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21/11/2001 | SUISSE | N°I.393/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 novembre 2001, I.393/01


«AZA 7»
I 393/01

IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari.
Greffier : M. Wagner

Arrêt du 21 novembre 2001

dans la cause

Fondation X.________, recourante, représentée par Maître
Laurent Schneuwly, avocat, Boulevard de Pérolles 6,
1701 Fribourg,

contre

Office fédéral des assurances sociales, Effingerstrasse 20,
3003 Berne, intimé,

et

Département fédéral de l'intérieur, Berne

A.- La Fondation X.________ (ci-après : la Fon

dation),
de siège à Oberried, a pour but l'accueil, l'hébergement,
l'observation, l'éducation et la scolarisation d'enfants
présenta...

«AZA 7»
I 393/01

IIe Chambre

MM. les juges Lustenberger, Président, Meyer et Ferrari.
Greffier : M. Wagner

Arrêt du 21 novembre 2001

dans la cause

Fondation X.________, recourante, représentée par Maître
Laurent Schneuwly, avocat, Boulevard de Pérolles 6,
1701 Fribourg,

contre

Office fédéral des assurances sociales, Effingerstrasse 20,
3003 Berne, intimé,

et

Département fédéral de l'intérieur, Berne

A.- La Fondation X.________ (ci-après : la Fondation),
de siège à Oberried, a pour but l'accueil, l'hébergement,
l'observation, l'éducation et la scolarisation d'enfants
présentant des difficultés scolaires et sociales, la
formation professionnelle et sociale de jeunes filles
présentant des difficultés d'apprentissage ainsi que

I 393/01 Tn

l'accueil, l'hébergement et la prise en charge sanitaire de
personnes âgées en home simple. A cet effet, elle exploite
l'Institut Y.________.
Depuis sa reconnaissance en 1964, l'Institut
Y.________ perçoit de l'Office fédéral des assurances
sociales (OFAS) des subventions pour les frais d'exploita-
tion de l'école spécialisée et du centre de formation
professionnelle spécialisée.
Par décision du 10 novembre 2000, l'OFAS a refusé
d'entrer en matière sur la demande de subventions pour
l'année 1999, au motif qu'elle avait été déposée tardive-
ment.

B.- La Fondation a recouru devant le Département
fédéral de l'Intérieur (DFI) contre la décision du
10 novembre 2000 dont elle demande l'annulation. Elle
concluait à l'octroi de la subvention aux frais d'exploi-
tation de l'année 1999 pour les sections de la formation
professionnelle et de l'école spéciale de l'institut.
Par décision du 16 mai 2001, le DFI a rejeté le
recours.

C.- La Fondation interjette recours de droit adminis-
tratif contre cette décision dont elle requiert, sous suite
de frais et dépens, l'annulation. Elle conclut à l'octroi
des subventions aux frais d'exploitation de l'année 1999
pour la section de la formation professionnelle et la sec-
tion de l'école spéciale de l'Institut Y.________, la cause
étant renvoyée à l'OFAS pour en fixer les montants.
Le DFI conclut au rejet du recours alors que l'OFAS
n'a pas déposé d'observations.

Considérant en droit :

1.- Selon la jurisprudence, les litiges en matière de
subventions selon l'art. 73 LAI ne concernent pas des pres-

tations d'assurance au sens des art. 132 et 134 OJ. Le pou-
voir d'examen du Tribunal fédéral des assurances est donc
défini par les art. 104 et 105 OJ. Le tribunal doit ainsi
examiner si l'autorité précédente a violé le droit fédéral,
y compris par l'excès ou par l'abus de son pouvoir d'appré-
ciation (art. 104 let. a OJ) ou si elle a constaté de ma-
nière inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 104
let. b OJ). Comme le recours n'est pas dirigé contre la
décision d'une autorité judiciaire (art. 105 al. 2 OJ), le
tribunal peut revoir d'office les constatations de fait
(art. 105 al. 1 OJ; ATF 124 V 266 consid. 2 et les réfé-
rences).

