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16/11/2001 | SUISSE | N°4C.190/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 novembre 2001, 4C.190/2001


«/2»

4C.190/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

16 novembre 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffier: M. Ramelet.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________ S.A., défenderesse et recourante, représentée par
Me Jean Heim, avocat à Lausanne,

et

Y.________ S.A., demanderesse et intimée, représentée par Me
Peter Schaufelberger, avocat à Lausanne;

(bail à loyer; frais

accessoires; interprétation; libération
conventionnelle)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

...

«/2»

4C.190/2001

Ie C O U R C I V I L E
****************************

16 novembre 2001

Composition de la Cour: MM. Walter, président, Leu et
Corboz,
juges. Greffier: M. Ramelet.

__________

Dans la cause civile pendante
entre

X.________ S.A., défenderesse et recourante, représentée par
Me Jean Heim, avocat à Lausanne,

et

Y.________ S.A., demanderesse et intimée, représentée par Me
Peter Schaufelberger, avocat à Lausanne;

(bail à loyer; frais accessoires; interprétation; libération
conventionnelle)

Vu les pièces du dossier d'où ressortent
les f a i t s suivants:

A.- a) Par contrat du 21 mars 1994, la société
X.________ S.A. a remis à bail à Y.________ S.A. une surface
de 3099 m2 au rez-de-chaussée du centre commercial qu'elle
avait entrepris de construire. Y.________ S.A. entendait y
installer un de ses supermarchés.

Par contrat du même jour, X.________ S.A. a égale-
ment loué à Y.________ S.A. une surface de 1500 m2 au
premier
étage du centre commercial. Y.________ S.A. n'entendait pas
utiliser elle-même cette surface, mais la sous-louer à des
partenaires. Les deux parties souhaitaient que toutes les
surfaces soient effectivement occupées au moment de l'ouver-
ture du centre; en concluant ce second contrat, Y.________
S.A. voulait agir dans ce sens et rechercher également des
preneurs.

Les deux conventions datées du 21 mars 1994 conte-
naient un article 9 qui prévoyait, à son alinéa premier, que
les frais d'eau et d'électricité seraient relevés sur des
compteurs pour toute la surface louée et payés directement
aux Services industriels par la société locataire, avec les
taxes s'y rapportant. Par ailleurs, l'art. 9 al. 2 avait la
teneur suivante:

" Les frais énumérés ci-dessous seront répartis en-
tre tous les locataires du bâtiment au prorata des
surfaces louées:

- frais de chauffage des locaux communs,
- frais d'éclairage des locaux communs et des

extérieurs,
- frais de nettoyage et d'entretien des locaux
communs,
- frais d'entretien des parkings du centre et
des parkings extérieurs,
- frais d'entretien des places de jeu et planta-

tions,
- frais d'entretien du système Sprinkler,
- taxes d'égouts et d'épuration des eaux usées,
- frais d'enlèvement des ordures et autres dé-
chets".

Par ailleurs, chaque contrat contenait une clause
générale prévoyant que les dispositions du code des obliga-
tions ainsi que les règles et usages locatifs du canton de
Vaud étaient applicables dans la mesure où les contrats n'y
dérogeaient pas expressément (art. 18, respectivement art.
15
du contrat).

b) Y.________ S.A. a mis X.________ S.A. en contact
avec la société Z.________ & Cie AG (ci-après: Z.________),
qui était l'un de ses partenaires habituels.

Par contrat du 17 mai 1994, X.________ S.A. a loué
à Z.________ une surface de 600 m2 située au premier étage
du
centre commercial.

Selon une déclaration faite en cours de procédure
par l'actionnaire de X.________ S.A. (qui s'occupait person-
nellement de l'affaire), Z.________ était censée occuper une
partie de la surface louée à Y.________ S.A. Le directeur de
Z.________ a déclaré, pour sa part, qu'il n'en avait pas été
question lors des négociations entre Z.________ et
X.________
S.A.

