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10/12/2001 | SUISSE | N°2A.362/2000

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 décembre 2001, 2A.362/2000


{T 0/2}
2A.362/2000/svc

Arrêt du 10 décembre 2001
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Müller, Yersin, Merkli et Zappelli, juge suppléant,
greffière Rochat.

S.________, demandeur, représenté par Me Rudolf Schaller, avocat,
boulevard
Georges-Favon 13, 1204 Genève,

contre

Confédération Suisse, 3003 Berne, (Administration fédérale des
finances),
3003 Berne, défenderesse.

dommages-intérêts

(action de droit administratif)
Faits:>
A.
S. ________ est né hors mariage. Le certificat de naissance établi par
l'office d'état civil de U.________, le 4 juillet 199...

{T 0/2}
2A.362/2000/svc

Arrêt du 10 décembre 2001
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Müller, Yersin, Merkli et Zappelli, juge suppléant,
greffière Rochat.

S.________, demandeur, représenté par Me Rudolf Schaller, avocat,
boulevard
Georges-Favon 13, 1204 Genève,

contre

Confédération Suisse, 3003 Berne, (Administration fédérale des
finances),
3003 Berne, défenderesse.

dommages-intérêts

(action de droit administratif)
Faits:

A.
S. ________ est né hors mariage. Le certificat de naissance établi par
l'office d'état civil de U.________, le 4 juillet 1995, indique qu'il
est le
fils d'Elisabeth S.________ , née en 1928 et originaire de
N.________, où
elle est également domiciliée.

Dans une convention extrajudiciaire approuvée le 30 avril 1949 par
l'autorité
tutélaire de N.________, B.________, né en 1927, a reconnu sa
paternité
vis-à-vis de l'enfant S.________ et s'est engagé à verser une
indemnité
unique de 8'600 fr. B.________ est décédé en 1995.

S. ________ a toujours souffert de sa situation d'enfant né hors
mariage et
du manque de relations avec son père génétique. Cela a été la cause
de ses
troubles de santé, qui ont provoqué sa mise à la retraite anticipée
des PTT
en 1994.

Le 20 juin 1996, S.________ a demandé au Service de l'état civil et de
l'indigénat du canton de Berne de l'inscrire dans les registres de
l'état
civil en qualité de fils de feu B.________ et d'établir un livret de
famille.
Le 30 août 1996, ce service a refusé de prononcer une décision sur ce
point,
en relevant que B.________ n'avait jamais reconnu l'enfant au sens de
l'art.
303 aCC, mais qu'il s'était seulement engagé à lui fournir des
aliments selon
les art. 317 ss aCC.

B.
Par requête du 20 février 1999 adressée au Conseil fédéral,
S.________ a
exposé que la législation suisse actuelle, dans la mesure où elle ne
lui
permettait pas de faire reconnaître la paternité de B.________,
portait
atteinte à la dignité humaine et à la liberté personnelle; partant,
elle
violait les art. 3, 8 et 14 CEDH. Il invitait ainsi le Conseil
fédéral à
entreprendre les démarches nécessaires auprès du Parlement fédéral
pour lui
permettre d'être reconnu fils de feu B.________.

Le 19 avril 1999, le Conseil fédéral a informé l'intéressé qu'il
n'avait pas
la compétence pour répondre favorablement à sa requête. Il expliquait
notamment qu'en vertu de la législation actuelle, comme de l'ancien
droit de
la filiation, le droit de procéder à une reconnaissance paternelle
appartenait exclusivement au père génétique. Or, en l'espèce,
B.________
n'avait pas procédé à une reconnaissance au sens de l'art. 303 aCC,
mais
seulement à une reconnaissance de paternité alimentaire, sans effets
d'état
civil. Il rappelait aussi qu'au vu des débats parlementaires relatifs
à
l'adoption du nouveau droit de filiation, entré en vigueur le 1er
janvier
1978, le législateur avait sciemment refusé de faire produire à la
paternité
alimentaire des effets de filiation.