2.- a) Selon l'art. 107 al. 1 RAI, les subventions
pour frais d'exploitation sont accordées sur présentation
des comptes annuels contrôlés. Les demandes de subventions
doivent être présentées à l'office fédéral dans les six
mois qui suivent la clôture de l'exercice annuel. Ce délai
peut être prolongé sur présentation d'une demande écrite.
L'inobservation du délai sans raison plausible entraîne la
perte du droit à la subvention.
Pour déterminer la nature du délai fixé par cette nor-
me, il y a lieu d'analyser la disposition qui le prévoit
ainsi que les effets qu'elle attache à l'inobservation du
délai. Ainsi, le délai dont la loi exclut l'interruption de
façon expresse ou implicite est péremptoire (Grisel, Traité
de droit administratif, Neuchâtel 1984, p. 663). D'autre
part, même en l'absence du terme de péremption, l'emploi de
formules telles que le droit s'éteint est considéré comme
déterminant. Enfin, la finalité du délai joue un rôle : la
péremption est à sa place lorsque non seulement des raisons
de sécurité juridique, mais aussi des considérations de
technique administrative impliquent que des rapports de
droit soient définitivement stabilisés après un certain
temps, sans que cette durée puisse être allongée par un
acte interruptif du créancier.

Dans le cas particulier, l'art. 107 al. 1 RAI prévoit
expressément que, sauf raison plausible, l'inobservation du
délai entraîne la perte du droit à la subvention. Il résul-
te ainsi déjà du texte que ce délai n'a pas le caractère
d'un simple délai d'ordre mais qu'il s'agit d'un délai
péremptoire en raison des conséquences attachées à son
non-respect. Par ailleurs, selon le but visé par cette
disposition, la présentation de la demande de subvention
s'inscrit dans le système annuel des comptes et budgets des
institutions sociales. Elle ne peut être ainsi laissée à la
libre appréciation du requérant qui ne saurait être admis à
présenter sa requête longtemps après la clôture des comp-
tes; au contraire, des motifs liés à la simplification de
la procédure et à son déroulement régulier, comme la néces-
sité pour l'OFAS de fixer annuellement tant le principe que
le montant des subventions allouées, justifient pleinement
l'instauration d'un délai impératif pour la présentation
d'une demande de subvention. A cet égard, on peut relever
que, appelé à statuer sur le caractère du délai fixé à
l'art. 225 al. 4 RAVS, disposition calquée selon la volonté
exprimée du Conseil fédéral sur celle de l'art. 107 al. 1
RAI (RCC 1978, p. 157), le Tribunal fédéral des assurances
a eu déjà l'occasion d'en retenir le caractère péremptoire
(ATF 125 V 262 et les arrêts cités).
Il n'existe en l'espèce pas de motifs de revenir sur
cette jurisprudence selon laquelle le délai de six mois est
péremptoire. On ne voit au demeurant pas que, comme le
soutient la recourante, son application conduirait à des
résultats choquants, inconciliables avec le droit et
l'équité dès lors que l'art. 107 al. 1 RAI réserve préci-
sément l'appréciation de situations particulières lorsque
le retard est dû à des raisons plausibles.

b) Le 24 février 2000, la recourante a déposé une
demande d'avance sur la subvention 1999. Par décision du
29 février suivant, l'OFAS a donné suite à la requête et
alloué un acompte de 300 000 fr. tout en précisant dans sa

correspondance - selon un texte imprimé en lettres gras-
ses - que «le versement de l'acompte est lié à l'obligation
de faire parvenir la demande de subvention à l'OFAS au plus
tard le 30 juin 2000 (art. 107 al. 1 RAI).Si ce délai n'est
pas respecté, le droit à la subvention tombe et le rembour-
sement de l'acompte sera exigé».
La recourante a présenté à l'OFAS sa demande de sub-
vention 1999 pour l'Institut Y.________ le 12 octobre 2000.
Il n'est pas contesté qu'elle n'a pas agi dans le délai de
six mois après la clôture des comptes et qu'elle n'a ainsi
pas respecté le délai arrivant à échéance le 30 juin 2000.
De surcroît, il est constant que la Fondation n'a pas
demandé en temps utile l'octroi d'un délai supplémentaire.
Enfin, la recourante ne prétend pas qu'elle aurait ignoré
ce délai de six mois, dont le caractère péremptoire lui
avait d'ailleurs été rappelé par l'OFAS aussi bien dans sa
décision du 29 février 2000 que dans des circulaires
précédentes (en particulier décembre 1992 et 1994, ainsi
qu'à fin 1998).
Il s'ensuit que la demande de subvention pour l'année
1999 est tardive et que, partant, le droit est périmé, sous
réserve d'une restitution de délai.

