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30/11/2001 | SUISSE | N°I.430/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 novembre 2001, I.430/01


«AZA 7»
I 430/01 Mh

IIIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Spira et Ursprung.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 30 novembre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg,
Impasse de la Colline 1, 1762 Givisiez, recourant,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Jean-Claude
Morisod, avocat, rue du Progrès 1, 1701 Fribourg,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- A.________, marié et pÃ

¨re de deux enfants, a
travaillé dès 1986 en qualité de manoeuvre, puis de
machiniste, au service de l'entreprise X.________ SA.
...

«AZA 7»
I 430/01 Mh

IIIe Chambre

MM. les juges Schön, Président, Spira et Ursprung.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 30 novembre 2001

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité du canton de Fribourg,
Impasse de la Colline 1, 1762 Givisiez, recourant,

contre

A.________, intimé, représenté par Maître Jean-Claude
Morisod, avocat, rue du Progrès 1, 1701 Fribourg,

et

Tribunal administratif du canton de Fribourg, Givisiez

A.- A.________, marié et père de deux enfants, a
travaillé dès 1986 en qualité de manoeuvre, puis de
machiniste, au service de l'entreprise X.________ SA.
Atteint d'une coxarthrose bilatérale, prédominante à
droite, et de dorso-lombalgies relevant de troubles
statiques et dégénératifs avec séquelles de maladie de
Scheuermann, il a été reconnu incapable de travailler à
100 % depuis le 15 septembre 1995 pour une durée indé-
terminée par son médecin traitant, le docteur B.________.

Le 23 mai 1996, il a déposé une demande de prestations
de l'assurance-invalidité. L'Office de l'assurance-invali-
dité du canton de Fribourg (ci-après : l'office) lui a
accordé un stage au centre d'observation professionnel de
l'assurance-invalidité (ci-après : COPAI). Selon le rapport
du COPAI du 12 janvier 1998, l'assuré est capable de
reprendre une activité à temps partiel n'impliquant pas de
déplacement important et permettant d'alterner les
positions (surveillance ou gardiennage, travail à l'établi)
et pourrait obtenir un rendement proche de la normale. Sur
le plan psychiatrique, les docteurs C.________ et
D.________, commis par l'office, ont constaté une réaction
dépressive légère consécutive à des problèmes physiques
handicapants, sans que le déséquilibre dans l'état psycho-
logique du patient soit suffisamment important pour justi-
fier en soi une incapacité de travail, même s'il aggrave
celle qui existe déjà (rapport du 6 mai 1998). Le docteur
E.________, médecin-chef du service de rhumatologie à
l'Hôpital Y.________, a confirmé que l'assuré ne pouvait
plus reprendre son métier de machiniste, mais disposait
toutefois d'une capacité résiduelle de travail de 50 % dans
une activité ne nécessitant ni le port de charges, ni de
longs déplacements à pied, avec la possibilité de changer
de positions (rapport du 10 mai 1999).
L'office a, par décision du 24 novembre 1999, alloué à
l'assuré une demi-rente ordinaire, fondée sur un taux
d'invalidité de 50 %, assortie d'une rente complémentaire
pour le conjoint et pour enfant à partir du 1er septembre
1996. Il a considéré que l'intéressé était en mesure
d'exercer à plein temps une activité adaptée à son état de
santé, mais avec un rendement de 70 % et disposait d'une
capacité de gain résiduelle de 30 712 fr. 50 (43 875 fr. x
70 %) par an.

B.- A.________ a recouru contre cette décision devant
le Tribunal administratif du canton de Fribourg, en
produisant un certificat du docteur B.________ du
2 novembre 1999. Sur demande de l'office, il a été soumis à
une expertise pluridisciplinaire auprès de la Clinique
romande de réadaptation dont il ressort qu'une capacité de
travail de 50 % dans une activité adaptée peut être exigée
de sa part (rapport du 31 août 2000). Se fondant sur ces
conclusions, l'office a considéré que l'assuré était
capable de travailler dans une activité d'ouvrier dans
l'industrie légère à plein temps, avec un rendement
diminué; il a de ce fait admis une réduction de 50 % du
revenu que l'assuré pourrait obtenir dans une telle
activité, ce qui conduit à un degré d'invalidité de 60 %
(observations du 18 octobre 2000). Il a, par décisions du
15 novembre 2000, complété la décision du 24 novembre 1999,
en ce sens qu'il a admis des périodes supplémentaires de
cotisations versées par l'assuré au Portugal. Par jugement
du 23 mai 2001, le Tribunal administratif a admis le re-
cours et annulé la décision attaquée, en reconnaissant à
l'assuré une rente entière d'invalidité.

