause. En outre, l'introduction dans le
système légal de normes établies par le secteur privé con-
duirait, à son avis, à un résultat insoutenable parce
qu'elle limiterait la rémunération admissible à ce que re-
cevrait un courtier dont l'activité serait restreinte au
strict minimum.

Dans son arrêt, le Tribunal administratif a retenu
que la notion de taux usuel renvoie aux taux proposés par la
Société vaudoise des régisseurs et courtiers en immeubles et
en fonds de commerce. A cet égard et contrairement à ses
propres affirmations en procédure cantonale (cf. allégué n°
32 du mémoire de recours du 27 avril 2000), la recourante
entend démontrer pour la première fois devant le Tribunal
fédéral qu'elle a appliqué un taux usuel pour les ventes en
cause. Cet argument repose toutefois sur des éléments de
fait qui n'ont pas été invoqués en procédure cantonale. Il
est donc irrecevable (cf. consid. 2c ci-dessus).

Au surplus, l'interprétation de l'autorité intimée
échappe au grief d'arbitraire. En alléguant que l'introduc-
tion dans le système légal de normes établies par le secteur

privé conduit à limiter de manière insoutenable la rémunéra-
tion admissible du courtier, la recourante perd de vue que,
conformément à la volonté du législateur vaudois, l'art. 40
al. 3 LI est une norme fiscale dont le but est de conférer
au "gain réalisé par le professionnel (dont le courtier en
immeubles nommément cité) dans de telles conditions [...] le
caractère d'un gain immobilier imposable dans le canton de
situation de l'immeuble" (Bulletin des séances du Grand Con-
seil du canton de Vaud, Automne 1962, p. 248 ss, 249, 253 et
258). Pareille interprétation ne limite en rien l'activité
de la recourante, qui conserve l'entière liberté contrac-
tuelle, dans les limites toutefois de l'art. 417 CO, de se
faire stipuler un salaire supérieur aux taux usuels tels que
retenus par l'autorité intimée. Les commissions de courtage
pratiquées par la recourante, qui sont largement supérieures
aux taux usuels, entrent dans les prévisions de l'art. 40
al. 3 LI. La question de savoir si tel serait encore le cas
si elles étaient inférieures à ces taux ne se pose pas en
l'espèce.

Par conséquent, en interprétant la notion de taux
usuel de l'art. 40 al. 3 LI à la lumière des recommandations
en la matière de la Société vaudoise des régisseurs et cour-
tiers en immeubles et en fonds de commerce et en appliquant
cet article aux commissions de courtage immobilier en cause,
le Tribunal administratif n'est pas tombé dans l'arbitraire.

bb) Dans un second grief, la recourante reproche au
Tribunal administratif d'être tombé dans l'arbitraire lors-
qu'il a considéré que l'interprétation des notions de gain
net et d'aliénateur des art. 40 al. 1 et 50bis al. 1 LI per-
mettent d'imposer les commissions de courtage en cause et de
percevoir cet impôt dans son chef.

Dans l'exposé des motifs à l'appui du projet de loi
modifiant la loi du 26 novembre 1956 sur les impôts directs
cantonaux, le Conseil d'Etat a exposé le souhait d'intro-
duire "un impôt généralisé sur la plus-value immobilière",
par quoi il faut "entendre un impôt susceptible d'atteindre
tous les gains immobiliers". Il a en outre précisé dans
cette ligne que "la notion de l'aliénation, définie à l'ar-
ticle 40, est extrêmement large, puisqu'elle permet d'assi-
miler à un transfert immobilier tout acte qui a pour effet
de transférer à un tiers le pouvoir de disposition réel ou
économique d'un immeuble". Il en tire la conséquence que "le
gain réalisé par le professionnel, (dont le courtier en im-
meubles nommément cité) dans de telles conditions a [donc]
le caractère d'un gain immobilier imposable dans le canton
de situation de l'immeuble" (Bulletin des séances du Grand
Conseil du canton de Vaud, Automne 1962, p. 248 ss, 249, 253
et 258). Dans ces conditions, force est d'admettre que l'in-
terprétation du Tribunal administratif procède directement
de la volonté du législateur vaudois. Or, sous l'angle res-
treint de l'arbitraire, le Tribunal fédéral ne saurait écar-
ter cette interprétation au profit d'une autre - littérale -
également possible, défendue par la recourante.

Par conséquent, en considérant que les commissions
de courtage de la recourante sont assujetties à l'impôt sur
les gains immobiliers du canton de Vaud et que le débiteur
de cet impôt est la recourante, le Tribunal administratif du
canton de Vaud n'a pas interprété de manière arbitraire le
droit cantonal.

8.- Au vu de ce qui précède, en tant qu'il est di-
rigé contre le canton de Vaud, le présente recours doit être
très partiellement admis dans la mesure où il est recevable.
L'arrêt rendu le 7 novembre 2000 par le Tribunal administra-

tif est annulé et le dossier renvoyé à l'Administration can-
tonale des impôts vaudoise pour nouvelle décision au sens
des considérants.

En tant qu'il est dirigé contre le canton de Ge-
nève, le présent recours est admis dans la mesure où il est
recevable. Les décisions de taxation rendues les 18 mars
1997 et 25 décembre 1995 par l'Administration fiscale canto-
nale genevoise sont annulées et le dossier renvoyé à l'Admi-
nistration fiscale cantonale genevoise pour nouvelle déci-
sion dans le sens des considérants et restitution de l'impôt
perçu en trop.

Succombant dans ses conclusions principales, la re-
courante doit supporter les frais judiciaires (art. 156 al.
1, 153 et 153a OJ). Il ne lui est pas alloué d'indemnité de
partie pour le même motif (art. 159 al. 1 OJ). Succombant
aussi, le canton de Genève, dont les intérêts pécuniaires
sont en cause, doit également supporter les frais judiciai-
res.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l ,

1. Admet très partiellement le recours de droit public
dans la mesure où il est recevable, en tant qu'il est dirigé
contre le canton de Vaud et annule l'arrêt rendu le 7 novem-
bre 2000 par le Tribunal administratif, le dossier étant
renvoyé à l'Administration cantonale des impôts du canton de
Vaud pour nouvelle décision au sens des considérants.

2. Admet le recours de droit public dans la mesure où
il est recevable en tant qu'il est dirigé contre le canton
de Genève et annule les décisions de taxation rendues les 18

mars 1997 et 25 décembre 1995 par l'Administration fiscale
cantonale du canton de Genève, le dossier étant renvoyé à
l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève pour
nouvelle décision dans le sens des considérants et restitu-
tion du trop-perçu d'impôt y relatif.

3. Met un émolument judiciaire de 4'000 fr. à charge
de la recourante et du canton de Genève, par moitié chacun.

4. N'alloue pas d'indemnité de partie.

5. Communique le présent arrêt en copie au mandataire
de la recourante, au Tribunal administratif et à l'Adminis-
tration cantonale des
impôts du canton de Vaud ainsi qu'à
l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève.

Lausanne, le 8 janvier 2002
DCE/otd

Au nom de la IIe Cour de droit public
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.289/2000
Date de la décision : 08/01/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-01-08;2p.289.2000 ?
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