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20/12/2001 | SUISSE | N°1P.675/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 20 décembre 2001, 1P.675/2001


{T 0/2}
1P.675/2001/col

Arrêt du 20 décembre 2001
Ire Cour de droit public

Les Juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Favre, Pont Veuthey, juge suppléante,
greffier Parmelin.

X.________, recourant, représenté par Me Olivier Boillat, avocat, rue
de la
Fontaine 9, case postale 3781, 1211 Genève 3,

contre

Y.________, représentée par Me Suzette Chevalier, avocate, rue
Pestalozzi 15,
1202 Genève, intimée,
Procureur général du

canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3,
Cour de cassation du canton de Genève, plac...

{T 0/2}
1P.675/2001/col

Arrêt du 20 décembre 2001
Ire Cour de droit public

Les Juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Favre, Pont Veuthey, juge suppléante,
greffier Parmelin.

X.________, recourant, représenté par Me Olivier Boillat, avocat, rue
de la
Fontaine 9, case postale 3781, 1211 Genève 3,

contre

Y.________, représentée par Me Suzette Chevalier, avocate, rue
Pestalozzi 15,
1202 Genève, intimée,
Procureur général du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3565, 1211 Genève 3,
Cour de cassation du canton de Genève, place du Bourg-de-Four 1, case
postale
3108, 1211 Genève 3.

procédure pénale; appréciation des preuves

(recours de droit public contre l'arrêt de la Cour de cassation du
canton de
Genève du 14 septembre 2001)

Faits:

A.
Le 25 avril 2000, Y.________, née le 20 mars 1973, a déposé plainte
contre
X.________ pour chantage, extorsion, menaces, lésions corporelles
simples et
viol.
Elle exposait en substance avoir fait la connaissance, en 1992, de
X.________, de dix ans son aîné. Ils ont décidé de vivre ensemble et
ont
emménagé dans un appartement commun en février 1996. Leur relation
s'est peu
à peu dégradée. Selon la jeune femme, X.________ aurait adopté à son
égard un
comportement de plus en plus autoritaire, exigeant qu'elle lui
remette son
argent, l'humiliant et l'injuriant en public, lui faisant subir des
violences
physiques et la terrorisant au point qu'elle est devenue dépressive et
anorexique.
Le 1er octobre 1998, elle a profité de l'absence de son ami pour
s'installer
dans son propre studio, avant de lui annoncer quelques jours plus tard
qu'elle mettait un terme à leur relation. Celui-ci a très mal
supporté cette
séparation et exigé que son ex-amie le dédommage pour les frais qu'il
aurait
consentis en sa faveur durant ses études, en la menaçant notamment de
venir
l'importuner sur son lieu de travail et de s'en prendre physiquement
à elle
et à ses proches. Elle aurait ainsi versé la somme de 10'000 fr. pour
récupérer la piano qu'elle avait laissé au domicile de X.________. Le
20
novembre 1998, elle lui aurait en outre remis, sous la menace, une
somme de
35'000 fr. empruntée à la Banque Procrédit de Genève, en exécution
d'une
reconnaissance de dette signée sous la contrainte le 21 septembre
1998, qu'il
aurait refusé de lui restituer. Par la suite, elle lui aurait encore
donné
1'000 fr. après avoir vainement tenté de contracter un nouvel emprunt
de
35'000 fr. Elle aurait également signé une reconnaissance de dette de
20'000
fr. Enfin, elle aurait versé sur le compte de son ex-ami des acomptes
mensuels de 500 fr. entre le 29 avril 1999 et le 30 mars 2000, en
déduction
de son salaire d'institutrice. En février 1999, X.________ l'aurait
invitée à
passer à son appartement pour discuter. Il l'aurait contrainte par la
violence et la menace à entretenir des relations intimes. Il se
serait en
outre par la suite rendu à deux reprises dans son studio et l'aurait
forcée à
avoir un rapport sexuel complet avec lui.
X.________ a nié l'intégralité des accusations portées contre lui.
S'il a
reconnu avoir touché de la plaignante 10'000 fr. et 500 fr. par mois
entre
avril 1999 et mars 2000, il s'agissait, selon lui, d'une contribution
volontaire aux frais d'entretien pour la période de leur vie commune
durant
laquelle elle étudiait.
L'instruction pénale a permis d'établir que, de septembre 1996 à
septembre
1997, X.________ a perçu plus de 32'000 fr. de prestations de chômage
alors
qu'il réalisait des revenus du même ordre de grandeur en travaillant
au noir.