C.- L'office interjette recours de droit administratif
en concluant à l'annulation du jugement entrepris et à la
confirmation de sa décision du 24 novembre 1999 en ce sens
que l'assuré a droit à une demi-rente fondée sur un degré
d'invalidité de 60 % dès le 1er septembre 1996.
A.________ conclut, avec dépens, au rejet du recours.
L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas
déterminé.

Considérant en droit :

1.- Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une
rente entière s'il est invalide à 66 2/3 % au moins, à une
demi-rente s'il est invalide à 50 % au moins, ou à un quart

de rente s'il est invalide à 40 % au moins; dans les cas
pénibles, l'assuré peut, d'après l'art. 28 al. 1bis LAI,
prétendre une demi-rente s'il est invalide à 40 % au moins.
D'après l'art. 28 al. 2 LAI, pour l'évaluation de
l'invalidité, le revenu du travail que l'invalide pourrait
obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement
attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de
réadaptation et compte tenu d'une situation équilibrée du
marché du travail, est comparé au revenu qu'il aurait pu
obtenir s'il n'était pas invalide.

2.- Les premiers juges ont, sur la base des expertises
médicales versées au dossier, retenu que l'intimé présen-
tait une capacité résiduelle de travail de 50 % dans une
activité adaptée, ce qu'a également admis le recourant en
cours de procédure. Certes, l'intimé semble contester cette
appréciation, mais il n'y a toutefois pas lieu de s'en
écarter. En effet, elle repose tant sur les conclusions de
l'expertise pluridisciplinaire de la Clinique romande de
réadaptation du 31 août 2000 que sur le rapport du docteur
E.________ du 10 mai 1999, lesquels reconnaissent à l'in-
timé une capacité de travail à 50 % dans une activité
permettant une alternance fréquente des positions et
évitant tout port de charges et déplacements importants
(travail en usine, dans l'assemblage de pièces, dans le
triage, le long d'une bande de roulement). Cette capacité
de travail résiduelle de 50 % constitue le point de départ
pour déterminer le revenu d'invalide de l'intimé. Peu
importe à cet égard, contrairement à ce que soutient le
recourant, que l'intimé puisse exercer une activité à temps
partiel avec un plein rendement ou travailler à plein temps
avec un rendement diminué de moitié. Au demeurant, il est
vraisemblable qu'il est plus difficile de trouver, dans le
secteur de la production et des services, un emploi à plein
temps dans lequel seule une prestation réduite de moitié
puisse être fournie, plutôt qu'un poste à mi-temps avec
prestation complète.

3.- Il reste à examiner quel est le degré d'invalidité
présenté par l'intimé en procédant à une comparaison des
revenus au sens de l'art. 28 al. 2 LAI.

a) S'agissant du revenu sans invalidité, on peut
prendre comme référence le salaire de 61 907 fr. par an
fixé par le recourant, qui s'est fondé sur les données
fournies par l'employeur pour l'année 1998, et qu'ont
retenu également les premiers juges. Cependant, comme 1999
est en l'occurrence l'année de référence pour la compa-
raison des revenus (cf. ATF 121 V 366 consid. 1b), il
convient de procéder à une adaptation de ce montant en
fonction de l'évolution des salaires de 1998 à 1999, soit
une augmentation de 0,3 % (La Vie économique, 3/2001,
p. 101, tableau B 10.2), ce qui donne un revenu de
62 093 fr.

b) En l'absence d'un revenu effectivement réalisé, la
jurisprudence considère que le revenu d'invalide peut être
évalué sur la base des statistisques salariales telles
qu'elles résultent de l'Enquête suisse sur la structure des
salaires, publiée par l'Office fédéral de la statistique
(ATF 126 V 76 consid. 3b/bb, 124 V 322 consid. 3b/aa). Dans
ce cas, on réduira le montant des salaires ressortant de
ces données en fonction des empêchements propres à la
personne de l'invalide, par exemple certaines limitations
liées au handicap, à l'âge, à la nationalité, à la caté-
gorie de permis de séjour ou au taux d'occupation. Il n'y a
toutefois pas lieu d'opérer des déductions distinctes pour
chacun des facteurs entrant en considération, mais il
convient plutôt de procéder à une évaluation globale des
effets de ces facteurs sur le revenu d'invalide, compte
tenu de l'ensemble des circonstances du cas concret. La
jurisprudence n'admet pas de déduction globale supérieure à
25 % (ATF 126 V 78 consid. 5).

