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30/11/2001 | SUISSE | N°I.422/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 30 novembre 2001, I.422/01


«AZA 7»
I 422/01 Tn

IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 30 novembre 2001

dans la cause

D.________, recourant,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue
Edmond-Vaucher 18, 1203 Genève, intimé,

et

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les
personnes résidant à l'étranger, Lausanne

A.- Par décision du 4 octobre 1996, l'Office AI pour
le

canton de Vaud a mis D.________, ressortissant espagnol,
au bénéfice d'une rente entière d'invalidité, ainsi que des
rentes complémentai...

«AZA 7»
I 422/01 Tn

IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 30 novembre 2001

dans la cause

D.________, recourant,

contre

Office AI pour les assurés résidant à l'étranger, avenue
Edmond-Vaucher 18, 1203 Genève, intimé,

et

Commission fédérale de recours en matière d'AVS/AI pour les
personnes résidant à l'étranger, Lausanne

A.- Par décision du 4 octobre 1996, l'Office AI pour
le canton de Vaud a mis D.________, ressortissant espagnol,
au bénéfice d'une rente entière d'invalidité, ainsi que des
rentes complémentaires pour son épouse et ses enfants à
partir du 1er avril 1995. Selon les constatations médicales
de l'époque (cf. en particulier le rapport du 9 novembre
1994 du Service de rhumatologie, médecine physique et

réhabilitation du Centre hospitalier X.________ et le
rapport du 20 décembre 1994 du docteur A.________, à
Lausanne), l'assuré était atteint, depuis le mois d'avril
1994, de récidive de lombo-sciatalgie gauche sur syndrome
facettaire (L5-S1) et présentait une légère protrusion
discale latérale gauche (L4-L5 et L5-S1). Il était inca-
pable de travailler pour une durée indéterminée, sa pro-
fession de chef d'équipe-maçon étant inadaptée.
A la suite du retour de l'assuré dans son pays d'ori-
gine en 1997, le dossier a été transmis à l'Office AI pour
les assurés résidant à l'étranger (ci-après : l'office AI).
Dans le cadre d'une révision du droit à la rente,
l'assuré a été examiné par le Servizio Accertamento Medico
dell'Assicurazione Invalidità (SAM) de Bellinzona. Dans
leur rapport d'expertise du 23 octobre 1998, les médecins
du SAM ont constaté que l'assuré avait recouvré, depuis le
1er avril 1997, une capacité de travail entière pour des
activités à sollicitations physiques légères à moyennes,
permettant de changer de position et ne nécessitant pas le
port de charges de plus de 30 kg. Se fondant sur les con-
clusions des experts, l'office AI a, par décision du
11 janvier 2000, supprimé la rente de l'assuré à partir du
1er mars 2000, au motif qu'il était à nouveau en mesure
d'exercer une activité lucrative adaptée à son état de
santé, ce qui lui permettrait de réaliser plus de la moitié
du gain qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas devenu
invalide.

B.- Par jugement du 14 mai 2001, la Commission fédé-
rale de recours en matière d'assurance-vieillesse, survi-
vants et invalidité pour les personnes résidant à l'étran-
ger (ci-après : la commission) a rejeté le recours formé
par l'assuré contre cette décision.

C.- D.________ interjette recours de droit admi-
nistratif contre ce jugement dont il requiert implicitement
l'annulation, en concluant au maintien de la rente. A l'ap-

pui de ses conclusions, il produit un rapport établi le
19 juin 2001 par le docteur B.________, chirurgien-ortho-
pédiste à Orense.
L'office AI conclut au rejet du recours en déposant
une prise de position de son service médical (rapport du
22 août 2001 du docteur C.________), tandis que l'Office
fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.- a) Aux termes de l'art. 9 al. 1 de la Convention
de sécurité sociale entre la Confédération suisse et
l'Espagne, conclue le 13 octobre 1969 et entrée en vigueur
le 1er septembre 1970, les ressortissants espagnols ont
droit aux rentes ordinaires et aux allocations pour impo-
tents de l'assurance-invalidité suisse, sous réserve des
paragraphes 2 et 3, aux mêmes conditions que les ressortis-
sants suisses.