C.
Le 6 septembre 1999, S.________ a saisi le Département fédéral des
finances
d'une demande de dommages-intérêts fondée sur la loi fédérale sur la
responsabilité de la Confédération, des membres de ses autorités et
de ses
fonctionnaires du 14 mars 1958 (en abrégé: la loi sur la
responsabilité;
LRCF; RS 170.32). Il alléguait à nouveau que le fait d'être privé de
la
filiation paternelle avait été la source d'une grave atteinte à sa
personnalité et que la législation suisse violait les art. 3, 8 et 14
CEDH.
Il en concluait que le refus du Conseil fédéral constituait un acte
illicite
au sens de l'art. 3 LRCF et réclamait le paiement d'une somme de
900'000 fr.,
avec intérêt à 5% dès le 31 août 1999, représentant notamment un
dommage
estimé à 701'680 fr., ainsi qu'un montant de 100'000 fr. à titre de
réparation du tort moral.

Le 1er mars 2000, le Conseil fédéral a rejeté la demande. Il a retenu
en bref
que le fait qu'une reconnaissance ne soit plus possible découlait de
la
volonté du législateur et que les conséquences morales ou financières
alléguées par le demandeur n'étaient aucunement imputables au Conseil
fédéral. Au demeurant, la loi sur la responsabilité était
inapplicable en
l'espèce, l'activité législative du Parlement ou celle du Conseil
fédéral ne
pouvant engager la responsabilité de la Confédération.

D.
Agissant le 10 août 2000 par la voie de l'action de droit
administratif,
S.________ a saisi le Tribunal fédéral d'une demande tendant à ce que
la
Confédération soit condamnée à lui payer 150'504 fr. à titre de
réparation du
dommage causé jusqu'au 1er août 2000, ainsi que la somme de 25'000
fr. à
titre de réparation du tort moral, avec intérêts à 5% l'an sur les
sommes
précitées dès le 6 septembre 1999, toute prétention relative au
dommage
encouru dès le 1er août 2000 étant réservée. Se fondant sur la loi
sur la
responsabilité, le demandeur allègue la violation des art. 3, 8, 14
et 41
CEDH, 13 et 14 Cst., 17 du Pacte international relatif aux droits
civils et
politiques du 16 décembre 1966, ainsi que les art. 9 et 16 de la
Convention
relative aux droits de l'enfant.

Au nom de la Confédération, le Département fédéral des finances
conclut au
rejet de l'action.

Les parties ont répliqué et dupliqué. Elles ont maintenu leurs
conclusions.

E.
Lors de l'audience de débats préparatoires (art. 35 PCF) du 23 août
2001, la
tentative de conciliation a échoué. La procédure a ensuite été
limitée à
l'examen du principe de la responsabilité de la Confédération. A
l'issue de
la procédure probatoire, les parties ont renoncé aux débats
principaux avec
plaidoiries. Elles ont également renoncé à déposer un mémoire
conclusif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Déposée contre la décision du Conseil fédéral du 1er mars 2000 dans
le délai
de six mois de l'art. 20 al. 3 LRCF, la présente action est recevable
au
regard des art. 10 al. 2 LRCF et 116 al. 1 lettre c OJ.

Il y a lieu dès lors d'entrer en matière sur l'action de droit
administratif
du demandeur.

2.
Le demandeur fonde ses prétentions sur la loi sur la responsabilité,
ainsi
que sur l'art. 41 CEDH. Selon lui, la législation suisse en matière de
filiation constituerait en soi une atteinte à la dignité humaine, à la
liberté personnelle et au droit à l'égalité de traitement garantis
par la
Convention européenne des droits de l'homme. La décision du Conseil
fédéral
de refuser d'agir pour supprimer cette atteinte serait donc illicite
au sens
de la loi sur la responsabilité.

2.1 Sous le titre: « Satisfaction équitable », l'art. 41 CEDH a la
teneur
suivante:
« Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses
protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne
permet
d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la
Cour
accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable
».

Comme l'indique clairement le texte même de cette disposition,
celle-ci est
réservée à la Cour européenne des droits de l'homme. L'art. 41 CEDH ne
s'applique que si la Cour européenne des droits de l'homme reconnaît,
à
l'issue de la procédure qui s'est déroulée devant elle, qu'il y a eu
violation de la Convention et que le droit de l'Etat condamné ne
permet pas
d'indemniser complètement le lésé pour les conséquences de cette
violation.
La Cour européenne des droits de l'homme peut alors accorder une
satisfaction
équitable, la décision pouvant être prononcée dans l'arrêt sur le
fond, si la
question est en état d'être jugée, ou réservée à une procédure
ultérieure
(Règlement de la CourEDH, art. 60 et 75).