3.- La recourante soutient que, contrairement à ce qui
a été retenu par le DFI dans la décision entreprise, elle a
demandé la restitution du délai écoulé avec le dépôt de sa
demande de subvention du 12 octobre 2000. Comme elle ne
s'était rendu compte de la situation que le 5 octobre pré-
cédent et qu'aucun reproche ne peut lui être adressé, les
conditions d'une restitution du délai sont réunies. Elle
prétend aussi qu'il existe des raisons plausibles propres à
justifier le non-respect du délai de six mois.

a) La restitution du délai, principe général du droit,
peut intervenir aux conditions de l'art. 24 al. 1 PA et 35
al. 1 OJ : empêchement non fautif de la partie ou de son
mandataire; présentation d'une demande de restitution dans

les dix jours à partir de la cessation de l'empêchement et
accomplissement dans les dix jours de l'acte omis (Grisel,
op.cit., p. 895). Ces règles générales sont applicables
lorsque, pour des motifs plausibles, le requérant a été
empêché d'agir dans le délai, faute de quoi l'institution
de la péremption perdrait de son sens.
En raison du caractère péremptoire du délai de
l'art. 107 al. 1 RAI, par «raison plausible» on doit en-
tendre excuse valable au sens d'un motif de restitution
d'un délai échu. Cela signifie que le requérant doit avoir
été empêché sans sa faute d'agir dans le délai et qu'aucun
reproche ne peut lui être adressé pour ce retard. En revan-
che, une restitution de délai ne peut être accordée ensuite
d'une simple ignorance de droit qui ne constitue pas un mo-
tif suffisant pour la justifier (ATF 125 V 264 consid. 5c
et d et les arrêts cités; A. Braconi, Prescription et pé-
remption dans l'assurance sociale, in Droit privé et assu-
rances sociales, Fribourg 1990, p. 232 ss).
Par empêchement non fautif, il faut entendre aussi
bien l'impossibilité objective ou la force majeure que
l'impossibilité due à des circonstances personnelles ou une
erreur excusables. Ces circonstances doivent toutefois être
appréciées objectivement. En définitive, il ne faut pas que
l'on puisse reprocher au requérant une négligence (Poudret,
Commentaire de la loi fédérale d'organisation judiciaire
ad. art. 35 OJ, n° 2.3sv; Kölz/Häner, Verwaltungsverfahren
und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, n° 151).

b) En l'espèce, c'est à l'occasion d'un téléphone, le
5 octobre 2000, avec un représentant de l'OFAS que le di-
recteur de la Fondation a pris conscience que la demande de
subvention pour 1999 n'avait pas été adressée alors même
que, selon ses dires, elle a été déposée régulièrement à
temps pendant au moins 18 ans. Ainsi qu'on peut le déduire
de la lettre du 12 octobre 2000 à l'OFAS, il s'agit en
l'occurence simplement d'une omission du ou des responsa-
bles, soit d'une impossibilité subjective.

Au regard des avertissements donnés par voie de cir-
culaire, auxquels s'ajoute l'avis figurant dans la décision
du 29 février 2000 de l'OFAS et qui mentionnait expres-
sément les conséquences d'une omission, l'oubli d'envoyer
la demande de subvention doit être considérée comme une
négligence inexcusable.
L'argumentation de la recourante au sujet d'une pré-
tendue confusion entre les subventions pour 1998 et 1999
n'emporte pas la conviction et ne rend pas au demeurant la
négligence excusable. D'une part, la Fondation était, selon
ses dires, dirigée par des personnes expérimentées; on voit
mal qu'elles aient pu confondre pendant plusieurs mois deux
périodes administratives pour lesquels se posaient à la
fois des questions de subventions de montants différents et
d'octroi de ce qui était demandé dans le seul premier cas.
D'autre part, le fait que pendant une aussi longue période
des discussions aient eu lieu entre la recourante et l'OFAS
au sujet des subventions 1998 et de leur retard devait né-
cessairement attirer encore davantage son attention sur le
problème des subventions annuelles et sur les questions
relatives au respect de délais ou de retards.

4.- Le litige ne concernant pas l'octroi ou le refus
de prestations d'assurance, la procédure n'est pas gratuite
(art. 134 OJ a contrario). La recourante, qui succombe,
supportera les frais judiciaires (art. 156 al. 1 en corré-
lation avec l'art. 135 OJ). Elle ne saurait prétendre une
indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159
al. 1 en liaison avec l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est rejeté.

II. Les frais de justice, d'un montant de 2000 fr., sont
mis à la charge de la Fondation X.________.

III. Le présent sera communiqué aux parties, ainsi qu'au
Département fédéral de l'intérieur.

Lucerne, le 21 novembre 2001

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre :

Le Greffier :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.393/01
Date de la décision : 21/11/2001
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-11-21;i.393.01 ?
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