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28/11/2001 | SUISSE | N°4C.178/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 28 novembre 2001, 4C.178/2001


«/2»

4C.178/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

28 novembre 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Rottenberg Liatowitsch et M. Nyffeler, juges.

Greffière: Mme de Montmollin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________ S.A., défenderesse et recourante, représentée par
Me François Besse, avocat à Lausanne,

et

A.________, demandeur et intimé, représenté par Me Jacques
Emery, av

ocat à Genève;

(contrat de courtage)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Désireux ...

«/2»

4C.178/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

28 novembre 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Rottenberg Liatowitsch et M. Nyffeler, juges.

Greffière: Mme de Montmollin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________ S.A., défenderesse et recourante, représentée par
Me François Besse, avocat à Lausanne,

et

A.________, demandeur et intimé, représenté par Me Jacques
Emery, avocat à Genève;

(contrat de courtage)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- Désireux de se faire bâtir des villas sur un
terrain à ..., les époux B.________, C.________, D.________
et E.________, ainsi qu'une cinquième personne, ont mandaté
un architecte, dans lequel ils ont perdu confiance.
B.________ s'est alors adressé à A.________, lui-même archi-
tecte, à qui il souhaitait confier la construction de sa
maison. A.________ a conseillé à son interlocuteur de passer
par une entreprise générale, X.________ S.A., afin de mieux
maîtriser les coûts.

Par la suite, les quatre mandants ont chacun conclu
un contrat d'entreprise globale avec X.________ S.A., qui a
ainsi endossé les fonctions tant d'architecte que d'entre-
preneur général. Les services de A.________ comme architecte
sont devenus superflus, de sorte que celui-ci s'est retiré
au
profit de X.________ S.A. Cette société s'est engagée envers
B.________ à lui verser une commission de 1.5% de la valeur
des contrats signés par les trois autres maîtres d'ouvrage.

B.- Le 16 décembre 1994, X.________ S.A., sous la
signature de F.________ et de G.________, a envoyé le cour-
rier suivant à A.________:

"Par la présente, nous vous confirmons le contenu
de notre dernier entretien à Genève concernant la
construction des villas à ...

Ainsi, nous avons prévu de vous verser une commis-
sion de 3% sur le prix de la villa de M.
B.________, et de 2% sur les autres clients éven-
tuels. Ces versements interviennent à l'achèvement
du sous-sol pour la première moitié et à la fin des
travaux pour la deuxième moitié.

Nous sommes persuadés que notre collaboration sera
aussi agréable qu'utile et nous comptons sur vous
pour faciliter certains contacts avec nos clients.
Actuellement, seulement MM. B.________ et

C.________ ont signé; les tractations continuent
avec MM. E.________ et D.________."

Relatant la rencontre mentionnée dans cette lettre,
F.________ et G.________ ont expliqué qu'ils attendaient de
A.________ qu'il intervienne dans la collaboration avec les
clients, assiste aux discussions avec eux, conseille à
ceux-ci des options architecturales ou les aide dans le
choix
des matériaux. En contrepartie, A.________ devait percevoir
une participation, sous forme d'une rétrocession partielle,
aux honoraires de X.________ S.A. La cour cantonale a toute-
fois estimé que la nature exacte des prestations ou
activités
ainsi décrites n'avait pas été établie à satisfaction de
droit.

A.________ a rendu visite une fois à Mme C.________
avec G.________ à la fin 1994, et a pris part à un rendez-
vous avec B.________ qu'il a assisté dans la prise de cer-
taines décisions. Il n'a eu aucun contact avec les
D.________
et les E.________.

C.- Le 18 juillet 1995, A.________ a transmis à
X.________ S.A. trois notes d'honoraires, chacune pour
"acompte à valoir sur décompte final ultérieur", respecti-
vement de 11 715 fr. (villa B.________), 5 325 fr. (villa
C.________), et de 4 260 fr. (villa D.________). X.________
S.A. a payé les deux derniers montants. Elle a invoqué, pour
le reste, l'absence à l'étranger de A.________ durant la
construction des villas ainsi qu'un litige avec B.________
pour le paiement final de sa facture, en faisant valoir
qu'elle envisageait de ce fait une "forte réduction" des
honoraires de A.________. Le 1er juillet 1996, X.________
S.A. a remis à A.________ les descriptifs techniques des
quatre villas, faisant état de prix de
900 000 fr. (B.________), 1 265 000 fr. (C.________),
505 000 fr. (D.________), et 1 146 000 fr. (E.________). Sur

cette base, A.________ a présenté à son interlocutrice un dé-
compte de commissions dues pour un total de 85 320 fr. sous
réserve des plus-values et de l'imputation du montant déjà
versé. La société a contesté ce décompte et fait opposition
à
un commandement de payer 85 320 fr. que A.________ lui a
fait
notifier le 17 octobre 1996.