2.2 Il a été jugé (ATF 126 V 64 consid. 5b p. 69), que l'Etat reconnu
coupable d'une violation de la Convention et condamné à verser une
indemnité
équitable est tenu de le faire en vertu du droit public. Pour ce
motif, et
selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, le
recourant n'est pas obligé d'épuiser les instances de recours
internes. Pour
le même motif, le requérant ne pourra faire valoir contre l'Etat sa
prétention fondée sur l'art. 41 CEDH devant les tribunaux nationaux
(cf. Mark
E. Villiger, Handbuch der Europäischen Menschenrechtskonvention, 2ème
édition
Zurich 1999, § 13, nos 237 et 238; Jost Gross, Schweizerisches
Staatshaftungsrecht, 2ème édition Berne 2001, n. 2.2, p. 21).
Le recours à l'art. 41 CEDH ne concerne donc que la Cour européenne
des
droits de l'homme et n'entre pas en ligne de compte en l'état. Au
demeurant,
le droit suisse, en l'occurrence la loi sur la responsabilité, permet
au lésé
d'obtenir de la Confédération, en cas d'acte illicite, l'entière
réparation
de son dommage et, en cas de faute, la réparation du tort moral. La
présente
action doit dès lors être examinée exclusivement sous cet angle.

3.
Le demandeur fonde son action en dommages-intérêts sur la
responsabilité de
la Confédération, engagée selon lui par le refus illicite du Conseil
fédéral
d'entreprendre des démarches auprès du Parlement en vue de permettre
au
requérant d'être reconnu fils de feu B.________.

3.1 En vertu de l'art. 3 al. 1 LRCF, la Confédération répond du
dommage causé
sans droit à un tiers par un fonctionnaire dans l'exercice de ses
fonctions,
sans égard à la faute du fonctionnaire. L'art. 2 al. 1 LRCF assimile
notamment les membres du Conseil fédéral à des fonctionnaires au sens
de
cette loi.

Selon l'art. 6 al. 2 LRCF, en cas de faute du fonctionnaire, celui
qui subit
une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent
à titre
de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le
justifie et
que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement.

3.2 La Confédération soutient que l'action en responsabilité doit être
rejetée au motif que les actes accomplis par le Conseil fédéral dans
le cadre
de son activité législative ne tombent pas sous le coup de la loi sur
la
responsabilité. Le cas échéant, l'action devrait de toute façon être
rejetée,
car elle a été déposée tardivement au regard de l'art. 20 al. 1 LRCF.
La
défenderesse allègue encore qu'aucune disposition légale n'impose au
Conseil
fédéral d'agir en la matière, ni même ne le lui permet, et en conclut
que le
refus d'agir du Gouvernement ne constitue en aucun cas un acte
illicite. Elle
avance enfin qu'en tout état de cause, même si l'acte ou l'omission
d'agir
qui lui est reproché devait être qualifié d'illicite, il n'y aurait
aucun
lien de causalité adéquate entre cet acte ou cette omission et le
dommage
allégué.

3.3 Il y a lieu tout d'abord d'examiner si l'action du demandeur est
ou non
périmée, dans la mesure où cette question est déterminante pour la
solution
du litige.

Aux termes de l'art. 20 al. 1 LRCF, la responsabilité de la
Confédération (art. 3 ss) s'éteint si le lésé n'introduit pas sa
demande de
dommages-intérêts ou d'indemnité à titre de réparation morale dans
l'année à
compter du jour où il a eu connaissance du dommage, et en tout cas
dans les
dix ans à compter de l'acte dommageable du fonctionnaire.

Si les délais légaux ne sont pas respectés, l'action est périmée (ATF
126 II
145 consid. 2a p. 150/151, ainsi que la jurisprudence citée; Jost
Gross, op.
cit. 2e éd. 2001, n. 11.8, p. 372 ss).