aa) En l'espèce, on ne saurait se fonder, comme l'ont
fait les premiers juges et le recourant dans la décision
attaquée, sur le montant de 43 875 fr. pour déterminer le
revenu d'invalide de l'intimé. En effet, ce montant ne
repose sur aucune donnée objective. Certes, le recourant
explique s'être basé sur les indications des employeurs de
la place, données de manière officieuse, ainsi que sur les
descriptions de poste de travail (DPT) de la CNA. Toute-
fois, il ne se réfère concrètement à aucune description de
poste de travail, ni ne produit au dossier une attestation
d'un employeur du canton de Fribourg susceptible de justi-
fier le montant retenu. Une simple référence à des données
«officieuses» ne saurait suffire à cet égard puisqu'elle ne
permet ni de connaître les sources du revenu exigible
retenu, ni de vérifier la fiabilité de celui-ci.

bb) Conformément à la jurisprudence citée, il convient
de se référer aux données statistiques publiées par l'Of-
fice fédéral de la statistique. En l'occurrence, le salaire
de référence est celui auquel peuvent prétendre les hommes
effectuant des activités simples et répétitives dans le
secteur privé en 1998, (pour 1999, les chiffres ne sont pas
encore disponibles), à savoir 4268 par mois (Office fédéral
de la statistique, Enquête sur la structure des salaires
1998, TA1, p. 25, niveau de qualifications 4). Au regard du
large éventail d'activités simples et répétitives que
recouvrent les secteurs de la production et des services,
on doit convenir qu'un certain nombre d'entre elles sont
légères et permettent l'alternance des positions et sont
donc adaptées aux problèmes physiques de l'intimé. Comme
les salaires bruts standardisés tiennent compte d'un
horaire de travail de 40 heures, soit une durée hebdoma-
daire inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises
en 1999 (41,8 heures; La Vie économique 3/2001, p. 100,
tableau B9.2), ce montant doit être porté à 4460 fr., soit
53 520 fr. par an.

Si l'on adapte ce chiffre à l'évolution des salaires
entre 1998 et 1999 de 0,3 % (supra let. a), on obtient
53 680 fr. Il faut en outre prendre en considération une
réduction de 50 % de la capacité de travail du recourant,
ce qui donne 26 840 fr. (53 680 x 0,5).

cc) Quant à une éventuelle réduction du salaire sta-
tistique de 26 840 fr., son principe et son étendue dé-
pendent de l'ensemble des circonstances personnelles et
professionnelles du cas concret. Selon l'expertise de la
Clinique romande de réadaptation, l'intimé ne peut plus
exercer qu'une activité légère sans port de charges et
permettant une alternance régulière des positions ainsi
qu'une légère déambulation, son état de santé général étant
altéré. Il est donc désavantagé sur le marché du travail
par rapport à un concurrent sans gêne physique. Par ail-
leurs, il y a lieu de prendre en considération le fait
qu'il ne pourra occuper qu'un poste à temps partiel. Une
réduction de 15 % tient raisonnablement compte de la si-
tuation, de sorte qu'il y a lieu de s'écarter de l'appré-
ciation des premiers juges sur ce point, lesquels se sont
contentés de faire référence «au rendement forcément res-
treint» de l'intimé sans motiver davantage les raisons qui
les ont amenés à accorder l'abattement maximal de 25 %
admis par la jurisprudence. Le revenu d'invalide détermi-
nant s'élève ainsi à 22 814 fr.

c) La comparaison avec un revenu réalisable sans
invalidité de 62 093 fr. (supra let. a) conduit à un taux
d'invalidité de 63,26 % ([62 093 - 22 814] x 100/62 093).

4.- Il suit de là que l'intimé n'a droit qu'à une
demi-rente. Dès lors, le recours est bien fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal
administratif du canton de Fribourg du 23 mai 2001 est
annulé.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au
Tribunal des assurances du canton de Fribourg, Cour
des assurances sociales, et à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 30 novembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.430/01
Date de la décision : 30/11/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-11-30;i.430.01 ?
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