Dans une lettre du 19 juin 1995 adressée à
X.________ S.A., Y.________ S.A. affirmait que "Z.________
devait implanter ses 600 m2 sur la partie du premier étage
que nous détenons en location". Par pli et téléfax des 20
juin 1995, X.________ S.A. a répondu à Y.________ S.A. que
"les surfaces louées à Z.________ par contrat du 17 mai 1994
n'étaient pas prélevées sur celles qui vous sont louées au
premier étage du centre".

Y.________ S.A. a reçu une copie du contrat conclu
avec Z.________ qui lui a été envoyée par X.________ S.A.
sous pli du 7 juin 1994. Elle n'a pas réagi à réception de
ce
document.

Se plaignant que toutes les surfaces du premier
étage n'avaient pas été louées, Z.________ a manifesté la vo-
lonté, par lettre du 27 décembre 1994, de se délier du con-
trat qu'elle avait conclu le 17 mai 1994. X.________ S.A. a
accepté de libérer Z.________ de ses obligations contrac-
tuelles, sans contrepartie aucune.

Le centre commercial a ouvert ses portes le 22 juin
1995.

B.- Un litige a surgi entre les parties au sujet
des frais que X.________ S.A. réclamait à Y.________ S.A.
Cette dernière a considéré que le montant était excessif,
puis a précisé, notamment, que l'on mettait à sa charge à
tort des frais qui n'étaient pas prévus à l'art. 9 des con-
trats. X.________ S.A. a reproché à Y.________ S.A. d'avoir
laissé des surfaces vides au premier étage à l'époque de
l'ouverture du centre, ce qui lui aurait causé un dommage.

Par requête du 7 octobre 1996, Y.________ S.A. a
ouvert action contre X.________ S.A. devant le Tribunal des
baux du canton de Vaud, demandant principalement que les
frais accessoires mis à sa charge soient réduits, que le
bail
portant sur les 1500 m2 soit déclaré nul, qu'il soit
constaté
que Y.________ S.A. n'est pas débitrice de X.________ S.A.
pour les sommes en capital de 26 578 fr.65 et 35 268 fr.80
et
que sa partie adverse soit déclarée débitrice de Y.________
S.A. pour la somme de 10 000 fr. avec intérêts.

X.________ S.A. a formé une demande reconvention-
nelle s'élevant au total à un montant en capital de
212 056 fr.80.

Par jugement du 8 novembre 1999, le Tribunal des
baux a statué sur l'ensemble des points litigieux.

Saisie du recours de X.________ S.A., la Chambre
des recours du Tribunal cantonal vaudois, par arrêt du 4 oc-
tobre 2000, a confirmé le jugement attaqué. Sur les deux
points qui restent actuellement litigieux entre les parties,
la cour cantonale a considéré en substance que X.________
S.A. ne pouvait pas réclamer d'autres frais accessoires que
ceux énumérés à l'art. 9 des contrats et que les 600 m2
loués
à Z.________ devaient être imputés sur les 1500 m2 loués au
premier étage à Y.________ S.A.

C.- Parallèlement à un recours de droit public qui
a été rejeté dans la mesure de sa recevabilité par arrêt de
ce jour, X.________ S.A. exerce un recours en réforme au Tri-
bunal fédéral. Invoquant une violation des art. 2 et 8 CC,
1,
18 et 257a CO, elle conclut à l'annulation de la décision at-
taquée et formule des conclusions sur le fond.

L'intimée propose le rejet du recours.

C o n s i d é r a n t e n d r o i t :

1.- a) Interjeté par la partie qui a succombé dans
ses conclusions relatives à la quotité de ses créances et di-
rigé contre un jugement final rendu en dernière instance can-
tonale par un tribunal supérieur (art. 48 al. 1 OJ) sur une
contestation civile dont la valeur litigieuse atteint le
seuil de 8000 fr. (art. 46 OJ), le recours en réforme est en

principe recevable, puisqu'il a été formé en temps utile
(art. 54 al. 1 OJ) dans les formes requises (art. 55 OJ).

b) Le recours en réforme est ouvert pour violation
du droit fédéral (art. 43 al. 1 OJ). Il ne permet en
revanche
pas d'invoquer la violation directe d'un droit de rang cons-
titutionnel (art. 43 al. 1 2e phrase OJ) ou la violation du
droit cantonal (ATF 127 III 248 consid. 2c et les arrêts ci-
tés).