La notion de dommage en droit public de la responsabilité est en
principe la
même qu'en droit privé (ATF 107 Ib 155 consid. 2b p. 158; Jost Gross,
Staat-
und Beamtenhaftung, in Schaden, Haftung, Versicherung, Bâle 1999, n.
3.62, p.
118).

3.3.1 Le demandeur soutient que l'action introduite le 6 septembre
1999
devant le Département fédéral des finances l'a été en temps utile,
car il n'a
eu connaissance de son dommage qu'à la réception des avis médicaux des
docteurs G.________ et A.________ les 25 septembre et 6 novembre
1998. Selon
lui, seuls les rapports de ses médecins-traitants ont établi de façon
évidente le lien de causalité entre la non-reconnaissance d'un lien de
paternité autre qu'alimentaire par son géniteur et le dommage
allégué. En
outre, il y aurait lieu de tenir compte du fait que l'atteinte
continue,
puisque la législation sur la filiation n'a pas encore été modifiée.

3.3.2 Selon la jurisprudence en matière de droit privé, applicable par
analogie à la responsabilité civile de la Confédération, l'action
dommageable
doit être entièrement terminée (Roland Brehm, Berner Kommentar, n. 29
ad art.
60 CO et la jurisprudence citée). Le créancier connaît suffisamment le
dommage lorsqu'il apprend les circonstances propres à fonder et à
motiver une
demande en justice (ATF 111 II 55 consid. 3a p. 57).

En l'occurrence, le demandeur pouvait apprécier les conséquences
financières
de sa mise à la retraite anticipée dès 1994. Quant à la cause de ses
troubles
de santé, il la connaissait bien avant. Il a en effet souffert, dès
son
enfance, de troubles dus à l'absence d'image paternelle. Cela l'a
amené à
suivre un traitement médical depuis 1970 et, dès les années 1980, une
«
thérapie du moi ». Son état de santé s'étant dégradé, il a entrepris
une
psychothérapie avec le docteur A.________ en décembre 1993 déjà,
motivée par
des « souffrances considérables du fait de la non-reconnaissance par
son
progéniteur d'un lien de paternité autre qu'alimentaire »
(voir
attestation
de ce médecin du 6 novembre 1998). Enfin, l'impossibilité légale de
remédier
à la situation d'enfant illégitime dont il se plaignait lui a été
connue à la
lecture de l'avis de droit du professeur M.________ du 16 avril 1996.
Au plus
tard, cette impossibilité s'est avérée en août 1996, après le refus
par le
Service de l'état civil et de l'indigénat du canton de R.________ de
l'inscrire dans le registre ad hoc en tant que fils de feu B.________,
décision contre laquelle, au demeurant, il n'a pas recouru.

Force est donc de constater que le demandeur connaissait, au plus
tard en
août 1996, toutes les circonstances propres à fonder une demande de
dommages-intérêts. En outre, son préjudice n'a pas évolué depuis
1994, au
sens où l'entend la jurisprudence (ATF 112 II 118 consid. 4 p. 123),
car sa
situation est restée la même et le dommage futur pouvait aisément être
calculé dès le jour de sa mise à la retraite.

Il en résulte que la demande de dommages-intérêts, déposée le 6
septembre
1999, soit plus de trois ans après que le demandeur eut connu son
dommage,
est tardive.

Quant au délai de péremption absolu de dix ans, il s'écoule dès «
l'acte
dommageable du fonctionnaire » (art. 20 al. 1 in fine LRCF). En
l'occurrence,
cet acte ne pourrait provenir que de l'adoption, par les Chambres
fédérales,
de la loi du 25 juin 1976 modifiant le droit de la filiation dont se
plaint
le demandeur.

Or, il a été jugé qu'une action en dommages-intérêts selon la loi sur
la
responsabilité ne saurait se fonder sur l'illicéité d'un traité ou
d'une loi
adoptés par l'Assemblée fédérale (arrêt 2A.102/1993 du 6 octobre 1995
en la
cause N.S., publié in Pra 1997/20 p. 108, consid. 4). Dans la mesure
où il
assume la fonction de législateur, le Parlement n'a donc pas qualité
de
fonctionnaire au sens des art. 1 et 2 LRCF, de sorte que l'art. 3
LRCF est
inapplicable.

