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28/12/2001 | SUISSE | N°U.514/00

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 décembre 2001, U.514/00


«AZA 7»
U 514/00 Mh

IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, et Ferrari, Jaeger,
suppléant. Greffier : M. Vallat

Arrêt du 28 décembre 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Philippe
Nordmann, avocat, place Pépinet 4, 1003 Lausanne,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- A.________ travaillait depui

s le mois de février
1985 comme magasinier et responsable technique au sein de
la société X.________. A ce titre, il était ass...

«AZA 7»
U 514/00 Mh

IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, et Ferrari, Jaeger,
suppléant. Greffier : M. Vallat

Arrêt du 28 décembre 2001

dans la cause

A.________, recourant, représenté par Maître Philippe
Nordmann, avocat, place Pépinet 4, 1003 Lausanne,

contre

Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne, intimée,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- A.________ travaillait depuis le mois de février
1985 comme magasinier et responsable technique au sein de
la société X.________. A ce titre, il était assuré auprès
de la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'acci-
dents (ci-après : CNA) contre les accidents non profes-
sionnels ainsi que les accidents et les maladies profes-
sionnels.

A partir du début de l'année 1992, l'assuré a progres-
sivement développé une pathologie respiratoire. Le docteur
B.________, spécialiste FMH en médecine interne et des
maladies des poumons, a posé le diagnostic de syndrome
paroxystique para-asthmatique, en rapport avec l'exposition
professionnelle à des poussières. Après avoir fait examiner
A.________ par le docteur C.________, de la division de
médecine du travail, qui relevait chez l'assuré la présence
d'autres affections sans relation avec la possible maladie
professionnelle (rapport du 29 août 1995), la CNA lui a,
par décision du 21 décembre 1995, refusé toute prestation
en relation avec cette affection au motif que cette
dernière n'apparaissait pas due, d'une manière nettement
prépondérante, à son activité professionnelle. Ensuite de
l'opposition formée par A.________ contre cette décision,
la CNA a rendu à son endroit, le 30 janvier 1996, une
décision d'inaptitude à toutes les activités en contact
avec les poussières de céréales avec effet immédiat et elle
a, par ailleurs, repris l'instruction du cas par la mise en
oeuvre d'une expertise. Dans un rapport du 29 mars 1999,
les docteurs D.________ et E.________, de la Clinique
Y.________, ont confirmé l'origine professionnelle de
l'affection pulmonaire.
Dans l'intervalle, il est apparu, au mois de juin
1996, que l'assuré souffrait d'une grave affection intes-
tinale (adénocarcinome du rectum), qui a été traitée par
30 séances de radiothérapie préopératoire suivies d'inter-
ventions chirurgicales en août et octobre 1996.
La CNA a versé des indemnités journalières en cas de
changement d'occupation pour la période du 31 janvier au
31 mai 1996. L'assuré a, en outre, bénéficié d'indemnités
journalières versées par son assurance perte de gain en cas
de maladie du 6 mars 1995 au 26 avril 1997. Il a, par
ailleurs, été reconnu invalide à 100 % et mis au bénéfice
d'une rente entière de l'assurance-invalidité dès le
1er août 1997.

Par décision du 14 janvier 2000, confirmée sur opposi-
tion le 17 avril de la même année, la CNA a refusé l'octroi
d'indemnités pour changement d'occupation à l'échéance du
droit à l'indemnité journalière pour changement d'occupa-
tion, soit dès le 31 mai 1996, au motif que l'incapacité de
gain résultait, depuis le printemps 1996, d'une affection
maladive, pour laquelle A.________ avait été entièrement
pris en charge par l'assurance-maladie puis par l'AI, et
non de la décision d'inaptitude du 30 janvier 1996.

B.- Par jugement du 10 octobre 2000, le Tribunal des
assurances du canton de Vaud a rejeté le recours formé
contre la décision sur opposition du 17 avril 2000 par
l'assuré.

C.- Ce dernier interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement en concluant, avec dépens, à son
annulation et à l'octroi de l'indemnité en cas de change-
ment d'occupation. Il requiert par ailleurs le bénéfice de
l'assistance judiciaire pour la procédure fédérale.
La CNA a conclu au rejet du recours. L'Office fédéral
des assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- Le litige a pour objet le droit du recourant à
l'indemnité pour changement d'occupation au sens des
art. 86 à 88 de l'ordonnance du 19 décembre 1983 sur la
prévention des accidents et des maladies professionnels
(ordonnance sur la prévention des accidents [OPA;
RS 832.30]).

