La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/11/2001 | SUISSE | N°4C.269/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 novembre 2001, 4C.269/2001


«/2»

4C.269/2001

Ie C O U R C I V I L E
************************

16 novembre 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Klett et M. Nyffeler, juges.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

F.________, demandeur et recourant, représenté par Me Alain-
Valéry Poitry, avocat à Nyon,

et

X.________ S.A., défenderesse et intimée, représentée par
Me Daniel Pache, avocat à Lausanne;

(contrat de travail; convention collective)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.______...

«/2»

4C.269/2001

Ie C O U R C I V I L E
************************

16 novembre 2001

Composition de la Cour: M. Walter, président, M. Leu,
M. Corboz, Mme Klett et M. Nyffeler, juges.
Greffière: Mme Aubry Girardin.

___________

Dans la cause civile pendante
entre

F.________, demandeur et recourant, représenté par Me Alain-
Valéry Poitry, avocat à Nyon,

et

X.________ S.A., défenderesse et intimée, représentée par
Me Daniel Pache, avocat à Lausanne;

(contrat de travail; convention collective)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- X.________ S.A. est une entreprise de fabrica-
tion et de montage de machines, d'appareils et d'articles en
tôle et en acier inoxydable.

Dès le premier septembre 1996, F.________, palefre-
nier de formation, a travaillé pour X.________ S.A. en quali-
té d'aide tôlier-serrurier non qualifié. Le contrat écrit du
23 septembre 1996 prévoyait un salaire mensuel brut de
3'500 fr., allocations familiales non comprises, versé douze
fois l'an. La durée hebdomadaire du travail était fixée à
quarante heures. Il était précisé que les parties n'étaient
soumises à aucune convention, les dispositions légales en vi-
gueur étant les seules applicables.

Durant son activité, F.________ a perçu un salaire
brut total de 22'607 fr. de septembre 1996 à décembre de la
même année, dont 600 fr. de gratifications et 1'040 fr. d'al-
locations familiales; en 1997, son salaire annuel brut s'est
élevé à 69'106 fr., somme comprenant les heures supplémentai-
res, une gratification de 925 fr. et les allocations familia-
les; en 1998, il a touché 65'638 fr., dont 3'900 fr. d'allo-
cations familiales et, en 1999, une somme brute de
57'025,80 fr. plus 5'450 fr. d'allocations familiales.

Dès le 27 août 1999, F.________ a été en incapacité
totale de travailler en raison d'un accident au cours duquel
il s'est coupé le doigt.

Par courrier du 29 novembre 1999, X.________ S.A. a
signifié à F.________ son licenciement avec effet au 31 jan-
vier 2000. Celui-ci n'a pas contesté son congé et a perçu
son
salaire jusqu'à cette dernière date.

Le 12 janvier 2000, le Syndicat de l'Industrie et
du Bâtiment, agissant pour le compte de F.________, a
réclamé
à X.________ S.A. divers montants. Celle-ci n'a accepté que
de verser une somme de 164,25 fr. représentant un solde d'al-
locations familiales et un complément d'heures supplémentai-
res.

B.- Le 28 avril 2000, F.________ a introduit une
action en justice à l'encontre de X.________ S.A., concluant
au paiement par cette dernière de la somme de 14'361,98 fr.,
dont 14'186,48 fr. à titre de treizièmes salaires dus pour
les années 1996 à 1999, sous déduction des gratifications
payées, et 175,50 fr. en compensation d'un jour de congé non
pris.

Par jugement du 29 juin 2000, le Président du Tri-
bunal civil de l'arrondissement de Y.________ a rejeté la de-
mande de F.________, avec suite de dépens. S'agissant des
prétentions liées aux treizièmes salaires, le juge a considé-
ré que l'action était infondée, car le travailleur avait ob-
tenu des montants supérieurs aux minima prévus par la conven-
tion collective de travail applicable, même si le contrat ne
prévoyait pas de treizième salaire.

Par arrêt du 31 janvier 2001, la Chambre des re-
cours du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé
par F.________ et confirmé le jugement du 29 juin 2000, avec
suite de dépens.