b) Selon l'art. 28 al. 1 LAI, l'assuré a droit à une
rente entière s'il est invalide à 66 2/3 % au moins, à une
demi-rente s'il est invalide à 50 % au moins, ou à un quart
de rente s'il est invalide à 40 % au moins. Toutefois, les
rentes correspondant à un degré d'invalidité inférieur à
50 % ne sont versées qu'aux assurés qui ont leur domicile
et leur résidence habituelle en Suisse (art. 28 al. 1ter
LAI).
Pour l'évaluation de l'invalidité, le revenu du tra-
vail que l'invalide pourrait obtenir en exerçant une acti-
vité lucrative qu'on peut raisonnablement attendre de lui,
après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et
compte tenu d'une situation équilibrée du marché du travail
(revenu d'invalide), est comparé au revenu qu'il aurait pu
obtenir s'il n'était pas invalide (revenu sans invalidité;
art. 28 al. 2 LAI).

c) Par ailleurs, en vertu de l'art. 41 LAI, si l'inva-
lidité d'un bénéficiaire de rente se modifie de manière à
influencer le droit à une rente, celle-ci est, pour l'ave-
nir, augmentée, réduite ou supprimée. Tout changement
important des circonstances propres à influencer le degré
d'invalidité et donc le droit à la rente, peut motiver une
révision. Pour juger si un tel changement s'est produit, il
faut comparer les faits tels qu'ils se présentaient au mo-
ment de la décision de rente initiale avec les circons-
tances régnant à l'époque de la décision litigieuse (ATF
125 V 369 consid. 2 et la référence).

d) En l'espèce, comme l'ont constaté à juste titre les
premiers juges, et comme l'admet l'office intimé devant la
Cour de céans, les conditions d'une révision au sens de
l'art. 41 LAI ne sont pas remplies. En effet, il ressort
des expertises médicales établies dans le cadre de la pro-
cédure de révision que l'état de santé de l'assuré ne s'est
pas modifié entre le moment de la décision initiale d'oc-
troi de la rente et celui de la décision litigieuse. Ainsi,
le médecin traitant du recourant en Espagne, le docteur
B.________, confirme que la situation de son patient est
similaire à celle résultant des rapports médicaux de 1995
(rapport du 19 juin 2000). Son dernier rapport daté du
19 juin 2001 ne fait pas non plus état d'une péjoration
notable de l'état de santé du recourant.
Dès lors, on peut retenir qu'il n'y a pas eu, depuis
l'octroi de la rente d'invalidité, de changement de la si-
tuation du recourant de nature à justifier la révision du
droit.

2.- a) Il reste à déterminer si c'est à juste titre
que les premiers juges ont confirmé la décision litigieuse
pour le motif substitué que les conditions d'une reconsi-
dération de la décision du 4 octobre 1996 de l'Office AI du
canton de Vaud sont remplies.

b) Selon la jurisprudence, si les conditions prévues à
l'art. 41 LAI font défaut, l'administration peut en tout
temps revenir d'office sur une décision formellement passée
en force de chose jugée et sur laquelle une autorité judi-
ciaire ne s'est pas prononcée sous l'angle matériel, à
condition qu'elle soit sans nul doute erronée et que sa
rectification revête une importance notable. Le juge peut,
le cas échéant, confirmer une décision de révision rendue à
tort pour le motif substitué que la décision de rente ini-
tiale était sans nul doute erronée et que sa rectification
revêt une importance notable (ATF 125 V 369 consid. 2 et
les références).
Pour juger s'il est admissible de reconsidérer la
décision, pour le motif qu'elle est sans nul doute erronée,
il faut se fonder sur la situation juridique existant au
moment où cette décision est rendue, compte tenu de la
pratique en vigueur à l'époque (ATF 119 V 479 consid. 1b/cc
et les références).

c) A l'époque de sa décision, l'Office AI du canton de
Vaud s'est fondé principalement sur une expertise du doc-
teur E.________, psychiatre à Vevey, selon laquelle des
mesures professionnelles ne paraissaient pas possibles dans
l'immédiat (rapport du 12 décembre 1994), pour retenir que
des mesures de réadaptation étaient prématurées et que le
recourant présentait dès lors une invalidité économique
totale. Or, d'une part, les expertises concernant l'assuré
sur le plan somatique ne permettaient pas de conclure à une
incapacité totale d'exercer une activité lucrative. Les
médecins du Service de rhumatologie, médecine physique et
réhabilitation de X.________ ont ainsi retenu qu'il
n'existait pas chez l'assuré «de raison sur le plan
rhumatologique susceptible de diminuer sa capacité de
travail à long terme» et qu'il devrait pouvoir reprendre
progressivement son travail dans les semaines suivantes
(rapport du 9 novembre 1994). De même, son médecin
traitant, le docteur A.________ estimait que si la

