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07/12/2001 | SUISSE | N°H.186/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 07 décembre 2001, H.186/01


«AZA 7»
H 186/01 Tn

IIIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Spira et Ursprung.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 7 décembre 2001

dans la cause

J.________, recourante,

contre

Caisse de compensation du canton de Fribourg, impasse de la
Colline 1, 1762 Givisiez, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- J.________, a été administratrice unique avec si-
gnature individuelle de la société X.________ SA, du
30 septembre 1998 a

u 3 avril 2000, date à laquelle la fail-
lite de la société a été prononcée.
Par décision du 23 mai 2000, la Caisse de compensati...

«AZA 7»
H 186/01 Tn

IIIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Spira et Ursprung.
Greffier : M. Vallat

Arrêt du 7 décembre 2001

dans la cause

J.________, recourante,

contre

Caisse de compensation du canton de Fribourg, impasse de la
Colline 1, 1762 Givisiez, intimée,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- J.________, a été administratrice unique avec si-
gnature individuelle de la société X.________ SA, du
30 septembre 1998 au 3 avril 2000, date à laquelle la fail-
lite de la société a été prononcée.
Par décision du 23 mai 2000, la Caisse de compensation
du canton de Fribourg (ci-après : la caisse), à laquelle la
société anonyme était affiliée, a réclamé à J.________ la
somme de 12 009 fr. à titre de réparation du dommage résul-
tant du non-paiement par la société de cotisations pari-

taires d'assurances sociales de janvier 1998 à novembre
1999, y compris les frais de gestion, de sommation et de
poursuite ainsi que les intérêts moratoires.
Le 7 juin 2000, J.________ s'est opposée à cette
décision.

B.- Par jugement du 3 mai 2001, le Tribunal adminis-
tratif du canton de Fribourg a admis la demande en répara-
tion du dommage formée par la caisse et condamné J.________
à payer à cette dernière la somme réclamée par la caisse.

C.- J.________ interjette recours de droit administra-
tif contre ce jugement en concluant à l'annulation du juge-
ment entrepris et à libération de l'obligation de payer la
somme de 12 009 fr.
La caisse conclut au rejet du recours. L'Office fédé-
ral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.- La décision litigieuse n'ayant pas pour objet
l'octroi ou le refus de prestations d'assurance, le Tribu-
nal fédéral des assurances doit se borner à examiner si les
premiers juges ont violé le droit fédéral, y compris par
l'excès ou par l'abus de leur pouvoir d'appréciation, ou si
les faits pertinents ont été constatés d'une manière mani-
festement inexacte ou incomplète, ou s'ils ont été établis
au mépris de règles essentielles de procédure (art. 132 en
corrélation avec les art. 104 let. a et b et 105 al. 2 OJ).

2.- La condition essentielle de l'obligation de répa-
rer le dommage consiste, selon le texte même de l'art. 52
LAVS, dans le fait que l'employeur a, intentionnellement ou
par négligence grave, violé des prescriptions et ainsi cau-
sé un préjudice. L'intention et la négligence constituent
différentes formes de la faute. L'art. 52 LAVS consacre en

conséquence une responsabilité pour faute résultant du
droit public. Il n'y a obligation de réparer le dommage,
dans un cas concret, que s'il n'existe aucune circonstance
justifiant le comportement fautif de l'employeur ou ex-
cluant l'intention et la négligence grave. A cet égard, on
peut envisager qu'un employeur cause un dommage à la caisse
de compensation en violant intentionnellement les prescrip-
tions en matière d'AVS, sans que cela entraîne pour autant
une obligation de réparer le préjudice. Tel est le cas
lorsque l'inobservation des prescriptions apparaît, au vu
des circonstances, comme légitime et non fautive (ATF
108 V 186 consid. 1b, 193 consid. 2b; RCC 1985 p. 603 con-
sid. 2, 647 consid. 3a). Ainsi, il peut arriver qu'en re-
tardant le paiement de cotisations, l'employeur parvienne à
maintenir son entreprise en vie, par exemple lors d'une
passe délicate dans la trésorerie. Mais il faut alors, pour
qu'un tel comportement ne tombe pas ultérieurement sous le
coup de l'art. 52 LAVS, que l'on puisse admettre que l'em-
ployeur avait, au moment où il a pris sa décision, des
raisons sérieuses et objectives de penser qu'il pourrait
s'acquitter des cotisations dues dans un délai raisonnable
(ATF 108 V 188; RCC 1992 p. 261 consid. 4b).