C.- Contre l'arrêt du 31 janvier 2001, F.________
(le demandeur) interjette un recours en réforme au Tribunal
fédéral. Il conclut, avec suite de frais et dépens, princi-
palement à l'admission du recours et à la réforme de l'arrêt
attaqué en ce sens que X.________ S.A. est sa débitrice de
la

somme de 14'186,50 fr. représentant l'allocation de fin
d'année de 1996 à 1999, sous déduction des charges sociales
et conventionnelles. Il requiert, à titre subsidiaire, l'an-
nulation de l'arrêt du 31 janvier 2001.

X.________ S.A. (la défenderesse) propose le rejet
du recours.

Parallèlement à son recours en réforme, F.________
a également formé un recours de droit public au Tribunal fé-
déral contre l'arrêt du 31 janvier 2001.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- Selon l'art. 57 al. 5 OJ, lorsque la décision
attaquée est en même temps l'objet d'un recours en réforme
et
d'un recours de droit public, il est sursis en règle
générale
à l'arrêt sur le premier recours jusqu'à droit connu sur le
second. Il peut toutefois être dérogé à ce principe, notam-
ment lorsque le recourant invoque dans son recours de droit
public une violation du droit fédéral qui pourrait être rete-
nue dans l'examen du recours en réforme, ce qui rendrait le
premier sans objet et même irrecevable eu égard à sa subsi-
diarité (ATF 107 II 499 consid. 1; 99 II 297 consid. 1; Jean-
François Poudret, COJ II, Berne 1990, art. 57 OJ no 5 p.
464).

En l'espèce, le demandeur a déposé un recours de
droit public pour se plaindre d'arbitraire dans l'apprécia-
tion des preuves et dans l'établissement des faits. Il re-
proche d'une part à la Chambre des recours de ne pas avoir
tenu compte de ses heures supplémentaires en établissant le
salaire minimal auquel il aurait eu droit en vertu de la
Convention collective de travail du 15 décembre 1994 de la

serrurerie et construction métallique du canton de Vaud (ci-
après: CCT); d'autre part, il lui fait grief d'avoir omis de
prendre en considération une augmentation de 1,2 % prévue
par
la CCT lors du calcul de son salaire horaire pour 1998 et
1999. Ces critiques concernent la façon dont l'autorité can-
tonale a appliqué et interprété la CCT précitée, qui a fait
l'objet d'une décision d'extension (arrêté du Conseil d'Etat
du 3 septembre 1997 in FAO vaud. du 31 octobre 1997),
valable
jusqu'au 31 décembre 1999 (arrêtés du Conseil d'Etat du 11
janvier et 4 août 1999 in FAO vaud. du 12 mars et du 19 octo-
bre 1999). Or, les conventions collectives de travail dont
le
champ d'application a été étendu, que ce soit par le Conseil
fédéral ou, comme en l'espèce, par une autorité cantonale,
renferment du droit privé fédéral (ATF 98 II 205 consid. 1,
confirmé in arrêt du Tribunal fédéral non publié du 26 sep-
tembre 2000 dans la cause F. contre X. SA, consid. 3b;
Schönenberger/Vischer, Commentaire zurichois, art. 356b CO
no 144; Jean-Fritz Stöckli, Commentaire bernois, art. 356b
CO
no 88). Par conséquent, comme le souligne pertinemment la dé-
fenderesse, les griefs soulevés portent sur des questions de
droit fédéral qui peuvent être revues en instance de
réforme,
de sorte que, si le recours en réforme déposé parallèlement
devait être admis, le recours de droit public perdrait alors
son objet, pour autant qu'il puisse être considéré comme re-
cevable.

Dans ce contexte, il convient, en dérogation à la
règle de l'art. 57 al. 5 OJ, d'examiner en premier lieu le
recours en réforme.

