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10/12/2001 | SUISSE | N°I.179/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 décembre 2001, I.179/01


«AZA 7»
I 179/01 Tn

IIIe Chambre

MM. et Mme les juges Schön, Président, Spira et Widmer.
Greffière : Mme von Zwehl

Arrêt du 10 décembre 2001

dans la cause

Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15,
1951 Sion, recourant,

contre

I.________, intimé, représenté par Maître Léo Farquet,
avocat, rue de la Poste 5, 1920 Martigny,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- Le 7 août 1995, I.________ a été victime d'un
accident de la circulatio

n au cours duquel il a subi, no-
tamment, un traumatisme crânio-cérébral. Depuis lors, il
n'a pas été en mesure de reprendre son acti...

«AZA 7»
I 179/01 Tn

IIIe Chambre

MM. et Mme les juges Schön, Président, Spira et Widmer.
Greffière : Mme von Zwehl

Arrêt du 10 décembre 2001

dans la cause

Office cantonal AI du Valais, avenue de la Gare 15,
1951 Sion, recourant,

contre

I.________, intimé, représenté par Maître Léo Farquet,
avocat, rue de la Poste 5, 1920 Martigny,

et

Tribunal cantonal des assurances, Sion

A.- Le 7 août 1995, I.________ a été victime d'un
accident de la circulation au cours duquel il a subi, no-
tamment, un traumatisme crânio-cérébral. Depuis lors, il
n'a pas été en mesure de reprendre son activité de manoeu-
vre en raison de fortes céphalées. Les investigations médi-
cales auxquelles il a été soumis ont révélé un syndrome
subjectif post-traumatique (cf. les rapports des docteurs
A.________, B.________ et C.________, respectivement des

21 décembre 1995, 5 juillet et 15 novembre 1996). La Caisse
nationale suisse en cas d'accidents (CNA), par laquelle
I.________ était assuré, a pris en charge le cas et lui a
versé des indemnités journalières fondées sur une incapaci-
té de travail de 100 % jusqu'au 25 novembre 1996; à cette
date, elle a mis fin à ses prestations (décision du 22 no-
vembre 1996).
Entre-temps, l'assuré a présenté une demande de rente
de l'assurance-invalidité. A partir du 15 janvier 1997, son
médecin traitant, la doctoresse D.________, l'a jugé apte à
travailler à 50 %. Cette capacité de travail réduite a été
maintenue jusqu'au 1er novembre 1997, date à laquelle
I.________ a été victime d'un second accident de la circu-
lation qui a entraîné une distorsion simple du rachis cer-
vical et une nouvelle incapacité de travail de 100 %. A ce
titre, le prénommé a perçu des indemnités journalières de
la CNA jusqu'au 5 avril 1998. Afin d'élucider son droit aux
prestations, l'Office de l'assurance-invalidité du canton
du Valais (ci-après : l'office) a confié une expertise au
docteur E.________, psychiatre. Dans son rapport du 6 avril
1998, ce médecin a nié que le choc du premier accident ait
pu engendrer chez l'assuré une atteinte organique cérébrale
de quelque importance, et conclu qu'une grande part de son
incapacité de travail, de l'ordre de 75 %, était de nature
purement subjective. L'office a également commis le profes-
seur F.________, médecin-chef de la division autonome de
neuropsychologie du Centre hospitalier X.________, pour une
expertise neuropsychologique. Ce dernier a fait état d'un
affaiblissement cognitif associé à un fléchissement discret
des aptitudes exécutives; à raison de ces troubles, quali-
fiés de très modérés, il a attesté d'une incapacité de tra-
vail de 25 % au maximum dans l'activité habituelle de l'as-
suré depuis le traumatisme crânien du 7 août 1995 (rapport
du 17 novembre 1998).
Se fondant sur ces pièces, l'office a rendu trois dé-
cisions le 26 juillet 1999. Dans la première, il a alloué à

l'assuré une rente entière d'invalidité pour la période al-
lant du 1er août 1996 au 28 février 1997 (décision n° 1);
dans la seconde, il lui a accordé une demi-rente pour cas
pénible du 1er décembre 1997 au 28 février 1998 (décision
n° 2), et enfin dans la troisième, à nouveau une rente en-
tière du 1er mars au 31 juillet 1998 (décision n° 3). Ces
prestations ont été assorties de rentes complémentaires
pour l'épouse et les trois enfants de l'assuré.