profession exercée par le recourant jusqu'alors était
inadaptée, des mesures professionnelles dans une activité
sédentaire étaient indiquées (rapport du 20 décembre 1994);
il proposait qu'une expertise soit confiée au Centre
médical d'observation de l'assurance-invalidité (rapport de
l'OAI du canton de Vaud du 25 juillet 1995). D'autre part,
le docteur E.________ n'a pas constaté d'atteinte psychique
susceptible d'influencer la capacité de gain de l'assuré,
de sorte que l'on ne pouvait conclure, sur la base de
l'avis exprimé par ce praticien, à une incapacité totale de
travail. Dans ces circonstances, il ne se justifiait donc
pas de fixer à 100 % le degré d'invalidité du recourant.

3.- Dès lors que le recourant était susceptible de
travailler dans une activité adaptée à son atteinte, il y a
lieu d'examiner quel était le degré d'invalidité du recou-
rant au moment de la décision initiale.

a) Pour ce faire, et dans la mesure où l'état de santé
du recourant ne s'est pas modifié, l'on peut se référer aux
conclusions des médecins du SAM, selon lesquelles le recou-
rant est - et était - en mesure d'exercer entièrement une
activité adaptée à son état de santé, telle qu'ouvrier de
fabrique ou magasinier.
Le recourant se plaint certes du fait que les rap-
ports de son médecin traitant constatant une invalidité
totale et permanente n'auraient pas été examinés et re-
proche à l'intimé de n'avoir pas établi un rapport détaillé
sur son état de santé.
Ce grief n'est cependant pas fondé. En effet, d'une
part, les rapports du docteur B.________, postérieurs à
la décision de l'intimé, ont été dûment pris en compte par
l'instance de recours précédente, comme cela ressort du
jugement entrepris. D'autre part, l'expertise du SAM a été
établie de manière très détaillée et se fonde sur les ré-
sultats d'examens pluridisciplinaires (examens radiolo-
giques, examens de laboratoire, électrocardiogramme, con-

sultations psychiatrique, psychopathologique, neurologique
et orthopédique), ainsi que sur l'ensemble du dossier médi-
cal à disposition; elle prend également en compte les
plaintes de l'assuré. Aussi bien ce rapport remplit-il
toutes les exigences posées par la jurisprudence pour qu'on
puisse lui accorder une pleine valeur probante (ATF
125 V 352 consid. 3a et les références) et il n'y a pas
motif de s'écarter des conclusions qui y sont retenues. Au
demeurant, le médecin traitant du recourant pose un dia-
gnostic identique à celui des médecins du SAM, mais se
borne à affirmer que les douleurs décrites par son patient
s'expliquent par son affection lombaire et le rendent tota-
lement invalide (rapport parvenu à la commission le 20 no-
vembre 2000 et certificat du 19 juin 2001). Son apprécia-
tion ne permet pas de douter du bien-fondé des conclusions
auxquelles sont parvenus les médecins du SAM.
On ne voit pas non plus en quoi l'intimé aurait violé
la convention susmentionnée comme l'allègue le recourant.
En particulier, l'Arrangement administratif concernant
l'application de cette convention, conclu le 19 avril 1990
et entré en vigueur le 1er août 1990, ne prévoit pas une
obligation de l'office compétent de demander à l'Institut
National de la Sécurité sociale de procéder aux examens
médicaux nécessaires en Espagne. Ceux-ci peuvent être
confiés, comme en l'espèce, à des médecins en Suisse.

b) aa) S'agissant de la comparaison des revenus néces-
saire pour déterminer l'invalidité du recourant, on peut
prendre comme référence pour le revenu sans invalidité le
salaire de 4855 fr. par mois, soit 63 115 fr. par an (y
compris le treizième mois de salaire), que le recourant
aurait réalisé en 1994, s'il n'avait dû cesser son activité
pour des raisons de santé (questionnaire pour l'employeur
du 13 janvier 1995). Cependant, comme 1996 est en l'occur-
rence l'année de référence pour la comparaison des revenus
(cf. ATF 121 V 366 consid. 1b), il convient de procéder à
une adaptation de ce montant en fonction de l'évolution des

salaires entre 1994 et 1996, soit une augmentation de 1,3 %
de 1994 à 1995, puis de 1,3 % de 1995 à 1996 (La Vie écono-
mique, 1/2000, p. 28, tableau B 10.2), ce qui donne un
revenu de 64 767 fr.