B.
Par arrêt du 21 mars 2001, la Cour correctionnelle du canton de
Genève,
siégeant sans le concours du jury (ci-après: la Cour
correctionnelle), a
reconnu X.________ coupable d'extorsions, de viol et d'infraction à
l'art.
105 de la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et
l'indemnité en
cas d'insolvabilité et l'a condamné à deux ans de réclusion et à son
expulsion du territoire suisse pour une durée de sept ans, avec sursis
pendant cinq ans. Elle l'a en outre astreint à verser à Y.________
les sommes
de 57'015.20 fr. en remboursement de son dommage matériel et de
10'000 fr. à
titre de réparation du tort moral.
Les premiers juges ont admis que l'accusé avait fait peser sur sa
victime,
nettement plus jeune que lui, un ensemble de manoeuvres d'intimidation
tombant sous le coup de l'art. 156 ch. 1 CP, qu'il avait réussi à lui
faire
signer une reconnaissance de dette de 35'000 fr. et à lui faire
verser 10'000
fr. pour obtenir la restitution du piano, auquel elle était très
attachée,
après avoir menacé de le détériorer avec de l'acide. Ils ont
également retenu
que X.________ avait, toujours par la menace, contraint la plaignante
à
souscrire un emprunt de 35'000 fr. auprès de la Banque Procrédit, à
Genève,
puis à lui remettre cette somme et à se faire verser des acomptes
mensuels de
500 fr. pour un montant total de 5'500 fr. En revanche, en l'absence
de
preuves matérielles, ils ont acquitté le prévenu de l'accusation
d'avoir
extorqué à la plaignante une reconnaissance de dette à hauteur de
20'000 fr.
et de l'avoir contrainte de retirer la somme de 1'000 fr. de son
compte,
après avoir vainement tenté d'obtenir un nouvel emprunt.
S'agissant des accusations de viols et d'abus sexuels, la Cour
correctionnelle a retenu un seul viol commis sur Y.________ au
domicile de
cette dernière, en se fondant sur le témoignage de la collègue de
travail de
la plaignante, A.________, à laquelle celle-ci s'était confiée; elle
n'a pas
retenu les deux autres viols parce que les déclarations de la victime
avaient
varié quant aux dates et aux circonstances de ces infractions.
Statuant par arrêt du 14 septembre 2001 sur un recours du condamné,
la Cour
de cassation du canton de Genève (ci-après: la Cour de cassation ou
la cour
cantonale) a confirmé ce jugement.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, X.________ demande au
Tribunal fédéral d'annuler cet arrêt. Invoquant les art. 9, 29 al. 2,
32 al.
1 Cst. et 6 § 2 CEDH, il reproche à la Cour de cassation d'avoir
violé les
principes constitutionnels de la présomption d'innocence, de
l'interdiction
de l'arbitraire et du droit à la motivation, en confirmant sa
condamnation
pour extorsions et viol. Il requiert l'assistance judiciaire.
La Cour de cassation se réfère à son arrêt. Y.________ conclut au
rejet du
recours. Le Procureur général du canton de Genève propose également
de le
rejeter dans la mesure où il est recevable.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le pourvoi en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal
fédéral n'est
pas ouvert pour se plaindre d'une appréciation arbitraire des preuves
et des
constatations de fait qui en découlent (ATF 124 IV 81 consid. 2a p.
83) ou
pour invoquer la violation directe d'un droit constitutionnel ou
conventionnel, tel que la présomption d'innocence consacrée aux art.
32 al. 1
Cst. et 6 § 2 CEDH (ATF 120 Ia 31 consid. 2b p. 35/36). Au vu des
arguments
soulevés, seul le recours de droit public est ouvert en l'occurrence.
Le recourant est directement touché par l'arrêt attaqué qui le
condamne à une
peine de deux ans de réclusion et à son expulsion du territoire
suisse pour
une durée de sept ans, avec sursis pendant cinq ans; il a un intérêt
personnel, actuel et juridiquement protégé à ce que cet arrêt soit
annulé et
a, partant, qualité pour recourir selon l'art. 88 OJ. Interjeté en
temps
utile contre une décision finale prise en dernière instance
cantonale, le
recours répond au surplus aux réquisits des art. 86 al. 1 et 89 al. 1
OJ.