B.- Ce dernier a recouru contre ces trois décisions
devant le Tribunal des assurances du canton du Valais, en
concluant à l'octroi d'une rente d'invalidité entière, non
limitée dans le temps, dès le 1er août 1996.
Le 3 décembre 1999, en cours de procédure, l'office a
rendu deux nouvelles décisions (remplaçant celles n° 2 et 3
du 26 juillet 1999), par lesquelles il a augmenté le mon-
tant des rentes octroyées à l'assuré, eu égard à la prise
en compte de cotisations supplémentaires.
Le tribunal cantonal a déclaré sans objet les recours
formés par l'assuré contre les décisions n° 2 et 3 du
26 juillet 1999 et rejeté celui visant la décision n° 1 da-
tée du même jour. Il a en revanche partiellement admis les
conclusions de l'assuré à l'encontre des deux décisions du
3 décembre 1999, en ce sens qu'il lui a reconnu le droit à
une demi-rente d'invalidité du 1er décembre 1997 au 31 jan-
vier 1998 et à une rente entière du 1er février au 31 juil-
let 1998 (jugement du 9 février 2001).

C.- L'office interjette recours de droit administratif
contre ce jugement dont il requiert l'annulation, en con-
cluant à la confirmation de ses décisions du 3 décembre
1999.
I.________ conclut, sous suite de dépens, au rejet du
recours, tandis que l'Office fédéral des assurances soci-
ales propose son admission.

Considérant en droit :

1.- Le jugement entrepris expose correctement les dis-
positions légales applicables en ce qui concerne la notion
d'invalidité (art. 4 LAI), l'échelonnement des rentes selon
le taux d'invalidité de l'assuré (art. 28 LAI) et le moment
où le droit à une rente prend naissance (art. 29 LAI), de
sorte qu'on peut y renvoyer.
On ajoutera qu'une décision par laquelle l'assurance-
invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétro-
actif et, en même temps, prévoit la réduction ou l'augmen-
tation de cette rente, correspond à une décision de révi-
sion au sens de l'art. 41 LAI (ATF 125 V 417 sv. consid. 2d
et les références). Aux termes de cette disposition, si
l'invalidité d'un bénéficiaire de rente se modifie de ma-
nière à influencer le droit à la rente, celle-ci est, pour
l'avenir, augmentée, réduite ou supprimée. A cet égard,
l'art. 88a al. 2 RAI précise que si l'incapacité de gain ou
l'impotence d'un assuré s'aggrave, il y a lieu de considé-
rer que ce changement accroît, le cas échéant, son droit
aux prestations dès qu'il a duré trois mois sans interrup-
tion notable; l'art. 29bis RAI est toutefois applicable par
analogie. Selon cet article, si la rente a été supprimée du
fait de l'abaissement du degré d'invalidité et que l'assu-
ré, dans les trois ans qui suivent, présente à nouveau un
degré d'invalidité ouvrant le droit à une rente en raison
d'une incapacité de travail de même origine, on déduira de
la période d'attente que lui imposerait l'art. 29, 1er ali-
néa, LAI, celle qui a précédé le premier octroi.

2.- a) Examinant l'ensemble des pièces médicales au
dossier, les premiers juges ont retenu chez l'intimé les
incapacités de travail suivantes : 100 % du 7 août 1995 au
25 novembre 1996, 30 % dès la fin du mois de novembre 1996
jusqu'au 31 octobre 1997, et enfin 100 % du 1er novembre
1997 au 5 avril 1998.