Saisi d'un recours en réforme, le Tribunal fédéral
doit conduire son raisonnement sur la base des faits
contenus
dans la décision attaquée, à moins que des dispositions fédé-
rales en matière de preuve n'aient été violées, qu'il y ait
lieu à rectification de constatations reposant sur une inad-
vertance manifeste (art. 63 al. 2 OJ) ou qu'il faille complé-
ter les constatations de l'autorité cantonale parce que
celle-ci n'a pas tenu compte de faits pertinents et réguliè-
rement allégués (art. 64 OJ; ATF 127 III 248 ibidem). Dans
la
mesure où une partie recourante présente un état de fait qui
s'écarte de celui contenu dans la décision attaquée, sans se
prévaloir avec précision de l'une des exceptions qui
viennent
d'être rappelées, il n'est pas possible d'en tenir compte.
Il
ne peut être présenté de griefs contre les constatations de
fait, ni de faits ou de moyens de preuve nouveaux (art. 55
al. 1 let. c OJ). L'appréciation des preuves à laquelle
s'est
livrée l'autorité cantonale ne peut être remise en cause
(ATF
126 III 189 consid. 2a; 125 III 78 consid. 3a).

Si le Tribunal fédéral ne saurait aller au-delà des
conclusions des parties, lesquelles ne peuvent en prendre de
nouvelles (art. 55 al. 1 let. b in fine OJ), il n'est lié ni
par les motifs qu'elles invoquent (art. 63 al. 1 OJ), ni par
ceux de la décision cantonale, de sorte qu'il peut apprécier
librement la qualification juridique des faits constatés

(art. 63 al. 3 OJ; ATF 127 III 248 consid. 2c; 126 III 59
consid. 2a).

2.- a) La recourante reproche à la cour cantonale
d'avoir mal interprété le sens et la portée de l'art. 9 fi-
gurant dans les deux contrats datés du 21 mars 1994.

b) En présence d'un litige sur l'interprétation
d'une clause contractuelle, le juge doit tout d'abord s'ef-
forcer de déterminer la commune et réelle intention des par-
ties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexac-
tes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour
déguiser la nature véritable de la convention (art. 18 al. 1
CO). S'il y parvient, il s'agit d'une constatation de fait
qui ne peut être remise en cause dans un recours en réforme
(ATF 126 III 25 consid. 3c, 375 consid. 2e/aa; 125 III 305
consid. 2b, 435 consid. 2a/aa).

Si la volonté réelle des parties ne peut pas être
établie ou si elle est divergente, le juge doit interpréter
les déclarations faites selon la théorie de la confiance. Il
doit donc rechercher comment une déclaration ou une attitude
pouvait être comprise de bonne foi en fonction de l'ensemble
des circonstances (cf. ATF 126 III 59 consid. 5b, 375
consid.
2e/aa p. 380). Il doit être rappelé que le principe de la
confiance permet d'imputer à une partie le sens objectif de
son comportement, même si celui-ci ne correspond pas à sa
volonté intime (ATF 127 III 279 consid. 2c/ee p. 287 et les
références doctrinales).

L'application du principe de la confiance est une
question de droit que le Tribunal fédéral, saisi d'un
recours
en réforme, peut examiner librement (ATF 127 III 248 consid.
3a; 126 III 25 consid. 3c, 59 consid. 5a, 375 consid. 2e/aa
p. 379; 125 III 305 consid. 2b, 435 consid. 2a/aa).