D.- Par demande du 29 avril 1998, A.________ a as-
signé X.________ S.A. en paiement de 85 320 fr., intérêts en
sus, "sous toutes légitimes imputations", en sollicitant
également la mainlevée définitive de l'opposition. Il a
porté
ses conclusions en cours de procédure à environ 95 000 fr.
avec intérêts.

Par jugement du 4 septembre 2000, la Cour civile du
Tribunal cantonal du canton de Vaud a condamné X.________
S.A. à verser au demandeur 52 815 fr. avec intérêts à 5% dès
le 18 octobre 1996. Elle a prononcé la mainlevée définitive
de l'opposition à concurrence du même montant.

E.- Parallèlement à un recours de droit cantonal,
retiré entre-temps, X.________ S.A. recourt en réforme au
Tribunal fédéral contre le jugement du 4 septembre 2000. Ses
conclusions tendent au rejet de la demande.

A.________ invite le Tribunal fédéral à rejeter,
dans la mesure de sa recevabilité, le recours de X.________
S.A. Il forme un recours joint aux termes duquel il conclut
à
la condamnation de la défenderesse à lui verser 75 735 fr.
avec intérêts à 5% l'an dès le 18 octobre 1996, la mainlevée
de l'opposition étant prononcée pour le même montant.

X.________ S.A. conclut au rejet du recours joint.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Afin de qualifier les relations entre les par-
ties, la cour cantonale s'est appuyée pour l'essentiel sur
la
lettre du 16 décembre 1994, qu'elle a interprétée à la lumiè-
re des déclarations, au demeurant sujettes selon elle à cau-
tion, des témoins F.________ et G.________. Ecartant la
thèse
du mandat soutenue par la défenderesse, elle est parvenue à
la conclusion qu'on était en présence d'un courtage de
présentation dans le cas de la construction de la villa des
époux B.________, de courtages d'indication dans les autres
cas.

Il est vrai que le contrat principal (contrat d'en-
treprise global) était déjà signé au moment de l'envoi de la
lettre du 16 décembre 1994. Mais cette circonstance n'ex-
cluait pas la figure du contrat de courtage, dans la mesure
où le courrier en question confirmait un entretien
préalable,
dont la date n'était pas certaine; quoi qu'il en soit, pour
les contrats d'entreprise globale déjà conclus (B.________
et
apparemment C.________), la promesse de rémunération du 16
décembre 1994 impliquait la reconnaissance d'une activité
causale du demandeur, qui était dès lors déchargé du fardeau
de la preuve de celle-ci (garantie de provision ou de commis-
sion).

La cour a cependant considéré que dans tous les cas
de garantie de provision, le salaire du courtier reste assu-
jetti à la condition que l'intéressé ait déployé une
certaine
activité, faute de quoi la qualification du contrat s'en
trouve modifiée: un tel accord constitue une promesse condi-
tionnelle de donner (art. 243 al. 1 CO). Comme en l'occurren-
ce la défenderesse, société commerciale, avait promis une ré-
munération au demandeur en fonction du mérite qu'il avait eu
d'engager B.________ - et par son intermédiaire d'autres

clients - à s'adresser à elle, une intention libérale ne
pouvait être retenue.

Le contrat devant être qualifié de courtage, il in-
combait au demandeur de prouver qu'il avait exercé une acti-
vité appropriée, ce qui n'était pas le cas à l'égard des
époux D.________ et E.________. Il n'avait donc pas droit à
une rémunération pour la conclusion des contrats mettant en
cause ces derniers, à moins que la défenderesse n'ait
reconnu
implicitement une activité causale de sa part, le déliant de
la preuve d'une telle activité. Pour les époux D.________,
la
défenderesse avait versé un acompte le 8 novembre 1995, bien
après la signature des contrats d'entreprise globale. Ainsi,
elle avait manifesté par acte concluant sa conscience et sa
volonté de s'acquitter des commissions promises. Il en
allait
différemment pour les époux E.________; en ce qui les concer-
ne, on ne pouvait inférer une reconnaissance implicite de
l'activité du demandeur ni de la lettre du 16 décembre 1994,
ni d'un quelconque paiement partiel de la commission. Ce
chef
de réclamation devait donc être rejeté.