2.- Aux termes de l'art. 84 al. 2 LAA, les organes
d'exécution peuvent exclure d'un travail qui les mettrait
en danger, les assurés particulièrement exposés aux
accidents et maladies professionnels. Le Conseil fédéral

règle la question des indemnités à verser aux assurés qui,
par suite de leur exclusion de l'activité qu'ils exerçaient
précédemment, subissent un préjudice considérable dans leur
avancement et ne peuvent prétendre d'autres prestations
d'assurance.
Le Conseil fédéral a fait usage de cette compétence en
édictant les art. 83 ss OPA. Selon l'art. 86 al. 1 OPA,
dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 mai 2001 (RO 2001
1403, 1405), le travailleur qui a été définitivement ou
temporairement exclu d'un travail ou qui a été déclaré apte
à l'accomplir à certaines conditions reçoit de l'assureur
une indemnité pour changement d'occupation lorsque du fait
de la décision et malgré des conseils personnels et le
versement d'une indemnité journalière pour changement
d'occupation et compte tenu de l'effort que l'on peut
raisonnablement attendre de lui pour qu'il compense le
préjudice qu'il subit sur le marché du travail, ses
possibilités de gains demeurent considérablement réduites
(let. a) et que les autres conditions, sans pertinence pour
la solution du présent litige, prévues par les lettres b et
c de cette disposition sont cumulativement remplies.
Conformément à l'art. 89 al. 1 OPA, en corrélation
avec l'art. 40 LAA, si l'indemnité journalière pour change-
ment d'occupation ou l'indemnité pour changement d'occupa-
tion concourt avec les prestations d'autres assurances
sociales, elle est réduite dans la mesure où, ajoutée aux
prestations des autres assurances sociales, elle excède le
gain dont on peut présumer que l'assuré se trouve privé.

3.- a) En l'espèce, le recourant prétend le versement
d'une indemnité pour changement d'occupation dès mars 1995,
subsidiairement dès janvier 1996 et, en tous les cas, pour
la période postérieure au 31 mai 1996.

b) En ce qui concerne la période antérieure au 30 jan-
vier 1996, le recourant invoque qu'il subissait déjà le
préjudice décrit par l'art. 86 OPA lorsqu'il a dû inter-

rompre son activité pour cause de maladie professionnelle
en mars 1995. Cette argumentation procède cependant d'une
confusion entre l'indemnisation des conséquences économi-
ques d'une maladie professionnelle ouvrant le droit aux
prestations prévues par le titre troisième de la LAA - qui
était, en l'occurrence, l'objet de la décision rendue par
l'intimée le 21 décembre 1995 - et l'indemnité pour change-
ment d'occupation. Cette dernière ne constitue pas une
prestation d'assurance au sens strict du terme mais une
prestation accordée en relation avec la prévention des
accidents et maladies professionnels (ATF 126 V 204 con-
sid. 2c et les références citées; RAMA 2000 U 382 p. 254
consid. 3a) et suppose, partant, l'existence d'une mesure
relevant de ce domaine, soit une décision d'exclusion au
sens des art. 84 al. 2 LAA et 78 ss OPA (art. 86 al. 1
OPA). Une telle mesure n'a été prise en l'espèce que le
30 janvier 1996, si bien que le recourant ne saurait
prétendre d'indemnisation de ce chef avant cette date.

c) Le recourant ne conteste pas que des indemnités
journalières en cas de changement d'occupation (depuis le
1er juin 2001: indemnité journalière de transition [RO 2001
1403, 1405]) lui ont été allouées par l'intimée pour la
période du 31 janvier au 31 mai 1996. Il ne peut dès lors
prétendre en sus de cette indemnité journalière - qui est
destinée à pallier, à court terme, de graves difficultés
économiques (art. 83 OPA) -, pour la même période, l'in-
demnité en cas de changement d'occupation qui suppose que
ni les conseils personnels (art. 82 OPA), ni les efforts
que l'on peut raisonnablement attendre de l'assuré pour
qu'il compense le préjudice qu'il subit sur le marché du
travail, ni le versement d'une indemnité journalière au
sens des art. 83 ss OPA n'aient permis d'améliorer ses
possibilités de gain (art. 86 al. 1 let. a OPA, dans sa
teneur en vigueur jusqu'au 31 mai 2001; [RO 2001 1403,
1405]). Il faut déduire de ces conditions posées par
l'art. 86 al. 1 let. a OPA que ce n'est qu'à l'issue du

droit à l'indemnité journalière de transition, que peut se
poser la question du droit à l'indemnité pour changement
d'occupation, ce qui exclut que les périodes durant les-
quelles ces indemnités sont versées (respectivement, au
maximum, 4 mois et 4 ans [art. 84 al. 2 et 87 al. 3 OPA])
puissent coïncider. Au demeurant un cumul pur et simple de
ces deux prestations, qui correspondent respectivement à la
pleine indemnité journalière prévue par l'art. 17 al. 1 LAA
(art. 84 al. 1 OPA) et à 80 % de la perte de salaire que
subit l'assuré par suite de la décision d'inaptitude
(art. 87 al. 1 OPA), aboutirait à une surindemnisation
choquante.