Pour trancher cette question de droit, il faut ce-
pendant se fonder sur le contenu de la manifestation de vo-
lonté et sur les circonstances, lesquelles relèvent du fait
(ATF 126 III 375 consid. 2e/aa; 124 III 363 consid. 5a; 123
III 165 consid. 3a).

c) Pour les habitations et les locaux commerciaux,
on entend par frais accessoires les dépenses effectives du
bailleur pour des prestations en rapport avec l'usage de la
chose, telles que frais de chauffage, d'eau chaude et autres
frais d'exploitation, ainsi que les contributions publiques
qui résultent de l'utilisation de la chose (art. 257b al. 1
CO).

Cependant, les frais accessoires ne sont à la
charge du locataire que si cela a été convenu spécialement
(art. 257a al. 2 CO).

Il faut en effet rappeler que le bailleur supporte
en principe les contributions publiques et les charges qui
grèvent la chose louée (art. 256b CO).

Pour que les frais accessoires puissent être mis à
la charge du locataire, il faut donc que les parties en
soient convenues d'une manière suffisamment précise et dé-
taillée (ATF 121 III 460 consid. 2a/aa; SVIT-Kommentar,
Mietrecht II, n. 18 ad art. 257-257b CO; David Lachat, Le
bail à loyer, p. 222, ch. 1.4 et 1.5; Peter Higi,
Commentaire
zurichois, n. 13 ad art. 257a-257b CO; Roger Weber/Peter
Zihlmann, Commentaire bâlois, n. 5 ad art. 257a CO). Il
n'est
pas nécessaire que la convention soit conclue par écrit;
elle
peut aussi résulter d'actes concluants (SVIT-Kommentar, op.
cit., n. 19 ad art. 257-257b CO; Lachat, op. cit., p. 222,
ch. 1.4; Higi, op. cit., n. 13 ad art. 257a-257b CO). L'art.
257a al. 2 CO se présente comme une règle particulière d'in-
terprétation en ce sens que les frais accessoires sont à la

charge du bailleur dans tous les cas où il n'est pas établi
qu'ils ont été mis conventionnellement à la charge du loca-
taire (Higi, op. cit., n. 14 ad art. 257a-257b CO; Lachat,
op. cit., p. 222, ch. 1.5). En conséquence, le bailleur ne
peut facturer au locataire d'autres frais accessoires que
ceux qui ont été convenus; à défaut de convention, ceux-ci
sont compris dans le loyer (ATF 121 III 460 consid. 2a/aa).

d) En l'espèce, il ne ressort pas de l'arrêt atta-
qué que la cour cantonale aurait déterminé la volonté réelle
des parties. Il faut donc procéder à une interprétation
selon
le principe de la confiance. Pour déterminer les circonstan-
ces, le Tribunal fédéral est lié par les constatations de
fait de la cour cantonale (art. 63 al. 2 OJ).

Il convient tout d'abord d'observer que l'on se
trouve en présence d'un bail commercial portant sur une va-
leur locative considérable, de sorte que l'on doit supposer
que les parties, dûment conseillées, en ont examiné les ter-
mes avec soin. Les constatations souveraines de l'autorité
cantonale ne contiennent en tout cas aucun élément qui
puisse
faire penser que les parties se sont servies de
dénominations
inexactes.

L'art. 9 du contrat contient une liste des frais
accessoires à la charge du locataire, qui sont décrits de ma-
nière précise. La clause ne comporte aucun renvoi aux usages
locatifs, ni aucune
mention telle que "notamment" ou "en par-
ticulier" qui montrerait que la liste n'est pas exhaustive.

La cour cantonale n'a pas violé les règles du droit
fédéral sur l'interprétation des manifestations de volonté
en
considérant que la liste figurant à l'art. 9 devait être te-
nue pour complète.

Il est vrai que les contrats, à un tout autre em-
placement, contiennent une clause générale de renvoi au code
des obligations et aux usages locatifs, mais ce renvoi ne
vaut - selon son texte clair - que pour autant que les clau-
ses contractuelles n'y dérogent pas. Or, les parties, pour
les frais accessoires, ont adopté une disposition spéciale
(l'art. 9) qui se présente comme une énumération exhaustive,
excluant tout complément.