En tout état de cause, le délai de dix ans, partant de l'entrée en
vigueur de
la loi fédérale modifiant le droit de filiation, le 1er janvier 1978,
aurait
été échu bien avant le dépôt de la demande.

3.3.3 Au vu de ce qui précède, la demande doit déjà être rejetée en
raison de
la péremption de l'action.

4.
Au demeurant, même si le Tribunal fédéral entrait en matière, il
devrait de
toute façon écarter la demande pour les motifs suivants.

4.1 Le demandeur se plaint de la législation suisse en matière de
filiation
et reproche au Conseil fédéral de ne pas être intervenu en vue de
permettre
la correction de ladite législation.

Toutefois, aucune disposition de l'ancienne Constitution fédérale,
comme
d'ailleurs de la Constitution actuelle, ne permettait au Conseil
fédéral de
prendre des mesures pour déroger à une loi adoptée par le Parlement.
En
effet, le Conseil fédéral est seulement tenu d'appliquer et de mettre
en
oeuvre les lois fédérales en édictant, si nécessaire, des ordonnances
d'exécution (art. 102 ch. 2, 102 ch. 4 aCst.; 182 al. 2 et 186 al. 4
Cst.).
Rien n'obligeait non plus le Conseil fédéral d'agir, sur la simple
requête
d'un particulier - qui n'a, en principe, pas droit à l'adoption ou à
la
modification d'une loi ou d'un règlement (arrêt du 21 octobre 1996
(2P.76/1996), publié in SJ 1997, p. 414, consid. 3) - pour inviter le
Parlement à corriger une loi fédérale. En outre, l'art. 102 ch. 4
aCst.,
auquel correspond aujourd'hui l'art. 181 Cst., attribue certes au
Conseil
fédéral le droit d'initiative envers l'Assemblée fédérale, en
relation avec
la législation (K. Eichenberger, Commentaire de la Constitution, n.
62 ad
art. 102 ch. 3 et 4), mais ne lui impose pas le devoir de soumettre
des
propositions législatives, en tout cas pas sur la simple requête d'un
citoyen.

Il en résulte que, pour autant que la loi sur la responsabilité soit
applicable, le Conseil fédéral n'avait aucune obligation d'agir. A
cet égard,
les griefs du demandeur ne sont donc pas fondés.

4.2 A cela s'ajoute que l'action devrait de toute manière être
rejetée en
raison de l'absence de lien de causalité entre les actes ou omissions
reprochés à l'Etat et le dommage dont se plaint le demandeur.

Comme en droit privé, pour que la responsabilité de la Confédération
soit
engagée, il faut qu'il existe entre l'acte dommageable et le dommage
un lien
de causalité naturelle, dans le sens que le dommage ne serait pas
survenu
sans l'acte, ou l'omission, reproché aux personnes qui engagent
l'Etat (Jost
Gross, Schweizerisches Staatshaftungsrecht, 2e éd. Berne 2001, n.
5.2.1, p.
193/194).

En l'espèce, le refus du Conseil fédéral d'intervenir, en 1999, pour
corriger
la législation ne se trouve aucunement en relation de cause à effet
avec le
dommage déjà établi, à savoir la souffrance du demandeur d'être un
enfant né
hors mariage, qui l'a conduit à sa mise à la retraite anticipée.

La décision négative du Conseil fédéral n'est donc pas susceptible de
fonder
la responsabilité de la Confédération, faute de lien de causalité
avec le
dommage.

Il s'ensuit que l'action doit être rejetée pour ce motif également.

5.
Au vu de ce qui précède, la demande de dommages et intérêts doit être
rejetée, avec suite de frais à la charge du demandeur.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
L'action de S.________ est rejetée.

2.
Un émolument judiciaire de 10'000 fr. est mis à la charge du
demandeur.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du demandeur
et à
l'Administration fédérale des finances.

Lausanne, le 10 décembre 2001

ROC/svc
Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2A.362/2000
Date de la décision : 10/12/2001
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-12-10;2a.362.2000 ?
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