d) En ce qui concerne la période postérieure au 31 mai
1996, les premiers juges ont retenu, en se référant au
rapport des docteurs D.________ et E.________, que
l'absence d'occupation durant cette période est due à des
motifs étrangers à la décision d'inaptitude, soit à
l'affection du système digestif dont la gravité est propre
à elle seule à causer une incapacité de travail
significative et qui a justifié l'octroi d'une rente
entière d'invalidité fondée sur une incapacité totale de
gain. Ils en ont déduit que le recourant ne pouvait
prétendre une indemnité pour changement d'occupation faute
de causalité entre la décision d'inaptitude et son
inactivité au-delà du 31 mai 1996.
Selon les pièces médicales figurant au dossier,
l'adénocarcinome dont a été atteint le recourant n'a été
diagnostiqué que le 19 juin 1996, alors que les premiers
symptômes, annoncés au médecin traitant au mois d'octobre
1995, n'avaient auparavant conduit à la prescription
d'aucun traitement. On ne saurait dès lors retenir, con-
trairement à l'opinion des premiers juges, que l'inactivité
du recourant aurait eu pour cause essentielle cette
affection dans l'intervalle du 1er au 19 juin 1996.
Il ressort toutefois également du dossier de la cause
que le recourant a perçu, du 1er mai 1996 au 26 avril 1997
soit durant une période recouvrant celle du 31 mai au
19 juin 1996, des indemnités journalières de 147 fr.,

correspondant à l'intégralité du gain assuré (53 300 fr.
l'an brut), versées par son assurance perte de gain en cas
de maladie. Le recourant ne peut dès lors prétendre,
jusqu'au 26 avril 1997 non plus, aucune indemnité pour
changement d'occupation (art. 89 al. 1 OPA en corrélation
avec l'art. 40 LAA).

e) Dans la mesure où le recourant a été mis au béné-
fice, dès le 1er août 1997, à l'issue d'une période de
carence qui a débuté en août 1996 (art. 29 al. 1 let. b
LAI), d'une rente entière correspondant à un degré d'inva-
lidité de 100 % en raison de son affection intestinale,
force est d'admettre que son inactivité n'est plus en rela-
tion de causalité avec la décision d'inaptitude du 30 jan-
vier 1996. A cet égard, c'est en vain qu'il soutient, de
manière au demeurant quelque peu contradictoire, que l'adé-
nocarcinome n'a, en réalité, atteint que sa capacité rési-
duelle de travail et que, même sans cette affection, il ne
pouvait exercer aucune activité physique quelconque en
raison de l'atteinte pulmonaire dont il souffre. Ce fai-
sant, il admet en effet implicitement que son inactivité
n'est plus en relation avec la décision d'inaptitude comme
telle, mais avec la seule maladie du système respiratoire
apparue depuis 1992 (cf. supra, consid. 3b).
Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que
les premiers juges ont nié le droit du recourant à l'indem-
nité pour changement d'occupation. Le recours se révèle
infondé.

4.- a) Le recourant a requis le bénéfice de l'assis-
tance judiciaire. La procédure ayant pour objet l'octroi ou
le refus de prestations d'assurance est gratuite (art. 134
OJ), si bien que cette demande ne porte que sur le droit à
l'assistance d'un conseil d'office.
Conformément à l'art. 152 al. 1 et 2 OJ, le tribunal
peut, au besoin, faire assister d'un avocat une partie
indigente et dont les conclusions ne paraissent pas vouées
à l'échec. Selon la jurisprudence, cela suppose notamment

que l'assistance d'un avocat soit nécessaire ou s'impose au
vu des circonstances (RCC 1989 347 consid. 2a).

b) En l'espèce, le recourant a été taxé pour la
période fiscale 1999-2000 sur un revenu de 2400 fr. et une
fortune de 17 000 fr., si bien que la condition de l'indi-
gence doit être considérée comme remplie. Le litige a pour
objet la prétention à une indemnité pour changement d'occu-
pation et pose des questions de fait et de droit suffisam-
ment complexes pour justifier l'intervention d'un avocat.
Le recours ne paraissant, par ailleurs, pas d'emblée dénué
de toute chance de succès, le recourant peut prétendre
l'assistance d'un conseil d'office.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. L'assistance judiciaire est accordée. Les honoraires
(y compris la taxe à la valeur ajoutée) de Me Philippe
Nordmann sont fixés à 2000 fr. pour la procédure
fédérale et seront supportés par la caisse du
tribunal.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal des assurances du canton de Vaud ainsi qu'à
l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 28 décembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral
des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.514/00
Date de la décision : 28/12/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-12-28;u.514.00 ?
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