2.
Le recourant prétend que la Cour de cassation aurait manqué à son
obligation
de motiver son jugement en confirmant sa culpabilité pour viol parce
qu'il ne
serait pas parvenu à démontrer que l'appréciation des preuves à
laquelle
s'est livrée la Cour correctionnelle était insoutenable, contraire à
des
faits avérés, incompréhensible ou choquante, sans expliquer en quoi
les
motifs avancés n'étaient pas pertinents. Il ne se plaint pas à cet
égard
d'une violation du droit cantonal de procédure, de sorte que le
mérite de son
grief doit être examiné à la lumière de l'art. 29 al. 2 Cst. (ATF 126
I 15
consid. 2a p. 16 et les arrêts cités).

2.1 Le droit d'être entendu garanti par cette disposition impose au
juge
l'obligation de motiver ses décisions afin que le justiciable puisse
les
comprendre et exercer ses droits de recours à bon escient. Pour
satisfaire
cette exigence, il suffit que le juge mentionne au moins brièvement
les
motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision. Il n'a
pas
l'obligation d'exposer et de discuter tous les faits, moyens de
preuve et
griefs invoqués par les parties, mais peut au contraire se limiter à
ceux
qui, sans arbitraire, peuvent être tenus pour pertinents (ATF 126 I 97
consid. 2b p. 102).

2.2 En l'espèce, l'autorité intimée a résumé l'intégralité des
arguments
soulevés par le recourant pour contester les accusations de viol
portées à
son endroit. Elle a en particulier reconnu que la présence de marques
de
strangulation ne permettait pas de conclure nécessairement à
l'existence d'un
viol. Elle a cependant précisé que le système de la preuve par indices
permettait au juge de forger sa conviction sur la base d'éléments
qui, pris
isolément, ne seraient pas décisifs, mais qui font apparaître
l'accusation
comme fondée sans laisser place à un doute raisonnable. Elle a en
outre
rappelé la motivation sur laquelle s'était fondée la Cour
correctionnelle
pour retenir un unique viol avant de conclure que les arguments
présentés ne
suffisaient pas pour démontrer le caractère arbitraire de
l'appréciation des
preuves effectuée.
Même si la Cour de cassation n'a pas répondu en détail à l'ensemble
des
arguments soulevés par le recourant, la motivation retenue était
suffisante
pour que celui-ci puisse connaître les raisons qui l'ont amenée à
confirmer
le jugement de première instance et attaquer la décision en
connaissance de
cause. Savoir si certains arguments ont été écartés à tort ou si
d'autres
n'ont pas été examinés alors qu'ils étaient pertinents pour l'issue
du litige
est une question relevant de l'appréciation des preuves et non du
droit
d'être entendu.
Le recours est dès lors mal fondé en tant qu'il dénonce une violation
de
l'art. 29 al. 2 Cst.

3.
Le recourant reproche à la Cour de cassation d'avoir violé le
principe de la
présomption d'innocence en tenant pour acquis dans la partie « en
fait » de
l'arrêt attaqué des faits qu'il contestait dans son pourvoi en
cassation.
La présomption d'innocence, consacrée aux art. 32 al. 1 Cst. et 6 § 2
CEDH,
est notamment méconnue lorsqu'une décision judiciaire concernant un
prévenu
reflète le sentiment qu'il est coupable d'une infraction avant qu'un
tribunal
compétent ne l'ait établie selon la loi (ATF 120 Ia 147 consid. 3b p.
155;
arrêt de la CourEDH du 10 février 1995, dans la cause Allenet de
Ribemont c.
France, série A no 308, § 35). Tel n'est pas le cas en l'occurrence.
Après
avoir rappelé le dispositif de l'arrêt attaqué devant elle, la Cour de
cassation s'est bornée à résumer les faits de la cause, tels qu'ils
ont été
retenus par la Cour correctionnelle; cela ne signifie pas encore
qu'elle les
tenait pour établis puisqu'elle précisait que X.________ s'était
pourvu en
cassation contre cet arrêt en concluant au prononcé de son
acquittement pour
les chefs d'accusation d'extorsion et de viol retenus contre lui.
Elle a
d'ailleurs examiné en droit les arguments soulevés par le recourant
avant de
conclure que la condamnation de ce dernier n'était pas arbitraire.
Le recours est donc manifestement mal fondé sur ce point.

4.
Le recourant dénonce ensuite à divers titres l'appréciation des
preuves à
laquelle s'est livrée la Cour de cassation en relation avec le
principe de la
présomption d'innocence.