Sur le recours principal

2.- a) D'entrée de cause, il y a lieu de rappeler
que, selon l'art. 55 al. 1 let. c OJ, il incombe au
recourant
d'indiquer succinctement quelles sont les règles de droit fé-
déral violées selon lui par la décision attaquée, et en quoi
consiste la violation. S'il n'est pas nécessaire de citer ex-
pressément des articles de loi, il est indispensable que le
recourant discute effectivement les motifs de la décision at-
taquée, qu'il précise quelles sont les règles de droit fédé-
ral qui auraient été violées et indique pourquoi elles au-
raient été méconnues (ATF 121 III 397 consid. 2a p. 400; 116
II 745 consid. 3 p. 748 s). Il ne peut être présenté de
grief
contre les constatations de fait, ni de faits, exceptions et
preuves nouveaux, ni d'observations sur la violation du
droit

cantonal (ATF 126 III 189 consid. 2a; 120 II 97 consid. 2 p.
99; 119 II 84 consid. 3; 116 II 92 consid. 2 p. 93 et les
références).

La sanction du non-respect de ces exigences est
l'irrecevabilité. Dans la mesure où la défenderesse se con-
tente d'une critique générale du jugement attaqué ou fonde
son argumentation sur un état de fait différent de celui re-
tenu par la cour cantonale, ses moyens doivent être d'emblée
écartés.

b) aa) Dans un premier moyen, la défenderesse sou-
tient que, contrairement à l'opinion de la cour cantonale,
l'on ne se trouve pas en présence d'un contrat de courtage,
mais d'un "simple" mandat, ce qui est un grief en soi receva-
ble en instance de réforme. Son affirmation se fonde toute-
fois sur un état de fait différent de celui retenu par les
juges cantonaux, étant rappelé que la détermination de la
réelle et commune intention des parties constitue un point
de
fait soustrait à l'examen du Tribunal fédéral en instance de
réforme (ATF 126 III 25 consid. 3c). La défenderesse se réfè-
re ainsi en pure perte aux déclarations du témoin G.________
décrivant l'activité attendue du demandeur, à savoir du con-
seil et de l'assistance aux clients, dans la mesure où la
cour cantonale a considéré de manière à lier le Tribunal fé-
déral (art. 63 al. 2 OJ) qu'il ne résultait pas de
l'audition
des témoins F.________ et G.________, au demeurant sujets à
caution, que les parties soient convenues oralement de pres-
tations ou de services bien déterminés incombant au
demandeur
(consid. II.b). La référence à une "collaboration" dans la
lettre du 16 décembre 1994 ne change rien à ce qui précède.
Pour le reste, la défenderesse ne tente pas de démontrer en
quoi, sur le vu de l'état de fait déterminant, la cour can-
tonale aurait violé le droit fédéral en qualifiant l'accord
passée entre les parties de contrat de courtage au sens des
art. 412 ss CO. Faute de grief motivé à satisfaction de
droit

(art. 55 al. 1 let. c OJ), le jugement cantonal n'a pas à
être revu sur ce point.

bb) Pour le cas où la relation contractuelle entre
les parties devait être qualifiée de courtage, la défenderes-
se soutient néanmoins que, étant tenu pour constant que le
demandeur n'a exercé aucune activité en relation avec la
convention du 16 décembre 1994, le versement de 9 585 fr.
qu'elle a effectué ne permettrait pas d'inférer qu'elle au-
rait, au moins implicitement, admis l'existence du courtage.
L'état de fait ne préciserait en effet pas à quel titre ce
règlement serait intervenu en main du demandeur, lequel
n'aurait pas apporté la preuve qui lui incombait (art. 8 CC)
qu'il se serait agi en l'occurrence du paiement partiel
d'une
commission de courtage.

Là aussi, la défenderesse se heurte aux constata-
tions de fait des premiers juges. Elle oublie que la cour
cantonale a souverainement relevé (consid. 3) que ce verse-
ment correspondait au total des deux notes d'honoraires du
demandeur du 18 juillet 1995 (5 325 fr. pour la villa
C.________ et 4 260 fr. pour la villa D.________), chacune
étant établie comme un "acompte à valoir sur décompte final
ultérieur". Et une fois de plus, elle ne montre pas (art. 55
al. 1 let. c OJ) en quoi serait contraire au droit fédéral
l'opinion de la cour cantonale selon laquelle ce versement,
sans réserve ni condition, constituerait la manifestation,
par acte concluant, de la volonté de la société d'entreprise
générale de s'acquitter des commissions promises.