Ils ont confirmé la décision n° 1 de l'office du
26 juillet 1999 en tant qu'elle limitait au 28 février 1997
le droit de l'intimé à une rente d'invalidité entière, con-
sidérant qu'à partir de ce moment-là, son incapacité de
gain s'était notablement réduite sur une période ininter-
rompue de plus de trois mois (cf. art. 88a al. 1er RAI) au
point de supprimer, à l'échéance de ce délai, tout droit
aux prestations. Les juges cantonaux ont également confirmé
le droit de l'intimé à une demi-rente pour cas pénible dès
le 1er décembre 1997, retenant qu'une incapacité de travail
moyenne de 40 % pendant une année avait été atteinte à par-
tir de cette date; ils ont en revanche estimé, à la lumière
de l'art. 88a al. 2 RAI, que I.________ pouvait à nouveau
prétendre une rente d'invalidité entière dès le 1er février
1998 (et non pas seulement à partir du 1er mars 1998) dans
la mesure où l'aggravation de son incapacité de travail,
survenue le 1er novembre 1997, avait alors déjà duré trois
mois consécutifs sans interruption notable.

b) L'office recourant critique l'interprétation faite
par la juridiction cantonale de l'art. 88a al. 2 RAI. Selon
lui, cette disposition s'applique uniquement lorsque le de-
gré d'invalidité d'un assuré s'aggrave «après la naissance
du droit à l'allocation». Autrement dit, seul un assuré dé-
jà au bénéfice d'une rente d'invalidité pourrait voir aug-
menter, au terme d'un délai de trois mois, son droit aux
prestations en raison d'une aggravation de son incapacité
de gain. Toujours selon l'office, c'est ainsi à tort que
les premiers juges ont fixé, dans le cas de l'intimé, le
point de départ du délai de trois mois prévu par l'art. 88a
al. 2 RAI au 1er novembre 1997, date à laquelle l'assuré,
bien qu'incapable de travailler à 100 %, ne pouvait préten-
dre de rente de l'assurance-invalidité compte tenu de la
période de carence d'une année prévue par l'art. 29 LAI.

3.- a) L'intimé a été victime, à deux ans et trois
mois d'intervalle, de deux accidents qui ont entraîné des
atteintes à la santé distinctes. Tandis que l'incapacité de
travail de 100 % provoquée par la première atteinte avait,
dès la fin du mois de novembre 1996, notablement diminué
pour se stabiliser à 30 % (circonstance qui a du reste fon-
dé la suppression de la rente entière d'invalidité allouée
à l'intimé depuis le 1er août 1996), les suites du second
accident ont derechef engendré une incapacité de travail
totale dès le 1er novembre 1997. On peut donc admettre que
la cause de cette nouvelle incapacité de travail n'est pas
la même que celle ayant provoqué l'invalidité initiale. A
juste titre, l'office et les premiers juges n'ont dès lors
pas fait application par analogie de l'art. 29bis RAI qui
permet de tenir compte, lorsqu'un assuré est victime d'une
reprise de son invalidité due à la même atteinte à la san-
té, de la période d'incapacité de travail ayant précédé la
première attribution de rente. Il en résulte cependant que
l'intimé ne peut, à raison de la nouvelle aggravation de
son état de santé, prétendre l'allocation d'une rente qu'à
partir du moment où il a subi une incapacité de travail de
40 % en moyenne pendant une année au sens de l'art. 29
al. 1 let. b LAI, sans que l'on puisse déduire de cette
période de carence celle qui l'a précédée. En dehors de
l'hypothèse visée par la règle spéciale de l'art. 29bis
RAI, on se trouve en effet en présence de deux cas d'assu-
rance différents, si bien que pour chacune des situations
données, le droit à une rente est subordonné à l'écoulement
de la période de carence imposée par l'art. 29 al. 1 let. b
LAI. Selon la jurisprudence, cette période peut courir dès
que l'assuré subit un taux d'incapacité de travail de l'or-
dre de 20 % (VSI 1998 p. 126). Pour calculer l'incapacité
de travail moyenne de l'intimé, c'est ainsi à bon droit que
l'office et les premiers juges ont pris en considération
une partie de la période d'incapacité de travail précédant
le second accident; I.________ n'avait en effet recouvré, à