2.- a) Interjeté par le travailleur qui a succombé
dans ses conclusions en paiement à l'encontre de son em-
ployeur, le recours porte sur une contestation civile dont
la
valeur litigieuse atteint le seuil de 8'000 fr. (art. 46 OJ)
et est dirigé contre un jugement final rendu en dernière ins-

tance cantonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1
OJ).
Déposé en temps utile compte tenu des féries (art. 34 al. 1
let. b et 54 al. 1 OJ) et dans les formes requises (art. 55
OJ), il est donc en principe recevable.

b) Dans la présente procédure, le demandeur ne re-
met plus en cause le refus de lui allouer le montant réclamé
en compensation d'un jour de congé qu'il n'aurait pas pu
prendre durant son activité. Cette question ne sera donc pas
revue (art. 55 al. 1 let. b et c OJ).

3.- Le litige porte exclusivement sur le point de
savoir si le demandeur peut exiger de son employeur l'octroi
d'une indemnité de fin d'année pour la période allant de
1996
à 1999, en application de la CCT.

Le tribunal cantonal a rejeté les prétentions du
demandeur après avoir procédé à une comparaison entre le sa-
laire effectif gagné par le travailleur entre 1996 et 1999,
sans les heures supplémentaires, et le salaire minimal que
celui-ci aurait touché en vertu de la CCT. Dès lors que la
rémunération globale effectivement reçue par le demandeur
durant cette période était supérieure à celle découlant de
la
CCT, y compris l'allocation de fin d'année dont le demandeur
entendait se prévaloir, il a été considéré que le
travailleur
avait bénéficié de conditions salariales plus avantageuses
que celles prévues par la CCT. Il ne pouvait donc prétendre
à
l'indemnité de fin d'année réservée par la CCT, même si son
contrat ne la prévoyait pas.

4.- Invoquant une violation de l'art. 357 al. 2 CO
et de l'art. 43 ch. 1 CCT, le demandeur soutient tout
d'abord
que l'allocation de fin d'année de 8,33 % prévue par la CCT

devait lui être versée, indépendamment du fait que son salai-
re annuel aurait pu excéder le minimum conventionnel.

a) La CCT, entrée en vigueur le 1er janvier 1995
(art. 61 ch. 1 CCT), a fait l'objet d'une décision d'exten-
sion, prorogée jusqu'au 31 décembre 1999 (cf. supra consid.
1). Dès lors que ses clauses étendues s'appliquent aux rap-
ports de travail entre les employeurs qui notamment vouent
leur activité principale au travail des métaux et les tra-
vailleurs d'exploitation de ces entreprises (cf. art. 3 arrê-
té d'extension du 3 septembre 1997 in FAO vaud. du 31
octobre
1997), il n'est à juste titre pas contesté que les parties
étaient soumises à ce texte de 1996 à 1999.

b) L'art. 357 al. 2 CO prévoit qu'en tant qu'ils
dérogent à des clauses impératives, les accords entre em-
ployeurs et travailleurs liés par la convention sont nuls et
remplacés par ces clauses; toutefois, les dérogations stipu-
lées en faveur des travailleurs sont valables. Le principe
du
caractère impératif des dispositions collectives est ainsi
limité par celui de la clause la plus favorable, qui revient
à déterminer si les conditions faites au travailleur par un
règlement individuel sont plus avantageuses que celles de la
CCT (cf. Ullin Streiff/Adrian von Kaenel, Leitfaden zum Ar-
beitsvertragsrecht, 5e éd. Zurich 1992, art. 357 CO no 3).
Selon la jurisprudence, il ne faut pas, lors de cet examen,
comparer les deux accords de manière globale, mais par sec-
teurs (Gruppenvergleich), ce qui revient à mettre en
relation
étroite les dispositions de la CCT et celles figurant dans
le
contrat individuel de travail concernant le même sujet (cf.
ATF 116 II 153 consid. 2a/aa p. 155 et les références ci-
tées). En revanche, les clauses ne se rapportant pas au même
secteur doivent être envisagées isolément (cf. arrêt du Tri-
bunal fédéral du 3 octobre 1994 dans la cause B. contre C.
publié in SJ 1995 p. 813, consid. 1b/aa).