4.1 En tant qu'elle a trait à la constatation des faits et à
l'appréciation
des preuves, la maxime « in dubio pro reo », découlant de la
présomption
d'innocence, est violée lorsque l'appréciation objective de
l'ensemble des
éléments de preuve laisse subsister un doute insurmontable sur la
culpabilité
de l'accusé (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 IV 86 consid. 2a p.
88; 120
Ia 31 consid. 2c p. 37). Saisi d'un recours de droit public mettant
en cause
l'appréciation des preuves, le Tribunal fédéral examine seulement si
le juge
cantonal a outrepassé son pouvoir d'appréciation et établi les faits
de
manière arbitraire (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 41; 124 I 208 consid.
4 p.
211; 120 Ia 31 consid. 2d p. 37/38; 118 Ia 28 consid. 1b p. 30 et les
arrêts
cités). Une constatation de fait n'est pas arbitraire pour la seule
raison
que la version retenue par le juge ne coïncide pas avec celle de
l'accusé ou
du plaignant; encore faut-il que l'appréciation des preuves soit
manifestement insoutenable, en contradiction flagrante avec la
situation
effective, qu'elle constitue la violation d'une règle de droit ou d'un
principe juridique clair et indiscuté, ou encore qu'elle heurte de
façon
grossière le sentiment de la justice et de l'équité (ATF 118 Ia 28
consid. 1b
p. 30).
Dans le cadre d'un recours de droit public pour arbitraire contre une

décision prise en dernière instance cantonale par une autorité qui
statuait
elle-même sous cet angle restreint, le Tribunal fédéral vérifie si
c'est à
tort ou à raison que cette autorité a nié l'arbitraire du jugement de
première instance et, de ce fait, enfreint l'interdiction du déni de
justice
matériel, question qu'il lui appartient d'élucider à la seule lumière
des
griefs soulevés dans l'acte de recours (ATF 125 I 492 consid. 1a/cc
et 1b p.
495; 111 Ia 353 consid. 1b in fine p. 355).

4.2 S'agissant de l'extorsion portant sur un montant de 10'000 fr., le
recourant reproche à la Cour de cassation d'être tombée dans
l'arbitraire en
confirmant le verdict de culpabilité sur la base de motifs que la Cour
correctionnelle n'avait pas évoqués et qui n'incluaient pas
l'existence de
violence ou de menace. De plus, l'autorité intimée n'aurait pas
suffisamment
précisé les raisons pour lesquelles elle considérait comme établi le
dessein
d'enrichissement illégitime.
Comme le relève à juste titre la plaignante, les premiers juges ont,
s'agissant des extorsions, estimé que celle-ci avait agi sous
l'influence
d'un ensemble de manoeuvres d'intimidation orchestrées par le
recourant et
tombant sous le coup de l'art. 156 ch. 1 CP. Ils n'ont donc pas
conclu à la
culpabilité du recourant du chef d'extorsion portant sur la somme de
10'000
fr. uniquement parce que celui-ci avait menacé de verser de l'acide
sur le
piano. En confirmant l'arrêt attaqué sur ce point par référence aux
pressions
exercées par le recourant sur la plaignante, la Cour de cassation n'a
pas
substitué une autre motivation à celle retenue par la Cour
correctionnelle.
Pour le surplus, savoir si les agissements du recourant que cette
dernière a
qualifiés de manoeuvres d'intimidation tombent effectivement sous le
coup de
l'art. 156 ch. 1 CP est une question relevant de l'application
correcte du
droit fédéral, qui aurait dû être soulevée dans le cadre d'un pourvoi
en
nullité et qui échappe à la cognition du Tribunal fédéral saisi
exclusivement
d'un recours de droit public (cf. art. 269 al. 1 PPF et 84 al. 2 OJ).
Quant au dessein d'enrichissement illégitime, la Cour correctionnelle
l'a
tenu pour établi sur la base du fait que le recourant n'avait apporté
aucune
raison convaincante susceptible de justifier ses prétentions
pécuniaires
vis-à-vis de la plaignante à hauteur des sommes versées, dans la
mesure où la
jeune femme lui avait remis la quasi-totalité de sa rémunération dès
le
moment où elle a obtenu son emploi d'institutrice. La Cour de
cassation a
pour sa part relevé sur ce point que la plaignante avait toujours
contribué
aux besoins du ménage en mettant à disposition du couple les
allocations
d'études dont elle bénéficiait comme étudiante et les revenus qu'elle
tirait
des remplacements et des cours de piano lorsqu'elle était étudiante,
puis son
salaire d'institutrice. Aucun élément du dossier ne permet de
conclure à une
constatation arbitraire des faits sur ce point. Pour le surplus,
savoir si
cela suffisait pour conclure à l'existence d'un enrichissement
illégitime est
une question de droit qui aurait dû être soulevée dans le cadre d'un
pourvoi
en nullité.