3.- a) A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le
droit du demandeur à des commissions de courtage serait re-
connu, la défenderesse reproche à la cour cantonale d'avoir
omis de prendre en compte le fait qu'elle s'était engagée à
verser aux époux B.________ une commission équivalant au
1,5%
de la valeur des contrats signés pour les trois autres
villas

et qu'un montant de 50 000 fr. aurait été porté à ce titre
en
déduction du décompte des époux B.________. Une telle commis-
sion ne pourrait s'inscrire que dans le cadre d'un courtage
d'indication; or, logiquement, une indication causale ne
pourrait pas émaner de deux personnes différentes, ou au
moins faudrait-il appliquer la jurisprudence
relative au
courtage de négociation prévoyant le partage de la rémunéra-
tion entre les courtiers.

b) La cour cantonale a déduit du comportement de la
défenderesse après le 25 octobre 1994, en particulier du ver-
sement sans réserve de l'acompte du 8 novembre 1995, qu'elle
avait reconnu le droit du demandeur à recevoir des commis-
sions, sans avoir à justifier d'activité. D'après la cour,
cette rémunération avait été promise au demandeur en considé-
ration "du mérite qu'il a eu d'engager B.________ - et, par
l'intermédiaire de celui-ci, d'autres clients, dans son
sillage - à s'adresser à elle". En d'autres termes, la rému-
nération annoncée constitue le salaire pour les indications
qu'il a données et qui ont conduit, non seulement directe-
ment, mais aussi indirectement, à la conclusion des diffé-
rents contrats de construction. On ne voit pas en quoi, ce
faisant, la cour cantonale aurait violé le droit fédéral, et
en quoi la déduction de 50 000 fr. consentie aux époux
B.________ empêcherait la reconnaissance des effets, même
indirects, de l'intervention du demandeur dans la conclusion
des différents contrats d'entreprise.

Lorsque la défenderesse soutient qu'il manque une
condition à la naissance du droit à la provision, à savoir
la
preuve d'un lien de causalité, elle perd de vue que l'art.
413 CO ne constitue pas une norme impérative. Le mandant
peut
parfaitement s'engager au versement d'une provision sans
preuve d'un lien de causalité (Hofstetter, SPR VII/6, 2e
éd.,
Berne 2000 p. 174). Il en va de même en ce qui concerne la
hauteur de la provision. Certes, la jurisprudence du
Tribunal

fédéral admet que si plusieurs courtiers sont intervenus in-
dépendamment, la provision de ceux-ci doit être fixée propor-
tionnellement à leur contribution au succès de l'affaire
(ATF
72 II 421; Amman, Commentaire bâlois, 2e éd., n° 12 ad art.
413 CO). Cette règle fondée sur des motifs d'équité qui ne
rencontre d'ailleurs pas l'unanimité en doctrine ne vaut tou-
tefois que pour autant qu'aucun accord contraire n'ait été
conclu. En l'espèce, la cour cantonale a constaté que la dé-
fenderesse avait versé sans réserve un acompte provisionnel
au demandeur et avait de la sorte reconnu le droit de celui-
ci à une commission. En outre, le demandeur et B.________
n'ont pas, selon le jugement attaqué, été chargés indépendam-
ment l'un de l'autre du courtage litigieux, puisque le deman-
deur devait précisément, de la volonté de la défenderesse,
être rémunéré pour avoir engagé B.________, et par l'intermé-
diaire de celui-ci, d'autres clients, à s'adresser à elle.
Dans ces circonstances, la cour cantonale n'a nullement
violé
le droit fédéral en ne diminuant pas la commission du deman-
deur en raison du rôle joué par B.________.

L'art. 417 CO stipule que lorsqu'un salaire exces-
sif a été stipulé soit pour avoir indiqué une occasion de
conclure un contrat individuel de travail ou une vente d'im-
meuble, soit pour avoir négocié l'un de ces contrats, il
peut
être, à la requête du débiteur, équitablement réduit par le
juge. La disposition ne vise cependant pas les contrats d'en-
treprise, de sorte que la défenderesse ne peut s'en préva-
loir. Il n'apparaît au demeurant pas qu'elle ait déjà
formulé
pareille requête en instance cantonale.

Le recours principal se révèle ainsi mal fondé,
pour autant qu'il soit recevable.

Sur le recours joint

4.- a) Le demandeur reproche quant à lui à la cour
cantonale de lui avoir dénié le droit à une commission pour
la construction de la villa E.________.