En l'espèce, l'autorité cantonale, procédant à
l'examen de la clause la plus favorable, a considéré que les
exigences salariales minimales de la CCT et l'allocation an-
nuelle de 8,33 % formaient un tout; elle les a donc mises en
parallèle avec le salaire effectivement versé au demandeur
en
vertu de son contrat de travail. Pour que cette comparaison
soit admissible, il faut cependant que ces clauses relèvent
du même secteur.

c) Comme les dispositions fixant un salaire minimal
et celles prévoyant une allocation de fin d'année ont un ef-
fet direct dans les relations entre l'employeur et le tra-
vailleur (art. 356 al. 1 et 357 CO), il s'agit de clauses
normatives qu'il convient d'interpréter selon les mêmes prin-
cipes que ceux régissant les textes de loi (ATF 127 III 318
consid. 2a et les références citées). Selon la jurisprudence
constante, la loi s'interprète en premier lieu selon sa let-
tre. Les autorités chargées de son application sont liées
par
un texte clair qui ne prête pas à discussion, pour autant
qu'il n'aille pas à l'encontre du sens véritable de la
norme.
Il est ainsi admissible, voire obligatoire, de s'écarter
d'un
texte clair, lorsque des raisons objectives permettent de
penser que celui-ci ne correspond pas à la portée véritable
de la disposition. De telles raisons peuvent découler de
l'élaboration de la norme, de son esprit et de son but, ou
de
ses liens avec d'autres dispositions. Il est également possi-
ble de déroger au texte de la loi, lorsque son
interprétation
conduit à un résultat que le législateur ne peut avoir voulu
(ATF 127 III 318 consid. 2b; 124 III 266 consid. 4 et les ar-
rêts cités).

d) L'allocation de fin d'année que cherche à obte-
nir le demandeur est traitée à l'art. 43 de la CCT. Cette
disposition prévoit notamment qu'"en fin d'année, le travail-
leur a droit à une allocation, versée directement par l'em-
ployeur, de 8,33 %" (ch. 1), mais sans indiquer sur quelle

base l'indemnité de 8,33 % doit être calculée. L'art. 43 CCT
ne contient d'ailleurs aucun renvoi aux dispositions de la
convention fixant le salaire. A son ch. 5, il indique que
"l'employeur ayant accordé précédemment une allocation de
fin
d'année (treizième salaire) ou une gratification peut
imputer
ces prestations au droit prévu à l'alinéa 1". Il en découle
que les auteurs de la convention n'entendaient pas assimiler
l'allocation de 8,33 % à un treizième salaire. Cette volonté
de séparer l'allocation annuelle des questions salariales se
déduit également de la systématique de la CCT. Le salaire
n'est pas régi au même chapitre que l'allocation de 8,33 % :
alors que celle-ci figure au chapitre V "Allocations et pres-
tations sociales", avec notamment les dispositions relatives
aux allocations
familiales, de mariage et de naissance, le
salaire est réglementé au chapitre IV "Conditions d'emploi".
En outre, le système salarial prévu par la CCT ne fait
aucune
référence au versement d'une allocation de fin d'année.
L'art. 35 CCT consacré aux salaires répartit les
travailleurs
en sept classes salariales (ch. 1) et renvoie, pour leur
fixation, à un accord sur les salaires, négocié chaque année
et qui fait partie intégrante de la convention (ch. 4). Cet
accord détermine le salaire minimal par heure pour les caté-
gories de travailleurs mentionnées à l'art. 35 CCT et
prévoit
les augmentations, mais sans jamais faire allusion au verse-
ment de l'allocation de fin d'année prévue à l'art. 43 CCT.

L'interprétation littérale et systématique de la
CCT laisse par conséquent apparaître que l'allocation annuel-
le de 8,33 % est indépendante de la fixation du salaire. Cet-
te garantie, qui se situe dans le chapitre consacré aux allo-
cations et prestations sociales, doit être considérée comme
celles-ci. Or, il ne viendrait pas à l'idée de refuser à un
travailleur les allocations familiales prévues par la CCT,
au
motif que son salaire annuel a dépassé les minima fixés con-
ventionnellement. Le même raisonnement s'applique à l'alloca-
tion de fin d'année de 8,33 %. Elle a été conçue comme une

prestation offerte en plus du salaire à tous les travail-
leurs, peu importe que leur rémunération dépasse le minimum
garanti par la CCT.