4.3 Le recourant conteste également l'existence d'une extorsion
portant sur
la somme de 35'000 fr. Selon lui, le fait de souscrire un montant
équivalent
à celui mentionné dans une reconnaissance de dette signée quelque
temps
auparavant ne démontre pas que ce prêt a été contracté en vue de
payer le
montant indiqué, comme l'a retenu arbitrairement la Cour de
cassation, mais
peut s'expliquer d'une autre manière. Par ailleurs, l'affirmation de
la
plaignante suivant laquelle il aurait ultérieurement accepté de
baisser ses
prétentions à 20'000 fr. serait en contradiction avec le fait qu'elle
lui
aurait remis l'enveloppe contenant les 35'000 fr. à la sortie de la
Banque
Procrédit. A suivre la Cour de cassation, il aurait réclamé 20'000 fr.
supplémentaires à Y.________, contrairement à ce que les premiers
juges ont
retenu.
Il est douteux que le recours soit motivé conformément aux exigences
de
l'art. 90 al. 1 let. b OJ en tant que le recourant se borne à évoquer
d'autres raisons pour expliquer le comportement de la plaignante sans
chercher à établir en quoi celle retenue serait insoutenable (ATF 127
I 38
consid. 3c p. 43). Quoi qu'il en soit, compte tenu des diverses
pressions
exercées par le recourant sur la plaignante, que celui-ci ne remet au
demeurant pas en cause dans le cadre du présent recours, il n'était
pas
arbitraire de voir un indice corroborant les dires de la victime dans
le fait
que cette dernière avait souscrit un emprunt de 35'000 fr. deux mois
environ
après avoir signé une reconnaissance de dette d'un même montant. Par
ailleurs, la Cour de cassation a clairement expliqué les raisons pour
lesquelles elle ne voyait ni contradiction, ni aveu du fait que la
plaignante
n'avait pas remis cette somme, dans la déclaration suivant laquelle le
recourant avait ultérieurement accepté de baisser ses prétentions par
rapport
aux 35'000 fr. qu'il réclamait initialement. Il n'était en effet pas
insoutenable d'admettre que faute d'avoir restitué à la plaignante la
reconnaissance de dette du même montant signée le 21 septembre 1998,
le
recourant avait persisté à exiger cette somme. L'argumentation de la
Cour de
cassation ne revient pas à admettre que le recourant aurait extorqué
20'000
fr. contrairement à ce que la Cour correctionnelle aurait retenu. La
cour
cantonale s'est en effet bornée à constater qu'il n'était pas établi à
satisfaction de droit que le recourant avait contraint la plaignante
à signer
une reconnaissance de dette de 20'000 fr.; en revanche, elle a retenu
à son
encontre le fait qu'il avait obtenu de la jeune femme une telle somme
sous la
menace par des versements mensuels de 500 fr. sur son compte bancaire.
Le recours est donc également mal fondé à cet égard.

4.4 Le recourant admet avoir reçu de Y.________ des versements sur
son compte
de 500 fr. entre les mois d'avril 1999 et de mars 2000. Il conteste
toutefois
avoir usé de menaces et prétend qu'elle aurait agi de son plein gré
pour
rembourser les frais qu'il avait assumés durant les études de la
jeune femme.
Cette thèse est en contradiction avec les déclarations de la victime,
qui ont
été jugées crédibles sur la base des témoignages de son médecin
traitant, et
des autres témoignages recueillis au cours de la procédure. La Cour
correctionnelle, puis la Cour de cassation pouvaient sans arbitraire
admettre
que le comportement de la plaignante s'inscrivait dans la suite
logique des
pressions exercées sur elle par le recourant. Le fait que les
premiers juges
ont acquitté ce dernier du chef d'extorsion relatif à la signature
d'une
reconnaissance de dette à hauteur de 20'000 fr. ne suffit pas pour
établir
une incohérence du jugement sur ce point. Le recourant n'a donc pas
été
condamné pour cette extorsion parce qu'il n'était pas parvenu à
démontrer son
innocence, comme il le prétend. De ce point de vue, le recours est
aussi mal
fondé.