bb) En l'absence d'un revenu effectivement réalisé, la
jurisprudence considère que le revenu d'invalide peut être
évalué sur la base des statistiques salariales (ATF
126 V 76 consid. 3b/bb).
En l'espèce, le salaire de référence (en 1996) est
celui auquel peuvent prétendre les hommes effectuant des
activités simples et répétitives dans le secteur privé
(valeur centrale), dans les secteurs de la production et
des services), à savoir 4294 fr. par mois (Office fédéral
de la statistique, Enquête sur la structure des salaires
1996 TA1, p. 17, niveau de qualifications 4). De tels
secteurs offrent un large éventail d'activités simples et
répétitives, de sorte qu'un certain nombre d'entre elles
sont adaptées aux problèmes physiques du recourant. Comme
les salaires bruts standardisés tiennent compte d'un
horaire de travail de 40 heures, soit une durée hebdoma-
daire inférieure à la moyenne usuelle dans les entreprises
en 1996 (41,9 heures; La Vie économique, 3/2001, p. 100,
tableau B.9.2), ce montant doit être fixé à 4498 fr., soit
53 976 fr. par an. En procédant en outre à un abattement de
15 pour cent (ATF 126 V 78 consid. 5) pour tenir compte en
particulier de la nationalité étrangère du recourant et de
son empêchement à effectuer des travaux lourds ou de
la
nécessité d'alterner les positions assis/debout, le revenu
d'invalide déterminant s'élève à 45 880 fr. par an.

cc) La comparaison avec un revenu réalisable sans
invalidité de 64 767 fr. (supra, let. b) conduit à une
invalidité de 29,16 % ([64 767 - 45 880] x 100/64 767 fr.),
ce qui est très largement inférieur au taux ouvrant le
droit à une rente (art. 28 al. 1 LAI).

Par conséquent, on peut retenir, avec les premiers
juges, que la décision d'octroi d'une rente du 4 octobre
1996 était sans nul doute erronée au sens de la jurispru-
dence, si bien que les conditions d'une reconsidération
sont données.

4.- a) Le droit d'être entendu doit être reconnu et
respecté lorsque le juge envisage de fonder sa décision sur
une norme ou un motif juridique non évoqué dans la procé-
dure antérieure et dont aucune des parties en présence ne
s'est prévalue et ne pouvait supputer la pertinence in casu
(ATF 125 V 370 consid. 4a et les références).
Toutefois, selon la jurisprudence, la violation du
droit d'être entendu, pour autant qu'elle ne soit pas d'une
gravité particulière - est réparée lorsque la partie lésée
a la possibilité de s'exprimer devant une autorité de re-
cours jouissant d'un plein pouvoir d'examen. Au demeurant,
la réparation d'un vice éventuel ne doit avoir lieu
qu'exceptionnellement (ATF 125 V 371 consid. 3c/aa).

b) En l'occurrence, les premiers juges ont confirmé la
décision litigieuse par substitution de motifs, sans que le
motif de la reconsidération ait été évoqué dans la procé-
dure antérieure. Cependant, le fait de ne pas prévenir
l'intéressé d'un changement de motivation ne constitue pas
une violation si grave du droit d'être entendu qu'elle ne
pourrait être corrigée par la suite (cf. ATF 125 V 371 con-
sid. c/bb). Etant donné que le recourant a eu la faculté de
s'exprimer devant le Tribunal fédéral des assurances qui
peut revoir librement tant les faits que le droit (art. 132
OJ), il y a lieu d'admettre que le vice a pu être excep-
tionnellement réparé en l'espèce.

5.- Il suit de là que le recours se révèle mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Il n'est pas perçu de frais de justice.

III. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la
Commission fédérale de recours en matière d'assurance-
vieillesse, survivants et invalidité pour les person-
nes résidant à l'étranger et à l'Office fédéral des
assurances sociales.

Lucerne, le 30 novembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

La Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.422/01
Date de la décision : 30/11/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-11-30;i.422.01 ?
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