Il ne s'agit donc pas d'une composante du salaire
qui lui serait intrinsèquement liée, comme le versement d'un
pourcentage calculé en fonction des prestations qui s'ajoute
à un salaire fixe (cf. ATF 116 II 153), de sorte que l'auto-
rité cantonale devait envisager isolément cette allocation
annuelle dans l'application du principe de la clause la plus
favorable.

Dès lors qu'il ressort des faits retenus, d'une ma-
nière qui lie le Tribunal fédéral en instance de réforme
(art. 63 al. 2 OJ), que les parties n'ont pas prévu contrac-
tuellement le versement d'une telle allocation ou d'une in-
demnité équivalente, la CCT apparaît plus favorable au recou-
rant. Celui-ci est par conséquent en droit de se prévaloir
de
l'application de l'art. 43 CCT (art. 357 CO), contrairement
à
ce qu'a retenu l'autorité cantonale.

Le recours doit ainsi être admis, sans qu'il soit
nécessaire de se demander si la Chambre des recours a violé
le droit fédéral, voire commis des inadvertances manifestes
et des fautes de calcul, comme le prétend le demandeur, en
considérant que le montant reçu par celui-ci était globale-
ment supérieur au salaire minimal garanti par la CCT, y com-
pris l'allocation de 8,33 %.

5.- Il reste à déterminer quels sont les montants
auxquels le demandeur peut prétendre à titre d'allocation de
fin d'année entre 1996 et 1999.

a) Comme les dispositions de la CCT permettant de
trancher cette question ont été étendues, elles renferment
du

droit privé fédéral (cf. supra consid. 1). Le Tribunal fédé-
ral peut donc les appliquer d'office (art. 63 al. 1 et 3
OJ),
même si leur contenu n'a pas été constaté dans l'arrêt atta-
qué (arrêt du Tribunal fédéral non publié du 26 septembre
2000, op. cit., consid. 3b in fine).

b) Selon l'art. 43 ch. 1 CCT, le travailleur a
droit, en fin d'année, à une allocation, versée directement
par l'employeur, de 8,33 %. Même si le montant qui sert de
référence n'est pas expressément indiqué, la lecture de
l'art. 43 CCT permet d'en déduire qu'il s'agit du salaire
annuel. Dès lors que la fonction de la convention collective
de travail est de protéger les travailleurs en leur
conférant
seulement des garanties minimales (cf. Manfred Rehbinder,
Schweizerisches Arbeitsrecht, 14e éd., Berne 1999, p. 233),
le demandeur ne peut obtenir, en vertu de la CCT, une alloca-
tion calculée sur la base du salaire annuel qu'il a effecti-
vement perçu, y compris les heures supplémentaires. Il a seu-
lement droit à une allocation de 8,33 % du salaire annuel mi-
nimal garanti par la CCT. Comme le demandeur a travaillé qua-
tre mois en 1996, il doit recevoir une allocation calculée
au
prorata de son activité durant cette année-là (cf. art. 43
ch. 3 CCT), puis une allocation complète de 1997 à 1999.

Enfin, selon l'art. 43 ch. 5 CCT, l'employeur ayant
accordé précédemment un treizième salaire ou une gratifica-
tion peut imputer ces prestations sur l'allocation de 8,33
%,
de sorte qu'il faudra déduire des montants obtenus sur la ba-
se de l'art. 43 CCT les gratifications touchées par le deman-
deur de 1996 à 1999.