Que la liste contenue à l'art. 9 des conventions ne
corresponde pas entièrement aux usages ne permet aucune con-
clusion décisive, puisque les parties pouvaient, en vertu de
la liberté contractuelle, déroger aux usages.

La manière dont une autre société aurait compris la
même clause ne revêt aucun caractère pertinent et ne saurait
lier l'intimée.

Même si les premières réclamations de la demande-
resse n'ont pas été soigneusement motivées, il ressort des
constatations cantonales qu'elle a contesté d'emblée le mon-
tant qui lui était réclamé; on ne peut déduire d'une contes-
tation globale du montant réclamé une quelconque acceptation
des bases de calcul.

e) Entrant dans le détail, la recourante essaie de
démontrer que certains postes écartés par la cour cantonale
pouvaient entrer dans le cadre de la liste contenue à l'art.
9 des contrats.

S'agissant des frais de chauffage, elle soutient
que l'art. 9 s'est borné à énoncer les points sur lesquels
il
divergeait des usages locatifs, de sorte que ceux-ci
seraient
applicables pour le surplus. Si telle était réellement la
volonté de la recourante, il lui incombait de le dire claire-
ment dans la clause contractuelle. En soumettant à son cocon-

tractant une clause qu'elle a rédigée elle-même et qui se
présente comme une énumération exhaustive, elle a créé une
apparence qui lui est opposable.

S'agissant des frais pour le refroidissement de
l'air, on ne peut pas dire - comme le soutient la recourante
- qu'ils sont compris dans les frais de chauffage. En effet,
les notions de chauffage et de refroidissement sont parfai-
tement antinomiques.

Quant aux frais de ventilation, il suffit de cons-
tater qu'ils ne sont effectivement pas mentionnés dans la
liste précise qui figure à l'art. 9 des contrats.

La clause contractuelle énumère de manière détail-
lée les différents frais d'entretien qui sont à la charge du
locataire (frais d'entretien des locaux communs, frais d'en-
tretien des parkings du centre et des parkings extérieurs,
frais d'entretien des places de jeu ...); il n'est fait au-
cune mention des frais d'entretien des locaux techniques, de
sorte que la cour cantonale n'a pas transgressé le droit fé-
déral en les excluant.

On pourrait peut-être se demander si les frais
d'entretien des gazons ne sont pas compris dans la notion de
frais d'entretien des plantations. La recourante ne
développe
pas d'argumentation précise à ce sujet et il est probable,
selon le sens courant des mots, que l'on visait plutôt des
arbres, arbustes et massifs floraux. En tout cas, le
Tribunal
fédéral ne dispose pas de constatations de fait qui permet-
traient d'affirmer que l'interprétation cantonale est
fausse.
Il faut d'ailleurs rappeler qu'en cas de doute, les frais ac-
cessoires sont à la charge du bailleur.

S'agissant des frais liés aux ascenseurs, la recou-
rante relève elle-même que les usages locatifs les mention-

nent expressément; dès lors qu'il s'agit d'un poste qu'il
est
d'usage de mentionner, la cour cantonale pouvait déduire de
l'absence de mention que ce poste avait été exclu à l'art.
9.

Il suit de là qu'aucun élément dans les constata-
tions cantonales ne permet de penser que les parties
auraient
passé, à un moment quelconque, un accord dérogeant à l'art.
9.

Le premier grief est dénué de tout fondement.

3.- La recourante reproche encore à l'autorité
cantonale d'avoir retenu que les parties avaient conclu un
accord ayant pour objet de libérer l'intimée à concurrence
des 600 m2 loués à Z.________.

Le raisonnement doit être mené sur la base des
constatations de fait contenues dans l'arrêt cantonal (art.
63 al. 2 OJ). Comme on l'a vu, la recourante ne peut pas,
dans un recours en réforme, rediscuter l'appréciation des
preuves et les constatations de fait qui en découlent. Il
n'est pas possible de tenir compte de faits allégués par la
recourante (par exemple des versements opérés par l'intimée)
qui n'ont pas été retenus par la cour cantonale. Que l'inti-
mée, qui exploite le rez-de-chaussée en tant que locataire,
ait continué de payer le loyer - comme l'allègue la recou-
rante - peut s'expliquer par la volonté de ne pas envenimer
la situation, mais ne permet pas de déduire l'existence d'un
accord, du moment que les 600 m2 étaient clairement liti-
gieux, ainsi que l'indiquent la lettre de la demanderesse du
19 juin 1995 et la réponse de la recourante du 20 juin 1995.