la fin du mois de novembre 1996, que le 70 % de sa capacité
de travail totale. Ce faisant, ils ont toutefois commis une
erreur de calcul : ce n'est qu'à partir du 1er janvier 1998
(et non pas dès le 1er décembre 1997) que l'intimé a pré-
senté - rétrospectivement - une incapacité de travail de
40 % en moyenne lui ouvrant le droit à une demi-rente d'in-
validité pour cas pénible (10 mois à 30 % et 2 mois à
100 %, soit un taux moyen de 41,6 %). Le début du droit
de I.________ à une demi-rente aurait, par conséquent, dû
être fixé au 1er janvier 1998 au lieu du 1er décembre 1997.

b) Cela étant, c'est à bon droit que l'office recou-
rant reproche à la juridiction cantonale d'avoir mal ap-
pliqué l'art. 88a al. 2 RAI pour déterminer quand la rente
entière a succédé à la demi-rente.
L'art. 88a RAI est une disposition d'exécution de
l'art. 41 LAI (révision du droit à la rente) en ce sens
qu'il fixe le moment à partir duquel une modification de
l'invalidité d'un bénéficiaire de rente est réputée suffi-
samment durable pour déployer ses effets sur le droit aux
prestations (cf. Meyer-Blaser, ad art. 41 LAI, p. 262); son
alinéa premier concerne les cas où la capacité de gain de
l'assuré s'est améliorée; le deuxième alinéa ceux où elle
s'est péjorée. L'art. 88a RAI est ainsi étroitement lié à
un cas de révision, de sorte que le délai de trois mois qui
y figure ne saurait débuter avant la naissance du droit à
une rente, soit avant que la période de carence imposée par
l'art. 29 al. 1 let. b LAI ne soit arrivée à échéance. En
l'occurrence, le droit de l'intimé à une demi-rente n'a
pris naissance qu'à compter du 1er janvier 1998. C'est ain-
si à cette date au plus tôt qu'un cas de révision pouvait
être réalisé. L'aggravation de l'état de santé de l'intimé
remonte certes au 1er novembre 1997, date de la survenance
du second accident, mais la période de carence d'une année
qui conditionne le droit à une rente n'était alors pas en-
core écoulée. En revanche, l'intimé étant toujours incapa-

ble de travailler à 100 % au moment de la naissance de son
droit à une demi-rente, cette dernière circonstance consti-
tue un cas de révision au sens de l'art. 41 LAI et fait
courir le délai de trois mois prévu par l'art. 88a al. 2
RAI. Il s'ensuit que le passage de la demi-rente à la rente
entière ne pouvait intervenir avant le 1er avril 1998. Par
ailleurs, c'est à juste titre que cette prestation a été
supprimée dès le 31 juillet 1998 puisqu'à partir du 4 avril
1998, l'intimé avait d'ores et déjà recouvré une capacité
de gain entière excluant tout droit à une rente d'invalidi-
té et que cette amélioration avait perduré au-delà de trois
mois (cf. art. 88a al. 1 RAI).

4.- Au vu de ce qui précède, l'intimé ne peut, en dé-
finitive, prétendre qu'une demi-rente d'invalidité pour cas
pénible du 1er janvier au 31 mars 1998 et une rente entière
du 1er avril au 31 juillet 1998.
Le recours de l'office est bien fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du 9 février 2001
du Tribunal des assurances du canton du Valais
est ré-
formé en ce sens que l'intimé a droit à une demi-rente
d'invalidité pour cas pénible du 1er janvier au
31 mars 1998 et à une rente entière du 1er avril au
31 juillet 1998.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice, ni alloué de
dépens.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton du Valais et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 10 décembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.179/01
Date de la décision : 10/12/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-12-10;i.179.01 ?
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