4.5 X.________ reproche enfin à la Cour de cassation d'avoir confirmé
sa
condamnation pour viol au terme d'une appréciation arbitraire des
preuves et,
en particulier, des déclarations de Z.________ et de la mère de la
plaignante. A ses yeux, l'absence d'indices concluants, le flou et les
contradictions quant à la date de l'infraction, l'absence de
certificat
médical et ses dénégations constantes auraient dû amener la Cour
correctionnelle, puis la Cour de cassation, à l'acquitter sur ce
point.
Les premiers juges ont retenu l'existence d'un unique viol sur les
trois
allégués, parce que la victime avait évoqué un seul épisode au début
de la
procédure, puis ensuite auprès d'une collègue de travail, et qu'elle
avait
varié dans ses déclarations quant aux dates et aux circonstances des
autres
viols. Ils ont situé cet épisode le jour où le recourant a serré la
plaignante à la gorge, car deux témoins avaient constaté les marques
de
strangulation sur le cou de la victime. La Cour de cassation n'a pas
considéré cette appréciation des preuves comme arbitraire, quand bien
même
seule la mère de la victime avait en réalité vu les marques de
strangulation.
Les accusations de viol reposent essentiellement sur les déclarations
de la
jeune femme faites à sa soeur ou à des tiers. Y.________ s'est
notamment
confiée à sa collègue, A.________, juste avant les vacances de Pâques
2000,
en lui déclarant avoir été victime d'insultes et de menaces de la
part du
recourant. Elle a également évoqué un épisode où son ami l'avait
contrainte à
entretenir des relations sexuelles contre son gré. Elle était alors
tendue,
elle pleurait et tremblait; ce témoin s'est déclarée convaincue de la
crédibilité des dires de la jeune femme. Les premiers juges pouvaient
donc
sans arbitraire voir dans ce témoignage un indice important de la
véracité
des dires de la plaignante. Le fait qu'ils n'ont pas retenu les deux
autres
viols ne signifie pas encore que Y.________ aurait menti ou que le
recourant
devrait être libéré au bénéfice du doute également sur ce point. Par
rapport
aux deux autres viols, qui reposaient exclusivement sur les
déclarations de
la jeune femme, la Cour correctionnelle pouvait en effet se fonder
sur le
fait que la mère de la plaignante avait constaté des traces sur le
cou de sa
fille compatibles avec l'allégation du viol dont celle-là prétendait
avoir
été la victime. Il est exact que ce témoin n'a pas mis en relation les
marques de strangulation avec une contrainte sexuelle; cet élément
trouve une
explication cohérente dans les déclarations de Y.________. Cette
dernière a
affirmé, après cet épisode, être rentrée chez ses parents pour
trouver du
réconfort; interrogée par sa mère sur l'origine des traces laissées
sur le
cou, elle lui a simplement répondu avoir rencontré le recourant sans
toutefois parler de l'agression sexuelle, afin de ne pas l'inquiéter.
La Cour correctionnelle pouvait sans arbitraire admettre que les
marques
constatées sur le cou de la plaignante par la mère avaient été
causées lors
du viol dont Y.________ prétendait avoir été victime à son domicile,
comme
l'affirmait la jeune femme. La Cour de cassation n'a pas fait preuve
d'arbitraire ou violé d'une autre manière la présomption d'innocence
en
confirmant le jugement de la Cour correctionnelle sur ce point
également.

5.
Le recours doit par conséquent être rejeté dans la mesure où il est
recevable. Les conditions de l'art. 152 al. 1 OJ étant réunies, il
convient
de faire droit à la demande d'assistance judiciaire et de statuer
sans frais.
Me Olivier Boillat est désigné comme avocat d'office du recourant
pour la
présente procédure et une indemnité lui sera versée (art. 152 al. 2
OJ).
L'intimée, qui obtient gain de cause avec l'assistance d'une avocate,
a droit
à des dépens à la charge du recourant (art. 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
La demande d'assistance judiciaire est admise.

3.
Il n'est pas perçu d'émolument judiciaire.

4.
Me Olivier Boillat est désigné comme avocat d'office du recourant et
une
indemnité de 1'500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer
par la
Caisse du Tribunal fédéral.

5.
Le recourant versera à Y.________ une indemnité de 1'500 fr. à titre
de
dépens.

6.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties,
au
Procureur général et à la Cour de cassation du canton de Genève.

Lausanne, le 20 décembre 2001

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.675/2001
Date de la décision : 20/12/2001
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-12-20;1p.675.2001 ?
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