L'intimée n'avait pas loué les locaux du premier
étage dans le but de les occuper elle-même, mais pour parti-
ciper à l'effort en vue de trouver des locataires, afin que
le centre commercial soit entièrement occupé dès son inaugu-

ration. La demanderesse entendait que ces locaux soient
loués
à ses partenaires habituels, ce que la défenderesse savait.
L'intimée a mis la recourante en contact avec Z.________,
qui
était un de ses partenaires habituels. Cette démarche s'ins-
crivait ainsi dans le cadre de l'effort prévu pour trouver
des locataires. La recourante a attribué à Z.________ une
partie de la surface louée à l'intimée et a immédiatement en-
voyé à celle-ci une copie du contrat conclu avec Z.________.
Dans le contexte retenu définitivement par la cour
cantonale,
l'envoi de cette copie avait une signification claire: la re-
courante faisait savoir à l'intimée que la recommandation de
cette dernière avait porté ses fruits, autrement dit que
l'intimée avait procuré un locataire, comme prévu, pour une
partie de la surface de 1500 m2 à raison de laquelle elle
s'était engagée à trouver des preneurs. Il est vrai que l'in-
timée envisageait à l'origine de sous-louer elle-même les lo-
caux, mais il semble que la recourante ait essayé de forcer
les choses pour devenir elle-même directement la
bailleresse.

Dans les circonstances retenues, on ne voit pas que
la cour cantonale ait enfreint les règles du droit fédéral
sur l'interprétation des manifestations de volonté en consi-
dérant que la transmission de la copie devait être interpré-
tée comme une offre de libérer l'intimée à concurrence des
600 m2 loués à Z.________.

S'agissant d'une offre entièrement favorable à
l'intimée puisqu'elle se caractérise comme une remise de det-
te partielle, le contrat est réputé conclu dès lors que l'of-
fre n'a pas été refusée dans un délai convenable (art. 6 CO;
cf. Gauch/Schluep/Schmid/Rey, Schweizerisches Obligationen-
recht, Allgemeiner Teil, vol. I, 7e éd., n° 456, p. 85; cf.
également: ATF 124 III 67 consid. 3a).

Partant, l'autorité cantonale n'a pas violé non
plus les règles du droit fédéral sur la conclusion des con-

trats en admettant que l'accord libératoire a été
valablement
passé.

En l'absence de toute constatation de fait dans ce
sens, il n'y a pas lieu d'examiner si le contrat conclu avec
Z.________ était assorti d'une condition (que les locaux
soient entièrement occupés à l'inauguration) qui se répercu-
terait sur le contrat libératoire.

4.- En définitive, le recours doit être rejeté,
l'arrêt critiqué étant confirmé. Vu l'issue de la querelle,
les frais et dépens doivent être mis à la charge de la recou-
rante qui succombe (art. 156 al. 1 et 159 al. 1 OJ).

Par ces motifs,

l e T r i b u n a l f é d é r a l :

1. Rejette le recours et confirme l'arrêt attaqué;

2. Met un émolument judiciaire de 15 000 fr. à la
charge de la recourante;

3. Dit que la recourante versera à l'intimée une
indemnité de 18 000 fr. à titre de dépens;

4. Communique le présent arrêt en copie aux manda-
taires des parties et à la Chambre des recours du Tribunal
cantonal vaudois.

__________

Lausanne, le 16 novembre 2001
ECH

Au nom de la Ie Cour civile
du TRIBUNAL FEDERAL SUISSE:
Le Président,

Le Greffier,


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4C.190/2001
Date de la décision : 16/11/2001
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2001-11-16;4c.190.2001 ?
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