3.- En l'espèce, la recourante ne conteste ni sa qua-
lité d'organe de la société, ni le calcul du montant de
12 009 fr. Elle soutient, en revanche, d'une part, que ce
montant correspond aux cotisations afférentes à son propre
salaire, par 153 426 fr. 25, et que, cette somme n'ayant
pas été encaissée dans l'espoir de voir la situation écono-
mique de la société se redresser, elle ne pouvait donner
lieu à la perception de cotisations, si bien que la somme
de 12 009 fr. réclamée par la caisse ne constituerait pas
un dommage au sens de l'art. 52 LAVS. Elle conteste, d'au-
tre part, avoir commis une quelconque négligence.

a) La cour de céans ne saurait suivre la recourante
dans son argumentation. Conformément aux art. 4 al. 1 et 14

al. 1 LAVS, les cotisations des assurés qui exercent une
activité lucrative sont calculées en pour-cent du revenu
provenant de l'exercice d'une activité lucrative. Elles
sont retenues lors de chaque paie et doivent être versées
périodiquement par l'employeur en même temps que la cotisa-
tion d'employeur. Les modalités de paiement du salaire,
convenues entre employeur et employé, demeurent sans inci-
dence sur la perception des cotisations. Ainsi, les parties
aux rapports de travail peuvent-elles convenir d'un paie-
ment en espèce ou du versement du salaire sur un compte.
Selon la jurisprudence, dans cette dernière hypothèse, un
revenu est réputé réalisé et donne lieu à la perception de
cotisations au moment où il est porté en compte (RCC 1976
p. 87 consid. 2 à 4).
La recourante ne soutient pas avoir purement et sim-
plement renoncé, d'emblée, à percevoir toute rémunération
de son employeur malgré l'activité qu'elle continuait à
déployer. Elle explique, au contraire, en avoir différé
l'encaissement dans l'attente d'une amélioration de la
situation économique et d'un redressement de la société.
Dans l'intervalle, ses créances de salaire ont alimenté son
compte courant «actionnaire J.________», qui présentait un
solde créancier de 153 436 fr. 25 lors de la cessation
d'activité de la société, selon le bilan pour l'année 2000.
Force est ainsi de constater que la recourante, en tant
qu'employée, a bien réalisé ces revenus, même si elle n'a
pu, en définitive, obtenir le paiement du solde créancier
de son compte courant après la faillite de la société. Elle
ne peut dès lors rien déduire en sa faveur de cette der-
nière circonstance en relation avec l'obligation qui lui
incombe, en qualité d'organe de la société, de réparer le
dommage résultant du non-paiement de cotisations d'assu-
rances sociales sur le montant de ces salaires.
Il est, au demeurant, douteux que le montant du dom-
mage, par 12 009 fr., ait pu correspondre, comme le sou-
tient la recourante, aux seules cotisations qui devaient
être déduites de son salaire, pour lequel, à fin 1998, un

montant de 1000 fr. par mois - sans commune mesure avec la
somme de 153 436 fr. 25 à laquelle elle se réfère - était
annoncé par son employeur à la caisse.

b) Dans un second moyen, la recourante soutient
qu'ayant volontairement renoncé, dans l'attente d'une em-
bellie conjoncturelle, à encaisser ses propres salaires,
une négligence grave ne saurait lui être reprochée en rela-
tion avec le non-paiement des cotisations afférentes à ce
revenu.
La recourante n'allègue toutefois - devant la cour de
céans pas plus qu'en première instance - aucune circons-
tance sérieuse et objective au sens de la jurisprudence
précitée (supra, consid. 2), qui lui aurait permis de pen-
ser qu'elle pourrait s'acquitter des cotisations échues
dans un délai raisonnable. Or, le seul espoir hypothétique
d'une amélioration de la situation économique, ne constitue
pas une telle circonstance si bien qu'on ne saurait repro-
cher aux premiers juges d'avoir admis que son comportement
était imputable à une négligence grave.

c) Pour le surplus, les premiers juges ont retenu de
manière à lier la cour de céans (art. 105 al. 2 et 132 OJ)
que les cotisations aux assurances sociales n'avaient été
acquittées que partiellement par la société entre octobre
1998 et novembre 1999 et ils ont admis à juste titre que ce
fait constituait une violation des art. 14 al. 1 LAVS et 34
ss RAVS, ce que la recourante ne conteste d'ailleurs pas.
Il n'est, enfin, ni contesté ni contestable que c'est bien
la négligence grave (cf. consid. 3b supra) de la recourante
qui a causé le dommage subi par la caisse au sens de
l'art. 52 LAVS, si bien que les conditions de sa responsa-
bilité en qualité d'organe de la société anonyme sont réu-
nies.
Le recours est mal fondé.

4.- La procédure, qui n'a pas pour objet l'octroi ou
le refus de prestations d'assurance n'est pas gratuite; la
recourante, qui succombe, en supportera les frais (art. 156
al. 1 en corrélation avec l'art. 134 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Les frais de justice de 1200 fr. sont mis à la charge
de J.________ et sont compensés avec l'avance de frais
d'un même montant qu'elle a versée.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal administratif du canton de Fribourg, Cour des
assurances sociales, ainsi qu'à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 7 décembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : H.186/01
Date de la décision : 07/12/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-12-07;h.186.01 ?
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