Invoquant une mauvaise application du principe de
la confiance, il prétend que, dans son courrier du 16 décem-
bre 1994, la défenderesse reconnaîtrait implicitement l'acti-
vité qu'il a déployée pour la conclusion du contrat avec
B.________, et le lien de causalité entre le service rendu
par le demandeur et les autres constructions que la société
d'entreprise générale a pu réaliser; il aurait donc été dis-
pensé d'apporter la preuve d'une activité ayant mené le pro-
priétaire de la dernière villa à conclure. Si telle n'avait
pas été l'intention de la défenderesse, elle n'aurait pas
précisé que sa lettre concernait la construction "des villas
au chemin des Princes", que la promesse de paiement incluait
non seulement les époux B.________, mais également tous les
autres clients éventuels soit en tout cas les époux
C.________ qui avaient déjà signé, ainsi que les époux
E.________ et D.________ avec lesquels la société d'entrepri-
se générale était en négociation, en précisant même le mon-
tant de la rémunération. La distinction opérée par la cour
cantonale entre les époux C.________ et D.________ d'une
part
et les époux E.________ d'autre part apparaîtrait
incompréhensible. Les constatations de la cour cantonale mon-
treraient que la conclusion des 3 derniers contrats ne cons-
tituerait que l'effet indirect du premier. B.________ aurait
du reste été rémunéré par la défenderesse pour avoir apporté
ces trois contrats.

b) Il est constant en l'occurrence que c'est le de-
mandeur qui a amené la défenderesse et les B.________ à
conclure le premier contrat de construction, et, indirecte-
ment, les trois autres, dans la mesure où c'est par les

B.________ que les propriétaires voisins sont entrés en
contact avec la société d'entreprise générale et ont décidé
de lui confier aussi les travaux de leur maison. La cour
cantonale perd de vue le fait qu'un lien de causalité, même
indirect comme dans le cas particulier, peut suffire à jus-
tifier le paiement d'une commission pour courtage
(Hofstetter, op. cit., p. 176; Engel, Contrats de droit
suisse, 2e éd., p. 531; cf. aussi ATF 114 II 357). La cour
cantonale a aussi constaté de manière à lier le Tribunal fé-
déral que la promesse de rémunération émanant de la défende-
resse était la manifestation de sa volonté de récompenser le
mérite du demandeur de lui avoir adressé non seulement
B.________, mais encore d'autres clients par son biais. On
doit donner raison au demandeur lorsqu'il soutient que la
lettre du 16 décembre 1994 ne pouvait se comprendre, selon
les règles de la bonne foi, que comme la reconnaissance im-
plicite de l'activité déployée en faveur de la défenderesse
pour la conclusion du contrat avec B.________, et comme la
reconnaissance du lien de causalité entre le service rendu
par le demandeur et les autres constructions qu'elle a pu
réaliser sur la parcelle. Le demandeur n'avait donc plus à
fournir la preuve d'une activité spécifique pour ces der-
niers.

Le recours joint doit donc être admis. Le jugement
attaqué sera annulé et la défenderesse condamnée à verser au
demandeur une commission équivalant à 2% du prix de la villa
E.________, 1 146 000 fr., soit une commission de 22 920
fr.
venant s'ajouter au montant déjà alloué par la cour cantona-
le. Ce montant portera intérêts à 5% dès le 18 octobre 1996,
lendemain de la notification du commandement de payer. La
mainlevée sera prononcée à due concurrence.

5.- Vu l'issue de la cause, la défenderesse suppor-
tera les frais de justice et versera une indemnité de dépens
au demandeur. Le dossier sera envoyé à la cour cantonale
pour

nouvelle décision sur les frais et dépens d'instance cantona-
le.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours de la défenderesse dans la
mesure où il est recevable;

2. Admet le recours joint du demandeur et annule le
jugement attaqué;

3. Condamne la défenderesse à verser au demandeur
75 753 fr. avec intérêts à 5% dès le 18 octobre 1996;

4. Lève définitivement à due concurrence l'opposi-
tion formée par la défenderesse au commandement de payer no-
tifié le 17 octobre 1996 dans la poursuite n° 581696 de
l'Office des poursuites de l'arrondissement de Lausanne-Est;

5. Met un émolument judiciaire de 4 500 fr. à la
charge de la défenderesse;

6. Dit que la défenderesse versera au demandeur une
indemnité de 6 000 fr. à titre de dépens;

7. Renvoie la cause à l'autorité cantonale pour
nouvelle décision sur les frais et dépens de l'instance can-
tonale;

8. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Cour civile du Tribunal cantonal
du canton de Vaud

________

Lausanne, le 28 novembre 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le président,

La greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.178/2001
Date de la décision : 28/11/2001
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-11-28;4c.178.2001 ?
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