c) En tant qu'aide tôlier-serrurier, le demandeur
appartient à la classe de salaires 1.1 prévue à l'art. 35
CCT, ce qui n'est pas contesté. Il ressort de l'Accord sur
les salaires 1997, qui fait partie intégrante de la CCT
(art.
35 ch. 4 CCT in FAO vaud. du 31 octobre 1997), que le
salaire

horaire minimal pour cette classe était de 18,60 fr. en
1997,
montant qui n'avait pas été augmenté par rapport à 1996. La
durée annuelle du travail en 1996 et 1997 étant de 2184 heu-
res (art. 32 ch. 1 CCT), le salaire annuel minimal selon la
CCT se montait ainsi à 40'622,40 fr. pour ces deux années. A
partir du 1er janvier 1998, un nouvel accord sur les
salaires
a été conclu (avenant no 1 à la CCT; arrêté du Conseil
d'Etat
du 15 juillet 1998). Ce texte a introduit une augmentation
des salaires de tous les travailleurs d'exploitation de 0,5
%
dès janvier 1998 (ch. 1) et a fait passer la durée annuelle
du travail de 2184 à 2158 heures (ch. 3). Il était en outre
stipulé que la diminution de la durée du travail entraîne-
rait, en plus de la compensation du renchérissement, une aug-
mentation des salaires de 1,2 % des travailleurs rétribués à
l'heure (ch. 4). Comme le temps de travail a été réduit dans
une proportion de 1,2 %, l'accroissement des salaires prévu
au ch. 4 de cet accord a seulement permis de maintenir un sa-
laire de base identique à celui des années précédentes. Con-
trairement à ce que soutient le demandeur, l'augmentation sa-
lariale réelle n'a donc été que de 0,5 % pour 1998. Il en ré-
sulte que la rémunération annuelle minimale se montait,
cette
année-là, à 40'622,40 plus l'augmentation de 0,5 %, soit à
40'825,50 au total. Pour 1999 en revanche, la Cour de céans
n'est pas en mesure de calculer le salaire annuel minimal en
vertu de la CCT, dès lors que l'autorité cantonale,
reprenant
le jugement de 1ère instance, a déclaré ignorer si un accord
salarial était intervenu cette année-là. De plus, les consta-
tations de fait figurant dans l'arrêt entrepris sont insuffi-
santes s'agissant des gratifications qu'aurait pu percevoir
le demandeur en 1998 et en 1999 dont on a vu qu'elles de-
vaient être déduites de l'allocation annuelle de 8,33 % (cf.
supra let. b in fine). En effet, s'il a été retenu que le
demandeur avait reçu 600 fr. en 1996 et 925 fr. en 1997 à
titre de gratification, on ne sait pas ce qu'il en a été les
deux années suivantes.

Dans ces circonstances, il convient d'annuler l'ar-
rêt attaqué et de renvoyer l'affaire à l'autorité cantonale,
en application de l'art. 64 al. 1 OJ, pour qu'elle complète
le dossier et qu'elle fixe les montants dus au travailleur
au
titre de l'allocation annuelle de 8,33 % durant la période
allant de septembre 1996 à décembre 1999, conformément aux
principes énumérés ci-dessus.

6.- Bien qu'elle succombe, la défenderesse n'aura
pas à supporter les frais de la procédure fédérale, laquelle
est gratuite, puisque la valeur litigieuse, selon la préten-
tion du demandeur à l'ouverture de l'action (ATF 115 II 30
consid. 5b p. 41; 100 II 358 consid. a), ne dépasse pas
30'000 fr. (art. 343 al. 2 et 3 CO; RO 2001 p. 1048). En re-
vanche, elle devra payer au demandeur une indemnité à titre
de dépens, conformément à l'art. 159 al. 1 OJ.

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Admet le recours, annule l'arrêt attaqué et ren-
voie la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision
dans le sens des considérants;

2. Dit qu'il n'est pas perçu de frais;

3. Dit que la défenderesse versera une indemnité de
2'000 fr. au demandeur à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre des recours du Tribunal
cantonal vaudois.

__________

Lausanne, le 16 novembre 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FÉDÉRAL SUISSE:
Le Président,

La Greffière,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.269/2001
Date de la décision : 16/11/2001
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-11-16;4c.269.2001 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award